La Floride
199 pages
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La Floride , livre ebook

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Description

Extrait : "Les plus tragiques scènes de notre monde se passent sur l'Océan ; mais elles n'ont d'autres témoins que le soleil, ou les astres de la nuit, ou les oiseaux voyageurs. Quand le Malabar, vaisseau de la Compagnie hollandaise, s'abîma dans le gouffre de la mer Indienne, nul regard humain ne vit cette scène de désolation ; les passagers et l'équipage s'étaient jetés à la mer ; le capitaine seul ne voulut pas quitter son pavillon..."

À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN :

Les éditions LIGARAN proposent des versions numériques de grands classiques de la littérature ainsi que des livres rares, dans les domaines suivants :

• Fiction : roman, poésie, théâtre, jeunesse, policier, libertin.
• Non fiction : histoire, essais, biographies, pratiques.

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Informations

Publié par
Nombre de lectures 28
EAN13 9782335121742
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0008€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

EAN : 9782335121742

 
©Ligaran 2015

Préface

En voyage
Les meilleurs cours de littérature sont aujourd’hui professés dans les chambres des paquebots à vapeur.
Aussi les voyages sont-ils aujourd’hui plus instructifs que jamais.
Ce genre d’éducation manquait à nos pères : on apprend tout ce qu’on ignore en voyageant sur la Saône, sur le Rhône, sur le Rhin, ou sur la mer.
Je venais de quitter Paris, selon mon usage, et je courais en vapeur vers la Méditerranée. Nous étions cinquante, assis, couchés ou debout dans l’entre-pont d’un paquebot. Un monsieur grave prenait du café, en lisant un journal, et il souriait beaucoup.
« Il lit le roman de… dit un jeune homme en blouse ; je suis en arrière de deux feuilletons.
– Moi, je suis abonné, dit un ami : je recevrai ma collection poste restante à Valence.
– Je lis ce roman avec beaucoup d’intérêt, dit une dame voilée de vert, parce qu’il est écrit dans le genre que j’aime.
– Vous êtes tout à fait dans mes opinions, dit un voyageur maigre et chauve ; moi, madame, je n’aime que les romans d’intérieur domestique, ceux qui peignent avec vérité la vie réelle, qui nous offrent un miroir fidèle, et nous corrigent de nos vices et de nos défauts en nous les représentant d’après nature. Je suis fâché que la Bruyère n’ait pas fait un roman. »
Un jeune homme, coiffé à la Grioto, et qui allait en Chine un bâton à la main, prit la parole d’un ton leste et dit :
« Moi, je ne comprends pas trop le plaisir que vous trouvez à lire dans des livres ce que vous faites chez vous. Les Chinois ont bien plus de bon sens dans leur folie. Ils ne peignent, ne gravent, ne sculptent, n’écrivent que leurs rêves, leurs fantaisies, leurs caprices d’imagination. Tout ce qui se passe bourgeoisement autour d’eux leur paraît vulgaire et indigne d’être présenté à l’œil. Vous autres Français, vous voulez voir sur vos livres de boudoir, sur vos paravents d’alcôve, sur vos écrans de cheminée les mêmes choses que vous faites avec votre ridicule costume européen. Vous demandez à vos faiseurs de tapisseries une scène de nourrice, une noce de village, un départ de conscrits pour l’armée, un ménage de nouveaux mariés, un père maudissant un fils, une demoiselle qui touche du piano devant ses parents, un propriétaire qui met son locataire insolvable à la porte de sa maison. De cette manière, vous avez l’agrément de pouvoir répéter dans le salon vos histoires de tapisseries. Quant à moi, en passant à Lyon, où je m’arrête cinq jours, je vais commander à un fabricant quatre panneaux de papiers représentant quatre scènes qui se passent dans la planète de Saturne. Eugène Delacroix m’en a fait les dessins à Paris. À Péking, je vendrai cela un prix fou.
– Mais, monsieur, observa un voyageur sérieux et enrhumé, savez-vous ce qui se passe dans la planète de Saturne ?
– Si je le savais, je ne le ferais pas peindre, répondit le Chinois : cela rentrerait alors dans la vie bourgeoise et réelle des gens de Saturne.
– Ah ! dit le voyageur sérieux ; et il toussa beaucoup.
– Les jeunes gens ont des idées de jeunes gens, remarqua un monsieur presque endormi sur la pomme d’un jonc ; moi, ce que je cherche dans un roman, c’est un fait, un grand fait historique, une chose enfin qui m’instruise en m’amusant, comme dit Boileau ; car, soyons de bonne foi, quel fruit retirez-vous de la lecture d’une œuvre de pure imagination, d’un long mensonge, tranchons le mot ?
– Parbleu ! cela nous amuse ; voilà le fruit, dit le Chinois.
– Oui, dit le monsieur somnolent ; mais cela ne vous instruit pas. Moi, monsieur, j’ai appris l’histoire d’Écosse dans Walter Scott.
– Moi aussi, dit la dame voilée de vert.
– Moi aussi, dit son mari.
– Vous voyez, ajouta l’autre, que tout le monde ici est de mon avis, monsieur.
– Ah ! vous croyez aux histoires d’Écosse de Walter Scott ? dit un Parisien qui entrait en éteignant son cigare. Vous saurez, mesdames, qu’il pleut sur le pont… les histoires d’Écosse sont des fables en brouillards comme toutes les autres histoires d’ailleurs ; à qui dites-vous cela ? Moi, monsieur, j’ai vu à Paris trois histoires et deux révolutions passer sous mes croisées, et je les ai rencontrées dans la rue, comme je vous rencontre ici. Depuis, j’ai lu vingt ouvrages sur ces évènements. Chaque ouvrage contredit les dix-neuf autres, et tous contredisent ce que j’ai vu de mes propres yeux ; et vous voulez, après cela, que j’ajoute foi aux choses qui se sont passées dans les brouillards, les cavernes et les neiges d’Écosse il y a trois cents ans ! Allons donc ! »
Le monsieur sérieux agita le bras droit, mais la parole lui fut supprimée par une quinte de toux.
Une dame d’un âge mur, qui donnait à boire dans son verre à un épagneul, prit la parole et dit : « Moi, je n’aime que les romans par lettres, comme ceux de M. Montjoie.
– Nous ne connaissons pas M. Montjoie, remarquèrent en trio trois jeunes gens.
– Mais quel âge ont ces messieurs ? demanda la dame de l’épagneul.
– Trente ans, comme tout le monde, répondit un des trois.
– M. de Montjoie, poursuivit la dame, écrivait en mille… mille… huit cent… et quelque chose… Il a fait les Quatre Espagnols , le Manuscrit du mont Pausilippe , etc., etc., toujours sous la forme épistolaire. J’ai lu cela au sortir du couvent.
– Il me faut à moi les grosses plaisanteries, dit un énorme voyageur qui s’ennuyait de se taire ; les farces, quoi ! un tas de gaudrioles à mourir de rire le dimanche quand il pleut. Tenez, voulez-vous savoir mon roman que j’aime, moi ? c’est celui de… aidez-moi un peu… j’ai le nom au bout de la langue… un farceur… Ce livre, où il y a un homme bête comme une oie, qui a une femme gentillette et il y a un autre jeune cadet, nommé… chose je suis brouillé avec les noms !… J’ai acheté ce livre en arrivant de l’armée, et puis je l’ai donné à mon cousin, qui est veuf et qui n’a pas d’enfants.
– D’où vient que l’on ne fait plus aujourd’hui des romans avec des chevaliers ? demanda naïvement une dame qui allait joindre son mari à Alger.
– Des chevaliers de quoi ? répliqua un jeune évaporé, qui jouait avec ses cheveux.
– Des chevaliers qui se battaient dans les tournois et qui allaient en Palestine.
– Bah ! ce sont des romans de servantes de curés, ça ! dit le même.
– J’ai un cousin qui fait des romans, dit une dame mystérieuse ; vous devez le connaître, messieurs, mais je ne dis pas son nom. Il rédige beaucoup dans les gazettes. C’est plus fort que lui, il ne peut écrire que des choses tristes comme une robe de deuil ; je lui dis quelquefois : Alfred, mon ami (je l’ai vu enfant), il ne faut pas toujours broyer du noir comme cela ; on dirait que tu es employé aux pompes funèbres… Ça le fait rire aux larmes… Eh bien ! c’est son naturel. Il est gai avec ses camarades, et dès qu’il prend la plume, il vous oblige à pleurer.
– Voilà un genre que je déteste, moi, dit un jeune farceur qui voyageait pour les garances. Nous, par exemple, dans notre état, nous avons toujours la gaudriole à la bouche. Il faut causer beaucoup avec les correspondants. On est invité à dîner : on trouve des dames, des demoiselles qui vous demandent : Avez-vous lu le roman de M. tel ? Que diable ! si ce roman est noir comme un four, on ne peut pas rire au dessert. Nous voulons des historiettes galantes, des amourettes, des bêtises. L’autre jour, à Lyon, j’ai fait une affaire de vingt-sept mille francs, escompte deux, en disant cette drôle d’aventure de ce monsieur qui était dans les journaux avec la femme d’un autre ; et lorsque le mari entra, il sauta dans le jardin, et resta pendu par son habit à la grille en fer.
– Ce n’est pourtant pas ce que veut l’époque, dit un professeur de philosophie en vacances : l’époque est sérieuse. On accepte le roman comme distraction, comme amusement, comme on écoute l’air d’un orgue de Savoyard dans la rue. Il y a beaucoup de gens frivoles qui cherchent, disent-ils, à tuer le temps. Mais pour la majorité des travailleurs, des penseurs, des moralistes, des industriels, le temps n’est pas une chose qu’on tue ; c&

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