La spirale de la misogynie
198 pages
Français

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La spirale de la misogynie , livre ebook

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198 pages
Français

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Description

Qu'est-ce que la misogynie ? C'est d'abord le mépris de la femme, des femmes. Puis ce mépris se transforme quasi naturellement en haine de la femme, des femmes. Enfin la spirale entraîne ces sentiments, attitudes, comportements vers la violence qui est le passage à l'acte trop fréquent de la part de conjoints, d'hommes ordinaires, de religieux intégristes, d'Etats théocratiques etc. C'est cette culture odieuse qu'Alain Piot s'efforce d'analyser et de décrypter.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 novembre 2012
Nombre de lectures 65
EAN13 9782296508330
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Titre
Alain PIOT





La spirale de la
misogynie

Du mépris à la violence

Préface de Djemila Benhabib
Copyright

Illustration de couverture :
Daniel Serrec, Bordeaux




© L’Harmattan, 2013
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.ha rmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-98661-9
EAN : 9782296986619
Dédicace

A Manoël et Joanna

L’absence d’un autrui porte atteinte aux états de conscience, elle les réduit ou les précipite dans d’infinies chimères. Une part de la conscience se structure avec autrui ou avec son absence. L’Autre en revanche c’est comme un cyclone qui surgit, une panique, qui ébranle les belles structures mises en place avec l’autrui ou l’idée qu’on s’en fait. L’Autre, en son extrême, c’est l’impensable.
Patrick Chamoiseau (« L’empreinte à Crusoé »)
Artisanat haïtien
Préface
Djemila Benhabib 1
Après avoir publié son premier brûlot, La diabolisation de la femme – On brûle une sorcière , voilà que le sociologue Alain Piot poursuit dans la même veine avec un deuxième ouvrage aussi courageux que le premier : La spirale de la misogynie . Avec une plume limpide mise au service d’une promenade entre l’anodin et le monstrueux étayée par quelques exemples forts significatifs puisés ici et ailleurs, il met à nu un phénomène infâme qui, loin de disparaître, persiste à chosifier les femmes, d’une génération à l’autre, et qui a trouvé dans les religions monothéistes une justification, voire un système de légitimation. Bref, sous la houlette des ordonnances divines, les femmes n’ont qu’à se tenir à carreau !

Si vous pensiez que la misogynie qui se traduit par des gestes petits et grands, conscients et inconscients, subtils et brutaux, appartient à une ère révolue, eh bien il serait temps de déchanter ! Certes, de nos jours, le phénomène a connu de nombreuses transformations et a subi quelques mutations. Mais est-ce suffisant pour en décréter la mort ? Par prudence, on prédira sa lente disparition ? Enfin, espérons-le. Gardons-nous tout de même du péché d’anachronisme qui consiste à ne voir dans notre société que ces vilains travers. Rappelons-le encore, le statut des femmes a grandement évolué depuis les soixante-dix dernières années. La question n’est pas là. A l’évidence, nous sommes bien loin de l’époque des bûchers et des sorcières. Alain Piot est le premier à le reconnaître, lui qui a consacré un livre à ces femmes « diaboliques ». Allons à l’essentiel. Osons le faire. Car en ouvrant le débat sur la misogynie, nous nous forçons à redéfinir les rapports entre les hommes et les femmes. Du même souffle, c’est notre vision de la société et plus largement celle du monde que nous sommes amenés à revisiter.

A vrai dire, pour qui sait observer la société avec finesse tel que le fait ce sociologue, on décèle aisément des « traces » ici et là de nombreuses manifestations de vieux réflexes « ordinaires » qui vont du simple mépris à la détestation pure et simple du féminin. En analysant les œuvres du chanteur de rap OrelSan ou encore les écrits du chroniqueur Eric Zemmour, Alain Piot montre bien que les porte-voix de la misogynie ont su piocher au cœur même de notre élite culturelle, médiatique et politique pour y planter une pensée machiste et homophobe résolument décomplexée. Car dans notre société démocratique, il suffit de brandir l’argument du « choix » ou de « la liberté d’expression » ou celle du créateur pour justifier et valider une option quelconque. Enfin, ça ne marche pas à tous les coups mais presque ! Vous l’aurez deviné, dans la tête de ces gens-là, la misogynie est une posture intellectuelle comme une autre qui mérite largement sa place.

Comment expliquer alors l’épisode du rappeur OrelSan qui dans Sale pute « se lâche » au milieu d’un chaos amoureux traumatisant et troublant qui, par sa représentation fantasmagorique, renoue avec une vision exécrable de la femme putain , si ce n’est par une certaine indulgence de nombreux médias vis-à-vis de jeunes artistes qui crachent des mots comme on lance des bombes ? Comme si se défouler sur une femme était acceptable. Comme si en appeler à son meurtre était banal. Comme si ce déversement de folie meurtrière pouvait correspondre à une quelconque expression artistique. Si tel est le cas, soyons cohérents. Assumons-nous. Arrêtons de nous surprendre qu’en France une femme sur dix soit victime de violences conjugales et que tous les trois jours une femme en meurt. Cessons de nous indigner du sort des femmes afghanes ou iraniennes. Décrétons que la violence contre les femmes s’inscrit dans « l’ordre naturel » des choses. Et passons à autre chose.

Car il y a des limites à banaliser la misogynie et à s’offusquer de ses « débordements ». En d’autres mots, il est vain de vouloir isoler la main de l’agresseur de sa tête tout comme il est illusoire de découpler la plume de l’encrier. Le passage à l’acte ne constitue qu’une étape d’un long processus jonché de la détestation et du mépris des femmes. Ce processus de déshumanisation de l’Autre, nous dit Alain Piot, repose sur un cercle infernal régi par trois paramètres : le mépris, la haine et la violence à l’égard de la moitié de l’humanité. Cela étant, précise-t-il, la misogynie n’est pas tout à fait la violence ; elle est surtout la détestable porte à travers laquelle viennent s’engouffrer toutes les brutalités qui éclatent à un moment ou à un autre. C’est en cela que le concept de spirale est intéressant. Car une fois le doigt dans l’engrenage, la misogynie nous aspire dans une dynamique infernale dont on connaît le début mais dont ignore la fin. A une vexation en succède une autre. Puis, une parole blessante relaye des propos haineux. S’ensuivent alors des actes de violence. Par la suite, on ne sait plus très bien…

Avant d’aller plus loin, récapitulons : la misogynie c’est d’abord un état d’esprit, une prédisposition véhiculée par une vision du monde qui dévalorise les femmes en les plaçant en bas de l’échelle sociale à laquelle correspond un schéma pyramidal. Au sommet, l’homme, en dessous – bien en dessous –, la femme, et encore plus bas – bien plus bas –, l’homosexuel. Revenons sur cet épisode d’OrelSan, symptomatique d’une époque qui consiste à donner à voir les conséquences d’un manque d’exercice du jugement. Pour que chacun, ici, puisse se faire une idée précise du contenu de Sale pute , en voici quelques paroles :

« Je vous ai vus vous jeter l’un sur l’autre, il passait les mains
Sous ton pull pendant que tu l’embrassais.
Putain j’avais envie de vous tuer, j’étais choqué, j’croyais que tu étais différente des autres pétasses.
J’te déteste, j’te hais
T’es juste bonne à te faire péter le rectum, même si tu disais des trucs intelligents t’aurais l’air conne
J’te déteste, j’veux que tu crèves lentement
J’veux que tu tombes enceinte et que tu perdes l’enfant »

C’était en mars 2009. Une polémique éclate. Des politiques, des artistes, des féministes et des militants des droits de la Personne prennent des positions contradictoires et antagoniques. Les uns évoquent la liberté de l’artiste de créer, les autres évoquent l’incitation à la haine et certains autres demandent ni plus ni moins l’annulation de ses spectacles. Promu au firmament, loin de pâlir, l’étoile de l’artiste scintille comme jamais auparavant. A la fin de la même année, il est nommé au concours des révélations françaises du prix Constantin et est, dans le même temps, élu par les internautes comme étant le meilleur artiste français de l’année pour représenter la France aux MTV Europe Music Awards.
Conclusion ? L’affaire de la Sale pute n’a eu qu’un faible pouvoir mobilisateur. Nos bons réflexes « féministes » se sont-ils assoupis ? Un sentiment de résignation serait-il en train de prendre le dessus ? A moins qu’insulter une femme ne veuille plus dire grand-chose ?

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