Séraphine de Senlis

Boureau Corinne

Description

En 1912 à Senlis, le collectionneur d'art allemand Wilhelm Uhde découvre que Séraphine Louis, sa femme de ménage, peint dans sa chambre, des oeuvres dont la force impressionne ce premier acheteur de Picasso. Ce roman est une fiction, librement inspirée de la vie de Séraphine de Senlis dont l'épopée se déroule en Bretagne, terre mystique où l'être cherche l'harmonie avec la nature. Cette femme, animée par une foi dévorante et guidée par un ange, va dédier à la Sainte Vierge des bouquets sublimes et déroutants.

Sujets

• Harmattan Littérature
• Nouvelles
• Romans
• Littérature

Informations

• Publié par: L'Harmattan
• Date de parution: 01 novembre 2013
• Nombre de lectures: 12
• EAN13: 9782336329369
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 4 Mo

Extrait

Corinne Boureau

Séraphine de Senlis
ϔ ǯ

Séraphine de Senlis

Roman

collection
Amarante

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©ȱL’Harmattan,ȱ2013ȱ
5Ȭ7,ȱrueȱdeȱl’Ecoleȱpolytechnique,ȱ75005ȱParisȱ
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http://www.harmattan.frȱ
[e-mail]ȱ
[e-mail]ȱ
ISBNȱ:ȱ978Ȭ2Ȭ343Ȭ01966Ȭ6ȱ
EANȱ:ȱ9782343019666

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SéraphineȱdeȱSenlisȱ
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Leȱsouffleȱdeȱl’angeȱ
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Amaranteȱȱ
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Cetteȱcollectionȱestȱconsacréeȱauxȱtextesȱdeȱ
créationȱlittéraireȱcontemporaineȱfrancophone.ȱ
ȱ
Elleȱaccueilleȱlesȱœuvresȱȱdeȱfictionȱ
(romansȱetȱrecueilsȱdeȱnouvelles)ȱ
ainsiȱqueȱdesȱessaisȱlittérairesȱ
etȱquelquesȱrécitsȱintimistes.ȱ
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Laȱlisteȱdesȱparutions,ȱavecȱuneȱcourteȱprésentationȱ
duȱcontenuȱdesȱouvrages,ȱpeutȱêtreȱconsultéeȱ
surȱleȱsiteȱwww.harmattan.frȱȱ
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CorinneȱBoureauȱ

SéraphineȱdeȱSenlisȱ
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Leȱsouffleȱdeȱl’angeȱ
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L’Harmattanȱ

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AȱMartine,ȱNino,ȱJelleȱȱ
etȱPeterȬMarcȱ

Ceȱromanȱestȱuneȱfiction,ȱlibrementȱinspiréeȱdeȱlaȱvieȱdeȱ
SéraphineȱdeȱSenlis.ȱ
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«ȱPenseȬtoiȱfleur,ȱfruitȱetȱleȱcœurȱdeȱl’arbre,ȱ
puisqu’ilsȱportentȱtesȱcouleurs,ȱ
puisqu’ilsȱsontȱunȱdesȱsignesȱnécessairesȱȱ
deȱtaȱprésence.ȱ»ȱ
PaulȱEluardȱ

Premièreȱpartieȱ

Leȱvertȱenȱherbeȱ
ȱ

Doëlanȱ1932ȱ
Laȱterreȱbattueȱabsorbeȱleȱsilenceȱsombre.ȱ
Auȱfilȱdesȱans,ȱl’argileȱaȱaccueilliȱenȱsonȱseinȱlesȱpousȬ
sières,ȱlesȱgraisses,ȱlesȱcrachats,ȱlesȱfuméesȱetȱlesȱmiesȱdeȱ
pain.ȱCeȱcirageȱminéralȱaȱétéȱpiétinéȱetȱtasséȱparȱlesȱalléesȱ
etȱvenuesȱdesȱsabots,ȱdesȱgriffesȱetȱdesȱpattesȱdeȱvelours.ȱ
Deȱlaȱmatièreȱémanentȱlesȱodeursȱâcresȱetȱdensesȱdeȱlaȱ
suie.ȱLaȱmarmiteȱsuspendueȱveille,ȱenȱastreȱnoir,ȱsurȱlaȱ
pénombreȱdeȱlaȱpièce,ȱtandisȱqueȱl’âmeȱduȱfoyerȱsomnoleȱ
dansȱsesȱcendres.ȱȱ
ȱ

Séraphineȱseȱtientȱdeboutȱcontreȱlaȱtableȱdeȱchêne.ȱSaȱpeȬ
titeȱvoixȱchuchoteȱdansȱsaȱtêteȱ:ȱ«ȱJouesȱdeȱpomme…ȱ
HerbeȬauxȬloups…ȱTrèfleȱàȱquatreȱoreilles…ȱ»ȱIncertaine,ȱ
elleȱtâtonneȱavantȱdeȱtrouverȱleȱmotifȱquiȱconvient.ȱȱ
«ȱMainsȱdeȱmargueriteȱouȱCollierȱd’œufsȱdeȱtourterelle,ȱ
deȱmerleȱetȱd’alouetteȱ?ȱ»ȱLaȱfilletteȱhésiteȱtoutȱenȱprêtantȱ
l’oreille.ȱPersonneȱneȱviendrait,ȱàȱpasȱdeȱloup,ȱlaȱsurȬ
prendreȱdansȱceȱqu’elleȱentendȱfaire,ȱetȱbienȱqu’àȱprésentȱ
elleȱseȱsenteȱenȱsécurité,ȱsesȱyeuxȱguettentȱlaȱfenêtre,ȱsonȬ
dentȱleȱnoirȱduȱcorridor,ȱpuisȱseȱriventȱsurȱlaȱmotteȱdeȱ
beurreȱposéeȱsurȱlaȱtable.ȱCelleȬciȱestȱfraîchementȱmouléeȱ
etȱsuinteȱsonȱsel.ȱȱ
Ceȱmatin,ȱJeannineȱaȱbarattéȱtouteȱlaȱcrèmeȱdeȱlaȱlaiteȬ
rie,ȱetȱmouléȱsonȱbeurre.ȱLaȱpatronneȱtientȱàȱcetteȱhabiȬ
tudeȱdeȱdécorerȱd’uneȱroseȱchaqueȱmotteȱdeȱbeurre,ȱarȬ
rangeantȱquelquesȱpétalesȱenȱcerclesȱrapprochésȱavecȱ
l’aideȱd’uneȱcuillèreȱenȱbois.ȱSéraphineȱaȱbeauȱluiȱdireȱ
d’imaginerȱautreȱchose,ȱrienȱqu’uneȱseuleȱfoisȱ:ȱ«ȱAutreȬ
mentȱça,ȱessaieȱunȱbateauȱ!ȱ»,ȱmaisȱJeannineȱn’enȱdémordȱ
pasȱd’unȱpoilȱ:ȱ«ȱGast,ȱnonȱquoiȱ!ȱLaȱrosetteȱonȱn’yȱtoucheȱ
pasȱ!ȱ»ȱ
ȱ
Soudain,ȱleȱsoleilȱréapparaîtȱàȱtraversȱlesȱcarreauxȱdeȱ
l’uniqueȱfenêtre,ȱjetantȱuneȱgerbeȱdeȱlumièreȱsurȱSéraȬ
phine.ȱDansȱcetteȱrésurrectionȱdeȱcouleurs,ȱceȱrayonneȬ
mentȱintimeȱéclabousseȱl’enfantȱd’uneȱbeautéȱsurpreȬ

nante.ȱUneȱpetiteȱcoiffeȱbrideȱsesȱcheveux,ȱdégageantȱunȱ
frontȱhautȱetȱbombé.ȱSesȱoreillesȱdiscrètesȱailentȱsonȱviȬ
sageȱpâle,ȱtoutȱmouchetéȱdeȱrousseur.ȱElleȱdessineȱavecȱ
sonȱdoigtȱunȱcollierȱd’œufsȱsurȱlaȱtable,ȱpuisȱseȱmordȱlaȱ
langue,ȱtenueȱparȱl’irrésistibleȱenvieȱd’effacerȱlaȱrosetteȱduȱ
beurre.ȱMaisȱelleȱaȱpeurȱdeȱseȱfaireȱprendre,ȱalors,ȱtrèsȱviteȱ
sonȱestomacȱseȱvrille,ȱtelleȱlaȱfleurȱduȱliseronȱseȱfanantȱenȱ
nombrilȱ:ȱ«ȱJeannineȱvaȱmeȱrouspéter,ȱpourȱsûrȱ!ȱ»ȱ
s’inquièteȬtȬelle.ȱToutefois,ȱl’appelȱestȱirrésistible,ȱalors,ȱenȱ
dépitȱduȱbonȱsens,ȱelleȱcèdeȱàȱlaȱtentation.ȱȱ
Elleȱsaisitȱlaȱcuillèreȱetȱl’abatȱd’unȱgesteȱvifȱsurȱleȱ
beurre.ȱUneȱjouissanceȱintenseȱhérisseȱsaȱfineȱchevelureȱ
lorsqu’elleȱs’appliqueȱàȱfaireȱdisparaîtreȱlaȱrose.ȱAprèsȱ
avoirȱbienȱlisséȱlaȱbosse,ȱelleȱposeȱd’abordȱlesȱvoiles,ȱenȬ
suiteȱlaȱcoqueȱetȱleȱmât,ȱpuisȱfignoleȱtroisȱrangéesȱdeȱ
vagues.ȱElleȱcontempleȱsonȱbateauȱavecȱunȱlargeȱsourireȱ
auxȱlèvres.ȱȱ
Toutȱàȱcoup,ȱuneȱgrosseȱvoixȱvenantȱdeȱlaȱcourȱdisȬ
perseȱunȱtintamarreȱdeȱpoulesȱenȱdébandade.ȱMalheurȱ!ȱ
LaȱJeannineȱ!ȱLaȱfilletteȱestȱsaisieȱdeȱstupeur.ȱDesȱsabotsȱ
titubantsȱrésonnentȱsurȱleȱsolȱduȱcorridor,ȱpuisȱdeȱgrosȱ
doigtsȱs’agrippen