La Diversité du monde
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La Diversité du monde , livre ebook

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Description


La diversité du monde, c’est vous, moi, elle et lui, au quotidien, dans cette miniature qu’est l’univers urbain tertiarisé contemporain. C’est la série des vaguelettes soutenues de nos petites (in)tolérances qui, de se heurter tout partout, dans tous nos recoins de vie, avec une implacable constance, se neutralisent, tout comme ces mystérieuses ondes sonores s’annulant les unes les autres de par leur simple rencontre. Et le petit monsieur observateur et narrateur, qui percole au fond de nous tous, parle juste un peu, du fait de se raconter bien peu dans un tel monde de peu. Et ce monde, si microscopiquement diversifié, lui, eh bien il fait tellement semblant de faire du surplace qu’il finit par sourdement nous faire prendre conscience du fait que, ce faisant, il avance...






Daniel Ducharme a grandi sous les trembles de l’est de Montréal sans trop savoir ce qu’il allait devenir. Après des études de philosophie et d’histoire, il a opté pour des études professionnelles en gestion de l’information, ce qui lui permet de « vivre » à peu près comme tout le monde. Il est d’ailleurs à l’emploi de Bibliothèque et Archives nationales du Québec depuis la fin des années 1990. Plus jeune, il a joué dans un groupe rock, a écrit une dramatique télévisée diffusée à Radio-Canada et a vécu dix ans à l’étranger. Depuis lors, il essaie de donner corps à ses velléités littéraires sans jamais se prendre au sérieux.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 11 décembre 2017
Nombre de lectures 4
EAN13 9782924550366
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0026€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

La diversité du monde
Daniel Ducharme

© ÉLP éditeur, 2017 www.elpediteur.com ecrirelirepenser@gmail.com
ISBN 978-2-924550-36-6
Conception graphique : Allan E. Berger
Image de la couverture : Métro Berri-UQAM, Société de transport de Montréal (http://www.stm.info/fr/presse/ressources-medias-0/photos-et-images)
Du même auteur
Le bout de l'île , roman. ÉLP éditeur, 2009
Des nouvelles du bout de l’île , ÉLP éditeur, 2010
Ces mots qu’on ne cherche pas …, essai. ÉLP éditeur, 2014
 
à Saandiya
 
1- La diversité du monde : une introduction
Pour prendre la mesure de la diversité du monde, nul besoin de faire le pèlerinage à Saint-Jacques de Compostelle ou l'ascension du Kilimandjaro. Non, pour observer le monde, il suffit de prendre n'importe quel bus de Montréal pour vous rendre au boulot. Vous entrez dans le bus, vous vous dirigez vers le fond et vous vous installez sur la banquette à deux places située juste après les portes arrières. De là, vous regardez le monde...
Les individus qui le composent se présentent alors un à un devant vous. De votre poste d'observation, vous pouvez les jauger en toute tranquillité. Ce faisant, vous constatez rapidement des différences marquantes entre les êtres humains.
Certains garçons sont vêtus à la limite de la décence. Pantalons courts qui, en ne descendant pas plus bas que la mi-cuisse, laissent deviner l'anatomie intime de la personne. Croyez-moi, c'est assez dégoûtant. Cette même personne porte parfois une chemise au col généreusement ouvert mais, plus souvent qu'autrement, sa préférence va au t-shirt froissé sur lequel on peut lire quelque slogan stupide. Et je passerai sous silence le spectacle de sa pilosité généreuse...
Certaines jeunes filles ne font guère mieux. Elles arborent fièrement leurs bras dénudés sur lesquels sont gravés des tatouages représentant des reptiles, des fleurs et, parfois, des symboles quasi religieux. Certes, elles imitent en cela une chanteuse connue, du moins connue dans la localité avoisinante, sauf qu’elles accusent vingt kilos de plus que celle-ci… Bref, l’effet n’est pas le même.
D’autres personnes sont, par contre, bien vêtues, mais elles prennent un air pincé quand elles croisent d'autres frères humains, ce qui ne les rend pas plus sympathiques aux yeux de l'observateur que je suis.
Et il y a moi aussi, au fond, qui ne vaut guère mieux que mes contemporains qui m’observent aussi, sans doute, d’un air indifférent. Comme eux, je prends les transports publics, les côtoie dans ces petits moments intermédiaires de la journée, sauf que moi je ne peux passer près d’eux sans les voir — et parfois même sans les observer. L’esprit à la dérive, le décodage s’opère alors tout seul, sans que je le veuille forcément. Il est fait de sensations diffuses, de préjugés, de réflexes hérités de mon histoire, de mon éducation, mais toujours conceptualisé avec retenue et prudence par respect pour l’autre, sachant qu’on n’enferme pas les gens dans des cases… Bref, je me garde bien de réduire les gens à leur mode d’apparence au monde.
À travers ces observations et portraits, c’est aussi bien moi-même que j’analyse, surpris de ce qui peut me passer par la tête parfois. À travers ces saynètes, j’expérimente combien nous sommes utiles les uns aux autres, à quel point les réflexions que j’ai sur autrui me renseignent sur moi-même — en autant que je me donne la peine d’être honnête, bien entendu.
L’étape suivant l’observation serait l’échange, quand tout à coup l’image de l’autre que j’ai fabriquée se déchire comme une affiche, et qu’apparaît la vraie personne, réactive et vivante, qui échappe à mes élucubrations pour dévoiler la réalité, ici souvent absurde, décevante, cruelle, mais parfois étonnamment bonne aussi alors que je ne m’y attendais pas. Je questionne ainsi mes préjugés et m’interroge sur la place de chacun en ce monde.
Dans la plupart des textes que vous allez lire, c’est le passage de la personne « pré-jugée  » à la personne « réelle  » qui est abordé, en mettant l’accent du même coup sur ce malentendu indissociable des rapports humains. Dans chaque récit, il y a une tension, une attente vis-à-vis de l’autre, une soif de contact et un regret quand le rendez-vous est manqué, même si, pour atténuer ma déception, je me réfugie dans le « après tout, cela ne me regarde pas, je n’ai pas à juger  ». À certains moments, je l’avoue, cette retenue du regard porté sur autrui est placée là comme garde-fou, car j’ai moi-même la sensation que le surgissement de sentiments souterrains confus n’est pas loin, sans cesse contenu dans les règles apprises du respect de l’autre, quitte à prendre énormément sur soi — à la limite de l’irrespect de soi ? D’où le soulagement que pourrait ressentir le lecteur lorsque, dans La femme au foulard , il peut lire à la fin : « Il suffit de demander  »…
L’un dans l’autre, je ne me reproche pas la vision toute subjective que je m’autorise malgré tout dans ces microfictions, puisque — à la différence des passants — l’écrivain, lui, prend le risque de s’offrir davantage aux regards indiscrets des lecteurs ! 
Je mets toutefois ceux-ci en garde : certains de ces textes ne relèvent pas de l’observation, mais plutôt de l’impression transformée en fiction, et, de ce fait, ils confinent parfois aux délires de l’imagination. C’est le cas notamment de Le passage piétonnier , de La poubelle et d’autres textes. La frontière, je vous le concède, n’est pas toujours aisée à établir mais, au fond, cela a assez peu d’importance. 
En terminant, j’aimerais remercier Nathalie Caro qui a pris la peine de lire ces textes un à un et de me communiquer ses impressions. D’ailleurs, des passages de cette sorte d’introduction sont carrément tirés de ses propos, un plagiat que je m’autorise avec son consentement. Je remercie également Allan E. Berger et Paul Laurendeau, mes deux collègues et amis d’ÉLP éditeur qui ne manquent jamais de m’encourager, même si je me laisse moi-même aller au découragement, parfois, face à La diversité du monde …
2- Dans le bus
Cet après-midi, assise sur la banquette latérale du bus qui me ramène à la maison, il y a…
Une dame forte, pour ne pas dire obèse, qui dort la bouche ouverte, dodelinant de la tête de temps à autre. Elle occupe à elle seule la place d'une personne et demie. Par ailleurs, elle a écarté les jambes de sorte que de mon siège je peux voir sa petite culotte. Cela fait comme une tache orangée en dessous de sa jupe verte.
À côté d'elle, une femme de taille moyenne lit L'aveuglement de José Saragamo, célèbre écrivain portugais qui a remporté le prix Nobel de littérature en 1998. Mais elle a du mal à tourner les pages de son livre tellement elle est coincée par le débordement corporel de sa voisine. Tout comme le jeune homme à lunettes qui tente désespérément de saisir son téléphone logé dans la poche droite de sa veste.
Sur la banquette du fond, un jeune homme écoute de la musique techno en frappant du pied. Sur sa tête, il porte un casque hi-fi assez bon marché. Il doit avoir les oreilles en compote parce qu'on peut déceler ses choix musicaux à vingt mètres... À ce rythme, il sera vraisemblablement à moitié sourd avant l'âge de trente ans.
Tout près de lui est assise une jeune fille qui joue à un jeu de casse-bonbons sur son téléphone à la marque de fruit. Quand on pense que ce téléphone vaut plus de 1000 dollars, on est en droit d’espérer une utilisation plus « intelligente  » de ce condensé technologique… La jeune fille se tient près du jeune homme, mais il m'est impossible de déterminer le lien qui les unit tellement ils sont dissemblables…
Et dans le bus il y a moi, homme vieillissant épuisé par de nombreux mandats professionnels,  qui écoute un trio pour piano de Charles-Marie Widor, un compositeur que personne ne connaît de nos jours. Je poursuis ma vie au milieu de cette faune humaine à laquelle j'appartiens, que je le veuille ou non.
o0o
J'ai pris le bus le plus lent, celui qui s'arrête à tous les arrêts jusqu'à chez moi. Cela me laisse le temps nécessaire pour formuler trois observations supplémentaires.
D'abord, le tiers des occupants sont en surcharge pondérale, une manière élégante de dire qu'ils souffrent d'obésité. Cela pose un problème de santé publique, bien entendu, mais dans un bus, la difficulté est ailleurs. Voilà, la société de transports a installé des sièges moulés, comme si nous avions tous la même taille, le même poids. Comment dit-on en anglais ? One size fits all ou quelque chose d'approchant. Ces concepteurs de bus ne prennent jamais le bus, c'est évident. Le simple fait de privilégier les banquettes latérales aux sièges à deux places l'illustre de façon éloquente. Sur ces banquettes, les voyageurs assis sont ballottés de gauche à droite, de droite à gauche, en fonction des arrêts intempestifs du chauffeur. Et quand votre surpoids fait en sorte que vous débordez de l’espace moulé, cela vous place dans une position inconfortable pour vous et, surtout, pour les autres qui se retrouvent souvent coincés entre deux… Bref, en fonction de votre environnement immédiat, cela peut vite virer au cauchemar.
Autre élément d'observation de ce bus de l’après-midi : les téléphones... Depuis deux ans, les ordinophones, ou smartphones si vous préférez, sont accessibles à tout le monde, les jeunes comme les vieux, les riches comme les pauvres. Ils sont devenus des objets usuels dont on ne pourrait plus se passer. Ce matin, je constate que la moitié des voyageurs tiennent un téléphone à la main. Ceux qui m'entourent s’adonnent surtout, sur ces derniers,  à des jeux...  D'autres consultent leur compte Facebook. Je dois faire figure d'exception en écrivant sur mon téléphone à clavier d'une marque canadienne, célèbre au début des années 2000. Bref, le téléphone, je veux bien… mais pourquoi le tenir constamment à la main, même quand on ne l’utilise pas ? 
Troisième élément d'observation : les vêtements. Dans tout le bus, deux ou trois personnes seulement peuvent être considérées comm

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