Sociologie de Jean-Marc Ela. Les voies du social
216 pages
Français

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Sociologie de Jean-Marc Ela. Les voies du social , livre ebook

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Description

Ce livre montre que l'oeuvre monumentale de Jean-Marc Ela se comprend à la lumière de deux paradigmes : l'épistémologie de la transgression et la libération de l'homme africain. Ce sont deux acquis paradigmatiques qui constituent le socle sur lequel repose une sociologie que l'auteur synthétise en trois grands champs : une sociologie de la théologie africaine, une sociologie du "monde d'en bas" et une sociologie de la production scientifique en Afrique.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2011
Nombre de lectures 270
EAN13 9782296465008
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

SOCIOLOGIE DE JEAN-MARC ELA Les voies du social
© L’Harmattan, 2011 5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-296-55141-1 EAN : 9782296551411
MOTAZE AKAM SOCIOLOGIE DE JEAN-MARC ELA Les voies du social
LHarmattan
Études Africaines Collection dirigée par Denis Pryen et François Manga Akoa Dernières parutions Léon Modeste NNANG NDONG,L’effort de guerre de l’Afrique. Le Gabon dans la deuxième Guerre mondiale (1939-1947), 2011. Joseph MBOUOMBOUO NDAM (sous la dir.),La microfinance à la croisée des chemins, 2011. Benoît AWAZI MBAMBI KUNGUA,De la postcolonie à la mondialisation néolibérale Radioscopie éthique de la crise négro-africaine contemporaine,2011.Anne COUSIN,Retour tragique des troupes coloniales, Morlaix-Dakar, 1944, 2011. Hopiel EBIATSA,Fondements de l’identité et de l’unité teke,2011. Patrice MOUNDOUNGA MOUITY,Transition politique et enjeux post-électoraux au Gabon, 2011. Baoua MAHAMAN,La nouvelle génération d'Africains. Quand les idéalistes d'hier plient face au système, 2011. Ghislaine SATHOUD,Rendez aux Africaines leur dignité, 2011. Théodore Nicoué GAYIBOR,Sources orales et histoire africaine, 2011. Jean-Christophe BOUNGOU BAZIKA,Entrepreneuriat et innovation au Congo-Brazzaville, 2011. Papa Momar DIOP,Guide des archives du Sénégal colonial, 2011. Pius NGANDU Nkashama,Guerres africaines et écritures historiques, 2011. Alphonse AYA,La fonction publique congolaise. Procédures et pratiques, 2011. e e Dieudonné MEYO-ME-NKOGHE,Les Fang auxXIXetXXsiècles, 2011. Mohamed Lamine.GAKOU,Quelles perspectives pour l’Afrique?,2011. Olivier LOMPO,Burkina Faso. Pour une nouvelle planification territoriale et environnementale, 2011.
A Jean - Marc Ela. En hommage respectueux pour une production des connaissances partant des terroirs et réalités africains.
INTRODUCTION J’ai décidé d’écrire ce petit livre sur Jean-Marc Ela parce que je l’ai connu concrètement comme aîné et collègue à l’Université de Yaoundé I en 1994. Si pour la première fois, je l’ai rencontré comme informateur durant son séjour pastoral à Tokombéré, dans l’Extrême-Nord du Cameroun en 1981 alors que je menais moi-même des recherches sociologiques dans la zone, je dois dire que mon expérience avec lui au Département de Sociologie et Anthropologie de Yaoundé I où il était alors Maître de Conférences, chargé de l’animation scientifique m’a beaucoup marqué. A la rentrée de l’année académique 1994-1995, le chef de notre Département, le regretté professeur Jean Mfoulou, lui confia la lourde tâche de refondre en les rénovant, tous les programmes d’enseignement de sociologie et d’anthropologie. Il me fit grandement honneur en m’associant à ce travail hautement académique et scientifique qui me permit de découvrir un homme d’une force de travail inépuisable et inimaginable. Nous avons abattu ce travail en moins de trois jours, allant parfois jusqu’au petit matin partant de certains après-midi. Dans les lignes qui suivent, je m’essaie à rendre hommage à cette sommité intellectuelle, académique et scientifique en tentant de synthétiser son œuvre prolixe et complexe dans la mesure où elle puise dans une pluridisciplinarité qui allie à la fois théologie, sociologie, anthropologie, histoire, démographie, politologie, économie, philosophie, littérature, art, etc. L’on comprend par là que c’est une tâche qui est loin d’être aisée, facile et simple. Mais, je trouve ce travail ardu passionnant, et surtout, enrichissant parce que Jean-Marc Ela a toujours été pour moi une grande lumière : il m’a été difficile de passer dix minutes avec lui sans rien apprendre de nouveau dans les domaines de la sociologie, de l’anthropologie, de la politologie, bref de la culture. Je suis convaincu que savant camerounais, africain ayant disparu à l’orée de ce 21è siècle, Jean-Marc Ela fait aujourd’hui figure de l’héritage intellectuel, culturel et scientifique africain tout
comme Alioune Diop et Cheikh Anta Diop dont il se réclamait. Au-delà de son décès survenu à Van Couver au Canada le 26 décembre, 2008, il demeure à jamais une figure emblématique de la nouvelle pensée critique africaine qui ne cessera d’inquiéter, au sens philosophique du terme, les consciences du monde de tous bords. Rien ne m’étonnerait que son œuvre, comme celles de Kwamé Nkrumah, Cheikh Anta Diop et d’autres ancêtres et pionniers de la réflexion critique africaine, souffre d’une conspiration de silence qui serait alors un défi à relever par la jeune génération d’africains acquise à la nouvelle pensée critique de notre continent. Qui était Jean-Marc Ela ? « Bout d’homme » au regard étincelant, pénétrant et surtout intelligent, Ela était un homme complexe. Ceci d’autant plus qu’au plus fort de sa maladie, il confia ceci à l’un de ses proches : « on ne me connaît pas », une prévention contre les hagiographes de tous bords qui tenteraient de s’approprier et de récupérer sa personnalité après sa disparition. Ma préoccupation n’étant pas hagiographique, je peux dire que Ela était de cette race extrêmement simple, humble, mais totalement rigoureuse. Ce n’était pas l’homme qui faisait les choses à moitié ou qui aimait jouer à l’équilibriste : avec lui, ou c’était ça ou ce n’était pas ça. C’était un homme de principe et de conviction. Tout chez lui passait au crible d’une réflexion sans complaisance. Très engagé pour des bonnes causes, il écoutait et observait beaucoup, parlait très peu, prenait son temps pour suivre attentivement les autres sans distinction de rang, de statut ou de classe. Il n’était pas rare de le voir sillonner à pied les quartiers populaires, voire la ville même de Yaoundé. « Un sociologue doit toujours marcher à pied pour bien observer », me lâcha-t-il un jour de pluie. Très naturel, le matériel ne lui disait pas grand-chose comme on peut le voir chez la plupart d’autres abbés ou encore collègues universitaires : durant son séjour à l’Université Laval au Québec où il bénéficia pour un temps d’un statut de professeur invité, les étudiants ne le reconnaissaient que par ce petit nom : « l’africain qui porte le boubou ». Ela est né à Ebolowa le 27 septembre 1936 et a passé son enfance à Ngoa-Zip I, son village paternel, en pleine forêt équatoriale. C’est le voisin du village du romancier et ex-ministre Ferdinand Ôyônô, qui lui était de Ngoa-Zip II et du conseiller à la 8
présidence de Paul Biya, René Owona, tous deux aussi décédés aujourd’hui. Socialisé par cet environnement villageois, il devint jusqu’à la fin de son cycle primaire, un tendeur de pièges patenté. Il en tendait une vingtaine par jour. Plus jeune des neuf enfants qu’eurent son père et sa mère, il était issu d’un milieu familial riche. Son père était le produit de l’école française et le frère de ce dernier - son oncle - celui de l’école allemande. Les deux hommes avaient constamment les livres entre leurs mains ; tandis que son père aimait la littérature française dont il savourait les auteurs classiques, son oncle faisait de même des auteurs allemands. Ceci marqua profondément le jeune Ela qui, en 1946, quitta Ngoa-Zip pour aller s’installer dans la maison que son père a construite en ville, à Ebolowa. Passionné par l’école, son premier instituteur fut évidemment son père en ce temps de guerre où les denrées de première nécessité manquaient : le savon, le sel, le sucre étant devenus d’une extrême rareté. Ela a toujours eu en mémoire, les souvenirs des moments forts des années 1947. Il dit justement à propos : «Lorsque nous avons vécu au Cameroun, principalement au Sud du pays, l’époque passionnante de la lutte pour l’indépendance et que dans nos régions nous étions passionnément impliqués avec nos parents dans cette lutte. Tous petits à l’école primaire, nous nous permettions de chanter l’hymne national qui avait été interdit par les Français dans nos écoles, car le Cameroun avait son hymne dès 1933 : « Ô Cameroun berceau de nos ancêtres, etc. ». Cet hymne composé par des jeunes d’une école protestante dans notre région, était devenu le symbole de notre patrimoine culturel et historique et faisait partie de notre mémoire. Ces luttes pour la libération constituent une tradition d’indocilité et de résistance qui a marqué mon imaginaire […]. Quand je m’engage pour un certain nombre de choses, je me demande si cette mémoire des luttes ne s’est pas réactualisée, d’une certaine manière, à travers mes différents itinéraires. «Qui suis-je ?... Une conscience aiguë de ce que représente la situation de nos sociétés et venant d’une famille où l’on n’a jamais partagé passivement, les 9
injustices, les humiliations, le mépris et la domination, je me considère un peu comme l’héritier de ces cultures de 1 résistance». Après des études primaires commencées dans la ville d’Ebolowa en 1946, pratiquement à la fin de la deuxième guerre mondiale dont Jean-Marc Ela dit n’avoir jamais connu les causes à l’époque, il obtint son certificat d’études en 1951 et s’en alla à Edéa, en Sanaga Maritime où il fut admis à un petit séminaire sous la direction d’un religieux, un père franco-suisse, après avoir réussi à l’examen d’entrée passé à Ebolowa. Quelque temps après, il revint dans un petit village situé à 60 km de Yaoundé, dans l’actuelle Région du Centre du Cameroun appelé Akono où dans un autre petit séminaire - celui de Mvaa - tenu par des religieux français, il passa son cycle secondaire jusqu’en classe de terminale. Le jeune Ela y vécut commeboyles prêtres catholiques ; chez c’est-à-dire ce garçon qui dresse le lit du prêtre, fait la propreté dans sa chambre, vide son pot de nuit, apporte de l’eau pour sa toilette, cire ses chaussures, bref ce garçon à tout faire…S’il reconnaît qu’une telle expérience lui a permis d’acquérir une rigueur morale, il dit avoir compris également que ces gens - les prêtres - tant craints par la société sont aussi bien sales : «En étant boy, j’ai découvert l’aspect caché de cet 2 univers, Les ombres qu’on ne soupçonnait pas». Après son baccalauréat Série A (Lettres), Ela fut admis, cette fois-ci, au grand séminaire d’Otélé d’où, après un voyage par bateau, arriva en France pour continuer ses études supérieures. Si au petit séminaire d’Akono, le jeune camerounais fut marqué par deux enseignants dont l’un positivement et dispensant les cours
1 Durant son séjour à Hull, près d’Ottawa, sur les chemins de son exil au Canada en août 1995, Jean-Marc Ela a réalisé des entretiens avec le sociologue togolais Yao Assogba, les données de cette courte biographie sont largement tirées de ces derniers. Voir, Yao Assogba :Jean- Marc Ela : le sociologue et théologien africain en boubou, Paris, L’Harmattan, 1999, 107 p. p : 26 2  Yao Assogba :op. cit. p : 31 10
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