Des animateurs parlent
152 pages
Français

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Des animateurs parlent , livre ebook

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Description

Rassembler et analyser dans une démarche qualitative les représentations d'étudiants en animation et celles de professionnels de ce secteur, tel est l'objectif de cet ouvrage, résultat d'une recherche réalisée auprès de plus de 700 personnes. L'objectif de l'étude a consisté à tenter de répondre aux questions suivantes : Quelle représentation d'eux-mêmes ? Quelle représentation de la société ? Quelle conscience ont-ils de leur profession ? Quelle identité sociale ? Quelle capacité à élaborer une pensée collective ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2009
Nombre de lectures 256
EAN13 9782296924031
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Des animateurs parlent
Militance, technique, médiaction
Jean-Claude Gillet


Des animateurs parlent
Militance, technique, médiaction


L’Harmattan
© L’Harmattan, 2008
5-7, rue de l’EcoIe polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-06988-6
EAN : 9782296069886

Fabrication numérique : Socprest, 2012
INTRODUCTION
Rassembler les représentations d’étudiants et de stagiaires de formation continue sur une partie de leur activité professionnelle telle qu’elle peut s’exprimer dans des productions écrites imposées par l’enquêteur, voilà ce qui a constitué l’objet de ma démarche.

D’abord qu’est-ce que cela peut signifier d’utiliser la notion de représentation ? Chez Marx, notamment, mais pas seulement, avec l’Idéologie allemande , La misère de la philosophie et Le dix-huit brumaire , on sait qu’elle constitue pour un individu ou un groupe, avec les idées, les productions psychiques en général (les convictions, les valeurs, des sentiments) le reflet de son idéologie : tantôt imaginaire ou illusoire lorsqu’elle est déconnectée des rapports de classes réels, tantôt fondatrice d’une désaliénation possible lorsque le prolétariat pense et agit à partir du travail vivant pour aboutir à la nécessité de la disparition du mode de production capitaliste. Mais il serait vain de croire à l’absence de contradictions chez Marx à ce sujet.

Pour le socio-philosophe Jean Baechler le système des représentations sociales est une idéologie fondée sur un discours lié à l’action, laquelle est élaborée à leur origine sur des passions et des valeurs, le tout s’incarnant au final dans la recherche de la satisfaction des intérêts individuels ou collectifs qui sont liés à leur structuration {1} . Valeurs et passions permettent lorsqu’elles sont partagées collectivement de constituer l’identité d’un groupe défendant sa position dans le champ social.

Edmond Marc Lipiansky, professeur à l’université de Paris X, pense pour sa part que la représentation « est une forme définie de cognition, tendant à constituer un objet précis, ainsi que les mécanismes qui président à sa genèse et à sa structuration », n’excluant évidemment pas qu’elle soit « une image reconstruite et déformée de l’objet réel » {2} . N’oublions pas en effet que Imago en latin signifie imitation, fantôme, copie, ombre, apparence, simulacre . « Modestiæ imagine » : « Sous le masque de la modestie », dit le Gaffiot, citant Tacite. Certes ce débat sur la nature des représentations est riche et ouvre de nombreuses portes explicatives, mais, au-delà des divergences des uns et des autres dans le champ de la psychologie sociale, le fait est reconnu que ces discours donnent donc « corps au langage des groupes en train de se faire et de se défaire » dans la société, comme le résume Jean Maisonneuve {3} .

Cette hypothèse de la possibilité du changement des fonctions jouées par les groupes sociaux nous renvoie au débat plus philosophique que scientifique certes, mais indispensable à la recherche scientifique dans l’établissement de ses postulats, concernant l’évolution des sociétés humaines : dans L’animation professionnelle nous écrivions que l’on voulait souvent imposer des choix réducteurs entre une perspective humaniste et une perspective critique : « Il existe une interaction des déterminants probables et des interventions possibles d’un acteur social (…), donc sujet, lui-même orienté dans ses actions par la situation sociale qui détermine à son tour la nature, l’ampleur et la portée de l’interaction. Il est dès lors envisageable de considérer l’animation comme relevant d’une philosophie de la praxis, c’est-à-dire que les structures sociales dans lesquelles elle s’inscrit sont à la fois des déterminants, mais aussi produits de l’action humaine, la rendant tout à la fois possible et limitée. La praxis, c’est le point de rencontre de ces oppositions entre production et reproduction, c’est l’idée d’un faire qui peut aussi être créateur de réalités et de sens nouveaux ». Façons d’agir et de concevoir sont ici dialectiquement liées {4} .

On comprendra dès lors pourquoi, sur la question des représentations sociales, nous nous rapprochons de la pensée d’Antonio Gramsci à propos des déterminations qui engendreraient de façon exclusive la production cognitive des individus et des groupes. Il écrit : « Si ce concept était vrai, le monde et l’histoire seraient toujours immobiles. En effet, si l’individu, pour changer, a besoin que toute la société change avant lui, mécaniquement, en raison d’une force extra-humaine, aucun changement ne se réaliserait jamais. L’histoire est au contraire une lutte continuelle d’individus et de groupes afin de changer ce qui existe déjà ; cependant pour que la lutte soit efficace ces individus et ces groupes devront se sentir supérieurs à l’existant,… » {5} . C’est en ce sens qu’ils peuvent devenir « éducateurs de la société ». Le point de vue est identique chez Cornelius Castoriadis qui nous explique que l’historicité de la société n’est gouvernée par aucune « ruse de la raison », par « aucune pensée héritée » et que c’est avant tout l’imaginaire des individus et des collectifs qui donne sens aux actions humaines {6} (souvent de façon inconsciente). Même les institutions sont les produits de cette action humaine et peuvent donc être transformées à nouveau, quelles que soient les pesanteurs qu’elles ne manquent de provoquer. On trouvera une pensée proche dans les ouvrages de Jacques Rancière sur la notion d’émancipation en particulier lorsqu’il explique, en opposition à Pierre Bourdieu notamment, que « ce qui entretient la soumission n’es pas tant l’ignorance que le doute sur sa capacité de faire changer les choses {7} ».

Notre curiosité, dans le droit fil du travail que nous présentons dans cet ouvrage, consistait à tenter de savoir, concernant les animateurs, comment « ils se sentaient » à partir des représentations de leur profession que nous allions recueillir. Quelle représentation d’eux-mêmes ? Quelle représentation de la société ? Quel « système d’interprétation {8} » proposent-ils ? Comment disent-ils agir ? Quelle conscience ont-ils de leur profession ? Se rassemblent-ils autour de valeurs communes ? Sont-ils unis sur un sens commun (qui leur est commun) ? Bref quelle identité sociale pour ce groupe des animateurs professionnels ? Montrent-ils une capacité à élaborer une pensée collective ? Traduisent-ils l’idée de la passivité ou ont-ils une vue de transformation de la société, avec un projet mettant en tension les aspirations conscientes de leur action et les conditions concrètes de celle-ci, ainsi qu’une perception de sa limitation éventuelle ? Quelles occultations laissent-ils entrevoir, puisque nous savons qu’un individu ou un groupe a plutôt tendance à donner une bonne image de lui-même, tout en étant amené par ailleurs à intégrer dans sa construction identitaire les représentations positives ou négatives existant dans son environnement social au contact des autres groupes sociaux, bref ce que l’on appelle aussi les effets en retour des interactions ? En conclusion, dans cette compréhension d’eux-mêmes et dans leur interprétation du monde, s’accordent-ils sur un système culturel commun, avec un langage partagé, des symboles à signifier, des repères à organiser ?

Sur cette question de l’identité professionnelle des animateurs qui reste l’axe heuristique permanent de notre travail depuis presque vingt-cinq ans maintenant, peu de travaux d’ordre général ont été réalisés. Une sociologie de type quantitatif existe, tel le travail de Francis Lebond, Un groupe professionnel en évolution ? Les animateurs socioculturels et de loisirs , qui se présente comme une analyse secondaire de l’enquête Emploi (1982-2005), rapport remis à l’INJEP en 2007. Nous avons largement mis en cause dans L’animation en questions les présupposés d’une pseudo théorie fonctionnaliste de prolétarisation accentuée des animateurs et les fondements épistémologiques de cette étude : conditions de recueil des données par l’INSEE tout à fait aléatoires, fondées sur une définiti

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