Le lémurien : du sacré et de la malédiction (Madagascar)
182 pages
Français

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Le lémurien : du sacré et de la malédiction (Madagascar) , livre ebook

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Description

Les liens multiples et antagonistes que les Malgaches entretiennent avec les lémuriens, tantôt vénérés et sacrés, tantôt inspirant la terreur, ont tous une signification, que cet ouvrage se propose d'approfondir, afin de dégager les rapports que les hommes de la Grande Île, dans la cohérence de leur philosophie, entretiennent avec les lémuriens.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2011
Nombre de lectures 59
EAN13 9782296467989
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le lémurien
Du sacré et de la malédiction
Claire Harpet


Le lémurien
Du sacré et de la malédiction
Madagascar


2 e édition

Préface de Claude Allibert
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-56138-0
EAN : 9782296561380

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Note de l’auteure
Lors de la première écriture de ce travail en 1994, venait de paraître l’ouvrage collectif Lemurs of Madagascar coordonné par Russell A. Mittermeier, Le guide fut réédité en 2010 pour la troisième fois. L’engouement scientifique pour les lémuriens avait pris avec Jean-Jacques Petter dans les années soixante-dix un essor considérable {1} . L’Infra-ordre des Lémuriformes comptait alors 53 espèces et sous-espèces différentes de lémuriens malgaches actuels et 11 espèces et sous-espèces de lémuriens fossiles.
Aujourd’hui, 101 espèces vivantes, réparties en 5 familles et 15 genres, et 17 espèces fossiles ont été identifiées. La taxonomie des lémuriens a été considérablement modifiée ces 10 dernières années notamment par l’amélioration des analyses phylogénétiques. De nombreuses sous-espèces de lémuriens sont passées au rang d’espèces à part entière et des espèces nouvelles ont été découvertes. Si cette nomenclature n’est pas reconnue par l’ensemble de la communauté scientifique {2} , elle révèle quoi qu’il en soit l’extraordinaire diversité et prolifération de formes de ces animaux ainsi que l’intérêt grandissant pour leur conservation.
On estime en 2010 que 90 % du couvert forestier de l’île a disparu au profit des activités agricoles, de l’élevage, des industries minières et de la coupe de bois rares {3} . Les lémuriens qui au fil des siècles de leur évolution avaient conquis toutes les niches écologiques de Madagascar n’occupent plus dès lors que 10 % du territoire malgache, soit 60 000 km {4} . Sur cette surface, on compte 18 parcs nationaux, 5 réserves naturelles intégrales et 23 réserves spéciales.

À la suite de mon premier terrain d’investigation dans le cadre de ma cinquième année d’étude en anthropologie sociale, d’autres travaux ont vu le jour et me permirent de confronter ma première étude sur les relations hommes/lémuriens essentiellement élaborée à partir de références bibliographiques à des données ethnographiques recueillies au fil des terrains depuis une quinzaine d’années. Cette nouvelle édition de Le lémurien : du sacré et de la malédiction suit les évolutions des avancées taxonomiques des Prosimiens de Madagascar et propose une nouvelle grille synthétique des noms vernaculaires des lémuriens. Elle s’est également enrichie de quelques compléments ethnologiques et bibliographiques.
Raha tsy marina izany,
Tsy Zah’mavandy fa Rantzloh.


« Si ce n’est pas vrai,
ce n’est pas moi qui suis menteur,
mais les anciens d’autrefois. »
(Proverbe malgache)
PREFACE
C’est un fait indubitable : Madagascar mise sur le tourisme, et les faiseurs d’argent que sont les officines à voyages utilisent ce qui fait l’originalité du pays pour en tirer des dividendes. Parlez de la Grande Île (la mise en route des clichés est opérée !), et l’on vous sortira aussitôt des brochures, voire des affiches débordant de lémuriens tous plus « mignons » les uns que les autres. Les lémuriens, tous les lémuriens sont à la mode. « Madagascar n’a pas de grandes et belles ruines à vous offrir » (en écho à Madagascar on pense aux temples d’Asie du sud-est), mais sa nature est unique au monde, et sa faune comme sa flore constitue une bonne raison pour s’y rendre.


Pourtant rares ont été les auteurs de monographie depuis que l’on écrit sur Madagascar qui ont jeté un regard sur ces Prosimiens dont l’ancêtre vieux de quarante millions d’années a été retrouvé il y a moins d’un demi-siècle en Amérique. Ce n’était cependant pas par manque d’intérêt pour cet animal dont les chroniqueurs arabes avaient déjà donné le portrait à l’occasion de l’évocation de l’île kmr : « Il y a de même des bêtes à figure ronde, ressemblant à la figure humaine, les oreilles minces et longues, la peau rayée en bandes rouges et blanches » (Dimaski, XIII e siècle). Le Français, Etienne de Flacourt, au milieu du XVII e siècle, en fit le rappel : « C’est un animal grand comme un veau de deux ans qui a la tête ronde et une face d’homme, les pieds de devant comme un singe et les pieds de derrière aussi. Il a le poil frisotté, la queue courte et les oreilles comme celles d’un homme ». La taille de l’animal ne laisse aucun doute sur la nature de l’animal qui aujourd’hui a disparu. Il s’agissait probablement de Megaladapis , espèce subfossile.

Ce n’est pas le moindre mérite de Claire Harpet d’avoir pris conscience de ce vide scientifique. Certes, bien avant elle, d’éminents chercheurs s’étaient intéressés aux comportements « sociaux » de ces lémuriens. Je me rappelle entre autres Ian Tattersall qui passaient ses jours et ses nuits à étudier le Eulemur fulvus de Combani (Mayotte) en 1973-75 pendant que je menais des prospections archéologiques en petite terre ; mais aussi Alison Jolly qui s’intéressa aux populations de la réserve de Berenty le long de la Mandrare, sans bien sûr oublier tous nos collègues français (Petter, Hladik) des institutions nationales.

Claire Harpet se fixa pour devoir préalable – et cela seulement dans un premier temps – de recenser dans la littérature toutes les occurrences des relations entre hommes et lémuriens, quand bien même elles fussent maigres, ce qui étaient souvent le cas. Son intention était de couvrir tout le territoire et toutes les espèces de lémuriens, et de dresser ce tableau compilatoire du savoir.

Le dépouillement opéré, sa démarche consista à tenter d’essayer de dégager des dominantes comportementales non pas des lémuriens comme l’auraient fait nos collègues spécialistes des lémuriens, mais bien de l’homme, des groupes malgaches, en fonction des groupes animaux rencontrés et des lieux.

On peut se demander pourquoi l’étude de cette relation entre l’homme et les lémuriens n’a pas été menée plus tôt, tant on sait combien les Malgaches entretiennent avec certains animaux (zébu, crocodiles) des relations privilégiées, même si elles peuvent être redoutées.

Il est possible que cette réticence à opérer ce questionnement sur toute forme de vie ressemblant trop à l’homme tienne au fait qu’il déclenche un rapport ambigu entre fascination et peur. Comme si ce que l’on regarde parce que « cela » nous ressemble et qui nous regarde en retour engageait notre propre identité. Les navigateurs arabes, nous l’avons dit, rencontrèrent ce problème. Ils le résolurent parfois en reconduisant la réponse qu’y avaient donnée les populations autochtones de l’Insulinde qui faisaient des grands singes (orang-outan, gibbon) des hommes et non pas une espèce différente. La preuve en est apportée par le nom qu’ils avaient donné à l’un deux (orang-outan, « homme des forêts »).

C’est peut-être cette ambiguïté due à cette relation d’interface entre altérité et parenté qui est à l’origine du problème, d’une forme de renoncement, non pas à étudier l’autre, le lémurien, mais à retarder l’analyse de l’approche relationnelle hommes-prosimiens.

Il va de soi que Claire Harpet n’entend pas se contenter de ce travail de collectes d’indices souvent ponctuels et de cette première réflexion qui a déjà pourtant permis de dégager deux comportements antithétiques diamétralement opposés, prenant en compte la relation duelle aux ancêtres (fastes) et aux esprits maléfiques.

Elle entend, à partir de ces jalons dégagés de la littérature anthropologique, lancer des enquêtes de terrain à Mayotte et dans le nord-ouest de Madagascar pour vérifier les affirmations livrées par nos illustres prédécesseurs. Le temps s’étant écoulé, il est probable que des changements se seront opérés, des atténuations auront sans doute rendu moins apparents les constats faits au début du siècle. Il n’est pas non plus exclu que ses enquêtes relèvent des improbabilités factuelles. Il importera alors de faire le départ entre ce qui est le résultat du changement ou le constat de l’erreur. L’écart sera plus ou moins grand entre les deux relevés, mais c’est l’interprétation de cet éc

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