L'Øneïdå , livre ebook

L'Øneïdå
- Livre II -
Les liens du sang

Créé et écrit par : A. Y. Gebleux
Illustré par : Édouard Noisette et Jean-Marie Brodu








© 2020 Nanachi
Édité par : Nanachi, La Rabatelière, France
ISBN : 979-10-7000-209-4
Dépôt légal 10-2020
À ma famille,
Où que vous soyez, je vous aime
Et je sens votre Amour

J'ouvre les cieux en deux, hurle le vent pour rien,
Altéré et loyal comme seul mantra
Øneïdå tu viens, aux pouvoirs arc-en-ciel
Visible aux humains qui t'honoreront Bey
Et de tout le divin sera dissimulé
Nul ne peut résister transpercé d'un coup sec
Quand l'homme nu sera découvert
L'élu des temps apparaitra
Il y trouvera un père
Le peuple le suivra
Prologue
Mes chers enfants,

Je me félicite de notre petit stratagème. Nos messages, cachés dans les bouchons des boissons que je vous fais envoyer, passent inaperçus. Je suis heureuse de pouvoir garder le contact avec vous et ainsi échanger des nouvelles.
Malheureusement, je n'en ai aucune à vous transmettre de la part de la belle Iris partie avec Ceylan et Delwyn. Depuis qu'ils sont arrivés sur l'île de l'Oracle, seul le silence de leur absence retentit. L'histoire de Winema se répète et je m'inquiète à leur sujet. Voilà bien des lunes maintenant qu'ils manquent à l'appel.
Leilani, quant à elle, fréquente toujours son prétendant de malheur. Ne pas la savoir en sécurité n'est pas pour améliorer mon sommeil non plus. Mais elle est astucieuse et courageuse. Avec l'aide de la grande prêtresse de Bahia d'Ama, elle s'est trouvé une protection, un talisman. Elle va maintenant tenter de retrouver les autres. Je ne connais pas les détails et il serait imprudent de les partager quoi qu'il en soit. Mais vous devez savoir que les liens qui vous soudent sont intacts malgré les lunes qui ont passé depuis votre Passage et la distance qui vous sépare. Faire le lien entre vous est une bénédiction pour mes vieux os.

Garance poursuit son rêve. Son départ pour la forêt d'Oihana s'est fait en toute discrétion. Vous serez heureux d'apprendre que Zéphyrin s'est réveillé, par la grâce seule des dieux. Il accompagne la p'tite dans son périple. Les funérailles qui lui ont été organisées ici pour couvrir ses traces étaient d'une tristesse que j'ai rarement connue. Orli, grande prêtresse de Bahia, a été parfaite. C'est heureux que la vérité de ce qui a été découvert dans autant de souffrances soit partagée par de hauts prêtres et des âmes aussi courageuses que vous les vôtres, mes enfants. Bien entendu, une épreuve aussi terrible que celle que Zéphyrin a traversée n'est pas sans laisser de traces. Il n'est plus tout à fait lui-même mais au cœur de la forêt, à l'abri des regards, j'ai bon espoir qu'il se reconstruise petit à petit. Aoitaif Nam les accompagne. Plus rien n'avait de sens pour elle à Ciprice depuis la mort de son cher Louison. L'orphelinat n'accueille plus de nouveaux enfants depuis des années et c'est sans doute mieux ainsi. Ceux qui restent sont assez grands pour se débrouiller seuls maintenant.
Mieux encore Suzan et Yavain Guerrati ont pris la route aux côtés de Garance également. Ils ont quitté leur poste à l'Académie pour se lancer dans l'aventure. Yavain est fasciné par les créatures mythologiques lui aussi et je suis rassurée de les savoir tous ensemble. Cette petite compagnie a de la ressource.

Je suis contente que vous vous acclimatiez aussi bien que possible à votre nouvelle vie à Vanolee. Je me doutais bien que ce serait plus facile pour l'un que pour l'autre, n'est-ce pas mon Sulian ? SI vous saviez comme je suis fière de vous !
Continuez à prendre soin les uns des autres, à vous enquérir des nouvelles des uns des autres et à puiser force et courage dans vos expériences respectives. Ce qui nous attend s'annonce sombre mais vous êtes la lumière, l'espoir et la vie. Vous êtes, vous tous, les enfants qui comblent mes vieux jours.

Va, aime et n'oublie pas, Sulian.
Va, aime et n'oublie pas, Jaoven

Je vous embrasse,
Votre chère Dame Yali
I
Barea : "L'eau m'encourage, elle bénit ce voyage" – Forêt d'Oihana, Continent Étoilé

Pousse, pousse, perce le manteau
Naître
N'être qu'un brin qui puise, puise l'eau
Grandir
Pompe, pompe, bercé par le vent
S'enhardir
Porte, porte feuilles, branches et courants
Hêtre

Quelques mots suffisent à rendre la nature si fertile. L'eau est la source de toute vie. Même la plus fragile. L'eau est ma raison de vivre, elle m'a mise au monde. Elle coule en moi et je me fonds en elle. Je la retrouve dans chaque brin d'herbe et chaque feuille. Dans le nénuphar qui accueille la grenouille et le lotus, dans la mouche que les oiseaux qui gazouillent gobent sans autre laïus. Elle me nourrit et nourrit chaque chose qui m'entoure.

Il est loin ce rêve d'amour.
Je me souviens encore de ses yeux qui pétillent. Je me rappelle les poissons du lac qui frétillent. Il parlait d'amour, éperdu. Tandis que mes sœurs me cherchaient, perdues. C'est le lac qui me l'a amené. On aurait dit une autre réalité. Un lieu où le temps s'arrête. Ce lieu devient ma nouvelle quête.

Au fil de l'eau, j'avance sereine. Je pars vers une quête nouvelle, humaine. C'est l'aventure qui nous attend. Je pense au futur, à mon enfant.

D'où vient ce rêve d'amour qui a germé et m'appelle au retour ? L'eau, ma bonne amie, sois mon guide, je t'en prie. Console mes sœurs pour qui il n'est pas permis de me suivre cette fois-ci. Il est bien rare pour ceux de mon espèce de s'aventurer hors de la forêt. Les hommes saccagent, se glorifient, blessent. Ceux qui m'ont enseigné l'ont appris à leurs dépens. Pourtant, me voilà fonçant droit devant. L'eau m'encourage, elle bénit ce voyage que d'autres trouvent insensé.

Un sens et un cœur, voilà le but de mon trajet. L'eau reste le moyen le plus sûr de m'y amener.
Je retrouverai le lac aux poissons frétillants.
Je croiserai encore ses yeux pétillants.
II
Sulian : "Peu importe le danger, nous l'affronterons ensemble" – République de Vanolee, Etzi, Capitale

Je ne m'habituerai jamais à cet endroit. Quelle que soit la saison, le ciel est dégagé et lumineux. Même en plein hiver, la température est douce et la lumière pâle continue de se refléter sur les maisons d'un blanc éclatant. À chaque balade hors de l'Académie Militaire, je suis aveuglé. J'ai tenté une fois un sort pour filtrer toute cette luminosité mais la pupille noire de mes yeux avait recouvert tout le blanc disponible et les habitants hurlaient de terreur en me voyant arriver. Ça a déclenché une panique dans le quartier que je traversais. À tel point que je me suis fait arrêter en pleine rue et qu'il a fallu attendre plusieurs heures que le sort ne s'estompe pour qu'ils comprennent que je n'étais pas une menace. Mon chef d'escadrille a dû intervenir pour se porter garant de moi. Cet épisode de fin d'été m'a valu un mois entier de corvées pour le désordre semé et la honte jetée sur l'Académie.
Ces étrangers ont des rites et des manières auxquels il m'est difficile de m'habituer car je ne connais pas leur culture. Jaoven s'est beaucoup penché sur la question, mais j'avoue que mon intérêt reste assez limité. Je n'arrive pas à me plonger dans des bouquins interminables. Ça me rendrait la vie bien plus facile si mon jumeau pouvait me raconter tout ce qu'il lit d'intéressant. Dès notre arrivée nous avons été affectés dans des escadrilles différentes et donc dans des dortoirs séparés. Je ne le vois pas autant que j'aimerais. Heureusement, nous appartenons au même groupe, l'Escadron de Défense. Cela nous donne l'occasion de travailler ou déjeuner ensemble.
Il semble qu'Ouriel, notre nouveau gouverneur de cité à Riwalenn, qui a œuvré pour que nous puissions être admis ici, a dévoilé les pouvoirs que notre Désignation passée a révélés. Je ne remets pas en cause sa bonne volonté. Nous aurions pu être exilés à tout jamais du Royaume et de la cité de Ciprice que j'affectionne tant. Grâce à Ouriel, nous pourrons y retourner au bout d'un an d'aliénation. Je compte les lunes qui me séparent de ce jour. Encore près de six.
Vanolee est une république pacifique où l'ordre règne. Cet ordre naît du respect et de la volonté d'œuvrer pour le bien de tous, non de la crainte ou de la répression. C'est un endroit sain et paisible, où il ferait bon vivre pour une âme moins rebelle que la mienne. J'ignore comment fait Jaoven pour s'acclimater si facilement.
Les couleurs qui caractérisent nos pouvoirs à Riwalenn ne signifient pas grand-chose pour eux ici, leurs pouvoirs s'affirment différemment. Mais il se trouve qu'Ouriel a donné des instructions très précises à l'Académie d'Etzi. Ils savent que le Jaune qui me caractérise s'apparente au Feu, qu'il symbolise la connexion avec les émotions, le pouvoir, le rayonnement, la force et la vitalité et que le Rouge préserve mon instinct de survie. En conséquence, j'ai été placé dans l'escadrille protection sol de l'Escadron de Défense.
Jaoven aussi fait partie de cet Escadron, mais pour l'affectation finale, leur réflexion s'est orientée différemment. Son pourvoir Bleu le relie à la Nature. Il lui doit sa soif de connaissance et son don pour la communication, mais aussi pour la guérison. Il a donc été nominé dans l'escadrille support d'intervention. Son pouvoir Indigo qui lui apporte clairvoyance et perspicacité. Il pourrait même être promu au commandement avec des dons pareils !
En revanche, le Rouge qui me caractérise est relié à la Terre. Son aura est celui de la survie, de la conscience physique, de la sécurité et de la protection. D'où mon placement dans l'escadrille protection sol.
Nous étions tous deux apprentis gardes de la cité de Ciprice, ce qui a été un atout précieux à notre arrivée. Aujourd'hui, après plus de trois lunes de formation, je me sens soldat, alors que mon frère pourrait devenir un fin stratège. Je n'avais pas réalisé jusque-là à quel point nos dons nous départagent. Je nous voyais comme un seul. Alors que nous sommes plus singuliers que jamais. Il y a des moments où je me sens so