Penser le sida
217 pages
Français

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Description

Les contributeurs de cet ouvrage ont essayé de penser le sida en croisant leurs analyses philosophiques, historiques et littéraires pour collaborer à la compréhension d'un phénomène dont les sciences biomédicales n'ont pas l'exclusivité de la lecture. Elles mettent en évidence les implications éthiques et politiques de la pandémie du sida, l'instrumentalisation idéologique dont elle peut être l'objet, les stratégies locales qui sont adoptées .

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 octobre 2010
Nombre de lectures 102
EAN13 9782296706736
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

PENSER LE SIDA
© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’École-polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-12794-4
EAN : 9782296127944

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Sous la direction de
Hubert MONO NDJANA
et Lucien AYISSI


PENSER LE SIDA

Analyses croisées d’une pandémie
PRÉFACE
Le Laboratoire d’Éthique et des Droits de l’Homme (LABETH & DH) de l’Université de Yaounde I vient enfin de sortir sa première publication collective d’envergure : Penser le Sida. Analyses croisées d’une pandémie. Avec cet ouvrage, le LABETH & DH a atteint l’objectif qui était le sien : se conférer une plus grande visibilité, conquérir une plus grande crédibilité auprès de l’opinion tant nationale qu’internationale.
Il était temps, en effet. Depuis que les préoccupations sur le bien-être, la sécurité et les droits de l’homme ont connu un regain d’intérêt au niveau des grandes institutions internationales, la pensée éthique s’est trouvée accaparée par des amateurs dont l’activisme constituait plutôt une trahison de l’éthique. Des organismes publics, parapublics, ou ceux de la société civile, et parfois l’État en personne, se sont mis eux aussi à s’activer autour de ce concept à la mode, de façon administrative, et sans avoir l’expérience nécessaire.
L’éthique, nul ne doit l’ignorer, a été créée et enseignée depuis toujours par les philosophes, le premier d’entre eux étant Aristote, à travers son Éthique à Nicomaque , puis son Éthique à Eudème. La tradition s’est poursuivie par les grands maîtres que furent Spinoza ( Éthique ), Kant ( Fondements de la métaphysique des mœurs ), ou Freud ( Malaise dans la civilisation ), et bien d’autres encore.
La tentative de l’État qui, un moment, a bien voulu essaimer partout des structures administratives d’éthique, s’est avérée infructueuse en ne produisant aucun rapport consistant en ce domaine. La présente publication apparaît donc comme une réconciliation de l’éthique avec sa vérité, une reprise en main par des experts intellectuellement outillés.
Le mal dont on parle est si préoccupant, dans le monde actuel, que le LABETH & DH a décidé d’en faire son premier grand souci à travers cette publication à caractère interdisciplinaire, qui lui confère une profondeur d’analyse inégalée par rapport aux littératures similaires en la matière. Ceux qui s’intéressent aux problèmes de société devraient normalement avoir recours à l’expertise de ce laboratoire.
Mais le Sida, en effet, n’appartient pas seulement à la médecine. Assimilable à la peste du Moyen Âge, cette maladie contemporaine de la postmodernité entraîne le sentiment d’une angoisse immense qui s’abat sur une humanité désemparée, impuissante à conjurer la certitude de la mort. Cette impuissance nous conduit tout droit à la métaphysique de l’angoisse, le sursis étant désormais la modalité existentielle la plus assurée. Jamais, en effet, la prémisse du plus célèbre des syllogismes : « Tout homme est mortel… » n’a été aussi vivace, aussi impressionnante que devant l’incapacité thérapeutique actuelle. Plus les complexités de la maladie tracent les limites de la science, plus augmente l’intensité du désespoir.
S’il n’existe donc pas un remède au mal physique, ne peut-on pas au moins trouver quelque palliatif pour apaiser le patient dans la dimension morale et culturelle de sa maladie ? Ne peut-on pas élaborer une stratégie existentielle d’accompagnement ?
À travers le présent essai, des chercheurs d’horizons divers ont essayé d’explorer des pistes dans cette direction. Dans la première partie qui s’occupe plus particulièrement de la philosophie, mon éminent collègue de l’Université de Yaoundé I, le professeur Lucien Ayissi a décrit une véritable phénoménologie des défis qui entourent le Sida, en esquissant une philosophie susceptible de les relever : la biophilosophie. Dans sa seconde étude, « Penser le Sida dans l’intervalle de du pathos et de l’éthique », l’auteur met les deux termes en liaison avec le logos, en partant du pathos du Sida au pathétique du sidéen, pour s’achever sur une éthique de la solidarité.
Le docteur Jacques Chatué, de l’Université de Dschang, a choisi, quant à lui, de discuter les thèses de Michel Foucault concernant la maladie en général et la sexualité en particulier. Son collègue de Dschang, le docteur André-Liboire Tsala Mbani, a travaillé sur « Le Sida ou la légitimation du dévoiement de la fonction procréatique du sexe », tandis que le docteur Dominique Ndeh, traitait de la maladie et de la dignité humaine en abordant tous les contours de cette relation. M. Thobie-Emmanuel Mbassi Ondoa, un doctorant talentueux, s’est penché sur l’amour à l’épreuve du Sida, en analysant le déclin des mythes et l’exploitation des angoisses. L’autre doctorant, Antoine-Serge Bell a plutôt traité utilement du préservatif dans la lutte contre le Sida.
Dans la deuxième partie de l’ouvrage, consacrée aux analyses historiques, nous retrouvons le docteur Robert Kpwang qui a mis en rapport le Sida et le problème de l’explosion démographique de l’Afrique noire. « Le Sida… s’est, en moins d’une décennie, transformé en une « pandémie génocidaire » pour la partie subsaharienne du continent noir », écrit-il. Quant au docteur Célestin-Christian Tsala Tsala, il analyse les activités de la célèbre ONG camerounaise, « Synergies Africaines », créée par l’épouse du président de la République du Cameroun, et son engagement face à la pandémie du Sida.
La littérature n’a pas été en reste dans cette chevauchée intellectuelle, puisque la troisième partie s’appelle précisément Analyse littéraire , au singulier parce qu’il s’agit de la très intéressante étude du professeur Bernard Mbassi, de l’Université de Yaoundé I, intitulée « Les maladies sexuellement transmissible s : le Sida et la littérature camerounaise ». Il s’y déroule toute une galerie de figures qui vont de l’amour érotique à l’exhibition nymphomaniaque, sans oublier le défilé des femmes fatales qui sèment la désolation à leur passage. Un bon raccourci, en tout cas, des nouveaux auteurs de la littérature camerounaise contemporaine, en même temps que l’ouvrage constitue, dans son ensemble et pour ainsi dire, un bel aperçu de la métaphysique du Sida, qui restaure à la fois l’espoir, le goût et les raisons de vivre.

Professeur Hubert Mono Ndjana
Directeur du LABETH & DH
I ANALYSES PHILOSOPHIQUES
PHILOSOPHIE DE LA VIE ET ÉTHIQUE DE L’ALTÉRITÉ FACE AUX DÉFIS DU SIDA par Lucien AYISSI
Université de Yaoundé 1 (Cameroun)


S’il n’existe pas encore ce qu’on pourrait appeler la philosophie du sida, une réflexion bioéthique, géronto-éthique et thanato-éthique centrée sur ce phénomène est indispensable, dans la mesure où le sida, plus précisément celui qui se transmet par voie sexuelle, n’entretient pas seulement la peur de la mort dans les consciences ; il s’accompagne aussi des défis que l’humanité doit relever par rapport à son aspiration à bien vivre, à bien vieillir et à bien mourir. La philosophie de la vie et l’éthique de l’altérité censées pouvoir relever les multiples défis que le sida lance à une humanité soucieuse de persévérer dans son être et d’améliorer l’expression de la qualité de sa vie dans le temps et dans l’espace, doivent, si elles veulent être pourvues de sens et de pertinence, produire des solutions appropriées aux problèmes d’ordre métaphysique, hédoniste et eudémonique qui se posent à l’homme, tant le traitement de la question des aphrodisia se rapporte non seulement au souci relatif à la préservation de l’être humain dans le temps, mais aussi à celui de la place que le plaisir sexuel doit occuper dans la construction de l’humanité de la vie et dans la quête du bonheur.
Nous n’allons donc pas nous intéresser à la problématique génétique du VIH/SIDA. C’est pourquoi nous ne nous poserons pas, suivant les termes de Leibniz, la question de savoir s’il s’agit d’un mal métaphysique, physique ou moral, car nous pensons que les défis de cette pandémie ne peuvent pas être suffisamment relevés par l’humanité si celle-ci se contente de dire, par exemple, que le sida a une origine métaphysique, donc qu’elle est due à notre finitude ontologique. L’établissement de son origine métaphysique, physique ou morale n’est pas d’un grand intérêt dans la résolution du problème du conatus. Il ne s’agira pas non plus de procéder à la phénoménologie de l’expérience du sida, de la souffrance et de l’angoisse dont cette pandémie est nécessairement assortie. Sans prétendre que la problématique théologico-métaphysique qui articule le souffrir au faillir est dépourvue de sens, nous allons l’éviter, car notre dessein est surtout de soumettre à la sanction de la philosophie de la vie et de l’éthique de l’altérité le rapport de la conscience bien portante à la conscience malade ou infectée par le VIH/SIDA, dans un contexte encore défini par la crise des certitudes scientifiques et thérapeutiques dans la résolution du problème de santé que pose cette pandémie.
I- Les défis du sida
Les défis auxquels la philosophie de la vie et l’éthique de l’altérité doivent faire face s’inscrivent dans le cadre global de tous ceux que la vie doit relever, afin d’apporter des réponses métaphysiques et éthiques correspondant à sa préservation et à l’amélioration qualitative de ses divers modes d’expression dans le temps et dans l’espace. Bien que la mort relève, en tant que programme métaphysique nécessaire, de la constitution biologique de tout être, elle obsède la vie humaine et ajoute, avec le sida, à ses modes d’expression macabres. Comme l’un des symptômes de la précarité de la vie, de la vulnérabilité de l’être et de sa finitude ontologique, le sida est, en dépit des progrès de la médecine et de l’essor des biotechnologies, ce dont les défis sont encore difficiles à relever par une humanité soucieuse d’améliorer, au moyen de la technoscience, la qualité de sa vie et de pro

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