L expérience esthétique en question
207 pages
Français

L'expérience esthétique en question , livre ebook

207 pages
Français

Description

Le pluralisme de la culture contemporaine donne naissance à une telle variété d'expériences esthétiques qu'elle devient de plus en plus complexe à définir. Les formes artistiques du XXIe siècle interrogent non seulement les catégories de l'esthétique philosophique, mais elles remettent souvent en cause la notion même d'expérience esthétique que la philosophie avait théorisée. Comment faire le point sur cette nouvelle conjoncture ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juillet 2009
Nombre de lectures 283
EAN13 9782296234413
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Avant-propos

e
L’esthétique en tant que discipline philosophique est née auXVIII
siècle, lorsqu’un certain nombre de conditions ont été remplies
pour qu’une constellation particulière se constitue entre le sensible,
e
l’art et le beau. L’art duXXsiècle a fait éclater cette configuration
et aboli les limites territoriales traditionnelles entre les disciplines
mises à contribution dans ce que l’on nomme aujourd’hui souvent
sans autre distinction comme appartenant au «domaine »
de l’esthétique. «Quelle esthétique pour les temps nouveaux? »
se demande à justetitre C. Talon-Hugon (2004). Depuis la
phénoménologie française des années 40et50qui s’étaitintéressée
directementà la notion d’expérience esthétique (pensons à
M. Merleau-Pontyetà M. Dufrenne), l’esthétique analytique
(M.Beardsley, G. Dickie, J. Stolnitz, A. Danto) dans les années60,
ainsi que l’esthétique de la réception des années70(H. R. Jauss),
yontconsacré plusieurs écrits. Ilya plus d’une décennie, on a
vusurgir de nouveauxénoncésthéoriques à ce propos dans les
milieuxphilosophiques (R. Rochlitz, G. Genette, J.-M. Schaeffer,
J.-P. Cometti, J. Morisot, R. Pouivet, Y. Michaud, M. Seel,
C. Menke).Bien que les intérêts de ces divers auteurs aientété
mobilisés alors par la question d’une critériologie esthétique, ils
traitaienten parallèle de la relation entre le plaisir esthétique etle
sens commun, de la rationalité de cette expérience, de sa spécificité
cognitive, dans la foulée des déterminations conceptuelles
établies par l’esthétique de Kant(1790). Nous avons alors été
témoins de réactualisations etde renversements de la position
kantienne, notammentconcernantsa conception d’un sens
commun esthétique etd’un plaisir esthétique désintéressé. Par
ailleurs,tandis qu’un auteur comme Danto remettaità l’ordre du
jour lethème de la dimension historique de l’arten réactualisant
la pertinence dudiagnostic hégélien,un autre auteur comme
G. Didi-Huberman, formé à la phénoménologie, à la fois préoccupé
de fondement théorique et tournévers les nouvelles expériences
des artsvisuels, a contribué à renouveler lathéorie de cette
expérience de manière pertinente. Le retour de l’expérience esthétique
vient toutjuste de recevoirune nouvelle impulsion en France avec
latraductiontardive de l’ouvrage de J. Dewey,Artas Experience
(1934), œuvre qui a inspiré longtemps latradition esthétique
américaine etdontl’influence se faitsentir dans d’autrestraditions de

5

pensée comme l’esthétique allemande récente. On levoit:
l’expérience esthétique, que Deweyn’hésitaitpas à nommer
« l’expérience des expériences »estde nouveauaucœurde
l’actualité.
Le pluralisme de la culture contemporaine engendreunetelle
variété d’expériences esthétiques qu’il devientde plus en plus
complexe de définir cette dernière. Nous pensons que
laconscience accrue de cette complexité produitplus que jamais
aujourd’hui chez un public avisé le besoin detrouverune
explication concernantles formes d’artetles expériences esthétiques
nouvelles qui puisse rattacher la portée de celles-ci à latotalité de
lavie individuelle etcollective. Dans le butde remplir cettetâche
d’une esthétique soucieuse des nécessités du temps présent, il
nous a paruapproprié de recourir àune réflexion multiforme
nourrie de l’apportde penseurs provenantdes arts, de l’histoire de
l’art, de la sociologie, de l’anthropologie etde la philosophie.
C’estce que nous avonsvoulufavoriser dans ce collectif. Nous
sommes partis d’un constatfortsimple : la notion d’expérience
esthétique s’estmétamorphosée aucours des dernières années non
seulementducôté de lathéorie mais surtoutàtraversune pratique
artistique oùlatendance à intégrer les découvertes scientifiques
età exploiter lestechnologies nouvelles, estdevenue flagrante.
Que ce soitdans ce qu’on appelle l’artmédiatique, les arts
sensoriels, le bioart, l’arten réseauoul’artrelationnel,toutes
e
ces nouvelles formes artistiques duXXIsiècle interrogentnon
seulementla pertinence des catégories de l’esthétique
philosophique, mais elles remettentsouventen question la notion même
d’expérience esthétiquetelle que la philosophie l’avait
thématisée. D’ailleurs, plus les expériences esthétiques se rapportentaux
nouvelles installations etperformances detoutes sortes instaurées
par des créateursvenus de disciplines culturelles fortdifférentes,
plus la problématique de l’intégration des expériences esthétiques
se complexifie pour ceuxqui setrouventsollicités par ces dernières.
Cette situation révèle, entre autres, que les individus demeurent
incapables d’accueillir favorablementdes propositions artistiques
nouvelles, s’ils ne saventpas préalablements’approprier les
données phénoménales provenantde leurs sens, de leurs
sensations, de leurs perceptions etde leurs expériencesvécues. Si l’idée
à l’origine de ce collectif étaitd’ouvrir la notion d’expérience
esthétique à la perspective plurielle de la pratique des arts, les

6

diverses interventions qui composentle contenude cetouvrage
démontrent, chacune à leur façon, que, pour pouvoir apprécier et
juger le sens des œuvres que l’artactuel propose à notre
attention, les acquis d’une approche phénoménologique favorisant
les conditions d’une compréhension justifiable de nos expériences
esthétiques etde nos rencontres avec les œuvres de l’artse
montrent toujours indispensables. Car même dans ses formes les plus
radicalementétrangères par rapportauxparamètres perceptifs du
monde quotidien, l’arts’adressetoujours entoutpremier lieuà
notre faculté de sentir etde juger. Quiconque aujourd’hui monnaie
les savoirs d’entendementcomme des données interchangeables
àvolonté finitpar ne plus être lui-même en mesure de distinguer
ce qu’il ressent véritablementetde porterun jugementéclairé.
Commentpourrait-il juger la nouveauté d’une proposition de
sens artistique, s’il ne dispose pas déjà d’un certain savoir et
d’une sensibilité lui permettantde déterminer ce qui mérite
d’être reconnucomme inédit?
Quatre disciplines sontreprésentées dans cetouvrage : la
philosophie, l’art, l’histoire de l’artetla sociologie. Les différentes
contributions n’ontpas été regroupées suivantl’appartenance des
auteurs à leur domaine de savoir. Nous avons plutôtchoisiune
présentation qui favorise les recoupements entre les différentes
interventions. Trois axes d’interrogation ontainsi été retenus :
1) les lieuxde l’expérience esthétique; 2) les effets esthétiques;
3) les cultures etle jugementesthétique. Autour de cestrois
axes se sont tracés des carrefours de réflexion oùse jouentdes
complicités imprévues entre diverses positionsthéoriques.
1) Le premier chapitre porte sulier les «ux» de l’expérience
esthétique etcontientles contributions de Doyen/Demers,
Pascale Bédard, Michel Cinus etÉric Ilhareguy. Considérant
l’esthétique cognitive de Schaeffer, enyannexantl’esthétique
sociale de M. Maffesoli etla dyade conceptuellereliance/déliance
de M. Bolle de Bal, letexte ducouple Doyon/Demers aborde
un artqui ressemble à lavie, à la manière du« désartiste »de
A. KaprowetJ. Levine. Ces pratiques artistiques d’immixtion
création de situations etinvention d’identités qui s’insèrentdans
des cadres devie préexistants - contribueraientàune certaine
désautorisationde l’esthétique normative,touten explorantla
notion d’esthétique sociale dansun contexte de démocratie
culturelle. Par ailleurs, Doyon/Demers définissentleur pratique
7

artistique par leterme d’indisciplinaritéévoquantainsi à la fois
la natusans discipline fire «xe »de leurtravail etl’idée plus
subversiv

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents