A la veille de la présidence française de l'Union européenne, à partir du 1er juillet 2000, le rapport indique les réformes indispensables en vue de l'élargissement (réforme de la Commission européenne et du nombre des commissaires, prise de décision au sein du Conseil, extension du vote à la majorité qualifiée, réforme du Conseil de l'Union européenne, présidence du Conseil et de l'Union). Il propose des avancées pour faire grandir le projet politique européen (flexibilité indispensable grâce aux coopérations renforcées, proposition de nouvelles impulsions dans l'Union élargie, rôle du Parlement européen et hiérarchie des normes, respect des principes fondateurs de l'Union). Il réfléchit sur les moyens de donner à l'Union européenne de nouveaux fondements (fontières ultimes de l'Union, charte des droits fondamentaux, nouveau Traité fondateur, accélérations à donner dans certains domaines, tels que la coopération judiciaire et la lutte contre les fraudes).
Paternité, pas d'utilisation commerciale, partage des conditions initiales à l'identique
Langue
Français
Extrait
N2454 ______
ASSEMBLE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIME LGISLATURE
Enregistr la Prsidence de l'Assemble nationale le 5 juin 2000.
RAPPORT D'INFORMATION
DPOS
en application de l'article 145 du Rglement
PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES TRANGRES(1)
sur la rforme des institutions del'Union europenne
ET PRSENT
PARM. JEAN-LOUISBIANCO,
Dput
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(1) La composition de cette commission figure au verso de la prsente page.
Union europenne
La Commission des Affaires trangres est compose de :M. Franois Loncle.,prsident; MM. Grard Charasse, Georges Hage, Jean-Bernard Raimond,vci-erpsidents; MM. Roland Blum, Pierre Brana, Mme Monique Collange, ,secrtaires Mmes Michle Alliot-Marie, ; Nicole Ameline, M. Ren Andr, Mmes Marie-Hlne Aubert, Martine Aurillac, MM. Edouard Balladur, Raymond Barre, Dominique Baudis, Henri Bertholet, Jean-Louis Bianco, Andr Billardon, Maxime Bono, Andr Borel, Bernard Bosson, Pierre Brana, Jean-Christophe Cambadlis, Herv de Charette, Yves Dauge, Patrick Delnatte, Jean-Marie Demange, Xavier Deniau, Paul Dhaille, Mme Laurence Dumont, MM. Jean-Paul Dupr, Charles Ehrmann, Jean-Michel Ferrand, Raymond Forni, Georges Frche, Jean-Yves Gateaud, Jean Gaubert, Valry Giscard d'Estaing, Jacques Godfrain, Pierre Goldberg, Franois Guillaume, Robert Hue, Mme Bernadette Isaac-Sibille, MM. Didier Julia, Alain Jupp, Andr Labarrre, Jean-Claude Lefort, Guy Lengagne, Franois Lotard, Pierre Lequiller, Alain Le Vern, Bernard Madrelle, Ren Mangin, Jean-Paul Mariot, Gilbert Maurer, Jean-Claude Mignon, Charles Millon, Mme Louise Moreau, M. Jacques Myard, Mme Franoise de Panafieu, MM. Etienne Pinte, Marc Reymann, Franois Rochebloine, Gilbert Roseau, Mme Yvette Roudy, MM. Ren Rouquet, Georges Sarre, Henri Sicre, Mme Christiane Taubira-Delannon, MM. Michel Terrot, Mme Odette Trupin, MM. Joseph Tyrode, Michel Vauzelle, Philippe de Villiers.
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SOMMAIRE ___
PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR
INTRODUCTION
I - LES RFORMES INDISPENSABLES EN VUE DE L'LARGISSEMENT
A la Commission europenne 1) Le statu quo : un commissaire par Etat membre 2) La vraie rforme : une Commission restreinte 3) Restaurer lautorit de la Commission
B La prise de dcision au sein du Conseil 1) Les nouvelles pondrations possibles 2) Les avantages de la double majorit simple
C L'extension du vote la majorit qualifie 1) Les diffrentes extensions possibles 2) Diviser les dispositions du trait en trois catgories
D La rforme urgente du Conseil de l Union 1) La rduction du nombre des formations du Conseil enfin dcide 2) La rforme des mthodes de travail 3) La dissociation des deux fonctions du Conseil 4) Le ddoublement du Conseil Affaires gnrales en deux formations
E. Prsidence du Conseil et prsidence de l Union europenne
II - DES AVANCES SOUHAITABLES POUR FAIRE GRANDIR LE PROJET POLITIQUE EUROPEN
A Les cooprations renforces, une flexibilit indispensable33 1) Les dispositions du trait dAmsterdam sont dissuasives 2) Les propositions de la Commission : des avances trop modres qui nassouplissent pas un cadre gnral trop strict. 3) Lavenir des cooprations renforces B Une "avant-garde" pour l'Union europenne ? 1) Comment donner de nouvelles impulsions politiques dans lUnion largie ? 2) Comment former le centre de gravit de lUnion largie ? C Rle du parlement europen et hirarchie des normes 1) Limiter le nombre des membres du Parlement 2) Llection dun quota de dputs sur des listes europennes : une ide sduisante complter 3) Mieux dfinir le rle lgislatif du Parlement
D Le respect des principes fondateurs de l Union
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III- RFLEXIONS POUR DONNER A L'UNION EUROPENNE DE NOUVEAUX FONDEMENTS47 A - Les frontires ultimes de l'Union47 B - La Charte des droits fondamentaux44 C - Un nouveau trait fondateur51 D - Des "acclrations" donner dans certains domaines53 1) L'Europe de la dfense53 2) L'Europe de la justice54 3) Crer enfin un statut de socit europenne57
CONCLUSION
TRAVAUX DE LA COMMISSION
EXAMEN EN COMMISSION
ANNEXE : Extrapolation du systme actuel de composition du parlement europen et de la commission, ainsi que de la pondration des voix au conseil
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PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR
La France va exercer, compter du 1er juillet 2000, la prsidence de l'Union europenne. A ce titre, elle devra amener leur conclusion les travaux de la Confrence intergouvernementale.
Pour ce faire, il lui faudra obtenir l'accord des quinze Etats membres sur un nouveau trait qui rformera les institutions pour, d'une part, leur permettre de fonctionner efficacement et, d'autre part, les adapter l'largissement.
Face cet objectif simple, de nombreux obstacles se dressent.
Les positions des Etats membres sont divergentes sur les chapitres incontournables de la rforme. Quels sont ceux-ci ? Une vraie rforme de la Commission europenne, l'instauration d'une nouvelle rgle de majorit pour les dcisions du Conseil, l'extension du vote la majorit qualifie de nouveaux domaines, la "rnovation" du Conseil et des cooprations renforces facilites pour permettre quelques Etats d'aller plus vite ou plus loin.
La composition de la Commission doit tre limite vingt membres, et la meilleure solution serait mme de la restreindre quinze membres. L'autorit de son Prsident doit tre renforce, notamment en lui permettant d'influencer la nomination des commissaires, voire de les nommer lui-mme, ou encore de s'opposer une candidature. Il lui reviendrait alors d'quilibrer gographiquement les nominations, et de s'assurer que tous les Etats membres auront un commissaire au cours d'une priode donne. Le caractre collgial de la Commission, qui est l'une des sources de sa lgitimit, doit absolument tre restaur.
La prise de dcision au sein du Conseil doit tre modifie afin que l'largissement ne se traduise pas par une pondration encore plus dsquilibre en faveur des petits pays. La solution simple et lisible pour les citoyens est le systme de la double majorit simple, une dcision tant adopte si elle runit la majorit des Etats et la majorit de la population totale de l'Union. Ce systme reflte bien la double nature de l'Union, la fois Union des peuples et des Etats. Par ailleurs, certaines dcisions pourraient tre soumises une majorit "super qualifie", ce qui leur confrerait une lgitimit accrue.
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L'extension du vote la majorit qualifie de nouveaux domaines doit tre ralise, pour des raisons videntes d'efficacit, mais elle doit s'accompagner d'une distinction loi/rglement, qui devient indispensable ce stade de la construction europenne.
Au titre des rformes indispensables encore, figure la rforme des mthodes de travail du Conseil de l'Union (pour laquelle des mesures de bon sens ont t proposes dont on s'tonne qu'elles ne soient pas encore appliques), la dissociation des deux fonctions, lgislative et de coordination, du Conseil, et enfin, le ddoublement du Conseil "Affaires gnrales" en deux formations.
Enfin, la prsidence semestrielle tournante de l'Union apparat insatisfaisante et en mme temps irremplaable certains gards. Il faut d'ailleurs noter qu'elle ne reviendra plus que tous les 13 ans et demi dans une Union 27. Il faut engager une rflexion, mme longue et complexe, sur l'hypothse d'une Prsidence de l'Union europenne, installe dans la dure et plus visible pour les citoyens et les Etats tiers.
Une nouvelle solution pourrait tre mise en uvre consistant confier la prsidence des 16 formations du Conseil un pays diffrent pour une dure de cinq ans, par exemple. Un tel systme permettrait de compenser, pour certains pays, l'absence de commissaire europen, et offrirait une chance d'agir "dans la dure" dans un domaine donn : environnement, transports, justice et affaires intrieures ou autre.
Les cooprations renforces doivent tre ouvertes : une coopration devrait pouvoir tre engage par un tiers des Etats membres ou un nombre d'Etats reprsentant un tiers de la population.
Arriver un accord sur ces questions est difficile et en mme temps indispensable. Mais s'en contenter ne suffira ni viter l'enlisement ni donner un nouveau souffle la construction europenne.
Mme amlior, le mcanisme des cooprations renforces ne sera pas suffisant pour relancer le projet politique europen. C'est pourquoi il faudrait prvoir dans les traits une base juridique permettant la formation d'une "avant-garde" pour l'Union. Une simple modification de l'article 306 du trait instituant la Communaut europenne suffirait dans un premier temps. La France et l'Allemagne devraient aussi mener ensemble une rflexion pour dterminer dans quels domaines l'on pourrait aller plus vite ou plus loin.
Ensuite, un nouveau texte fondateur, constitution ou autre, s'impose. En s'inspirant de la mthode du trait de Rome, l'on devrait mettre
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en place un groupe de sages qui pourrait tre prsid par deux personnalits politiques, par exemple Jacques Delors et Richard von Weizscher.
L'Union doit aussi se prononcer quant une dfinition de ses frontires ultimes pour l'avenir prvisible, afin d'viter sa dilution.
Enfin, une rflexion doit s'ouvrir sur l'instauration d'une hirarchie des normes et la redfinition du rle lgislatif du Parlement europen.
Il convient d'ouvrir rapidement des rflexions sur ces diffrentes questions, afin de permettre aux ambitions europennes de s'exprimer pour promouvoir un nouveau projet politique europen. Seule cette ambition permettra une vritable renaissance de l'Union europenne.
Mesdames, Messieurs,
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Les reprsentants des quinze Etats membres de lUnion europenne ont officiellement ouvert, le 14 fvrier dernier, la Confrence intergouvernementale (CIG) charge de prparer une nouvelle rforme des institutions europennes, puisque la clture de la confrence prcdente Amsterdam avait laiss inachev le chantier de ladaptation de lUnion ses nouvelles missions, dune part, et son futur largissement, dautre part.
Les Quinze se sont engags, lors du Conseil europen de Berlin des 24 et 25 mars 1999, pouvoir admettre les premiers pays candidats partir de 2002. Aussi la rforme institutionnelle pralable l'largissement doit-elle entrer en vigueur cette date. Cette rforme devrait donc, en toute logique, tre termine sous la prsidence franaise, soit en dcembre 2000, car il faut un dlai de prs de deux ans pour accomplir les procdures de ratification. Cest le calendrier que se sont impos les Chefs dEtat et de Gouvernement des quinze Etats membres lors du Conseil europen d'Helsinki des 10 et 11 dcembre derniers.
Les conclusions adoptes par les Quinze Helsinki envisagent la rforme des institutions en des termes assez ouverts. Elles prvoient dabord que la confrence examinera les trois grandes questions laisses en suspens lors de la conclusion du trait dAmsterdam, et qui ont t prcises dans le mandat de ngociation tabli par le Conseil europen de Cologne de juin 1999. Il sagit de la taille et la composition de la Commission europenne, la pondration des voix au sein du Conseil et lextension ventuelle de nouveaux domaines du vote la majorit qualifie du Conseil. Il est en outre prvu que le Conseil europen de juin 2000 pourra ventuellement dcider, aprs examen du rapport de la prsidence portugaise sur les travaux en cours, d'inscrire dautres sujets lordre du jour de la confrence intergouvernementale.
Certains Etats membres, comme certains pays candidats, avaient suggr de reporter 2004 la rforme fondamentale des institutions. Il est vident, au contraire, que lapprofondissement doit prcder llargissement , si lon veut une Union europenne en tat de marche avant de passer une nouvelle tape de son histoire qui va la transformer profondment.