De la mélancolie amoureuse à l amour de la mélancolie
227 pages
Français

De la mélancolie amoureuse à l'amour de la mélancolie , livre ebook

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227 pages
Français

Description

La mélancolie dit l'ambiguïté entre le plaisir et la souffrance, entre la vie et la mort. Cet ouvrage explore l'impasse mélancolique que représente l'ineffable de l'être, tout en proposant un focus sur la question de la perte et de la rencontre. À la lumière d'un fonctionnement psychique aussi pathologique qu'ordinaire, la mélancolie nous invite à réfléchir plus largement sur le paradigme du lien : comment envisager la liberté amoureuse sans anéantir la propension à l'amour ? L'auteure nous propose des regards croisés sur la mélancolie perçue par le prisme psychanalytique et artistique. Loin du spleen romantique qui esthétise la difficulté d'être-au-monde, la clinique appréhende une déréliction à déconstruire. C'est dans cet intervalle entre beauté et détresse que se loge une pensée à penser.

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Informations

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Date de parution 09 avril 2020
Nombre de lectures 0
EAN13 9782140146718
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

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Extrait

qu’ordinaire, la mélancolie nous invite à rééchir plus largement sur
Loin du spleen romantique qui esthétise la difIculté d’être-au-
travail traduit cette composition d’inLuences, dans le désir d’approcher la
Ludivine Richaud
DE LA MÉLANCOLIE AMOUREUSE À L’AMOUR DE LA MÉLANCOLIE
Études psychanalytiques
De la mélancolie amoureuse à l’amour de la mélancolie
Études Psychanalytiques Collection dirigée par Alain Brun et Joël Bernat La collectionÉtudes Psychanalytiquesveut proposer un pas de côté et non de plus, en invitant tous ceux que la praxis (théorie et pratique) pousse à écrire, ce, « hors chapelle », « hors école », dans la psychanalyse. Dernières parutions Liliane FAINSILBER,Des poètes, des mystiques et des psychanalystes, essai sur l’écriture, 2020.Bernard ROBINSON,La transmission clinique, 2019. Jean-Paul MATOT,L’homme décontenancé. De l’urgence d’étendre la psychanalyse, 2019.Cléopâtre ATHANASSIOU-POPESCO,Étude du noyau narcissique primaire en psychanalyse d’enfant, 2019. Jeanne DEFONTAINE,Dérives perverses dans le couple et blessures d’enfance, 2019. Françoise PEYPOUDAT,Regards psychanalytiques sur la formulette de tradition orale,Les enjeux de la transmission, 2019. Nafissa BOUKERCHE-DELMOTTE,Clinique et politique de la douleur, 2019. Cléopâtre ATHANASSIOU-POPESCO,L’organisation du moi,À propos du parasitisme,2019. Julien MAUCADE,La radicalisation ou La résurrection du père par le fanatisme, 2018. Jean-Tristan RICHARD,Handicaps, institutions et psychanalyse, 2018. Béatrice BÉRARD, Lydie CAMUS, Laurent KOELBLEN, Marie-Sarah NÉJADI, Dorit PERL, Christine ZIMAMOU-PRIGENT,Perversion – Variations sur un thème, 2018. Catherine COMBASE,Histoire de Psyfa – Psychanalyse et famille, 2018. Radu CLIT,Du trauma à l’écriture, un point de vue sur la création littéraire de Herta Muller, 2018. Claude NACHIN,Abrégé de psychanalyse, 2017.
Ludivine Richaud De lamélancolie amoureuse à l’amour de lamélancolie
© L’Harmattan, 2020 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr
ISBN : 978-2-343-20051-4 EAN : 9782343200514
INTRODUCTIONParfois un cher visage mort grimpe sur les traits de notre propre visage et s’attarde et même se repose. [...] Une douleur saute, au-dessus du temps, au fond du ventre, comme un chat dans l’espace, qui est tellement meilleure que l’oubli. Soudain des larmes qui ne sont pas les nôtres s’écoulent sur nos joues sans que personne les voie mais toi, toi, tu sais que quelqu’un d’autrefois 1 pleure au fond de toi. S’abîmer par amour. « Plonger au fond du gouffre pour 2 trouver » ... quoi ? Son propre trou, abîmé d’avoir confondu 3 « Enfer » et « Ciel » , dans un Moi devenu Autre ? La douleur que transcrivent les sujets amoureux est-elle mélancolique ou préfigure-t-elle de façon inhérente tout sentiment d’amour ? Lorsque l’individu, animé d’une passion qui est prête à s’engloutir dans la déréliction pour s’accomplir, sa structure psychique semble frôler une dépossession qui, non seulement témoigne de sa propre béance, mais tente d’asseoir son manque sur un abîme qui ne fait que renforcer l’écart d’avec lui-même. L’idéal, l’imaginaire, prend le pas sur le réel et l’amour est aimé par-delà sa mort. La forme 1  Pascal QUIGNARD,Dans ce jardin qu’on aimait, Paris, Grasset, 2017, p.80 2  Charles BAUDELAIRE, « La Mort », inLes Fleurs du Mal, Paris, Gallimard, 2005 3 Idem
d’amour mélancolique s’écarte alors du vivant en outrepassant ses limites, ainsi que celles du sujet, par la sauvegarde acharnée du règne d’un absolu si souvent travesti. Le mélancolique serait celui qui est perpétuellement dans une chute amoureuse. Tomber amoureux est pour lui non pas le signe d’une rencontre mais d’une perte. L’objet aimé est absorbé dans une indistinction qui rend la frontière entre les êtres chancelante et dangereuse. Le vertige de cette confusion place le sujet dans une perspective de désirable affliction,par laquelle, comme le dit Quignard dans les vers que j’ai choisis pour ouvrir cette réflexion, introduit de la jouissance dans la douleur, non pas considérée comme une plaie quelconque à panser, mais comme un précieux joyau au scintillement plus fort que son essence, que l’on méconnaît évidemment. L’être est en quête d’une chose mystérieuse qu’il ne peut nommer ; et c’est bien dans cette invisible énigme, pour elle et à cause d’elle, que se loge son plus intense et douloureux désir. Mais l’obscurité de mes propos épars dépasse l’objectif de cette introduction qui est de présenter et de situer mes tentatives d’analyse au sujet de la mélancolie amoureuse. Expression fortement usitée, souvent galvaudée, elle circule dans la société comme une ritournelle dont on connaît tellement bien les paroles à force de les chanter qu’on en a oublié le sens. C’est un thème qui intéresse la psychanalyse, la philosophie, la psychiatrie, l’art, l’histoire, etc. Considérée à la fois comme une pathologie et comme un simple sentiment humain qui parcourt l’existence de chacun, la mélancolie se heurte à des définitions variables selon le regard qui l’observe. Lambotte intègre ces « différents registres d’expressions », dans un trio lexical résumant les variations de perception, allant de « la plainte littéraire [à] l’allégorie iconographique [et au] compte rendu 1 médical » . La dimension pathologique est donc plus ou 1  Marie-Claude LAMBOTTE,Esthétique de la mélancolie, Paris, Aubier-Montaigne, 1999, p.20
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moins élargie selon le point de vue, variable historiquement, culturellement, et selon la discipline. Or, dans ce travail, c’est l’angle psychanalytique qui stimule le chemin de mes recherches, au cours desquelles je vais tenter une approche visant une élaboration centrée sur le déploiement d’une pathologie, et non d’un état d’âme ou spleen romantique. La mélancolie sera donc traitée avec vigilance et rigueur, je l’espère, afin d’interroger son fonctionnement et d’appréhender ses mouvements. Que signifie unJe t’aimeadressé à l’autre pour s’assurer qu’il nous aime aussi ? LeJ’véritablement le sujet ou est-il n’est-il en jeu que pour pointer le besoin que let’intervienne autrement qu’en complément d’objet et fasse dujeun objet de lui-même ? La mélancolie ne semble parler que d’amour, faisant du sentiment unpré-texte qui se décline dans une totalité érigeant un être d’amour en peine, qui est parce qu’il aime. L’ambivalence se situe justement sur ce point de jonction entre le Moi et sa relation avec l’objet aimé, aimé pour d’aveugles raisons, propulsant le sujet dans une rationnelle et mortifère apathie, à en perdre la raison... La mélancolie dit l’ambiguïté entre le plaisir et la souffrance, entre la vie et la mort, à l’image de son étymologie ;khole désignant à la fois la bile, l’encre de la seiche, et au sens figuré l’amertume et la colère – etmelas, noire. La dimension physique et psychique s’entremêle dans l’intimité de son appellation comme pour nous indiquer que l’équivoque sémantique symbolise la duplicité, voire la diversité, de cette affection. L’identique dans l’opposé, et le contraire dans le même, suggèrent l’alternance, ou l’identité, que représentent la mélancolie et la manie, la dépression et l’excitation. Il est d’ailleurs intéressant de constater que cette binarité se profile jusque dans une symétrie entre ce qu’est cette maladie et ce qu’elle fait advenir : l’excès de pensée,
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cause et conséquence, ou encore symptôme et outil d’analyse. Mais la dualité réside selon moi notamment dans ce qui va constituer ma problématique, à savoir, le passage de la mélancolie amoureuse à l’amour de la mélancolie. En quoi la double nature de la lypémanie, corporelle et animique, est-elle corrélée de façon analogue à son double usage, c’est-à-dire son renversement qui paraît demeurer au creux de sa dynamique, constituant peut-être même sa nature ? Comment s’articulent les symptômes de déréliction à leur maintien et quels en sont leurs enjeux ? La pensée se heurte à des difficultés étiologiques et sémiologiques pour examiner le fonctionnement mélancolique et ce qui peut-être en résulte. Les quatre parties suivantes vont ainsi structurer mon étude : 1.:L’expérience mélancolique ou le vide hyperbolique une tentative d’étiologie de la « pathologie amoureuse » ; 2.Entretenir le vide pour rester plein : l’abandon dans la présence de l’absence ; 3.: sentiment nécessaire ou outil deLa mélancolie subversion ? Le paroxysme de la virtuosité mélancolique ou la fixation dans la virtualité ; 4.L’impasse du dédain de la réalité dans l’artifice de l’élégance mélancolique.
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