La Bible ou le livre des plaisirs corrompus
258 pages
Français

La Bible ou le livre des plaisirs corrompus , livre ebook

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258 pages
Français

Description

La Bible apparaît généralement comme un livre austère, minorant le plaisir des hommes ou le subordonnant à Dieu. Mais le texte laisse en réalité apparaître des bribes de gaieté, de joie, de jouissance parfois, qui laissent deviner un bonheur plus matériel. Cependant, tous ces plaisirs ne se disent pas de la même manière selon les auteurs et les époques. Quand l'imaginaire des anciens Israélites admettait encore d'autres divinités, on relève une grande tolérance dans les propos, à l'image des plaisirs qu'ils prêtaient à leurs dieux. Mais le grand virage monothéiste, privant leur dieu unique de ses anciennes joies, amorça une législation très restrictive. Cet ouvrage tente de comprendre la manière dont ces plaisirs furent progressivement corrompus par l'émergence du monothéisme.

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Informations

Publié par
Date de parution 09 mai 2019
Nombre de lectures 1
EAN13 9782140121173
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1100€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

de figuier
6
Daniel Faivre
LA BIBLE OU LE LIVRE DES PLAISIRS CORROMPUS
LA BIBLE OU LE LIVRE
DES PLAISIRS CORROMPUS
Collection « Histoire, Textes, Sociétés »dirigée par Monique Clavel-Lévêque et Laure LévêquePour questionner l’inscription du sujet social dans l’histoire, cette collection accueille des recherches très largement ouvertes tant dans la diachronie que dans les champs du savoir. L’objet affiché est d'explorer comment un ensemble de référents a pu structurer dans sa dynamique un rapport au monde. Dans la variété des sources – écrites ou orales –, elle se veut le lieu d'une enquête sur la mémoire, ses fondements, ses opérations de construction, ses refoulements aussi, ses modalités concrètes d'expression dans l'imaginaire, singulier ou collectif. Déjà parus René Nouailhat,La leçon de Malicornay, 2019. Daniel Garrigue,Le temps des gaullistes de gauche, 2018. Yves Ansel,De l’enseignement de la littérature en crise, 2018. Laure Lévêque (dir.),2000 ans de guerres en paix, 2018. Daniel Faivre (dir.),Religion et violence. Regards croisés sur une dualité problématique, 2018. Marie-Claude L’Huillier et Anne Jollet (dir.),Nation(s), mondialisation(s) : toute une histoire, Quatrièmes rencontres d’histoire critique,2017. Monique Clavel-Lévêque, Laure Levêque, Rome et l’histoire. Quand le mythe fait écran, 2017. Laure Lévêque, Philippe Bonfils, Yusuf Kocoglu, Thierry Santolini, Delphine van Hoorebeke (dir.),Vulnérabilités, échanges et tensions dans l'espace méditerranéen, L'Amer Méditerranée,2017.Maya Khaled,L’écriture d’Amin Maalouf à la lisière de deux langues. Une approche pluridisciplinaire, 2017. Daniel Faivre,De l’acte fondateur au mythe de fondation.Une approche pluridisciplinaire, 2016. Laure Lévêque, Philippe Bonfils, Yusuf Kocoglu, Thierry Santolini, Delphine van Hoorebeke,Les échanges dans l’espace euro-méditerranéen. Formes et dynamiques, 2016. Laure Lévêque, Philippe Bonfils, Yusuf Kocoglu, Thierry Santolini, Delphine van Hoorebeke (dir.),L’espace euro-méditerranéen entre conflits et métissages. Rencontres, échanges, représentations, 2015. Marie-Claude L’Huillier et Anne Jollet (dir.),Guerre et paix. Troisièmes rencontres d’Histoire critique, 2015.
Daniel Faivre La Bible ou le livre des plaisirs corrompus
Du même auteur Essais L'idée de Dieu chez les Hébreux nomades. Une monolâtrie sur fond de poly-démonisme, préface de Martin ROSE,Éditions L'Harmattan, Paris, 1996. Vivre et mourir dans l'ancien Israël. Anthropologie biblique de la vie et de la mort, Éditions L'Harmattan, Paris, 1998. Précis d'Anthropologie Biblique. Images de l'homme, ÉditionsL'Harmattan, Paris, 2000. Mythes de la Genèse, genèse des mythes,Éditions L’Harmattan, Paris, 2007 (281 p).(Directeur)Tissu, voile et vêtement, Éditions L’Harmattan, Paris, 2007.(Directeur)La mort en questions,Éditions Érès, Toulouse, 2013. (Directeur)De l’acte fondateur au mythe de fondation,Éditions L’Harmattan, Paris, 2016. (Directeur)Religion et violence. Regards croisés sur une dualité problématique, Éditions L’Harmattan, Paris, 2018. Romans L'enfer à sa porte, Éditions Feel, Nice, 2001. Rouge du sang des mères, Éditions Empreinte, La Belle Étoile, 2004. Le Messie d’Or, Éditions In octavo, Saint-Germain-en-Laye, 2006. Le meilleur ami de l’homme, Éditions L’Harmattan, Paris, 2008 De proche en proche, Éditions L’Harmattan, Paris, 2010. La première femme, Éditions L’Harmattan, Paris, 2013. L’ère Elvirah,Éditions Les Sentiers du Livre, Nantes, 2015. © L’HARMATTAN, 2019 5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Parishttp://www.editions-harmattan.fr/ ISBN : 978-2-343-17485-3 EAN : 9782343174853
« Par le plaisir faut tromper le trépas » Ronsard(Second Livre des Amours)
Des éléments pour comprendre, d’autres pour douter
«La Bible s’ouvre riante avec laGenèse, et se ferme sur la menaçante 1 Apocalypse» Victor Hugo,Préface de Cromwell. La phrase de Victor Hugo, mise en exergue de ce chapitre, fut sans doute assez imprudente, surtout dans sa première proposition. Mais elle possède le louable mérite de nous inviter à rechercher et à comprendre les différentes manifestations de ce rire annoncé. Cependant, la présente étude ne se clôturera pas sur la « menaçanteApocalypse»mais restera centrée sur le premier Testament, qui comporte lui aussi son content de frayeurs. Et, bien loin d’anathématiser le poète pour des proposque l’on pourrait jugerhasardeux, nous y verrons peut-être quele plaisir biblique n’est jamais très éloigné de la menacecomme l’est la jouissance de la douleur. Un éloignement plus mince que l’espace d’un livre. Enfin, cette phrase de Victor Hugo n’a pas été choisie pour sa seule beauté. Elle nous servira en quelque sorte de fil rouge tout au long de ce livre. Au moins sur le fond, à défaut den suivre la lettre. Nous commencerons effectivement notre travail par évoquer les grands moments de réjouissances qui émaillent le texte biblique telles des bornes incantatoires, avant de progresser pas à pas vers un final nettement plus inquiétant. Plus inquiétant peut-être encore, car beaucoup plus concret, que la « menaçanteApocalypse» évoquée par le poète. Plus inquiétant aussi parce qu’il ne reporte pas le châtiment et la mise au pas des plaisirs humains vers une lointaine eschatologie, mais qu’il l’intègreprogressivement dans la vie quotidienne des gens, au plus profond d’une législation qui s’élaborera sous le regard d’une divinité unique et sourcilleuse.Cependant, vouloir présenter une réflexion sur les diverses manifestations du plaisir dans la Bible hébraïque pourra sans doute étonner le laïciste comme l’intégriste.Pour le premier nommé, ce livren’estrien d’autre qu’un long prêchi-prêcha informe et dénué de toute réalité historique ; pour le second, il constitue au contraire le recueil minutieux et éclairé de la parole de Dieu, dont il ne faut pas s’écarter d’un iota etqui ne souffre donc aucun regard critique. Pas mêmed’un sourire. Entre ces deux pôles, la situation de l’historien paraîtassez bancale. Un ème peu comme s’ilsiècle au moyen duvoulait étudier la poésie française du XIX 1.Œuvres de VictorHUGO, tome 2, Éditions Méline, Cans et Compagnie, Bruxelles, 1837, p. 15.
Daniel Faivre
Code Civil. Maisc’est précisément entre ces deuxextrêmes que nous allons chercher la place étroite pour poser une réflexion raisonnée. Certes, la Bible n’a pas pour vocation de faire concurrence auKama Sutraet la recherche du plaisir ne constitue pas la finalité première de cet écrit. Nous sommes à des époques encore très éloignées de cette phrase que Saint-Just jeta dans l’enceinte de la Convention Nationale, lors d’undiscours demeuré célèbre et prononcé le 13 ventôse An II (3 mars 1794), dix-huit années après l’inscription de ce droit dans la Déclaration d’Indépendance américaine du 4 juillet 1776: « Le bonheur est une idée neuve en Europe ». Néanmoins, un simple regard sur les récits bibliques permet de déceler, çà et là, des mots et des expressions qui laissent entendre que, pour les Hébreux, la vie n’était pas qu’une longue vallée de larmes mais qu’on savait, à l’occasion,rire, se réjouir, prendre du plaisir, oublier pour un temps la dureté de la vieet l’aridité du milieu. Des formes de plaisir qui se manifestent tels des sommets d’icebergs dans un océan gelé. Ce sont ces mots que nous nous proposons ici de rechercher pour essayer de définir l’une des composantes sans doute les moins connues de la vie des anciens Hébreux, la quête du plaisir. Nous nous efforcerons donc, dans cet ouvrage, d’établir une forme de typologie des différents moyens de se réjouir que les hommes de la Bible tenaientà leur disposition. Nous aurons l’occasionde constater que ces moyens ne sont pas constants mais qu’ils évoluent dans le temps comme dans l’espace. Aussi, après une étude minutieuse des mille et une manières d’adoucir la vie terrestre, complèterons-nous notre réflexion par le poids du religieux dans l’assouvissement des plaisirs humains, mesurant plus particulièrement les effets dela lente transition d’une sociététraditionnellement et longtemps polythéiste vers une pensée devenue monothéiste. Ainsi que ses répercussions sur la quête du bonheur. Mais travailler sur les mots de la Bible hébraïque équivaut à visiter, sans carte ni boussole,une ville jonchée d’impasses et de sens interdits, un jour de grève des transports publics. En effet, force est de constater que le vocabulaire hébraïque ancien,malgré tout le respect qu’on lui doit,estd’une indigence extrême. Car lorsque les hellénistesde l’Antiquitépeuvent s’appuyer sur une langue forte de plus de cent mille mots, le bibliste doit composer avec un vocabulaire hébreu nettement moins pléthorique, comprenant à peine huit mille mots, en comptant les noms propres. Et tous ces termes ne sont construitsqu’à partir de cinq cents radicaux seulement. En outre, près du quart de ce lexique est constitué d’hapax, c’est-à-dire de mots orphelins,qu’on ne trouve nulle part ailleurs, ce qui rend leur traduction souvent des plus problématiques. De surcroît, nous aurons maintes fois l’occasion deconstater que le champ sémantique du plaisir constitue, plus que tout autre, une véritable champignon-nière à hapax, dont la traduction laisse fréquemment perplexe le chercheur le plus opiniâtreet ouvre un champ d’interprétation des plus vastes. Pour rendre les choses plus claires encore, précisons que ce vocabulaire biblique correspond approximativement, en nombre, à celui que possède un 6
La Bible ou le livre des plaisirs corrompus lycéen français moyenaujourd’huice qui ne laisse pas d’inquiéter!quand une personnedotée d’un bon niveaucultureldispose d’environ trente milletermes 1 différents pour structurer sa pensée et organiser sa perception du monde . En d’autres termes, l’historien d’Israëlancien ne peut compter que sur le bagage linguistique d’un lycéenpour tenter de se représenter le monde biblique ce qui, sans vouloir jeter le moins du monde le discrédit sur cette besogneuse tranche de population, rend compte en soi de la complexité de la tâche. En effet, le grec et, dans une mesure presque équivalente, le latin, se fondentl’uncommel’autreune foisonnante littérature, couvrant des sur domaines aussi divers que celui du droit, de la littérature et de la philosophie, mais aussi de toutes les sciences naturelles, en plus du vocabulaire strictement religieux.Et cet héritage s’étire sur plus d’un millénaire. À côté de ces deux langues,l’hébreu ancienrepose essentiellement sur le texte biblique qui,en termes de volume, n’atteint même pas les dimensions des œuvres du seul Aristote. Quant àl’apport desostraca,c’est-à-dire des inscriptions surdes tessons d’argile, ou celui des manuscrits de Qumran, ni les uns, ni les autres ne sont déterminants. Ainsi, des mots aussi courants que "cerveau", "passion" ou "religion" sont totalement absents du lexique biblique. Étaient-ils pour autant inconnus? Probablement non, mais les auteurs bibliques n’étaient pas des lexicologues et leurs préoccupations premières ne se bornaient pas à nous offrir un dictionnaire exhaustif de leur langue. Et leur absence dans le corpus biblique ne peut se prêter à aucune explication certaine. En d’autres termes, on peut penser que l’hébreuancien réel devait être quelque peudifférent, ou plutôt que l’hébreu biblique est unereprésentation édulcorée et sans doute beaucoup plus intellectuelle de l’hébreu réel. Mais paradoxalement plus pauvre en mots. Car de nombreux registres de cette langue, qui nous manqueront beaucoup dans cette étude, sont soit totalement escamotés, soit à peine esquissés. L’historien doit donc s’accommoder de cette carence et se faire à cette idée évidente mais décevante que la seule exégèse biblique, même réalisée dans une démarche rigoureuse et scientifique, ne saura suffire à appréhender complète-ment la nature profonde des modes de pensée hébraïques. C’est d’ailleurs une forme de paradoxe de réaliser quel’un des fondementsfort de notre socle culturel est fondé sur une telle pauvreté linguistique. Un autre type de difficultés apparaît ensuite. Elle concerne la structure même des mots et l’organisation des lettres qui les composent. La langue biblique ne comportait, à l’origine, que des consonnes, comme l’hébreu contemporain d’ailleurs, ou encore comme l’arabe coranique. Mais il a 2 été vocalisé au début du Moyen-âge par une classe de scribes, les Massorètes , 1. Sources : Patrick KUCHARD,Les 600 mots français les plus usités, http://www.encyclopedie-incomplete.com/, samedi 17 janvier 2009. 2. Leur nom vient de l’araméenmassorah, qui a le sens de "compte" ou de "dénombrement". Ce sont des docteurs de la Bible qui en ontcréé l’apparat critique. Leur activité a commencé vers 400 pour s’achever à la fin du premier millénaire. «Je vous allegueray l'autorité des massoretz, interpretes des saintes lettres hebraïcques »,disait d’eux FrançoisRABELAIS,Pantagruel,II, 1. 7
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