164
pages
Français
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2012
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Ebook
2012
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Publié par
Date de parution
21 décembre 2012
Nombre de lectures
0
EAN13
9782748398311
Langue
Français
Une vengeance dans la communauté des gens du voyage, le faux suicide d’un professeur de musique à la dérive, une affaire de dopage dans le milieu hippique, un arbitre de rugby brûlé à l’acide... Capitaine de police aux Sables-d’Olonne, Étienne Vavin a fort à faire. Mais c’est sans compter le cas d’Alice, sa fille, à qui l’on vient de diagnostiquer une trisomie 12p. Avec sa femme Camille, capitaine elle aussi, il devra apprendre à gérer la différence...
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Date de parution
21 décembre 2012
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0
EAN13
9782748398311
Langue
Français
Nulle n'est parfaite
Catherine Savary
Société des écrivains
Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Société des écrivains
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Nulle n'est parfaite
Avertissement
Les personnages et les situations de ce récit étant purement fictifs, toute ressemblance avec des personnages ou des situations existantes ou ayant existé, ne serait que fortuite.
Cerises sur le gâteau…
La peur n’évite pas le danger…
— Allô ? Philippe ?
— Oui…
— C’est Étienne…
— Étienne ! Qu’est-ce que tu deviens ?
— Rien de spécial…
— Tu as la voix grave, il y a un problème ?
— Oui, il faut que je te voie, très vite, c’est au sujet de ma petite Alice.
La voix d’Étienne Vavin s’étrangla dans un sanglot. Il ne voulait pas…, il ne voulait pas pleurer, pas encore, puisqu’il n’avait aucune certitude.
Après un rendez-vous fixé pour le lendemain à 15 heures au cabinet du professeur Philippe Angelman, Étienne raccrocha, épuisé. Voilà trois jours qu’il ne dormait pas. Après une longue discussion avec son épouse Camille, ils prirent ensemble la décision de téléphoner à l’ami d’enfance d’Étienne. Ils avaient usé leurs pantalons, comme le dit la coutume, sur les mêmes bancs au collège, puis au lycée. Ensuite, ils se revoyaient lors des grandes occasions : leurs mariages – au nombre de deux chacun –, les naissances, mais les enterrements aussi. Étienne avait eu grand besoin du soutien de son ami lors du décès de sa première épouse et de leur fille dans un terrible accident de voiture contre un train. Son remariage avec Camille quelques années plus tard le sortit de la dépression.
Étienne Vavin était officier de police judiciaire à la Police Nationale. Avec le grade de capitaine, il exerçait au commissariat des Sables d’Olonne. Maintenant, il était à six mois de la retraite.
Étienne vivait un bonheur presque parfait : son épouse Camille était devenue capitaine au commissariat de La Roche-sur-Yon. Elle rentrait chaque soir, sauf une fois par trimestre lors de son astreinte. Après la naissance de Lucien, une petite fille vint agrandir le cercle familial. C’était Alice.
Camille et Étienne s’inquiétaient : vers trois mois, leur enfant était un enfant plutôt mou, en retard comparativement à Lucien. Le pédiatre, en examinant Alice à l’âge de 5 mois, avait noté un retard moteur et une mauvaise coordination. Mais il n’y avait pas de malformation visible et franche.
À un an, le retard moteur d’Alice était important : elle tenait à peine assise.
Les parents, alors très inquiets, firent effectuer une irm cérébrale et un bilan pédiatrique complet : l’ensemble s’avéra normal. Camille et Étienne furent momentanément soulagés.
Alice fut cependant prise en charge par le camsp 1 , un jour sur deux, puis à mi-temps. Un taxi ambulance venait la chercher chez la nourrice, puis cette petite fille était ramenée chez elle où une jeune femme veillait sur elle jusqu’au retour des parents. Ce fut un dispositif compliqué à mettre en place. Étienne avait beaucoup de difficultés à ne pas se sentir coupable : chaque séparation d’avec Alice lui fendait le cœur. En même temps, Camille lui faisait comprendre combien il était nécessaire de pouvoir échapper quelques heures à ce calvaire.
À deux ans, Alice tenait debout mais ne marchait pas. Elle ne jouait pas seule. Elle n’avait aucun langage.
Étienne et Camille avaient hâte de rencontrer Philippe : il était pédiatre spécialisé dans tous les problèmes de retard de développement.
Le couple se serra fort : ils savaient que leur chemin serait désormais compliqué et que cette petite fille aurait un besoin d’eux sans limite.
Il leur fallait expliquer à Lucien leur courte absence, et c’est Camille qui prit la parole. Elle s’agenouilla auprès de Lucien occupé à dessiner. Elle lui dit :
— Lucien, demain nous devons aller à Nantes, pour rencontrer un docteur.
— T’es malade ? interrogea l’enfant.
— C’est pour Alice.
— Elle est malade ?
— Oui, mais sa maladie est cachée, et il faut la trouver pour qu’Alice puisse courir, comme toi !
— La maladie, elle joue à cache-cache ?
— C’est ça ! Et papa et moi, nous emmenons Alice voir ce grand docteur. Nous partirons demain matin de bonne heure. Tata Do va venir pour te garder à la maison, avant et après l’école. Tu as tout compris, Lucien ?
— Chouette, on va bien rigoler avec tata Do !
La petite sœur de Camille, Dorothée, avait pris sa journée pour se rendre disponible. Son neveu était très important pour elle qui n’avait pas eu le bonheur d’avoir des enfants. Tata Do arriva la veille au soir. La soirée fut animée : Lucien était un peu énervé, mais les parents comprenaient cet énervement qui retomba avec le coucher et l’habituelle histoire racontée pour endormir le petit garçon.
La vengeance est un plat qui se mange froid…
Comme l’y oblige la loi Besson du 5 juillet 2000 pour les communes de plus de 5 000 habitants, la ville des Sables d’Olonne a aménagé une aire d’accueil pour les gens du voyage.
Quelques familles y résidaient en hiver, la plupart descendaient vers le midi, là où les températures leur semblaient plus supportables.
La famille Douville était implantée, presque sédentaire avec la troisième génération en place. Ils étaient au nombre d’une bonne vingtaine.
Depuis leur installation, l’organisation familiale était toujours la même : un système pyramidal, avec le plus ancien comme chef de file.
Lorsque l’aîné mourait, c’était le plus âgé du groupe qui prenait la suite. Ainsi, toutes les décisions jugées importantes étaient prises par celui qui était considéré comme le plus sage. Il n’y avait aucune contestation : tout semblait facile.
La famille Douville confectionnait des paniers depuis toujours. La transmission de ce savoir-faire s’effectuait de génération en génération. La vente des paniers suffisait à nourrir les quelque vingt personnes réunies autour du feu, matin, midi et soir. Quelques rapines avaient bien lieu ici et là, mais c’était plus par défi que par nécessité.
C’était Marcel qui était le patriarche et nul n’osait lui contester sa place… sauf peut-être Johnny. Tatoué maladroitement sur les bras, les épaules et le torse, il aimait faire bouger ses muscles. Si le cerveau était un muscle, Johnny ne le remuait pas autant que nécessaire. Mais il trouvait que les paniers, ce n’était pas une affaire suffisamment rentable. Il lui fallait plus d’action, et plus d’argent.
Jamais il ne serait venu à l’esprit de Johnny qu’une discussion avec le patriarche aurait pu être fructueuse. Car Johnny avait grand peur de Marcel.
Il râlait beaucoup dans le dos de ce vieil homme, mais il n’osait pas l’affronter pour lui dire qu’il avait d’autres idées autrement plus lucratives pour gagner de l’argent. Ce jeune homme de vingt et un ans n’avait pas compris que l’essentiel pour le patriarche, c’était la famille, le groupe et non la sordide affaire pécuniaire…
Donc, un matin, Johnny emmena avec lui trois garnements entre dix et seize ans : Jason, Alan et Kevin. Il promit à chacun une belle récompense : cinq euros chacun. Puis il invita chacun à mettre un blouson car l’automne, disait-il, était frais en ce mois d’octobre…
— Qu’est-ce qu’il faut faire ? s’enquit le plus âgé, Kevin.
— Entrer au Super U, et me suivre…
— On fera quoi ? interrogea Jason, le plus jeune.
— Tu verras…
Ce fut la seule réponse de Johnny qui accompagna celle-ci d’une tape amicale sur la visière de la casquette du minot.
Alan était sourd et ne participa pas à la discussion. Il avait seulement compris qu’il aurait cinq euros.
Les quatre jeunes entrèrent dans le supermarché, les mains dans les poches, tranquilles.
Ils se dirigèrent nonchalamment vers l’étalage des confiseries : Johnny prit un paquet de bonbons au caramel – ses préférés –, le cacha très rapidement dans la poche intérieure de son blouson. Les trois garnements le regardèrent avec des yeux grands comme des soucoupes.
— Waouh ! lança Kevin admiratif.
— Arrêtez de loucher sur moi ! À vous, maintenant ! Il vaut mieux être seul, chacun pour soi ! On se retrouve à la caisse pour régler quelques courses.
Et voilà les trois galopins dispersés dans le supermarché. Johnny, volontairement, n’avait donné aucune consigne : aujourd’hui, pour une première fois, il fallait que ce ne soit que du plaisir. C’est ainsi que Jason se retrouva au rayon jouets, Kevin au rayon multimédia et Alan au rayon chocolats – c’était le plus gourmand. Pendant ce temps, Johnny s’occupait des courses familiales.
Au bout d’une demi-heure, le petit groupe se retrouva à la caisse. Le Caddie n’était pas plein – il ne fallait pas exagérer –, les blousons regorgeaient de trésors qu’ils se dévoileraient à la sortie.
Le plus gêné des quatre était Alan, mais ses acolytes le chahutèrent suffisamment pour éviter toute question de la caissière.
Une fois sortis du supermarché, ils ouvrirent leur blouson et se montrèrent le fruit de leur chapardage : un chevalier noir et un paquet de cartes Pokémon pour Jason ; une compilation de Mickaël Jackson, une souris d’ordinateur sans fil et un jeu de guerre pour pc pour Kevin ; Alan sortit un paquet de Carambars et un sachet de Shamallow…
— Cool ! confirma Johnny, fier de sa nouvelle équipe. Pour cette fois, vous pouvez garder vos trésors.
— Super ! lança Kevin qui n’envisageait pas les choses autrement.
— La prochaine fois, je vous dirai quoi prendre.
— On pourra aussi prendre des choses pour nous ? interrogea le petit Jason.
— Ouais, mais faut faire gaffe à pas se faire prendre.
C’est ainsi que Johnny avait l’intention de faire fortune.