Pensée mythique et représentations sociales
183 pages
Français

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Pensée mythique et représentations sociales , livre ebook

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Description

Mythes et représentations sont des formes distinctes de la pensée sociale. Le présent ouvrage rassemble les contributions d'anthropologues et de psychosociologues, en vue de préciser quelques-unes des modalités de la relation établie actuellement entre ces deux formes de pensées. Dans l'espace de vie d'une tribu indienne du Brésil, ou au vue de l'incarnation de l'identité de genre dans la littérature féminine contemporaine, les liens entre mythes et représentations sociales mis à jour s'avèrent multiples et diversifiés.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juillet 2010
Nombre de lectures 446
EAN13 9782296702813
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Pensée mythique
et représentations sociales
Ce livre a été à l’origine édité au Brésil (2009), sous le titre Pensamento Mitico e Representaç õ es Sociais , à la collection « Éducation et Psychologie » (Vol. 13), avec l’appui des Éditions de l’Université Fédérale du Mato Grosso, de l’Université de Cuiabá et du Programme de la Fondation de Soutien à la Recherche de l’État du Mato Grosso.

Photographie couverture : Mains de Takuman Kaiamurá, travaillant en tant que pajé (Lucia Shiguemi Isawa Kawahara)


© L’Harmattan, 2010
5-7, me de l’École-polytechnique ; 75005 Paris

http:// www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-12324-3
EAN : 9782296123243

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Sous la direction de
D enise J ODELET et E ugênia C OELHO P AREDES


Pensée mythique
et représentations sociales


Préface de
Serge M OSCOVICI
À la mémoire de Gerard Duveen et de Cândido Proc ó pio Ferreira de Camargo, qui nous ont enchantées intellectuellement et nous ont réunies par les liens de l’affection.
Préface Serge M OSCOVICI
Tout le monde connaît le destin que Paul Valéry prévoyait, en 1919, aux civilisations : " Nous autres civilisations nous savons maintenant que nous sommes mortelles. Nous avons entendu parler de mondes disparus tout entiers, d’empires coulés à pic avec tous leurs hommes et tous leurs engins. " Cette phrase était de toute évidence un avertissement mais aussi une mise en question d’une conviction millénaire, remontant à Platon, celle que les idées et à un moindre degré les mythes sont éternels. On suppose ainsi que dans l’histoire de toutes les civilisations ou sociétés destinées à la mort, il y aurait une mémoire donnée, non pas acquise, et servant de principe de vie.
Ces remarques, sommaires et superficielles, permettent cependant de préciser le sentiment et le motif de l’attirance vers le mythe, malgré tout ce qui nous en éloigne et nous incite à l’éviter. Est-ce la raison pour laquelle il semble parfois si étrange d’accepter l’idée d’un mythe actuel, de le penser authentique sans toutes ces morts, toutes ces sociétés absentes dont témoigne sa présence ? L’exotisme est une qualité dont on est ravi. on aime à penser que ceux qui ont conçu le mythe nous font signe et nous préparent à comprendre leur existence, leur culture et à en tirer tous les fruits. Bergson leur a réservé une fonction fabulatrice et Platon évoque des histoires contées par des enfants ou des vieilles femmes.
Il est possible de dire, d’une façon un peu différente, que le mythe est une autre façon d’accéder à la culture, à une culture autre, en rêve. Un rêve éveillé, certes, dans lequel on trouve des personnages, des évènements qui auraient pu avoir lieu et une intention qui transforme habilement les évènements, les faits et les représentations. on y trouve aussi une trame de détails véritables, une composition qui les métamorphose discrètement en métaphores de la langue du conteur. C’est donc qu’il y a des règles. c’est exactement le contraire de ce que, dans mon esprit, ils auraient dû être, à savoir : des illusions, des fabulations de culture qui ne peuvent être connues que du dehors.
Toutes ces raisons, ou plutôt ces impressions, un peu vagues certes, m’ont empêché de souscrire avec enthousiasme à cette idée d’une recherche sur les mythes actuels ou actualisés lorsque Eugênia Paredes et Denise Jodelet m’en ont parlé pour la première fois. Ou plutôt je n’ai pas d’emblée saisi quelle pouvait être la contribution d’une telle recherche à la théorie des représentations sociales. Toujours est-il que je m’y suis intéressé dès le début, parce qu’il me semble que la psychologie sociale et la théorie en général, gagnent toujours lorsque l’on se consacre à l’étude des phénomènes concrets, à l’observation holiste des groupes ou pour employer la notion de Mauss, à des " phénomènes sociaux totaux ".
Une telle démarche est exactement le contraire de ce qui se pratique le plus souvent en découpant la réalité sociale, en isolant des catégories qui n’ont d’autre existence que le nom qu’on leur donne. On accède alors à des réalités fragmentées et fragmentaires, coupées du monde qui se crée autour d’elles et bien éloignées de l’arrière-plan de notre existence sociale. À procéder de la sorte, une grande partie de la psychologie sociale se contente de créer des entités, des êtres abstraits qui ne peuvent être identifiés dans la réalité d’aucune manière, ni par la théorie, ni par l’observation, ni par l’expérience vécue. Et dans les tourbillons de détails, dans les ambiguïtés d’un lieu abstrait de la réalité véritable, on a l’impression de perpétuer la triste image qu’a donnée le positivisme. il est possible de rompre avec cette image, saisir dans le vif la matière d’un monde vécu. C’est ce que fait ce livre et tel est certainement l’un de ses intérêts. Mais il en a un autre sur lequel je vais m’arrêter plus longuement.
C’est un fait que mythos et logos sont les deux thêmata souverains de notre culture. Et ce qui enchante le lecteur de ce livre, c’est la façon dont chaque auteur avance, tantôt attiré par l’un, tantôt attiré par l’autre, l’importance qu’il attache à l’aspect métaphorique du premier ou à l’aspect réflexif du second. Nous nous intéressons d’autant plus à ces " ruses ", ces "métis", pour reprendre un terme que Vernant (1965) utilise pour parler, entre autres, du combat de la raison et du mythe, à la fois opposés et semblables, que nous ne pouvons pas être trop précis sur la frontière entre le mythos et le logos. On éprouve alors le sentiment de celui qui passe clandestinement une frontière. Il sait qu’il l’a passée mais sans l’avoir vue, sans savoir même où elle est. C’est le passeur qui lui dit qu’il l’a passée. Peu à peu on s’aperçoit que la frontière entre mythos et logos est une affaire d’imprégnation culturelle. Bref qu’il s’agit d’être capable d’accepter de bonne foi des habitudes et des coutumes, même si l’on a le sentiment de n’avoir pas tout compris. Quelque chose comme l’expérience de Lévi-Strauss dans Tristes tropiques !
Je me suis donc rendu compte que l’on ne peut aborder l’étude des mythes en toute innocence, spontanément, non seulement parce qu’il y faut un sixième sens, mais surtout parce que leur champ est vaste, la littérature les concernant immense. Il y a longtemps que les philologues et les anthropologues, plus récemment les psychanalystes, ont tiré de l’étude des diverses familles de mythes, la partie la plus magnifique de leur œuvre. Ils ont lutté d’invention avec ce qu’il y a de plus singulier et de plus durable dans la pensée humaine et qui n’a jamais cédé sa place à, ni reculé devant, la religion, la philosophie ou la science. Et je crois vraisemblable que l’usage du mythe "serves to stabilize a set of ideas and images that might otherwise be blown apart by their own contradictions achieving such stability by designating the’Muse’otherwise paradoxical act of speech as something one can accept as absolutely true in spite of its ambiguous and internal contradictions" (Lincoln, 1999, p. 21).
Qu’il s’agisse d’investiguer des mémoires révolues, des sédiments ou des coutumes ou bien des normes indispensables aux objectifs d’un groupe, d’une société, dans ce livre on tient les mythes pour acquis, plutôt que d’en faire un objet de doute ou de polémique. Les philosophes grecs n’avaient pas une grande estime pour les "fabricateurs de mythes. " Mais ils ne dénonçaient pas les mythes dont la durée et la solidité étaient supérieures à celles de la philosophie. À quoi était due la permanence ou l’unité des mythes ? Vraisemblablement à l’autorité de leurs assertions, du discours qui se représente comme "something to be beleived and obeyed" (Lincoln, 1999, p. 17).
Sans doute les mythes dont il est question dans ce livre sont dispersés dans le temps ou l’espace

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