La nature de la société
158 pages
Français

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La nature de la société , livre ebook

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Description

Depuis la Révolution française, la sociologie s'est présentée et représentée comme une "physiologie" attachée à rendre sa liberté d'allure à un "corps social" préjugé souffrant, voire moribond. Le sociologue scrute enregistre les fièvres civiles et s'efforce d'en comprendre l'origine. Les phénomènes sociaux ne vont pas sans raisons. La sociologie s'agglomère avec l'histoire naturelle jusqu'à s'y confondre pour former avec elle une doctrine connue depuis lors sous le nom "d'organicisme". Cet ouvrage interroge la périodisation de ce mouvement, l'étayage biologique des réflexions menées sur la "nature" de la société et l'inspiration solidariste au coeur de la "question sociale".

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Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2005
Nombre de lectures 58
EAN13 9782336269474
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Collection « Histoire des Sciences Humaines »
dirigée par Claude BLANCKAERT

Fortes désormais de plusieurs siècles d’histoire, les sciences humaines ont conquis une solide légitimité et s’imposent dans le monde intellectuel contemporain. Elles portent pourtant témoignage d’hétérogénéités profondes. Au plan institutionnel, la division toujours croissante du travail et la concurrence universitaire poussent à l’éclatement des paradigmes dans la plupart des disciplines. Au plan cognitif, les mutations intellectuelles des vingt dernières années ainsi que les transformations objectives des sociétés post-industrielles remettent parfois en cause des certitudes qui paraissaient inébranlables.
Du fait de ces évolutions qui les enrichissent et les épuisent en même temps, les sciences humaines ressentent et ressentiront de plus en plus un besoin de cohérence et de meilleure connaissance d’elles-mêmes. Et telle est la vertu de l’histoire que de permettre de mieux comprendre la logique de ces changements dans leurs composantes théoriques et pratiques.
S’appuyant sur un domaine de recherche historiographique en pleine expansion en France et à l’étranger, cette collection doit favoriser le développement de ce champ de connaissances. Face à des mémoires disciplinaires trop souvent orientées par des héritages inquestionnés et par les conflits du présent, elle fera prévaloir la rigueur documentaire et la réflexivité historique.
Dans la même collection
L. Mucchielli (dir.), Histoire de la criminologie française, 1994.
J. Schlanger, Les métaphores de l’organisme, 1995.
A.-M. Drouin-Hans, La communication non-verbale avant la lettre, 1995.
S.-A. Leterrier, L’institution des scienees morales, 1795-1850, 1995.
M. Borlandi et L. Mucchielli (dir.), La sociologie et sa méthode, 1995.
C. Blanckaert (dir.), Le terrain des sciences humaines. Instructions et enquêtes (XVIII e XX e s.), 1996.
L. Marco (dir.), Les revues d’économie politique en France. Genèse et actualité (1751-1994), 1996.
P. Riviale, Un siècle d’archéologie française au Pérou (1821-1914), 1996.
M.-C. Robic et alii, Géographes face au monde. L’union géographique internationale et les congrès internationaux de géographie, 1996.
P. Petitier, La géographie de Michelet. Territoire et modèles naturels dans les premières œuvres de Michelet, 1997.
O. Martin, La mesure de l’esprit. Origines et développements de la psychométrie 1900-1950, 1997.
N. Coye, La préhistoire en parole et en acte. Méthodes et enjeux de la pratique archéologique (1830-1950), 1997.
J. Carroy, N. Richard (dir.), La découverte et ses récits en sciences humaines, 1998.
P. Rauchs, Louis II de Bavière et ses psychiatres. Les garde-fous du roi, 1998.
L. Baridon, M. Guédron, Corps et arts. Physionomies et physiologies dans les arts visuels, 1999.
C. Blanckaert, L. Blondiaux, L. Loty, M. Renneville, N. Richard (dir.), L’histoire des sciences de l’homme. Trajectoire, enjeux et questions vives, 1999.
A. et J. Ducros (dir.), L’homme préhistorique. Images et imaginaire, 2000.
C. Blanckacrt (dir.), Les politiques de l’anthropologie. Discours et pratiques en France (1860-1940), 2001.
M. Huteau, Psychologie, psychiatrie et société sous la troisième république. La biocratie d’Édouard Toulouse (1865-1947), 2002.
J. Rabasa, L’invention de l’Amérique. Historiographie espagnole et formation de l’eurocentrisme, 2002.
S. Moussa (dir.), L’idée de « race » dans les sciences humaines et la littérature ( XVIII e -XIX e siècles ), 2003.
F. Tinland, L’homme sauvage. Homo ferus et Homo sylvestris, de l’animal à l’homme, 2003.
M.-A. Kaeser, L’univers du préhistorien. Science, foi et politique dans l’œuvre et la vie d’Édouard Desor (1811-1882), 2004.
La nature de la société
Organicisme et Sciences Sociales au XIXe Siècle

Claude Blanckaert
Sommaire
Collection « Histoire des Sciences Humaines » Page de titre Page de Copyright Introduction - LES PHYSIOLOGIES DU CORPS SOCIAL Chapitre I - MISÈRE DE L’ORGANICISME Chapitre II - ORGANISER Chapitre III - UNE SOCIÉTÉ DE COOPÉRATION VITALE Chapitre IV - LA CIVILISATION DE L’ORGANISME Chapitre V - LE BON GRAIN ET L’IVRAIE Chapitre VI - MALAISE DANS LA CIVILISATION Chapitre VII - LES INSTITUTIONS PHYSIOLOGIQUES Chapitre VIII - L’HARMONIE DES CONTRASTES Bibliographie Index des auteurs cités
© L’Harmattan, 2004
9782747576918
EAN : 9782747576918
Il faudra faire table rase, disait Charvet de son ton bref, comme s’il eût donné un coup de hache. Le tronc est pourri, on doit l’abattre. [...]
— Cependant, disait à son tour Florent, dont la voix gardait un son lointain de tristesse, cependant si vous abattez l’arbre, il sera nécessaire de garder des semences... Je crois, au contraire, qu’il faut conserver l’arbre pour greffer sur lui la vie nouvelle... La révolution politique est faite, voyez-vous ; il faut aujourd’hui songer au travailleur, à l’ouvrier ; notre mouvement devra être tout social. Et je vous défie bien d’arrêter cette revendication du peuple. Le peuple est las, il veut sa part.
Émile ZOLA ( Le ventre de Paris, 1968 : 201-202)
Introduction
LES PHYSIOLOGIES DU CORPS SOCIAL
La bio-philosophie du « corps social » alimente depuis la Révolution française un discours substantialiste qui prit forme scientifique sous diverses appellations concomitantes, l’histoire naturelle de la société, la physiologie sociale, la physique sociale puis la sociologie. Toutes ces expressions sont équivalentes. Elles varient seulement l’éclairage d’expérience, plus ou moins descriptif ou nomothétique selon les cas, réclamé de la raison publique. La réforme des institutions se découvre solidaire de la cohésion politique dont on espère qu’elle affranchira l’humanité des malheurs qui l’accablent. La sociologie du XIX e siècle y puisa sa raison d’être. Il lui fallait réduire la part d’arbitraire qui, toujours, fausse le commerce des hommes. Elle ambitionnera de découvrir le principe de concordance de leurs actions, l’exacte mesure de réciprocité de leurs intérêts et, dans l’unité du vivant, « un système général de l’ordre où l’on pourrait reconnaître une constitution déclarant les lois fondamentales de l’Etat » (Conry, 1994 : 586). Dans cette ambiance naturaliste, les discours tenus sur la destinée des nations et leur vocation au progrès annulent notre distinction commode entre le scientifique et l’évaluatif.
La sociologie - un néologisme forgé par Emmanuel Joseph Sieyès dans les années 1780 (Guilhaumou, 2002, chap. 5) et impatronisé, bien sûr, à partir du Cours de philosophie positive d’Auguste Comte — n’a jamais paru une science détachée de l’art social, d’une rénovation des mœurs et d’une politique éclairée. De Volney à Durkheim, tous les auteurs qui s’y spécialisent admettront comme pré-requis que le bonheur marche de pair avec le savoir et que « le premier et principal objet de toute institution publique [doit] être le bien de la totalité des membres de la société, et non uniquement celui d’une portion d’entre eux » (Lamarck, 1820 : 90). Mais ce bien si rare et tant bafoué dépend des connaissances puisées dans la nature de l’homme, le système de ses besoins, ses aptitudes altruistes, ses affects collectifs. On ne peut y persévérer à l’aveugle : « la recherche continuelle des vérités auxquelles l’homme social peut espérer de parvenir, lui fournira seule les moyens d’améliorer sa situation, et de se procurer la jouissance des avantages qu’il est en droit d’attendre de son état de civilisation ». Sans ces vérités, ajoute Lamarck (1820 : 89 et 85-86), nul salut, « les actions qui sont en opposition avec ces principes, donnant lieu à des vexations, des perfidies, des injustices et des oppressions de toutes les sortes, qui occasionnent des maux nombreux dans le corps social, et y font naître quelquefois des désordres incalculables ».
Le professeur de zoologie du Jardin des Plantes énonce une exigence commune. Par bien des aspects, une sociologie incipiente, cherchant ses marques, défère ses pouvoirs au regard clinique. La société est semblable au patient qui consulte. Elle est malade, réclame traitement, respect et compassion. Elle se soumet pourtant à la logique marmoréenne des nosographies en vogue. Il ne s’agit pas seulement d’identifier des symptômes. Il importe avant tout d’estimer la réactivité des organes et leur déficience, d’ausculter la vie, d’améliorer la circulation des humeurs. Or le remède prescrit n’agit qu’autant qu’il est conforme. La proto-sociologie s’est présentée et représentée comme une « physiologie » attachée à rendre sa liberté d’allure à un « corps social » préjugé souffrant, voire moribond. Le sociologue du XIX e siècle connaît s

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