Le Mystère de la chauve-souris
121 pages
Français

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Le Mystère de la chauve-souris , livre ebook

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Description

Extrait : "Avec son long mugissement de bête antédiluvienne, dont la colère s'enfle sourdement et va bientôt éclater dans toute sa fureur, l'Atlantique, mal contenue par le massif granitique de Saint-Mathieu-fin-de-Terre et la haute avancée de grès quartzeux du Toulinguet, commença, de ses lames soulevées, à balayer tout l'espace entre la côte de Léon et la presqu'île de Crozon." À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN : Les éditions LIGARAN proposent des versions numériques de grands classiques de la littérature ainsi que des livres rares, dans les domaines suivants : Fiction : roman, poésie, théâtre, jeunesse, policier, libertin. Non fiction : histoire, essais, biographies, pratiques.

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Informations

Publié par
Nombre de lectures 75
EAN13 9782335054835
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0006€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

EAN : 9782335054835

 
©Ligaran 2015

CHAPITRE PREMIER L’araignée
Avec son long mugissement de bête antédiluvienne, dont la colère s’enfle sourdement et va bientôt éclater dans toute sa fureur, l’Atlantique, mal contenue par le massif granitique de Saint-Mathieu-fin-de-Terre et la haute avancée de grès quartzeux du Toulinguet, commença, de ses lames soulevées, à balayer tout l’espace entre la côte de Léon et la presqu’île de Crozon.
Une significative barre d’écume se traça au pied du Grand Gouin ; sans se laisser arrêter par le sillon naturel, amas de rocs et de galets, sur lequel se dressent la chapelle gothique de Notre-Dame de Roz Madou et le fortin rouge élevé par Vauban, la mer se mit à battre rudement la base des petites maisons du port de Camaret, au moment où les derniers rayons du soleil couchant frappaient de biais la muraille de porphyre des falaises de Roscanvel et donnaient à l’ouverture béante du Goulet de Brest l’embrasement sanglant d’une immense gueule de fournaise.
À cet instant précis, en plein centre de cette lueur d’enfer, doublant d’une envolée vertigineuse la pointe pyramidale des Capucins, seule, au milieu du blanchissement des vagues, une barque parut, ayant pris trois ris dans ses voiles, couchée sur le flanc, grandissant de minute en minute et se dirigeant vers Camaret.
Elle semblait enveloppée de neige et de feu, portée par quelque tragique destin, et avançait avec une rapidité presque fantastique, fuyant devant la tempête, aidée aussi par elle, ayant hâte de venir gagner l’abri de ce petit port, où déjà non seulement toutes les barques du pays, mais de nombreux bâtiments d’un fort tonnage avaient cherché un refuge.
Comme, ayant atteint la rade, sauvée des dangers du large, elle glissait en oiseau de mer derrière le fortin de Camaret, le soleil disparut, englouti, et ce fut, sans transition, la nuit, une nuit subite amenée par l’envahissement brusque d’épaisses et géantes nuées de deuil tendues par d’invisibles mains sur toute l’étendue du ciel et qui semblèrent faire planer la mort sur le pays.
De leur crêpe lugubre les ténèbres avaient pris, enveloppé la barque, ainsi que pour la cacher à tous les regards ; et, lui faisant traverser le port d’une seule bordée, au milieu de l’entassement des barques qui ne la sentirent même pas glisser entre elles, une lame plus forte, plus grondante, plus écumeuse que les autres, l’apporta avec un râle sourd et prolongé jusqu’aux marches, baignées par le flot, d’une maison un peu plus importante que ses voisines, et portant au front, en lettres noires :
À l’Abri de la Tempête ,
puis, au-dessous, un nom :
Troadec .
Un homme mince, enroulé d’un manteau tout dégouttant d’eau de mer, sauta lestement sur les pierres glissantes et se secoua, en maugréant d’une voix railleuse :
« Voilà une traversée dont je me souviendrai, ventrebleu !
– À bon port que vous êtes à c’t’heure, citoyen, comme je vous l’avais promis ! répondit un organe rude et satisfait. Et il n’était que temps ! »
Dirigé vers la pleine mer, le bras du patron de l’embarcation montrait, à travers l’obscurité, l’étendue de plus en plus blanchissante ;
« Ma Doué ! Je m’aime mieux ici que dans le Goulet, et j’ai plaisir à penser que là-bas, entre Ouessant et Sein, l’Anglais doit danser une fameuse gigue !
– Tu es donc un bon patriote ? reprit le voyageur s’arrêtant un moment en haut de l’escalier.
– Nous le sommes tous tant que nous pouvons nous compter dans le pays. Et tenez, ici, chez les Troadec, les premiers de l’endroit que c’est pour l’hospitalité, et aussi pour détester l’Anglais, oh ! oui, vous trouverez du feu pour vous sécher, un gîte sûr et fameux accueil, si vous parlez ce langage-là, c’est moi qui vous le dis. »
Ensuite, passant à celui qui l’avait questionné une petite valise :
« V’là vos hardes ; vous n’avez plus besoin de moi : poussez la porte, la Corentine est toujours au logis. Pour nous, mes deux hommes et moi, nous allons conduire le bateau à son corps mort. »
Comme évaporée, la barque glissa dans la nuit, et l’homme resta seul, debout sur la plus élevée des dalles verdies formant les degrés, son sac à la main.
Après avoir vainement essayé de distinguer quelque chose autour de lui, il s’avança, appuya sans bruit sa main sur la porte dont le loquet bascula doucement, et entra, repoussant le battant derrière ses talons.
Plantée dans un chandelier de fer en spirale, une bougie de résine éclairait d’une flamme jaunâtre et fumeuse le visage d’une femme qui travaillait à raccommoder un filet, en chantonnant à mi-voix ; n’ayant rien entendu, elle n’avait pas fait un mouvement. Le courant d’air projeté par le battement d’éventail de la porte ouverte et refermée passa sur la lumière, la couchant un peu de côté, en même temps que dehors la clameur de la mer montait, grossissante ; la travailleuse s’interrompit de chanter pour soupirer avec un murmure d’angoisse :
« La mer est méchante ce soir ; pourvu que les gârs et l’homme puissent finir leur besogne et qu’ Elle soit en sûreté ! »
Brusquement elle eut un cri, un sursaut, le filet lui tombant des mains, et ses prunelles, immobilisées d’effroi, s’arrêtèrent sur un visage inconnu, blême, d’où jaillissaient avec une acuité, une pénétration d’instrument mortel, des regards semblables à des pointes d’acier fixées sur elle, pour ainsi dire dans sa chair, dans sa pensée. Dans la pénombre de la pièce, on ne distinguait un peu nettement que cette face pâle, tout le reste du corps si grêle disparaissant sous les plis du manteau sombre roulé autour des épaules et retombant jusqu’à terre.
Elle fit un geste pour porter la main à son front et se barrer la poitrine du signe protecteur contre les apparitions, balbutiant :
« D’où sort-il à c’t’heure, celui-là, qu’il entre chez nous comme le malheur, sans qu’on s’y attende !… Est-ce un vivant ? Est-ce un mort ?… »
Ç’avait été rapide, instantané, dans la surprise de cette arrivée inattendue, par cette nuit subite, alors qu’elle n’avait rien vu, rien entendu, l’esprit uniquement occupé de la pensée des siens, les oreilles bourdonnant encore de la grosse rumeur de l’Océan.
Mais déjà le visiteur, souriant de l’effet qu’il avait produit, se présentait d’une voix moitié aiguë, moitié plaintive :
« L’hospitalité, citoyenne, pour un pauvre voyageur qui arrive de Brest, trempé, harassé et affamé ! » En présence d’un être de la terre et non pas d’une apparition surnaturelle, Corentine avait immédiatement retrouvé son calme, sa bravoure tranquille ; elle se leva, s’exclamant :
« Bonne Dame de Roz Madou ! un vrai naufragé qu’on jurerait, en vous voyant !… C’est donc que vous étiez dans la barque aux Le Goff, le bateau qu’on avait signalé sortant du Goulet, en pleine bourrasque ? » Débarrassant vivement le nouveau venu de son sac et de son manteau, elle jeta dans la cheminée une brassée de genêts secs et d’ajoncs, qui lancèrent de hautes flammes brillantes, dont cet intérieur si sombre fut aussitôt illuminé et égayé :
« Chauffez-vous et mettez-vous à votre aise, monsieur. Chez les Troadec, vous v’là chez vous !… Et si c’est un gîte de durée qu’il vous faut, on fera de son mieux pour vous contenter. »
Ayant jeté son chapeau sur une table et ayant approché une escabelle du foyer, le voyageur frottait longuement et voluptueusement ses mains, en tendant au feu ses bottes humides qui fumaient déjà sous la chaleur des braises ; il roula les épaules et cambra les reins avec une sensation de bien-être et fit :
« C’est bon de se sentir vivre !… Eh ! eh ! Là-bas, au sortir de ce damné Goulet, quand le coup de vent s’est jeté sur la barque, j’ai bien cru que je n’arriverais jamais jusqu’ici !… Hum ! fameuse perte que ç’aurait été, pour moi d’abord, et puis pour… pour… Ah ! ah ! ah !… Et j’en connais aussi qui auraient été si satisfaits !… Mais non, on a besoin de moi et je ne disparais pas comme cela, moi !… »
Il sautillait sur l’escabeau, ne semblant pas pouvoir tenir en place, se relevant à chaque instant pour faire le tour de la pièce, puis revenant s’asseoir ou se planter devant le feu, et parlant tout haut avec de petits rires, des exclamations, des soubresauts.
Habituée aux allures calmes et lentes, aux gestes mesurés des pêcheurs de la côte, la femme le regardait avec étonnement, se demandant d’où pouvait venir cet inconnu si nerveux, si remuant, si agité ;
Celui-ci surprit l’examen dont il 

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