Trois matrices : de l Être au Moi puis au Je ; le pari de Pascal au risque de Lacan...
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Trois matrices : de l'Être au Moi puis au Je ; le pari de Pascal au risque de Lacan...

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Description

Il s'agit de questionner comment peut émerger le Je quand il peut s'extraire de l'être et du Moi. Blaise Pascal nous propose ainsi de parier sur l'existence d'un Autre transcendant capable de nous garantir une jouissance, mais qu'est donc au juste que cette jouissance et est-elle seulement accessible ? La réponse est-elle la même du temps de Pascal et de nos jours . Voilà vers quoi nous conduiront ces réflexions...

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Publié le 17 mars 2013
Nombre de lectures 449
Langue Français

Extrait

Ceci est la reprise d'un texte prononcé au séminaire de Mulhouse, le 25-02-2010
eCommentaire autour de la 10 séance (p.153 – 166)
1du séminaire XVI intitulé « D'un Autre à l'autre ».
Trois matrices : de l'Être au Moi puis au Je ;
2 le pari de Pascal au risque de Lacan...
Au cours du séminaire XVI mené de 1968 à 69, Lacan énonce le 05 février 1969 que
l'enfer qui nous est éventuellement promis après la vie, n'est pas à chercher bien loin :
nous y sommes déjà !
3Le gain de tout, comme l'écrivait Pascal dans son pari est une formulation qui porte la
marque d'un excès, d'un surcroît, d'un ''au-delà'' selon la formule freudienne de l'Au-
4delà du principe de plaisir . C'est un pari après lequel nous courons plus ou moins, et
duquel il est difficile de se départir en totalité. Y compris peut-être, pour ceux qui
annoncent ne viser qu'une relativité dans leur vie, un juste milieu. La tentation est
toujours présente en quelque endroit, de faire, de cette objectif relatif, un absolu à
atteindre – absolu retombant, dès lors, dans le filet d'un aboutissement. Celui-ci, en ce
qu'il serait satisfaction ultime, conduirait à l'idée de complétude et donc d'unité (idée
voisine de l'Un des mystiques).
1 Lacan J., D'un Autre à l'autre, (1968-69), Le séminaire, livre XVI, Seuil, 2006
2 Image du titre : Triptyque de John Donne, par Hans Memling (XVe siècle), Londres, National Gallery.
3 « Examinons donc ce point, et disons Dieu est, ou n'est pas... Que gagerez-vous ?... Il faut parier cela n'est pas
volontaire, vous êtes embarqué... Pesons le gain et la perte en prenant croix, que Dieu est. […] Vous avez deux
choses à perdre : le vrai et le bien, et deux choses à engager : votre raison et votre volonté, votre connaissance et
votre béatitude ; et votre nature a deux choses à fuir : l'erreur et la misère. Votre raison n'est pas plus blessée, en
choisissant l'un que l'autre, puisqu'il faut nécessairement choisir. Voilà un point vidé. Mais votre béatitude ?
Pesons le gain et la perte, en prenant croix que Dieu est. Estimons ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez
tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien. Gagez donc qu'il est, sans hésiter ». (Blaise Pascal, Pensées, 1670)
4 Freud S., Au-dela du principe de plaisir (1920), Essais de psychanalyse, Petite Bibliothèque Payot, 2001,
p.47-128
1Nous nourrissons donc, notre vie durant, par de vaines tentatives, tantôt dans l'intimité
de nos pensées, tantôt au cœur même de nos actes, le secret espoir, de raccourcir avec
cet Un, la distance qui nous en sépare pourtant irrémédiablement. Les symptômes
névrotiques sont aussi là pour en témoigner.
Ce tout, cet Un, cet objet, nommons-le selon la formulation pascalienne « objet ɛ »,
conserve toujours une longueur d'écart par rapport à la complétude et à notre pente
vers elle. Cet Un, Lacan l'approche, au travers de son « objet a » à lui (sa trouvaille
selon ses termes), et il en illustre une facette corrélativement aux démonstrations
numériques du rapport qu'induit la suite mathématique de Fibonacci. L'invariance de
ce rapport fibonaccien (1/a) est par ailleurs également retrouvée dans celui de la divine
proportion du nombre d'or, souvent désigné par la lettre φ (phi) en l'honneur du
sculpteur Phidias qui l'aurait utilisé pour concevoir le Parthénon.
A côté du pari de Pascal, le séminaire D'un Autre à l'autre se déploie à partir de
l'énoncé suivant : «L'essence de la théorie psychanalytique est un discours sans
parole». Cette phrase apparaît d'emblée comme paradoxale, car, comment un discours
pourrait-il ainsi se tenir sans parole ? Je pense qu'il s'agit, pour bien l'entendre, de la
compléter par le fragment suivant : « … qui puisse le clore ». En effet, avant de revenir
plus loin sur la distinction linguistique saussurienne entre ''signifié'' et ''Signifiant'', il
s'agit de se déprendre de l'idée qu'un individu, en parlant, puisse clore quoi que ce soit
dans son discours à en énoncer un ''terme'' qui, à l'instar du dernier stade de soins
palliatifs, pourrait se qualifier de ... ''terminal''. Une telle parole bouclant ainsi l'Un du
sens, n'existe pas, et c'est précisément ce que pointe comme faille, la théorie et la
pratique psychanalytique du « parlêtre », à savoir qu'il y a toujours quelque chose à en
redire. C'est cela, d'après moi, l'essence d'un discours sans parole, un paradigme de
5l'idée d'ouverture – le concept hégélien d'Aufhebung – se centrer sur le mouvement
qu'induit le discours, afin d'y entendre, en creux, le défilé du désir.
Embarquons donc ensemble pour quelques pirouettes métaphysiques. Attachez vos
ceintures car nous tournerons souvent autour du pot en risquant d'y croiser quelques
trous d'air...
*
Perdu dans une attention flottante et laissant mes idées, librement associer, Les trois
matrices, (titre que Lacan donna à cette dixième séance de son séminaire), m'ont
d'abord évoqué les trois Grâces.
Ces déesses grecques représentaient le charme, le désir et le plaisir. Elles étaient filles
de Zeus et de la nymphe Eurynomé et illuminaient comme toutes les femmes de
l'antiquité, la vie des hommes. Les fêtes qu'elles présidaient se déroulaient à certains
moments de l'année dont les dates étaient définies à l'avance. Le séminaire mulhousien
que nous poursuivons encore cette année, s'éclaire ainsi pareillement d'une gracieuse
programmation tout comme l'étaient en leurs temps les illustres mardis parisiens de
Charcot et les mercredis viennois de Freud.
5 Concept difficilement traduisible, évoquant, pour Hegel, la conjonction triple d'une conservation, d'une
suppression et du mouvement même entre ces deux ''états''. L'Aufhebung est aussi bien un ''moment'', que
l'illusion d'un temps qui se suspendrait, comme en témoigne son étymologie (momentum, le mouvement).
2
Les trois grâces : Tableau du
peintre Raphaël, 1504, au
musée Condé à Chantilly.
Ces nymphéas m'ont ensuite conduit vers les trois Parques, divinités, maîtresses du
sort des hommes, équivalentes romaines des Moires grecques (Clotho, Lachesis et
Atropos). Elles vivaient dans un palais où les destinées des hommes étaient gravées sur
le fer et sur l'airain, de sorte que rien ne pouvait les effacer. Cette notion de trace et
d'effacement reviendra, plus loin en écho à ces propos.
Des Parques, nous mettrons le cap vers Arthur Rimbaud et son autre « Je », puis vers
le cogito cartésien avec son doute élevé au rang de certitude. Nous survolerons
Nietzsche en ce qu'il appuiera la division intime du sujet. La pensée ontique de
Heidegger se profilera à l'horizon éclairant à jour frisant l'Être de Parménide et des
présocratiques. Nous amorcerons alors une descente à la verticale de l'Angleterre
shakespearienne avec la tirade d'Hamlet, et je tenterais de poser mon vieux coucou sur
la piste de Victor Hugo et d'Edgar Poe dans leurs contributions poétiques et littéraires à
la métaphore.
Du ETRE et du JE :
L' « ɛ » du pari de Pascal ou l'objet « a » de Lacan sont-ils ''inclus'' dans le sujet, avant
6même que ce sujet soit pensant ou même parlant ? Le sujet (dans son acception
7psychanalytique), serait-il même l'émanation d'un objet cause de désir , venu d'un lieu
Autre, ou de ce que l'on pourrait nommer d'un ''grand prédécesseur'' ? Cet Autre ayant
plongé le futur sujet avant même sa conception, dans un bain de langage, indiquerait-il
l'endroit d'où le sujet ne pensera pas selon l'inversion lacanienne du cogito, « Je pense
8 où je ne suis pas donc je suis où je ne pense pas. » ?
Pour la linguistique, le verbe être, est rattaché à la vie, au vivant, Asus en sanskrit. Ce
verbe a dérivé plus tard en esti, est, ist – ce qui en soi et à partir de soi se tient et va –
le « subsistant-par-soi » de Saint-Thomas d'Aquin, l'Eigenständig (littéralement, la
6 Lacan J., L'instance de la lettre, Écrits I, p.492
7 Melm

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