Esclaves et affranchis dans la vice-royauté du Pérou
158 pages
Français

Esclaves et affranchis dans la vice-royauté du Pérou , livre ebook

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158 pages
Français

Description

Les femmes n'étaient pas absentes des cargaisons d'esclaves dans les Amériques espagnoles, mais elles représentaient un pourcentage inférieur par rapport aux hommes, ce qui ne manqua pas de rendre problématiques les relations entre les deux sexes. De plus, elles attirèrent l'attention des conquérants espagnols privés de femmes ainsi que de leurs descendants qui firent d'elles des objets sexuels compensatoires. La concentration masculine puis l'agamie forcée favorisèrent probablement une sexualité hétérodoxe mais eurent surtout des conséquences psychiques dévastatrices, la femme et l'homme noirs ne pouvant pas assumer pleinement leur affectivité envers leurs enfants.

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Publié par
Date de parution 01 novembre 2017
Nombre de lectures 10
EAN13 9782140049835
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

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Extrait

femmes, puis de leurs descendants qui en Irent des objets sexuels
conjugale limitaient leurs droits de propriétaires, d’où l’âpre lutte à
urbain où ils avaient davantage la possibilité de se défendre. La vie des couples, formés non sans difIculté, s’en ressentait et elle généra
 siècles). JustiIcations,
Jean-Pierre Tardieu
ESCLAVES ET AFFRANCHIS DANS LA VICE-ROYAUTÉ DU PÉROU
L’impossible vie affective et sexuelle e e (XVI -XVIII s.)
A RECHERCHES M É R I Q U E S L AT I N E S
ESCLAVES ET AFFRANCHIS
DANS LA VICE-ROYAUTÉ DU PÉROU
L’impossible vie affective et sexuelle
e e (XVI -XVIII s.)
Recherches Amériques latines Collection dirigée par Denis Rolland et Joëlle Chassin La collectionRecherches Amériques latinespublie des travaux de recherche de toutes disciplines scientifiques sur cet espace qui s’étend du Mexique et des Caraïbes à l’Argentine et au Chili. Dernières parutions Daniel Emilio ROJAS,Amérique latine globale. Histoire connectée, globale et internationale, 2017. Céline GEFFROY,Jeux de mort. Ivresse et rites funéraires dans les Andes boliviennes, 2017. Danielle CAVALERI,Traditions textiles maya du Yucatán (Mexique XXIe siècle). Usages rituels et codes symboliques, 2017. Charlotte PUJOL, Emilie DORÉ, Félicie DROUILLEAU, Susana VILLAFUERTE,Les Amériques créatives. Regards croisés sur les discours et les pratiques, 2017. Maria Luiza TUCCI CARNEIRO,Le Brésil face à l’holocauste et aux réfugiés juifs (1933-1948), 2016. Charles LANCHA,L’Argentine des Kirchner (2003-2015). Une décennie gagnée ?, 2016. Antoine FAURE, Franck GAUDICHAUD, Maria Cosette GODOY H.,Chili actuel : gouverner et résister dans une société néolibérale, 2016. Charlie DAMOUR,La mort et le désir d’immortalité dans l’œuvre de Gabriel Garcia Marquez, 2016. e Eliott MOURIER,État et Églises dans le Brésil du XXI siècle. Les partenariats Public-Religieux, 2016. Julieta QUIROS,La politique vécue. Péronisme et mouvements sociaux dans l’Argentine contemporaine, 2016. Beatriz PALAZUELOS,Acapulco et le galion de Manille. La e réalité quotidienne d’un port au XVII siècle, 2016. Eric TALADOIRE,Les contre-guérillas françaises dans les Terres Chaudes du Mexique (1862-1867). Des forces spéciales au e XIX siècle, 2016.
Jean-Pierre Tardieu
ESCLAVES ET AFFRANCHIS
DANS LA VICE-ROYAUTÉ DU PÉROU
L’impossible vie affective et sexuelle e e (XVI -XVIII s.)
MAQUETTE: Katia AUZOUX DICK, Marie-Pierre RIVIÈRE, Sabine TANGAPRIGANIN Bureau Transversal des Colloques, de la Recherche et des Publications Illustration de couverture :Tapada con su criada negra. Aquarelle de Pancho Fierro (Lima, 1810-1879)
© Réalisation : Bureau Transversal des Colloques, de la Recherche et des Publications Faculté des Lettres et des Sciences Humaines
Université de la réunion, 2017 Campus universitaire du Moufia 15, avenue René Cassin CS 92003 97744 Saint-Denis CEDEX 9 PHONE: 02 62 938585 COPIE: 02 62 938500 SITE WEB : http://www.univ-reunion.fr
© Éditions l’Harmattan, 2017 7, rue de l’École Polytechnique 75005 Paris La loi du 11 mars 1957 interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute reproduction, intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite.
ISBN : 978-2-343-13381-2
EAN : 9782343133812
INTRODUCTION Tant aux États-Unis qu’en Europe, les historiens de la traite et de l’esclavage aux Amériques étudièrent le phénomène sur-e tout dans le cadre du « boom » sucrier de la fin du XVIII siècle e1 jusqu’aux abolitions du XIX . Leur optique économique les amena le plus souvent à ne voir en l’esclave que l’instrument de production, suivant en cela l’enseignement de Karl Marx dans 2 Le Capital (1867) . Depuis quelques décennies, les chercheurs 1  Cela est particulièrement évident avec Daniel P. Mannix et M. Cowley, Historia de la trata de negros(Black Cargoes : A History of the Atlantic Slave Trade: Alianza Editorial, 1968. Hubert Deschamp élargit le, 1962), Madrid champ de son étude dansHistoire de la traite des noirs de l’antiquité à nos jours, Paris : Fayard, 1971. Hugh Thomas présenta enfin en 1997 une vision globale de la traite dans le temps et dans l’espace à travers son œuvreThe Slave Trade. Dernièrement Olivier Pétré-Grenouilleau poursuivit cet effort de globalisation dansLes traites négrières. Essai d’histoire globale, Paris : Gallimard, 2005, puis dansQu’est-ce que l’esclavage ? Une histoire globale, Paris : Gallimard, 2014. La réitération du qualificatif « globale » est significative de la finalité des deux ouvrages, d’une amplitude jamais égalée. Pour autant, des espaces restent encore vides ou à peine effleurés, en particulier pour la traite et l’esclavage dans l’empire hispano-américain, d’où cependant la traite et l’esclavage sont partis. Les Anglais et les Français ne firent que suivre l’exemple des Espagnols. D’une façon générale ces ouvrages pèchent par leur ambition : ne pouvant être rédigés qu’à partir de compilations de lectures, ils ne s’attardent pas sur les sources premières qui se trouvent dans les archives, dont l’étude minutieuse, entreprise avec un esprit critique (car elles offrent bien souvent la vision de la société dominante), est absolument indispensable pour évaluer toute l’horreur de ces crimes contre l’humanité. 2 Rappelons que Marx, parlant des plantations de coton du sud des Etats-Unis, attira l’attention sur le fait que le mode de production capitaliste transforma le caractère patriarcal du système esclavagiste : « Mais à mesure que l’exportation du coton est devenue un intérêt vital pour ces États, l’écrasement du nègre à la tâche, la consommation de toute son existence consumée en l’espace de sept années de travail, comme c’est le cas en certains endroits, sont devenus le facteur et la norme du système à la fois calculateur et bien calculé ». Voir : Karl Marx,Le Capital. Livre 1, Paris : Quadrige/P.U.F., 1993, p. 263. Comme il le signale, c’est la lecture deThe slave power : its character, career and probable designs(1862), de John-Elliot Cairnes, qui sensibilisa Marx sur les effets de cette évolution : « L’agriculture des Indes occidentales, berceau
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ne se contentent plus de projeter sur le passé, en le généralisant à tout un continent, un discours certes d’une logique scienti-fique indéniable, mais pour une époque et des lieux précis. En réduisant les Noirs à l’esclavage pour satisfaire des besoins économiques sous de frauduleux prétextes spirituels – salut de leurs âmes et de celles des Indiens –, on en fit des biens meubles, à la rigueur des animaux sans droit à l’affectivité, c’est-à-dire d’éprouver un sentiment d’amour envers leurs conjoints ou leur progéniture, et de souffrance lorsque ces liens étaient bafoués ou rompus par une instrumentalisation croissante en relation avec le développement de la production. Le plus souvent l’affectivité des esclaves n’avait d’intérêt pour les maîtres que dans la mesure où elle satisfaisait leur propre libido ou leur cupidité. En utilisant la documentation des diverses Archives nationales hispano-américaines, les chercheurs ont initié la reconstruction de l’individu qui, victime du système servile, se mit très tôt, dès ses débuts même, à revendiquer dignité et 1 liberté . Avec les études sur le genre a surgi une nouvelle focali-sation, à savoir la place de la femme noire dans les sociétés esclavagistes. Jusqu’alors peu avait été dit à ce sujet, car, 2 comme l’a souligné Sydney Mintz , l’esclave valait surtout par
séculaire d’une richesse fabuleuse, a englouti des millions d’hommes de la race africaine. Aujourd’hui, c’est à Cuba, où les revenus se chiffrent par millions et où les planteurs sont des princes, que nous voyons une grande partie de la classe des esclaves, non seulement condamnée à ne recevoir que la plus grossière des nourritures et s’épuiser sans relâche à des corvées éreintantes, mais directement détruite chaque année par la lente torture de l’excès de travail et du manque de sommeil et de repos ». Voirid., note 106, p. 297-298. 1 J’y ai contribué, d’abord pour le Pérou, dans les années 1980, et ensuite pour l’Équateur. Jean-Pierre Tardieu,Noirs et nouveaux maîtres dans les « vallées sanglantes » de l’Équateur. 1778-1820, Paris, l’Harmattan, 1997. 2  Sydney W. Mintz (dir.), « Vers une histoire afro-américaine »,in Esclave = facteur de production. L’économie politique de l’esclavage, Paris : Dunod, 1981. L’auteur, dans sa préface, insiste sur l’optique de son étude :  « L’importance de la traite et de l’esclavage ne se limite pourtant pas aux facteurs démographiques et culturels. L’ère esclavagiste marque un tournant essentiel de l’histoire économique du monde occidental puisqu’elle permit l’accumulation massive de ressources essentielles au développement
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sa force de production. Ce critère des négriers priva une grande partie de l’Afrique de ses meilleurs éléments du point de vue 1 physique, d’une « élite biologique » remarque Magnus Mörner , jusqu’au moment très tardif où certains grands propriétaires du Nouveau Monde, poussés par la peur de l’abolitionnisme, se mirent à favoriser la reproduction des travailleurs, en particulier avec les « crèches » casa de los criollos») montées par les 2 saccharocrates de Cuba . Les femmes noires n’étaient pas absentes des cargaisons arrivant aux ports de répartition Cartagena de Indias, Nombre de Dios et Portobelo, Veracruz, et, après la libéralisation de la traite, Buenos Aires ou plutôt Montevideo, mais elles représen-3 taient un pourcentage bien inférieur par rapport aux hommes . Cela ne manqua pas de poser un problème au niveau des relations entre les deux sexes. De plus, elles attirèrent l’atten-tion des conquérants espagnols privés de femmes, puis de leurs descendants qui en firent des objets sexuels compensatoires, enfreignant la législation religieuse destinée à maintenir la paix
ultérieur du capitalisme européen. Le colonialisme européen est souvent considéré comme une étape tardive du capitalisme ; du coup, on oublie peut-être (bien que Marx se soit fort clairement expliqué sur ce point) que la conquête et l’asservissement des peuples du Nouveau Monde et l’essor soudain des empires esclavagistes en Amérique ont amplement alimenté l’accumulation primitive grâce à laquelle le capitalisme européen a pu se développer » (p. X). 1 « … la sélection faite par les négriers et l’élimination impitoyable de tous les esclaves de faible constitution pendant le voyage faisaient des immigrants noirs une élite biologique », inLe métissage dans l’histoire de l’Amérique latine, Paris : Fayard, 1971, p. 32. 2  Jean-Pierre Tardieu,». En torno al reglamento deo dominar « Morir esclavos de Cuba (1841-1866), Madrid/Frankfurt, Vervuert/ Iberoamericana, 2003. Domingo de Aldama, pour ses propriétés, décrit en 1842 cet édifice où, pendant que leurs mères travaillent, sont réunis les enfants sous la surveillance d’une esclave d’un certain âge. Voirop. cit., p. 246-247. Magnus Mörner évoque le problème de l’approvisionnement en esclaves des plantations dans : « Buy or breed ? Alternative sources of slave supply in the plantation societies of the New World », Institute of Latin American Studies, 1981. 3  Philip D. Curtin estime que pour toute la période de traite, l’Amérique espagnole importa 1 552 000 individus d’Afrique, mais il n’offre pas de pourcentages par sexe. VoirThe Atlantic Slave Trade. A Census, Madison, University of Winconsin Press, 1969, p. 46.
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