Un village sarde contemporain
147 pages
Français

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Un village sarde contemporain , livre ebook

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147 pages
Français

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Description

Cet ouvrage s'intéresse aux luttes du quotidien, autour des ressources locales, dans le milieu agricole d'un village sarde dans la deuxième moitié du 20e siècle. Deux réseaux y sont en concurrence : l'un composé d'éleveurs ayant des liens avec les notables terriens, l'autre composé d'éleveurs autonomes s'associant entre eux de façon informelle mais qui parviennent aussi à des résultats économiques remarquables. Les enjeux de pouvoir qui régissent un village sarde ressemblent à ceux des quartiers populaires urbains.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2012
Nombre de lectures 50
EAN13 9782296479357
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Un village sarde contemporain :
pouvoirs et contrepouvoirs
Logiques Sociales
Collection dirigée par Bruno Péquignot

En réunissant des chercheurs, des praticiens et des essayistes, même si la dominante reste universitaire, la collection Logiques Sociales entend favoriser les liens entre la recherche non finalisée et l’action sociale.
En laissant toute liberté théorique aux auteurs, elle cherche à promouvoir les recherches qui partent d’un terrain, d’une enquête ou d’une expérience qui augmentent la connaissance empirique des phénomènes sociaux ou qui proposent une innovation méthodologique ou théorique, voire une réévaluation de méthodes ou de systèmes conceptuels classiques.

Dernières parutions

Philippe ZARIFIAN, La question écologique , 2011.
Anne LAVANCHY, Anahy GAJARDO, Fred DERVON (sous la dir.) Anthropologies de l’interculturalité , 2011.
André DUCRET et Olivier Moeschler (sous la dir. de), Nouveaux regards sur les pratiques culturelles. Contraintes collectives, logiques individuelles et transformation des modes de vie, 2011.
Frédéric MOLLE, Servir. Engagement, dévouement, asservissement… les ambiguïtés , 2011 .
Bernard FORMOSO, L’identité reconsidérée. Des mécanismes de base de l’identité à ses formes d’expression les plus actuelles , 2011.
Hermano Roberto THIRY-CHERQUES, Survivre au travail , 2011.
Isabelle LOIODICE, Philippe PLAS, Núria RAJADELL PUIGGROS (sous la dir. de), Université et formation tout au long de la vie, Un partenariat européen de mobilité sur les thèmes de l’éducation des adultes , 2011.
Maxime QUIJOUX, Flaviene LANNA, Raúl MATTA, Julien REBOTIER et Gildas DE SECHELLES (sous la dir. de), Cultures et inégalités. Enquête sur les dimensions culturelles des rapports sociaux , 2011.
Nathalie GUIMARD et Juliette PETIT-GATS, Le contrat jeune majeur. Un temps négocié , 2011 .
Christiana CONSTANTOPOULOU (sous la dir. de), Récits et fictions dans la société contemporaine , 2011.
Raphaële VANCON, Enseigner la musique : un défi , 2011.
Fred DERVIN, Les identités des couples interculturels. En finir vraiment avec la culture ?, 2011 .
Christian GUINCHARD, Logiques du dénuement. Réflexions sociologiques sur la pauvreté et le temps , 2011 .
Jérôme DUBOIS (sous la dir. de), Les usages sociaux du théâtre en dehors du théâtre , 2011.
Isabelle PAPIEAU, La culture excentrique, de Michael Jackson à Tim Burton , 2011.
Aziz JELLAB, Les étudiants en quête d’université. Une expérience scolaire sous tensions, 2011 .
Odile MERCKLING, Femmes de l’immigration dans le travail précaire , 2011.
Andrea Tribess


Un village sarde contemporain :
pouvoirs et contrepouvoirs


L’Harmattan
© L’HARMATTAN, 2011
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-56645-3
EAN : 9782296566453

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Avant-propos
En Sardaigne, au mois de juin, il fait chaud. L’air est chargé de l’odeur des plantes méditerranéennes. Devant vous, il y a des champs jaunâtres à perte de vue. Les ondulations douces des collines s’assemblent par-ci, par-là, en des buttes couronnées d’une ruine ou de « nuraghi » encore cachés sous quelques rochers. De temps à autre un bêlement lointain accompagné de sons de clochette enrichit l’harmonie paisible du paysage. Vous approchez. Une vague de parfum animal, mélange subtil, vous atteint. Vous percevez quelques interpellations brèves que lance un berger qui cherche à attraper une bête. Il la prend, la coince entre ses deux jambes et extrait le fruit de ses labeurs : le lait de brebis, pour faire le pecorino, ou encore su casu marciu , tant apprécié par les Sardes (et nettement moins par le visiteur).
Laissez-vous inviter chez le berger. On emmène une brebis à la maison. Elle s’est cassé la patte. Dans la cour, la femme prépare le terrain pour l’abattre. Les enfants regardent la scène d’un air curieux, exécutant de temps à autre une tâche ordonnée sèchement par l’un des parents. Le père installe la brebis sur une table, lui met le couteau à la gorge. Le sang commence à ruisseler. Pas de bruits, seules quelques brèves convulsions sont les dernières expressions vivantes de la brebis. Difficile de dire à quel moment survient le passage dans l’autre monde. A la vue de la grimace que vous avez du mal à cacher, le berger avoue : « Je n’aime pas tuer les brebis. Moi, je suis éleveur, je préfère les élever. Mais elle n’avait aucune chance avec sa patte cassée. La vie est faite comme ça. » Quelques instants encore et la brebis ne bouge plus. Afin de ne pas abîmer la peau lors du dépeçage, le berger incise l’extrémité d’une patte, et soufflant dans la coupure, il gonfle l’animal. Comme un ballon. Du coup, la bête prend presque un aspect comique : les quatre pattes dressées en l’air, elle devient de plus en plus volumineuse, la peau se tend, devenant très lisse. Pour les opérations suivantes, on vous prie de tenir le corps désormais sans vie. Car, gonflé, il a tendance à rouler. Une fois la peau délicatement enlevée, c’est le moment de sortir les entrailles. Avec l’expression d’un vif regret, le berger constate qu’elle portait. Sa femme détourne le regard et s’en va à l’intérieur de la maison. Elle aussi est enceinte. Peu à peu, la tension tombe, toute la famille passe aux gestes habituels de son travail commun. Le berger sort le foie, vous le tend pour le goûter, et, content de votre frayeur, il l’avale tout cru en riant de votre air et de la plaisanterie réussie.
Plus tard, vous passez à table. Il y a du jambon, du pain, su carasau , la ricotta, fromage frais issu du jus de la première fermentation, de la viande, du vin et tant d’autres choses. Une deuxième occasion de choquer le visiteur de la ville se présente : c’est le moment de goûter su casu marciu , espèce de fromage vieux, fort et crémeux agrémenté de ses propres vers. Afin de corser la chose, on vous raconte quelques anecdotes autour de ce fromage local, des vers qui sautent et ainsi de suite. Un peu malgré vous, vous dégustez cette délicatesse qui, au fond, est un bon fromage. Juste un peu fort. La conversation s’anime autour de l’événement de la journée. Il y a grand regret d’avoir abattu une brebis portante. Dans la foulée, on parle des grossesses humaines, des enfants handicapés pour lesquels on préférerait appliquer l’euthanasie, mais en aucun cas il ne faudrait interrompre la gestation. Elle est sacrée. Cela ferait du mal à la femme portante.
Plus tard encore, des amis se sont joints à l’assemblée, on bavarde plus allègrement, on sort la guitare, on se met à chanter d’une voix plaintive ces airs avec leurs harmonies aux intervalles incongrus (tout du moins pour celui qui aurait appris la musique occidentale classique). Le chant sarde conte de longues histoires :
a duru a duru tsia Mariola… (chanson en dialecte barbarigino )

Une année plus tard, en 1990, nous avons visité un village où se tenait une foire aux bestiaux. C’était un jour de pluie au mois d’avril. Ce temps mitigé n’empêchait pas que cette foire fut aussi une grande fête. Sur un gril des sardines doraient pour assurer le ravitaillement de tous ces gens qui se saluaient les uns les autres, échangeaient des nouvelles, passaient d’un groupe à l’autre, invitaient l’étrangère que nous étions à prendre un verre de vin et quelques biscuits faits maison.
La foire occupait un terrain vague rectangulaire. Dans des petits enclos provisoires étaient exposées des brebis toutes blanches, un peu mouillées, mais considérées comme les plus beaux exemplaires de leur espèce : les ovins sélectionnés de race Sarde. Leurs éleveurs s’empressaient de montrer plus en détail la qualité de leurs bêtes lorsqu’on s’en approchait. Un mois plus tôt, nous apprit-on, certaines des brebis avaient même gagné un prix au salon international de l’agriculture à Paris. A un moment donné un curé, abrité par un parapluie tenu par quelqu’un qui l’accompagnait, est passé d’un enclos à l’autre pour verser de l’eau bénite sur ces vénérables bestiaux. Son tour accompli, il disparut aussi discrètement qu’il était apparu, sans bruit. Par ailleurs il y eut des bêlements de brebis, des tintements de clochettes, certes, mais surtout un brouhaha de voix dont une, amplifiée par un haut-parleur, dén

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