Revenu minimum et redistribution optimale des revenus : fondements théoriques
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Pièce maîtresse du système de protection sociale, le RMI occupe une place essentielle dans le système redistributif français. Ses effets potentiellement désincitatifs sur l'activité de ses bénéficiaires font toutefois débat entre ceux qui privilégient l'insertion sur le marché du travail au nom d'un principe d'efficacité ou d'inclusion sociale et ceux qui défendent le droit de toute personne à un revenu minimum au nom d'un principe d'équité, même au risque de réduire le niveau d'emploi. Sous certaines hypothèses, l'optimum social justifie le principe d'un revenu minimum garanti pour les individus dont la productivité du travail est très faible, a fortiori nulle. Ce revenu se présente comme une combinaison de transferts forfaitaires, de transferts sous conditions de ressources et/ou d'un impôt sur le revenu éventuellement « négatif ». En inférant la productivité du travail à partir du revenu du travail observé, on essaye de déterminer empiriquement la redistribution optimale pour les bas revenus à partir de deux fonctions de bien-être social. La première justifie le dispositif actuel du RMI. La seconde resterait favorable aux bas revenus tout en donnant des fondements à la prime pour l'emploi. Le revenu minimum à garantir aux personnes dont la productivité est la plus basse et la façon dont celui-ci se modifie avec l'activité sont alors fonction avant tout de la volonté redistributive de la société, autrement dit de son aversion plus ou moins grande pour l'inégalité, et de l'inégalité des revenus avant redistribution. En élargissant le cadre théorique initial dans une perspective plus dynamique, l'hypothèse d'une relative inertie de l'offre de travail des plus défavorisés peut être abandonnée si on intègre l'activité de formation. Ce n'est plus alors le travail en tant que tel qui devrait être encouragé mais également l'activité de formation. Une véritable requalification augmenterait leur employabilité et les inciterait davantage à s'insérer sur le marché du ...

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Langue Français

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187-204 - Bourguignon 21/12/2001 16:49 Page 187
REVENU
Revenu minimum et redistribution
optimale des revenus :
fondements théoriques
François Bourguignon*
Pièce maîtresse du système de protection sociale, le RMI occupe une place essentielle
dans le système redistributif français. Ses effets potentiellement désincitatifs sur l’activité
de ses bénéficiaires font toutefois débat entre ceux qui privilégient l’insertion sur le
marché du travail au nom d’un principe d’efficacité ou d’inclusion sociale et ceux qui
défendent le droit de toute personne à un revenu minimum au nom d’un principe d’équité,
même au risque de réduire le niveau d’emploi.
Sous certaines hypothèses, l’optimum social justifie le principe d’un revenu minimum
garanti pour les individus dont la productivité du travail est très faible, a fortiori nulle.
Ce revenu se présente comme une combinaison de transferts forfaitaires, de transferts
sous conditions de ressources et/ou d’un impôt sur le revenu éventuellement « négatif ».
En inférant la productivité du travail à partir du revenu du travail observé, on essaye de
déterminer empiriquement la redistribution optimale pour les bas revenus à partir de
deux fonctions de bien-être social. La première justifie le dispositif actuel du RMI. La
seconde resterait favorable aux bas revenus tout en donnant des fondements à la Prime
pour l’emploi. Le revenu minimum à garantir aux personnes dont la productivité est la
plus basse et la façon dont celui-ci se modifie avec l’activité sont alors fonction avant
tout de la volonté redistributive de la société, autrement dit de son aversion plus ou
moins grande pour l’inégalité, et de l’inégalité des revenus avant redistribution.
En élargissant le cadre théorique initial dans une perspective plus dynamique, l’hypothèse
d’une relative inertie de l’offre de travail des plus défavorisés peut être abandonnée si
on intègre l’activité de formation. Ce n’est plus alors le travail en tant que tel qui devrait
être encouragé mais également l’activité de formation. Une véritable requalification
augmenterait leur employabilité et les inciterait davantage à s’insérer sur le marché du
travail.
* François Bourguignon est directeur d’études à l’EHESS et fait partie du Delta (Bourguignon@delta.ens.fr).
Les noms et dates entre parenthèses renvoient à la bibliographie en fin d’article.
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avec les formes les plus diverses du systèmee débat qui a conduit à l’instauration de la
redistributif. En particulier, ces propriétésLPrime pour l’emploi portait indirectement
permettaient-elles de justifier l’ancien dispo-sur le RMI, pièce essentielle de notre système
sitif du RMI, avant l’introduction de la Primede protection sociale. Il reflétait avant tout la
pour l’emploi? Ou, au contraire, valident-connaissance très imparfaite que nous avons
elles pleinement la création de la Prime pourdes effets désincitatifs qu’il est susceptible
l’emploi et sont-elles susceptibles d’imposerd’avoir sur l’activité. Pour certains, le « taux
certaines contraintes à celle-ci ? marginal effectif d’imposition » élevé engendré
par cette garantie de revenu (1) décourageait
l’emploi salarié et enfermait les individus
dans un « piège de pauvreté ». Pour d’autres, Le cadre théorique
au contraire, la cause du non-emploi des béné- de la fiscalité optimale
ficiaires du RMI résidait dans la faiblesse de la
demande de travail du secteur productif plu-
e modèle simple de redistribution optimaletôt que dans le découragement de l’offre. La été introduit dans la littérature écono-D’autres, enfin, estimaient que, en dessous d’un
mique il y a presque 30 ans par Mirrlees. Il metcertain niveau de revenu, le critère d’équité,
parfaitement en lumière les enjeux essentielsc’est-à-dire le souci de garantir un bien-être
de la redistribution, et en particulier les termesminimal à toute personne, devait dominer tout
de l’opposition entre équité et efficacité (3).critère d’efficacité et le risque de réduire arti-
ficiellement le niveau d’emploi (2). Qu’une
décision ait été prise, sous la forme de la Prime
Un modèle simple pour l’emploi qui cherche à desserrer certains
de redistribution optimalepièges possibles de pauvreté, ne signifie pas
que le débat soit clos. Un choix a été fait en
Les individus d’une population sont caracté-situation d’information très imparfaite mais il
risés exclusivement par la productivité poten-ne fige pas obligatoirement la partie du sys-
tielle de leur travail w (4). Ils sont, par ailleurs,tème redistributif qui concerne les bas reve-
supposés parfaitement identiques. L’autoriténus. Les solutions alternatives sont encore
de redistribution n’observe pas la productiviténombreuses et la question de la forme souhai-
du travail, mais elle en connaît la distributiontable à donner à la garantie de revenu minimum
statistique, de densité f(w), dans la population.reste ouverte.
Elle n’observe pas non plus l’offre de travail
effective T des agents, c’est-à-dire la durée
La méconnaissance des enjeux de la redistri- de travail et son intensité. En revanche, elle
bution vers les bas revenus n’est cependant connaît le revenu total issu de ce travail,
pas totale et le problème est donc de savoir Y = wT, et fonde la redistribution sur cette
jusqu’où permet d’aller l’information dispo- seule information. Soit I(Y) l’impôt payé par
nible. Ainsi, si on ne dispose pas de toute la un individu dont le revenu est Y. Cet impôt est
connaissance empirique des comportements net des transferts reçus et la fonction I()
d’offre de travail nécessaire pour optimiser un représente donc le résultat consolidé de tous
objectif social donné, un certain consensus les instruments constitutifs du système redis-
existe sur quelques caractéristiques de ce com- tributif, soit tous les impôts et transferts expli-
portement, comme par exemple l’intuition citement basés sur le revenu. Dans le cas de la
que l’offre de travail tend à diminuer avec le France, ceux-ci incluraient l’impôt sur le revenu,
taux marginal effectif d’imposition et avec le mais aussi le RMI, l’allocation logement, les
revenu qui n’est pas lié à l’activité. De même, allocations familiales accordées sous condi-
l’objectif social que l’on cherche à optimiser
n’est pas lui-même précisément défini. Mais,
là aussi, il est possible de réunir un consensus
1. On entend par taux marginal effectif d’imposition le rapport
sur certaines exigences de base : par exemple entre la variation du revenu disponible et une variation du revenu
du travail, que l’écart entre les deux soit dû à des impôts ou àque la société a de l’aversion pour l’inégalité
des transferts accordés sous condition de ressources.
et la pauvreté mais n’est pas pour autant en 2. Voir Bourguignon et Bureau (1999).
3. Pour un exposé simple et complet de ce modèle voir Atkinsonfaveur d’une imposition confiscatoire. Dans
et Stiglitz (1980), en français voir Salanié (1999).ces conditions, la question est de savoir si ces 4. Il est courant d’assimiler productivité et taux de salaire et, en
propriétés minimales suffisent à définir le type même temps, offre de travail et temps de travail. L’offre de travail
peut cependant être un concept plus général si l’on y incorporede redistribution à mettre en œuvre pour les
l’effort, auquel cas productivité et salaire sont deux concepts
plus bas revenus ou si elles sont compatibles distincts.
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tion de ressources, l’API, etc. La fonction I( ) l’inégalité initiale des productivités indivi-
résume donc les contraintes budgétaires sous duelles seront fortes et que la sensibilité de
lesquelles opèrent les agents. Dans ce qui suit, l’offre de travail des agents à la redistribution
on la représentera souvent sous la forme de la sera faible. La première condition revie

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