ÉMANCIPATION
251 pages
Français

ÉMANCIPATION , livre ebook

-

251 pages
Français

Description

Contrairement au concept canonisé d'émancipation du XVIIIe siècle (celui de Condorcet, de Rousseau et de Kant), le concept d'émancipation devient au XXe siècle synonyme de toutes les formes de résistance, de résilience et de libération des contraintes, de l'oppression, des discriminations et de toutes les formes de pouvoir liberticide et totalitaire. C'est dans la pleine conscience de la mémoire historique de toutes les luttes pour l'émancipation que cet ouvrage reconstruit la trajectoire de ce concept, sans oublier qu'il s'agit là d'un concept-clé d'une philosophie sociale critique visant, dans le sillage de Marx à Sartre et Marcuse, non seulement la libération du genre humain mais aussi la transformation du monde vers une société libre, non-répressive, égalitaire et fraternelle.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 04 mai 2020
Nombre de lectures 0
EAN13 9782140149061
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1050€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Q
es
ArnoMÜNSTER
nsc ÉMANCIPATION (DE MARX À MARCUSE) Historique et actualité d’un concept
Questions contemporaines
Questions contemporaines Collection dirigée par Jean-Paul Chagnollaud, Bruno Péquignot et Xavier Richet Chômage, exclusion, globalisation… Jamais les « questions contemporaines » n’ont été aussi nombreuses et aussi complexes à appréhender. Le pari de la collection « Questions contemporaines » est d’offrir un espace de réflexion et de débat à tous ceux, chercheurs, militants ou praticiens, qui osent penser autrement, exprimer des idées neuves et ouvrir de nouvelles pistes à la réflexion collective. Dernières parutions Mohamad SALHAB (dir.),La technologie une et multiple, Réflexions libanaises et françaises,2020. Philippe JOURDAIN,Gilets jaunes, Mai 68, 2020. Michel ADAM,Composer avec la nature.Renaturation et géocitoyenneté, 2020. Jacques BEAUCHARD,Le peuple contre le peuple. Démocratie et Gilets jaunes, 2020. Pierre MORLANNE,Pour en finir avec les religions, 2020. Louise FINES,Enfants au travail : le paradoxe de la nécessité et du choix, 2020. Abdelbaki BELFAKIH, Abdelkader GONEGAÏ, Bruno PÉQUIGNOT (dir.),Art, individu et société, 2020. Alain REDSLOB,Évidences économiques d’hier et d’aujourd’hui. Pensées, innovations, mutations, 2020. Simon-Pierre THIERY,Le regain des campagnes. Les ruraux et leurs collectivités locales, 2020. Matthieu LABBÉ-ZERILLI,Manuel de survie d’un universaliste, 2020. Laure MANICOM,Manières de penser les crises, 2020. François TESTARD,Le non-recours au RSA chez les seniors,2019. Jean-Paul GUICHARD,Du tsarisme au totalitarisme, 2019. Ndache DJAVÉTY,Ethnorelégation et mahorité : l’intégration pathologique d’une minorité, 2019.
Arno Münster Émancipation (de Marx à Marcuse) Historique et actualité d’un concept
© L’Harmattan, 2020 5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Parishttp://www.editions-harmattan.fr ISBN : 978-2-343-20128-3 EAN : 9782343201283
Mes remerciements à Camille
Je dédie ce livre à Geneviève LEGAY, en solidarité avec cette militante d’ATTAC qui, lors d’une manifes-tation pacifique des « Gilets Jaunes », le 23 mars 2019, sur la place Garibaldi, à Nice, a été brutalement frappée et gravement blessée à la tête par un policier.
DU MÊME AUTEUR
Figures de l’utopie dans la pensée d’Ernst Bloch, Aubier, Paris, 1985. Ernst Bloch : Messianisme et utopie (Introduction à une « phénoménologie » de la conscience Anticipante), PUF, Paris, 1989. Nietzsche et le nazisme, Kimé, Paris, 1995. Progrès et catastrophe. Walter Benjamin et l’histoire. (Réflexions sur l’itinéraire philosophique d’un marxisme « mélancolique »), Kimé, Paris, Le principe dialogique. (De la pensée monologique auto-réflexive vers la proflexion inter-subjective), Kimé, Paris, 1997. Le principe « discussion ». Habermas ou le tournant langagier et communicationnel de la Théorie critique, Kimé, Paris, 1998. Nietzsche et Stirner, suivi de : Nietzsche est-il « immoraliste », Kimé, Paris, 1999. L’utopie concrète d’Ernst Bloch. Une biographie, Kimé, Paris, 2001(trad. en allemand et et en italien). Heidegger, la science allemande et le national-socialisme, Kimé, 2002, Paris.Sartre et la praxis (Ontologie de la liberté et praxis dans la pensée de Jean-Paul Sartre), L’Harmattan, Paris, 2005. Sartre et la morale, L’Harmattan, Paris, 2007. Sartre, le philosophe, l’intellectuel et la politique (avec J. William Wallet), Actes du Colloque d’Amiens (2005), L’Harmattan, Paris, 2005. Hannah Arendt contre Marx ? (Réflexions sur une anthropologie philosophique du « politique »), Hermann, Paris, 2008. Adorno, Une introduction (Il n’y a pas de vraie vie dans la vie fausse), Hermann, Paris, 2009. Réflexions sur la crise, L’Harmattan, Paris, 2009. André Gorz ou le Socialisme difficile, Lignes, Paris 2008 (trad. en allemand, Zurich, 2011). Pour un socialisme vert. Vers la société écologique par la justice sociale. (Contribution à la critique de l’écologie politique), Lignes, 2012.Utopie, écologie, écosocialisme. (De l’utopie concrète d’Ernst Bloch à l’écologie socialiste), L’Harmattan, coll. Questions contemporaines, Paris, 2013. Albert Camus : La révolte contre la Révolution ?, L’Harmattan, coll. Ouverture philosophique, Paris, 2014. Espérance, rêve, utopie dans la pensée d’Ernst Bloch (Six conférences), L’Harmattan, coll. Ouverture philosophique, Paris, 2015. Jean Jaurès : un combat pour la Laïcité, la République, la justice sociale et la paix, L’Harmattan, coll. Questions contemporaines, Paris, 2015. La réprobation de l’Allemagne ou les vraies raisons du nouveau ressentiment anti-allemand. Quel avenir pour l’Europe ?, L’Harmattan, coll. Questionner l’Europe, Paris, 2016. Le changement climatique va-t-il tout changer ? Quelle utopie concrète pour demain ?,L’Harmattan, coll. Questions contemporaines, Paris, 2017. André Tosel, penseur de l’Emancipation (un hommage), Lignes, Fécamp, 2018. Ernst Bloch et les XI thèses de Marx sur Feuerbach, Editions Delga, mars 2018. Socialisme et religion au XXème siècle. (Judaïsme, christianisme dans la philosophie de la religion d’Ernst Bloch, l’Harmattan, Ouverture philosophique, mai 2018. Le marxisme « ouvert » et écologique de Michael Löwy-Hommage à un intellectuel « rebelle », L’Harmattan, Ouverture philosophique, mars 2019. Osons l’utopie pour construire un monde meilleur – Esquisse d’une autobiographie politique, l’Harmattan, Questions contemporaines, Paris, octobre 2019.
I - INTRODUCTION  Comme dans les grandes créations de la musique classique et des opéras romantiques,l’émancipation, à savoir la lutte, le combat pour l’émancipation (sous ses diverses formes d’expression), traverse bien, depuis des siècles, comme unleitmotiv l’histoire de l’humanité tout entière. Elle constitue le contre-point et un point de cristallisation critique dans l’évolution des sociétés et de l’histoire économique, politique, sociale, religieuse et culturelle des peuples, et surtout dans l’histoire des régimes politiques autoritaires. Elle signifie précisément l’expression d’une volonté individuelle et collective commune – pacifique ou révolutionnaire – de larésistancecontre latyrannie, contrel’esclavage etl’oppression et contre toutes sortes de conditions où l’homme est traité comme un être soumis, humilié et exploité, étant blessé dans sadignité humaine par la violence d’un système tyrannique et des formes de domination autoritaires et inhumaines qui suscitent chez l’homme soumis la volonté de se rebeller, en revendiquant liberté et justice. L’émancipation, c’est le principal antipode à laservitude,définie, entres autres, par Spinoza, dans sonEthique, comme « l’impuissance de l’homme à gouverner et réduire 1 ses affections. » Autrement dit, comme il a été souligné, 2 d’entrée de jeu, par les organisateurs du Colloque International « Emancipation » de Berlin, en mai 2018, le concept d’émancipation comporte la prétention à la libération universelle de la domination, à la liberté, à l’égalité et à la reconnaissance réciproque, au-delà des
1  Spinoza,Ethique démontrée suivant l’ordre géométrique et divisée en cinq parties, traduction et notes par Charles Appuhn,Œuvres 3,Garnier-Flammarion, Paris, 1965, p. 217. 2  Les principaux concepteurs de ce colloque étaient Rahel Jaeggi, Kristina Leopold et Thomas Seibert.
7
intérêts particuliers. En ce sens précis, il est bien le point nodal des débats socio-philosophiques et socio-politiques actuels.
Un bref rappel historique : L’esclavage, pratiqué dans l’Antiquité grecque et romaine ainsi que dans les colonies des Empires coloniaux européens, depuis le XVe-XVIe siècle, avant d’être aboli au courant du XIXe siècle (au Brésil, tardivement, seulement en 1888 !), constituait sans nul doute la forme la plus extrême et la plus inhumaine de cette domination de l’homme sur l’homme, avant qu’il réémerge, au XXe siècle. Il réémerge à l’ère du fascisme, par exemple sous la forme de la domination exterminatrice raciale du nazisme, avec l’extermination des Juifs de l’Europe, dans les camps de concentration nazis, entre 1942 et 1945. La première grande insurrection menée, dans la Modernité, sous le mot d’ordre del’émancipationdel’esclavageet du régime colonial était sans nul doute le soulèvement des noirs guidés par Toussaint Louverture, en Haïti, en 1791, qui aboutira en 1804 au départ des Français. Ce n’était que la toute première étincelle de toute une série de révoltes contre le régime colonial et le colonialisme qui devaient suivre et qui se sont produites au cours du XIXe et du XXe siècle en Asie, en Afrique et en Amérique latine où la lutte des peuples colonisés contre les conditions d’exploitation et d’humiliation proches de l’esclavage était en général liée au combat pour l’émancipation et pour l’indépendance nationale.
8
II - L’EMANCIPATION A TRAVERS LES SIECLES
1 - La sortie du Peuple Juif de l’Egypte du Pharaon
L’exode, guidé par Moïse, son leader et libérateur, de l’Egypte, où les hébreux vivaient en esclavage, depuis des siècles, sous le régime despotique des pharaons, était sans nul doute le tout premier acte d’émancipation collectivedans l’histoire de l’humanité dont le récit (Cf. le Livre de l’Exodela Torah) est symptomatique d’un réveil des de consciences dans la résistance commune de tout un peuple (humilié et discriminé) à la tyrannie. Et si le souvenir de cet « épisode » historique, constitutif pour l’Être-Juif figure toujours au centre même de la plus grande fête religieuse juive de l’année, à savoir de laFête de Pessah, c’est parce que cet événement libérateur est en un sens si profondément lié à l’histoire et à l’identité du judaïsme qu’il est devenu le pôle d’identification majeur des communautés juives dispersées dans le monde et de l’Etat d’Israël fondé en 1948. Cette identification a joué un rôle dans la genèse du sionisme moderne, puisque, comme le rappelle à juste titre Alain Boyer, le terme de ‘sionisme’ a été forgé, en allemand, par Nathan Birnbaum, rédacteur du journal ‘Selbstemanzipation’ (auto-émancipation), en 1891, par référence au mont Sion. Ce Mont, qui surplombe Jérusalem, désigne la ville Sainte et l’ensemble du pays d’Israël et ceci, dès les temps bibliques. « Par son étymologie même, le sionisme rappelle l’ancienneté des liens indissolubles qui unissent le peuple d’Israël, la Tora 3 d’Israël et la Terre d’Israël. » C’était sans nul doute le tout premier exemple du lien étroit qui unit, dans une visionémancipatrice, une religion libératrice avec l’idée de la création d’un État national (autonome et
3  Cf. Alain Boyer,Les origines du sionisme», PUF,Que sais-je , « Paris,1988, p. 5.
9
indépendant) fondé sur ce consensus et le souvenir de cet actecollectif d’émancipation de l’esclavage. Après la publication deL’Etat Juifpar Théodor Herzl, en 1898, le sionisme s’est développé, au courant du XXe siècle, en divers mouvements et tendances : (a) un courant de sionisme socialiste(très inspiré des idées de Moses Hess, le contemporain de Karl Marx et l’auteur du livreRome et Jérusalem(1867)) au sein duquel s’est développé le mouvement juif des coopératives socialistes, qui a conduit à la création des « Kibboutzim », en Palestine, puis en Israël ; (b) un courant desionisme culturel animé par le philosophe Martin Buber, qui préconise, avec ses nombreux écrits, une pensée « dialogique » et une politique du « dialogue » avec les Arabes ; et (c) une tendance qu’on pourrait qualifier de sionisme fondamentalistequi, inspiré des idées de Théodor Herzl et de Max Nordau, qui mettaient l’accent sur la nécessité de la création d’un « Foyer Juif » et même d’un « Etat Juif national » en Palestine, ainsi que sur la colonisation et l’implantation de colonies juives en Judée-Samarie. Après la création del’Etat d’Israël, en 1948, après la décision sur le partage de la Palestine, prise par l’ONU, en septembre 1947, cette tendance est devenue majoritaire et hégémonique en Israël. Elle devint dans la pratique politique surtout une doctrine de plus en plus instrumentalisée par les partis de la droite et de l’extrême-droite israélienne (ainsi que par les partis représentant les Juifs religieux ultra-orthodoxes) à des fins de justification de lacolonisationet de son intensification dans les territoires occupés par Israël, lors de la Guerre des Six Jours, en 1967. C’est l’adhésion des gouvernements de la droite israélienne à cette doctrine et l’intransigeance de ses dirigeants politiques qui sans nul doute, surtout après l’assassinat de Itzhak Rabin, par un Juif ultra-nationaliste,
10
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents