À la croisée des regards
159 pages
Français

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À la croisée des regards , livre ebook

159 pages
Français

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Description

Cet ouvrage apporte un éclairage sur les réalités du métier d'assistant social et sur les tensions qui traversent la relation d'aide. Il interroge les rapports que les usagers entretiennent à l'aide sociale, aux travailleurs et aux institutions qui les reçoivent. Au fil des chapitres, il décrypte une série d'enjeux au centre des interactions qui se nouent entre usagers et intervenants sociaux : des enjeux identitaires et professionnels.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 16 octobre 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782806122919
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1050€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Copyright










D/2019/4910/49
EAN Epub : 978-2-8061-2291-9
© Academia – L’Harmattan s.a.
Grand’Place, 29
B-1348 L OUVAIN-LA- N EUVE
Tous droits de reproduction, d’adaptation ou de traduction, par quelque procédé que ce soit, réservés pour tous pays sans l’autorisation de l’éditeur ou de ses ayants droit.
www.editions-academia.be
Titre


Fédération des Services Sociaux Hugues-Olivier Hubert et Justine Vleminckx

(avec la contribution d’Alexia Serré)






À la croisée des regards

Usagers et travailleurs sociaux
REMERCIEMENTS
Cette publication et la recherche sur laquelle elle s’appuie n’ont pu être réalisées que grâce au soutien financier du Fonds social pour les établissements et services de santé, ainsi qu’aux apports des Cabinets des Affaires sociales de la COCOF, de la COCOM et de la Région wallonne. Nous les en remercions.
Nos remerciements les plus vifs s’adressent aux personnes qui fréquentent les services sociaux associatifs membres de la FdSS-FdSSB, qui ont accepté de témoigner de leurs parcours et de nous livrer leurs expériences, leurs difficultés, leurs regards sur la réalité sociale qui les entoure, leurs espoirs aussi… La recherche « Regards croisés usagers et travailleurs sociaux » n’aurait pas existé sans leur précieuse contribution.
Nous remercions bien sûr chaleureusement chacune des équipes qui nous ont ouvert leurs portes, d’une part pour l’accueil qui nous a été réservé et d’autre part pour le temps qui nous a été consacré. Nous remercions chacun des travailleurs pour sa participation. Les analyses présentées ici sont le fruit d’une co-construction de savoirs entre praticiens et chercheurs. Nous espérons être en mesure de refléter toute la richesse de leurs réflexions.
Un grand merci également aux chargées de recherche Charlotte Belleflamme et Céline Nieuwenhuys pour leur implication créative et féconde lors des phases de problématisation et de recueil de données sur le terrain.
Enfin, nous souhaitons remercier nos collègues, ainsi que nos proches, pour leur soutien et leurs encouragements.
INTRODUCTION

Georges introduit sa carte d’identité. Il a longtemps hésité. Plusieurs fois, il est passé et repassé devant la borne avant de se décider. Pourtant, il y a souvent songé. Ça fait un bon bout de temps qu’il tire le diable par la queue. À force de débrouille et de privations, ils s’en sont toujours tirés pour boucler les fins de mois. Au début, il fallait se démener pour tenir les deux trois derniers jours, puis ce fut toute la dernière semaine. Mais aujourd’hui, on n’est que le 10 et ils n’ont déjà plus un sou. Tout est passé dans le paiement du loyer. Puis, il a fallu solder les arriérés de factures impayées. La dernière mise en demeure faisait planer la menace du limiteur de puissance. Sans compter les soins : « Ah, il a vraiment trouvé le bon moment pour se casser le bras, celui-là ! » Il chasse rapidement cette pensée et grommelle : « Arrête. Qu’est-ce qu’il en peut le gamin, si son père n’est pas foutu de ramener suffisamment d’argent pour faire vivre la famille ? Et puis, si je n’avais pas toujours remis à plus tard le paiement des cotisations à la mutuelle, j’aurais été en ordre et ça n’aurait pas coûté aussi cher ! » C’est sûr, Georges a sa fierté. Mais là, il se sent complètement dépassé. Il ne pourra pas s’en sortir seul. Cette fois, il a absolument besoin d’aide.
Il introduit son code PIN comme l’y invite le message sur l’écran et il lit :
Bonjour Monsieur Delville,
Bienvenue sur la borne d’aide sociale n° 837-48-1001/rue_de_la_ Charité@Saint-Josse-ten-Noode.
Nous vous accueillons avec la plus grande empathie ! Rassurez-vous, tout problème trouve sa solution.
Quel est votre problème ?
— Je n’ai pas d’emploi.
— Je n’ai pas de revenu.
— Je n’ai pas de logement.
— Je n’ai pas de quoi me nourrir.
— Je suis surendetté.
— J’ai des difficultés administratives.
— J’ai des soucis avec mes enfants.
— Je me sens seul.
— Je ressens une souffrance psychique.
— Je souffre d’assuétude.
— Je suis étranger.
— Autre.
« Sur quoi cliquer ? », se demande Georges. « Bon, je ne suis pas étranger, pas toxicomane, j’ai un logement et, même si c’est parfois un peu tendu, je m’en sors plutôt bien avec les gosses. C’est après que ça se corse ! C’est pas vraiment que je n’aie pas d’emploi ni de revenu. Je fais des petits boulots dès qu’une opportunité se présente. Ça me rapporte un peu, mais pas suffisamment pour être tranquille. Du coup, c’est vrai que je tarde souvent à régler les factures à échéance et que j’ai encore quelques dettes. Pour ce qui est de se nourrir, on a vidé le frigo hier et on n’a pas de quoi le remplir pour cette semaine. Heureusement, il reste quelques paquets de pâtes dans le placard de la cuisine. Côté psy, je me sens souvent seul face à tout ça, ça m’angoisse et ça me déprime… S’il n’y avait qu’un problème ! Mais non, ils s’accumulent, se recouvrent et s’agglutinent. Un véritable nœud de vipères. Sur quel bout tirer pour démêler ce bazar ? »
Georges rumine. Derrière lui, les voitures glissent silencieusement sur l’avenue. Il jette un regard furtif. Pourvu qu’aucune connaissance ne le surprenne ici, à cette borne ! Ce serait la honte ! Il imagine déjà les cancans dans la famille ou le voisinage. Il ne supporterait pas qu’ils le regardent autrement, qu’ils changent d’attitude, qu’ils l’évitent avec mépris ou au contraire qu’ils deviennent trop prévenants, trop condescendants. Il relève son col pour que son visage soit un peu moins visible. « OK, mon vieux, ressaisis-toi. Mets de l’ordre dans tes idées. Fais vite, on ne va tout de même pas y passer la nuit ! La raison principale pour laquelle tu es là, c’est ? … C’est ? … C’est qu’il n’y a plus un balle ! Voilà la raison ! Bon, je clique sur “Je n’ai pas de revenu”. On verra bien. »
Vous n’avez pas de revenu ? Nous y remédions.
Vous allez être automatiquement redirigé vers la plate-forme du Centre
Numérique d’Action Sociale.
Merci de nous avoir confié vos difficultés.
Introduisez à nouveau votre code PIN.
Georges s’exécute et l’écran affiche une nouvelle page d’accueil.
Bonjour Monsieur Delville,
Le Centre Numérique d’Action Sociale vous accueille avec compréhension et humanité.
Soyez assuré que nous mettons tout en œuvre pour restaurer votre dignité dans les plus brefs délais.
Dans une première étape, nous vous invitons à lire attentivement les conditions d’utilisation.
1. Nous vous informons que l’ensemble de vos informations personnelles, ainsi que celles des membres de votre famille seront automatiquement croisées et analysées par le logiciel de traitement des métadonnées de la Banque Carrefour de la Sécurité Sociale (BCSS). Ces informations d’état civil, bancaires, fiscales, judiciaires, médicales et autres nous permettront de dresser votre profil numérique. En fonction de votre domicile, de votre situation de ménage, de vos revenus et/ou patrimoines, de l’existence ou non d’ascendants, de descendants ou de tout autre débiteur alimentaire dont les revenus justifieraient le recours à la solidarité familiale, de votre état de santé, de votre citoyenneté et de votre degré d’intégration, nous serons en mesure 1) de déterminer si vous avez droit à une allocation sociale, 2) de préciser sous quel statut ainsi que 3) de fixer le montant de cette allocation.
2. Si vous avez droit à une allocation sociale, celle-ci sera versée mensuellement et automatiquement sur votre compte bancaire :
— si le logiciel de traitement des métadonnées de la BCSS ne détecte aucun changement dans votre situation ;
— si vous nous transmettez, chaque mois, le formulaire numérique d’attestation de votre participation bénévole à un service à la collectivité (cliquez sur ce lien pour accéder à la liste des services accessibles dans votre commune : animation de jeunes, aide aux personnes âgées, environnement, propreté pu

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