Apprendre le bridge
160 pages
Français

Apprendre le bridge , livre ebook

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160 pages
Français

Description

La formation au jeu de bridge s'étale sur trois années sous l'égide de la Fédération Française du Bridge. Absence de diplôme, de contrôle, d'instance de régulation des conflits : il s'agit d'un loisir, d'un sport cérébral. La succession d'expériences a incité l'auteure à tenir son carnet de route. Apprendre à jouer au bridge, c'est combattre en arborant la niaque, la volonté de vaincre, seulement en disposant de moyens ainsi que du mental appropriés afin d'atteindre l'objectif d'une application enthousiaste avant tout.

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Informations

Publié par
Date de parution 06 décembre 2017
Nombre de lectures 23
EAN13 9782140053030
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Elyane Caubet
Apprendre le bridge Entre espoirs et désillusions
Apprendre le bridge
Entre espoirs et désillusions
Elyane CAUBET Apprendre le bridge Entre espoirs et désillusions
© L’HARMATTAN, 2017 5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr ISBN : 978-2-343-13620-2 EAN : 9782343136202
Prologue« Comme tout organisme vivant, l’être humain est génétiquement programmé, mais programmé pour apprendre. » François Jacob, prix Nobel de physiologie et de médecine (1981) Ce prologue semblera bien surprenant, les premières lignes sont toujours déroutantes, sinon pour le lecteur du moins pour moi. J’ai envie de raconter l’expérience paradoxale que je vis dans ma formation au jeu de bridge. Bien entendu, la part agréable est plus robuste dès lors que je suis allée jusqu’au bout de la formation. Mais il conviendrait de ne pas mésestimer la part dissimulée. J’étais à la recherche d’une occupation, plutôt versant sport cérébral, lorsqu’un ami m’a dit «pourquoi tu ne jouerais pas au bridge ? »il ne m’a pas dit « Mais pourquoi n’apprendrais-tu pas à jouer au bridge ? »découvre déjà Je une différence qui m’apparaît significative. Jouer et apprendre à jouer ne désignent pas la même chose. Jouer c’est passer le temps agréablement, sans faire trop d’efforts. Tandis qu’apprendre à jouer consiste à s’investir, apprendre à développer de nouvelles capacités. En un mot : faire des efforts, se déformer, s’immerger… Si, avant l’installation de la télévision dans tous les ménages, les jeux de société se pratiquaient en famille et avec des amis le dimanche, plutôt la manille dans le Nord et la belote dans le Sud, sans oublier les petits chevaux, aucun ne nécessitait d’investissement particulier. Tous faisaient l’affaire, comme on dit. Je commençais à émerger d’une longue période fortement douloureuse. Je sortais d’une fatigue intense accumulée à la suite de la lourde prise en charge de ma mère, atteinte d’une maladie grave, en fin de vie. A son décès, je me suis recroquevillée et suis restée claustrée quasiment pendant près de trois ans. J’étais éreintée, épuisée… Le temps de la résilience fut long du fait que je m’étais particulièrement investie dans les
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soins palliatifs qui lui étaient prodigués à la maison, jour et nuit et ce, pendant plusieurs mois. Peu à peu j’aspirais à autre chose qu’à jouer au zombie. Je m’étais rendue à la présentation du club de bridge parmi les multiples offres associatives. Ce qui avait attiré favorablement mon attention tenait au fait qu’il fallait apprendre les règles de jeu, la méthode, pendant une période de trois ans. Cette alternative me paraissait organisée, à la fois coriace et attirante, en quelque sorte un placement à effectuer et ce, afin de bonifier le temps libre pour les années à-venir. Ainsi me voilà redevenue apprenante à soixante et un ans, un bon stimulant pour me réveiller et repartir vers d’autres horizons… Je choisis le terme apprenant à celui d’élève. Pourquoi ? Un apprenant est une personne qui apprend, qui suit un enseignement, globalement sans distinction d’âge. Celui d’élève fait référence au statut d’écolier, de collégien, de lycéen ou d’étudiant. Cette distinction traduit une différence de catégorie de population, du point de vue de l’acte de naissance. Dans le club, ouvert à tout le monde sans distinction d’âge, les apprenants sont seniors à 100 %, sauf exception rare. Qualifier un senior d’élève pourrait renvoyer, quant aux représentations collectives, au paradoxe selon lequel, l’expérience de la première moitié de la vie serait réduite aux acquêts d’un mineur ou d’un jeune majeur. Ce type de représentation plutôt simpliste serait susceptible de promouvoir quelques méprises dans le comportement relationnel. Nous aborderons cet aspect délétère très présent pour certains dans les relations moniteur-apprenant. Quand j’étais étudiante à Paris, il y a plus d’une quarantaine d’années, je m’étais renseignée pour apprendre à jouer au bridge. L’école philotechnique, située rue Saint-André des Arts, proposait des cours mais les horaires ne correspondaient pas aux miens. Si bien que le temps est passé sans que j’apprenne cette méthode. Maintenant le procédé est en cours de ème rectification. Je suis en cours de 2 année et, enfin, j’entrerai ème en 3 année dès octobre prochain afin d’achever le cursus de base correspondant à l’acquisition des données fondatrices du jeu de bridge. D’après ce que j’entends, les conventions ont beaucoup évolué depuis une ou deux décennies.
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A jeu complexe, population complexe ? Oui et non. Le discours actuel, au XXIème siècle, semblerait plutôt sibyllin. L’accent est mis sur l’incontournable humilité à avoir, à ne pas perdre de vue, revenant invariablement tel un leitmotiv… Ce qui me surprend et rendrait cette façon de voir plutôt suspecte. Insister constamment sur cette nécessaire humilité ne traduirait-il pas, subtilement l’aveu contraire ? L’humilité peut être là, on la constate chaque fois que l’on perd, sans qu’elle soit nécessairement évoquée a priori. D’autant que le panel de population semble rechercher une forme d’entre-soi, plus dans son versant de suffisance. J’observe que certains, sinon la majorité, n’hésitent guère à adopter une attitude carrément auto-satisfaite, suffisante. Qui se ressemble, s’assemble ! Il est fréquent qu’un bridgeur soit aussi golfeur. Evoluer sur deux aires sécuritaires favorise les relations amicales, sans risque de baisser de niveau. Et, en plus on y fait des rencontres qui peuvent s’avérer utiles. Ceci traduit le partage d’une aisance à la fois matérielle et culturelle. Bien entendu, peuvent cohabiter des exceptions qui ne se manifestent pas en tant que telles généralement. Hormis cet aspect, les personnalités sont ce qu’elles sont avec leur part de qualités et leur part de défauts. Lorsqu’on laisse traîner son oreille, il n’est pas rare d’entendre des critiques faites les uns sur les autres, parfois acerbes, on s’aime ou on ne s’aime pas, comme partout ailleurs. Si au club on accepte de se tutoyer, cela peut être intéressant de taquiner ce qui était interdit autrefois, ce n’est pas le cas pour tout le monde quand on se rencontre à l’extérieur, on n’est plus dans l’ici et maintenant du groupe, il est recommandé de conserver ses distances. Le club compte environ trois cents adhérents. Il est ouvert tous les jours de l’année sauf le week-end. Des tournois ont lieu tous les jours. Des fêtes calendaires ainsi que des repas, parfois champêtres, sont organisés avec soin, après les tournois. Des photos sont prises puis envoyées par mail aux membres adhérents. Cela étant, il n’existe pas de site informatique spécifique au club, ça manque en termes d’accès à l’information locale. Cela évoluera probablement avec le temps. De même qu’il réunit pour une journée les joueurs Golfe-Bridge, le matin dédié au golf et l’après-midi au bridge, à l’instar d’autres clubs. 7
Et encore, il organise à merveille une journée touristique et gastronomique chaque année, en septembre à laquelle je ère participe depuis la 1 année de formation. Si j’écris ces pages, je ne rédige pas un constat à titre documentaire pour en finir avec l’objet. Pourquoi narrer mon itinéraire ? Parce qu’au départ, j’ai été abasourdie par le comportement molestant de deux moniteurs ramenards qui se prenaient toutefois pour des pédagogues... Et, afin d’ôter le caillou qui s’est glissé dans ma chaussure, j’ai tenté de comprendre ce qui agit, interagit, rétroagit, agite et se transforme en laissant dans le sillage quelques traces saumâtres, qui resteront indélébiles pour certaines d’entre elles. Je reste stupéfaite d’observer l’impatience traduite au moyen de la violence exercée par ces moniteurs. Ce qui est le comble de la pédagogie ! Ne suis-je pas aguerrie contre la maltraitance, alors que j’ai été la première à utiliser ce terme dans le journal Le Point en 1987 ? Sans doute pas, j’y suis toujours aussi sensible et je reste plutôt anéantie et sans défense immédiate d’autant qu’il s’agit d’apprendre le bridge soit un jeu, de partager des moments ludiques… Où l’intérêt n’est ni financier ni professionnel, n’engageant pas l’avenir de la trajectoire de vie… Alors un peu d’indulgence les seniors vaniteux qui se prennent encore et toujours au sérieux. A croire qu’ils ont oublié qu’ils étaient eux aussi débutants lorsqu’ils étaient plus jeunes ! A supposer qu’ils ont besoin de se montrer sérieux comme s’ils expiaient leur part de frivolité… Je n’ai pas de prétention autre que celle de raconter mon expérience et surtout mon questionnement, les bonnes et les mauvaises rencontres que j’ai faites, la philosophie que j’en ai tirée. J’observais le hiatus qui sépare l’apprentissage des règles du bridge et son application. J’observais aussi le jugement porté par certains, présentés comme moniteurs, accusant la mauvaise volonté à agir de l’apprenant bien qu’il ne s’agissait pas du tout de cela. Sans indulgence, ils se transformaient en butors. C’est ce qui m’a poussée à aller faire un tour dans les neurosciences et m’a fait découvrir la théorie de Benjamin Libet relative à l’enregistrement de la mémoire. Quel enseignement et quelle distance sa théorie m’a apportés, que de verrous a-t-elle fait sauter en ce qui me concerne. Enfin, plus modestement,
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combien elle m’a rassurée, je reconnais qu’elle peut aussi générer l’effet inverse ! En neurosciences, Benjamin Libet a démontré le processus de l’enregistrement de la mémoire. Notre conscience intervient comme un après-coup, qui nous fait intégrer une information nouvelle, nous apprenons sans aucun doute, mais ne pourrons faire usage des choses apprises ou plutôt nous ne pourrons en faire usage que la prochaine fois. Rarement la problématique de la volonté et de l’intuition mises en question n’est abordée ainsi que celle qui oscille entre espoirs et désillusions. La navette est quasiment infinie dans ce va-et-vient où l’optimisme prévaut. Mieux vaut positiver. Malgré les frustrations, on apprend constamment de ses erreurs. On ne les récidive que rarement. Ou si on les réitère, c’est pour mieux les disséquer et les chasser. Le bridge est un sport cérébral particulièrement complexe à pratiquer, l’effort de concentration y est capital. En fin de compte, on reçoit d’énormes leçons de modestie qui ne gâchent en rien l’enthousiasme partagé. Le jeu est fondamentalement un symbole de lutte, lutte contre la mort, contre les éléments, contre les forces hostiles, contre soi-même, contre sa peur, sa faiblesse, ses doutes. Même quand les jeux sont de pure réjouissance, ils ont des éclats de victoire, du moins du côté du gagnant. Contrat, hasard, simulacre ou vertige, le jeu est à lui seul un univers dans lequel il convient, avec chances et risques, de trouver sa place. Comme la vie réelle mais dans un cadre déterminé d’avance, le jeu associe les notions de totalité, de règle et, de liberté. Quasi exclusivement basé sur les statistiques, le bridge échappe aux aspects les plus variés selon les besoins d’un moment sociétal. Jeu agressif, paradoxalement, il est une occasion de détente après l’effort ou plutôt les efforts exercés antérieurement et sur le moment. Les jeux prédominants symbolisent les intérêts majeurs d’une époque. Ils reflètent leurs temps : ils traduisent l’ère statistique, électronique et télématique, mathématique, mécanique et robotique. Voici les nouvelles, je les livre en partage, elles couvrent les moments forts vécus par des apprenants-bridgeurs durant les trois ans de formation. Elles pointent le projecteur sur les coulisses des combats courtois entre retraités pour la majorité 9
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