Néachronical, 3
272 pages
Français

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Description

Par trois fois, on m'a laissée pour morte.


Dans l'ombre d'un seul et même homme.


Le temps de la vengeance est enfin venu.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 11
EAN13 9791090627796
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Jean Vigne
Néachronical III MANUS DEI
Éditions du Chat Noir
« La vie, c’est la fourmi. La mort, c’est la cigale . À choisir, je préfère la cigale. » Néa
Maintenant, dans un tombeau... Je frappe la dalle de pierre. Encore... Toujours... Mes poings me font un mal de chien, mais je poursui s mon implacable travail de sape. Une besogne inutile surtout, je ne suis pas d upe. En pleine possession de mes moyens, je n’aurais aucune chance de soulever cette masse de granit, alors piégée dans ce trou à rat et diminuée par cette faim crois sante, que puis-je espérer ? Deux jours déjà que je cogite dans cette prison de pierr e, à attendre un miracle qui ne viendra plus. Ma main caresse le cadavre de mon ami , ce tigre blanc au regard d’azur tué par Merlin. Bon, pour être franche, mon compagn on d’autrefois pue la mort. Sa lente décomposition est intenable. Encastrée entre la dépouille du fauve, et monsieur feu chevalier Guinard, je suis bien lotie. Je n’ai plus de larmes à offrir, j’ai tout donné. J’aimerais montrer plus de courage, mais c’est l’as sèchement, la source épuisée par trop d’événements en si peu de temps. D’un geste, je touche la pierre, je lâche mon pouvo ir dévastateur contre elle, j’attends, rien ne se passe. Logique, ici, dans l’a ntre de Viviane, mon pouvoir de destruction reste inefficace. Viviane, mon ancêtre morte par la faute de Merlin et de sa complice, Morgane, cette sale traînée. Je lui ai offert ma confiance et en retour, elle m’a trahie. Tout s’embrouille dans mon esprit. Je dois faire le point sur ma situation. Merlin est un nécromancien, ramené à la vie par Viviane – si on peut associer notre état à ceux des vivants, une vérité que je préfère occulter. Si j’ai bien compris, l’homme n’a pas apprécié l’initiative de m on ancêtre et le lui a fait chèrement payer. Et Morgane dans tout ça ? Visiblement amoure use de Merlin, elle a traversé les siècles pour le retrouver, et quoi de mieux pou r résister aux affres du temps qu’une petite transformation en vampire. C’est ding ue, quand j’y pense. Nécromancien, vampire, et pourquoi pas au passage l a fée Carabosse ? Bordel, il me faut sortir d’ici. Appeler des animaux à l’aide ? C e ne sont pas quelques taupes qui pourront soulever la dalle et, de toute manière, au cune bête ne parviendra à percer les parois rocheuses du caveau. Je suis seule, dése spérément seule et sans solution. Merlin m’a piégée et pire, il détient Jul iette. Dieu seul sait ce qu’il est capable de lui faire. Ah, si seulement j’avais un c ric à ma disposition... un cric... une idée germe, ma foi stupide comme tant d’autres, mai s je n’ai que ça dans mon tiroir à bazar. OK, mais comment procéder ? Merlin en voulan t m’impressionner s’est fendu d’une explication assommante, genre seuls les plus puissants nécromanciens pouvaient espérer accomplir de grands miracles, et blablabla blablabla. Merlin n’est certes pas le roi de la franchise, mais je le soupç onne d’être tout sauf un vantard. C’est le moment pour moi de découvrir si oui ou non , je suis exceptionnelle. Je me souviens de Morgane, camouflée sous l’identité de S ylva, cette policière. Nous étions à la morgue, à ma demande elle a extrait de la mort Juliette avec son Rudis et Ambula. Morgane n’est pas une nécromancienne, mais un vampire et, surtout, une sorcière. Peut-être utilise-t-elle des arcanes comm uns à la nécromancie ? Avec des si, je risque de refaire le monde. Je risq ue surtout de finir desséchée dans ce tombeau. Allez, c’est décidé, je tente l’ex périence. Je ferme les yeux et me concentre. L’énergie dans mon corps est faible, je dois puiser les dernières ressources, gouttelettes infimes qui vont bientôt m e manquer. Les ondes parcourent mes veines, vibrations différentes des précédentes, emplies d’une force inconnue. Je touche mon tigre et transmets ce don maudit à mon a nimal. Rien ne se passe, sinon
le profond silence que ma respiration absente ne ri sque pas de briser. Un silence de mort... l’anecdote m’agace, je serais plus inspirée de me focaliser sur ma situation pour le moins périlleuse dans ce tube de ténèbres. D’un geste vif, je retire ma main. J’ai senti un mo uvement, oh, léger, mais bien réel. Le temps passe et moi, paralysée, je n’ose ém ettre le moindre son. Suis-je idiote d’avoir ainsi peur de mon animal de compagnie ? Oui , mais voilà, jouer aux apprentis sorciers comporte des risques. J’ai vu trop de film s où le malheureux novice ouvrait les portes de l’enfer et y voyait déferler une tonn e de monstruosités en guise de récompense. Et si Grognon passait de l’état de chaton vorace à celui d’éradicateur de donzelle un peu trop prétentieuse, nécromancienne o u pas ? Allons Néa, pas de panique, mon gros matou va se montrer mignon tout p lein. Le feulement qui suit me glace, je sens ses muscles puissants me coller et... une langue me lécher le visage. Oui, mon gros, oui, c’est ça. Je pars dans un fou rire, la pression retombe et av ec, une partie de mon angoisse. Je caresse le poil soyeux de mon fauve, r éconfort pour moi de l’avoir à mes côtés, de le retrouver par-delà la mort. Je n’a urais jamais pensé réussir un tel exploit. Cela ne me sort pas pour autant d’affaire. D’une pensée, j’ordonne à Grognon d’user de sa puissance. Aussitôt, il pousse sur ses quatre membres, force incroyable offerte par une nature généreuse. Je me mets de la partie, armée seulement de mes petits bras et de mes genoux. Et l’incroyable opère . La dalle bouge... Je hurle afin de me donner du courage, accompagnée du rugissement de ma bête. Encore, allez, pousse ! L’animal exprime toute sa puissance et, tout en gro gnant, soulève l’obstacle pour le renverser. Enfin libre ! Je m’assois, extirpe cette sensation oppressante en goncée dans ma poitrine d’un souffle, avant de détailler la pièce plongée dans l a pénombre. Deux torches encore rougeoyantes terminent leur existence, luminosité t rop pâle pour m’offrir un éclairage de l’endroit que je sais vaste. Merde, c’était recu ler pour mieux sauter ! Perdue dans les ténèbres, jamais je ne sortirai de cet enfer. J e n’ai même pas un briquet pour espérer un peu de lumière. De quoi suis-je punie po ur vivre ainsi un tel calvaire ? Lentement, je glisse hors du tombeau, prends positi on sur la roche humide, cherche à tâtons un quelconque indice. Mon tigre me rejoint sans mal. Le peu d’éclairage offert par les dernières braises lui su ffit pour se guider. Ce n’est pas mon cas, mon crâne servant de parechoc à mon voyage dan s l’inconnu. Maudit soit Merlin, Morgane, et tous les autres. Je suis foutue, inutile de prétendre le contraire. Je m’adosse contre la pierre rêche de ma tombe, abattue. Mon tigre s’allonge à m es pieds. Je peux sentir ses flancs puissants, cette rage animale. Un fauve nécromancien, voilà une curiosité dont je pourrais me glorifier et personne n’en saura jam ais rien. Nous allons pourrir dans un caveau, certes, plus grand que le précédent, mai s tout aussi hermétique. Une forteresse de pierre que rien ni personne ne peut v enir briser. * Juliette, tétanisée de douleur, essaye de se releve r. Son nouveau corps, autrefois celui de Merlin est pourtant musculeux, mais trauma tisée par les assauts magiques de Morgane, elle ne peut que s’asseoir et patienter . Elle est là, justement, cette maudite sorcière, à la surveiller d’un œil torve. S on visage fin, encadré de cette
chevelure couleur plumes de corbeau, lui confère un air supérieur. Une expression bien éloignée de la Sylva d’autrefois, jeune polici ère volubile au sourire facile. Comment diable a-t-elle pu ainsi jouer la comédie e t offrir ce double visage à la face du monde ? Merlin, posté plus loin, finit d’aliment er le brasier dont il compte bien se servir pour effacer les traces du dernier témoin de leur existence. En l’occurrence, celle qui n’a jamais rien demandé sinon de profiter d’une vie paisible. Juliette, une jeune fille embarquée malgré elle dans une aventure morbide et qui aimerait trouver un moyen d’échapper à cet enfer. Le problème, sa de rnière tentative s’est soldée par un échec cuisant. me Morgane.Ne sois pas inquiète, petite, ce sera rapide, enta Tu dis ça pour te rassurer ? Tu n’as qu’à tester d ’abord, tu me diras comment c’était... Juliette retient un sale pute du bout des lèvres. E lle n’a jamais aimé la grossièreté des autres, en particulier ses camarades de classe qui jalousaient son avance à l’école. Des gamins immatures et donc, nécessaireme nt envieux. Ce n’est pas pour tomber dans ce type de travers, même à l’aube de la mort. Morte... mais justement, elle l’est déjà, tout ce qu’il y a de plus crevée, sans respiration ni battements de cœur, même pas ce petit signe de chaleur corporelle pour la rassurer. Elle n’est qu’une enveloppe froide, réceptacle pour une âme égarée. M organe, de son pouvoir, l’a ramenée à cette pseudo existence de nécromancienne, et la même Morgane, aidée de son célèbre complice, veut aujourd’hui la suppri mer. C’est à ne rien y comprendre... ... Morgane affiche une moue agacée. Elle abhorre les é vénements à venir. Tuer ne lui a jamais posé de problème, surtout des rustres, des hommes sans foi ni loi, des types dont l’éducation souffrait d’un profond manqu e de respect envers les femmes. Pas le moindre remords, aucun cauchemar ni même l’o nce d’un regret, mais là, il s’agit d’une simple gamine, certes emprisonnée dans l’ancien corps de Merlin, cela ne la rend pas pour autant coupable. Alors, pourquo i persévérer dans cette voie dont elle sait l’issue fatale ? Parce que la gamine sait ! Morgane a déjà trop souffert de la solitude, de l’a nimosité des hommes poussés par leur peur de l’inconnu, leur sentiment d’impuis sance face à sa grandeur. Pas question pour elle de revivre une telle expérience, quitte à avoir du sang sur les mains. Merlin les rejoint. Bon, c’est l’heure. Le coin est abandonné, mais on n’est pas à l’abri de gamins ou de promeneurs un peu trop curieux. Juliette aimerait gagner du temps. Si seulement Néa était là, elle trouverait une solution à son problème. Une illusion à laquelle Ju liette ne peut même pas se raccrocher. Néa, tout comme elle, a été vaincue par Merlin et Morgane. Qui, de nos jours, pourrait s’opposer à des êtres investis de t els pouvoirs ? Juliette observe son ravisseur, ce magicien dont le nom suffit à embrase r l’imaginaire des plus jeunes. Si ces derniers le voyaient tel qu’il est, un assassin nécromancien dont le seul but est de voler le corps d’autrui pour survivre aux affres du temps. Et c’est elle la dernière victime de Merlin. La voilà engoncée dans ce corps trop grand, autrefois la propriété du nécromancien. Bien entendu, une fois son méfait commis, Merlin a regagné son apparence d’antan, délaissant celle de Juliette. Pa s question pour lui d’apparaître sous les traits d’une jeune fille fragile, son ego s’en trouverait affecté. Le salaud,
Juliette enrage mais ne peut rien faire, sinon atte ndre la sanction finale. Après tout, n’est-ce pas là le seul destin enviable pour elle ? La mort l’a déjà cueillie une fois, elle vient réclamer son dû. Merlin, loin de s’intéresser à la détresse de sa prisonnière, s’adresse à Morgane. Tu es certaine qu’elle ne nous causera aucun probl ème ? Morgane grimace. Je dois vraiment faire ton sale boulot ? elle.On est deux, dans l’histoire. Chacun sa part, ma b Une bravade silencieuse s’opère entre les protagoni stes, regard plongé dans celui de l’autre afin de le voir céder. Finalement, c’est Morgane qui abdique, consciente qu’elle ne peut espérer vaincre l’entête ment de Merlin. Elle-même est convaincue qu’aucun choix subsidiaire n’existe. Ell e se concentre, sous les yeux terrifiés de Juliette. Ses doigts se parent d’une t einte bleutée du plus bel effet, mini arcs électriques dont le parcours hiératique forme une toile d’araignée mouvante en guise de gants. Et d’un geste vif, elle projette sa puissance sur le corps de Juliette. La jeune fille s’arc-boute, traversée d’une douleur sa ns nom. La souffrance s’éternise, Morgane s’assurant ainsi de la rendre docile. Julie tte n’en a pas encore conscience, mais investie de son don de nécromancienne, elle po urrait se révéler une redoutable adversaire. Une adversaire dont Morgane entend anni hiler toute volonté de rébellion. Enfin, la sorcière cesse son jeu cruel, les mains e ntourées d’une épaisse vapeur. .Elle est à toi ! grogne Morgane, le visage mauvais Cette colère visible n’est nullement adressée à sa pauvre victime, Merlin le sait. Il connaît sa compagne, elle n’apprécie guère ses choi x récents. Elle n’aime surtout pas se voir ainsi forcer la main, mais de solutions , ils n’en ont plus. La gamine doit disparaître, point final. Accroupi, il agrippe Juli ette encore brûlante, la soulève, non sans difficulté – Merlin ne s’imaginait pas peser u n tel poids – et la dépose sur son épaule. Il est temps d’en finir, Morgane pourrait c hanger d’avis. Lui-même est traversé d’un doute. Tuer une enfant n’est jamais f acile, mais ce n’est pas la première, et ce ne sera sans doute pas la dernière. Merlin s’approche du brasier et dit, en guise d’épitaphe :  Désolé, jeune fille. Crois-moi ou pas, mais on aur ait aimé éviter de t’embarquer là-dedans. Un regard sur Morgane, celle-ci se défile d’un mouv ement de tête pour fuir sa culpabilité. Et il projette le corps dans les flammes... * D’énervement, je frappe ma nuque contre la pierre b rute. Ouah, quelle conne, ça fait un mal de chien ! Mes paroles résonnent dans cette chambre funéraire, écho dont la seule réponse est les quelques gouttes d’humidité qui percent la voûte de ce lieu ancestral. Comment m’en sortir ? Ici, tous mes pouvoirs de des tructions sont bloqués par ce sortilège lancé par Viviane, Dame du Lac, mon ancêt re. Si j’ai tout compris, seuls les enchantements dont le but est de nourrir la terre m ère, et non de la détruire, peuvent être lancés. Ainsi, impossible de réduire en poussi ère la pierre de ce caveau. Une horrible pensée me traverse, un mauvais sentime nt concernant Juliette. J’ai quelque peu oublié la gamine, concentrée sur mon ca s pour le moins désespéré. Aucun doute, Merlin va s’en prendre à elle afin de s’emparer de son corps. Une fois
fait, il devra s’en débarrasser. Pas de témoin, le principe de tout bon assassin, nécromancien ou pas, et en matière de pourriture, M erlin n’est pas le dernier de sa classe. Vous devriez prendre l’épée ! Bordel ! Je sursaute, me cogne contre le rebord de pierre du sarcophage, vois trente-six chandelles – au moins ai-je le droit à u n peu de lumière dans ce tombeau de ténèbres – pour finir par m’affaler sur mon tigr e qui grogne de surprise. D’un geste affolé, je m’assois, balaye de la main l’obscurité qui me fait face tout en lâchant, l’estomac en berne : Qui est là ? Moi. Connard, ce n’est pas une réponse, ça ! Je retiens de lâcher mon fiel et cherche l’origine de la voix. Elle venait de la droite, à p résent, elle se trouve sur ma gauche. Et monsieur Moi porte-t-il un nom ? Chevalier Guinard, pour vous servir. Nom de Dieu, le mort enterré dans le caveau ! Il es t tombé de son sarcophage équipé d’une paire de lunettes X Ray ? Comment peut -il me voir dans cette obscurité totale ? Prenez l’épée, insiste-t-il. e trouve.Comment voulez-vous, je ne sais même pas où elle s Sur votre gauche, à cinq pas environ. Sur ma gauche... je me tourne, avance, les mains en guise de protection. La voix du chevalier m’interrompt. Arrêtez-vous là. Je m’exécute. ’avez qu’à tendre le bras.Tournez sur votre droite... arrêtez. Voilà, vous n Bordel, je m’amuse à colin-maillard avec comme guid e, le fantôme d’un chevalier. J’espère que ce dernier ne m’a pas roulé e dans la farine. Ces derniers temps, le peu de confiance accordée à d’autres ne m ’a guère réussi. Soudain, ma main touche le pommeau rond et lisse d’une arme. Je descends, glisse les doigts sur la poignée froide et tire la lame à moi. Et soudain, tout bascule... Une vive lumière envahit la pièce. Éblouissante com me un soleil d’été, je ne peux soutenir son apparition. Une énergie vorace s’empar e de mon bras, remonte pour investir mon corps, mon esprit. Des souvenirs se mê lent, se percutent, s’ordonnent, pour finir par former une histoire, celle de mes an cêtres. Chaque Dame du Lac m’apporte son lot d’offrandes, une succession de sa voirs dont je ne maîtrise pas l’intensité. Une puissance écœurante, tant elle est débordante, violente sous sa nature sauvage. Bientôt, le feu qui brûle mes entra illes cesse, ne laissant qu’une faible lueur en lieu et place de ce prodige. L’épée , Excalibur, est baignée d’une auréole blanchâtre, légère coloration dont les refl ets baignent le lieu d’ombrages mouvants. J’aperçois enfin mon tigre, plus beau enc ore que par le passé. Il respire la forme, bien que sa fourrure soit toujours entachée de son sang, sang versé par Merlin. Un peu plus loin, dressé dans son armure co mplète, un chevalier m’observe d’un sourire mélancolique. Chevalier Guinard, ou to ut du moins, ce qu’il en reste. Je n’ai plus de doute sur la nature du prodige. L’homm e est mort voilà bien longtemps, tué par ce roublard de Merlin. Pour mieux me le con firmer, je jette un œil sur le corps momifié encore présent dans le caveau. ne grave. Je suis coincé icije ne reverrai les miens, conclut-il, la mi  Jamais
depuis tant de siècles, prisonnier de cet endroit l ugubre et sans âme. Je comprends sa peine, moi, je suis devenue à moiti é folle en moins de deux jours... des siècles, je n’ose imaginer. chevalier, pourquoi avoir attendu si lo  Dites-moi, ngtemps pour vous manifester ? Je préfère rester discret. Trop de trahisons m’ont appris l’art de la méfiance. Que s’est-il passé ? croisé le chemin d’une femme, une sorcière du nom de Marie-Madeleine. J’ai À cette époque, j’étais perdu, un vivant sans âme. Cette démone devait m’aider à ressusciter mon fils et ma femme, tués par Arnaud, mon félon de frère. La magicienne m’avait convaincu qu’un tel prodige était possible. C’est ainsi que j’ai accepté de la suivre dans cette grotte de malheur. Marie-Madelein e n’était en fait que Viviane, la vile et non moins célèbre Dame du Lac. Cette derniè re m’a jeté un sort pour me voler mon corps et l’offrir à Merlin, enfermé ici depuis des siècles par sa faute. Libéré de l’enchantement de la Dame du Lac, le corps dans leq uel mon âme se trouvait enfermée a fini par mourir. C’est ainsi que je fus fait prisonnier dans cette sombre grotte, sans autre possibilité que d’attendre une h ypothétique liberté, encore et toujours. Cette partie de l’histoire, je connais. Comme tant d’autres, l’homme s’est fait abuser. Ce qui m’agace, c’est de voir mon ancêtre, Viviane, complice de tels agissements. Il est temps pour moi d’offrir à ce ma lheureux ce que nul ne peut me donner en cet instant. Approchez, chevalier. Il m’observe, surpris. Ses pupilles noires, caracté ristiques de l’au-delà si je me fie à mon expérience, ne cessent de me dévisager dans l ’espoir de percer mes sombres secrets. Impossible, preux chevalier, je suis un mu r pour vous. Finalement, il obéit, s’avance et me rejoint. Il est temps pour vous de poursuivre votre voyage, chevalier. Le voulez-vous ? Je... Il se détourne de moi, détaille une dernière fois l e corps à l’intérieur du sarcophage. Ce n’est de toute manière pas le sien, mais celui de Merlin, lui prouvant si nécessaire qu’il n’a plus aucune attache sur cette terre. Je le veux, prononce-t-il, d’une voix grave. D’un geste solennel, je pose mes doigts sur son fro nt et prononce ces simples paroles. Partez, alors. Quelques secondes passent, le temps de voir ses pup illes virées au bleu, et l’homme s’efface de la pièce, fantôme dont les cont ours se désagrègent pour s’évanouir à jamais. Chevalier Guinard n’est plus, il a bien de la chance, lui, car mon cas s’avère plus épineux. Certes, je possède une jo lie épée qui, accessoirement, se transforme en sabre laser pour m’éclairer. Et alors ? Devant moi, le seul accès est barré par un monticule de pierres. Un barrage infra nchissable, même à coups d’épée magique. Bah, qui ne tente rien... J’arme mes bras, soulève l’arme fort légère ma foi, et frappe le premier bloc de toutes mes forces. La lame se plante dans la pierre , résonne d’un bruit métallique et me rend les fruits de mon effort sous la forme d’un e résonance désagréable. OK, c’est manqué ! Je m’apprête à réitérer mon exploit, la persévérance étant l’arme des braves, un éclair traverse mon esprit.
Une fulgurance qui porte un nom : Juliette. Elle est en danger ! Un appel au secours dont j’ign ore la provenance, mais dont je ressens l’existence au fond de mes tripes. Je me concentre, ressens une brusque souffrance, od eur de brûlé, fumée, flammes. Je serre la poignée de mon épée, focalise mon énergie en un seul point, à la recherche de la source. Juliette a besoin de moi , je dois l’aider, la sortir de ce mauvais pas... Une violente douleur traverse mon bras. Un choc me propulse au sol, mon crâne frappe un bloc de granit mal placé, Excalibur roule et s’éteint. Pourtant, le noir total ne gagne pas le tombeau, éclairé par une faible lueur chancelante. Mon regard se fige sur ma découverte. Un corps gît à mes pieds, le dos en feu. Je l’agrippe, le retourne... et recule aussitôt, atteinte d’une peur panique. La surprise passée, je plonge sur mon épée et lève l’arme au-dessus de moi, prête à frapp er le mécréant. Merlin est là, devant moi et sans défense. Je ne connais pas la na ture du prodige, mais je bénis ce sortilège qui m’a amené ce perfide menteur. Qu’il p aye, qu’il meurt ! Non, attends, c’est moi Néa ! La main tendue, Merlin m’implore. Rêve-t-il ce gran d pourri ? Nous ne sommes pas dans Alice au pays des merveilles, imbécile heu reux ! uger. Aide-moi, arrête le feu, jeJuliette... c’est moi, Juliette. Je ne peux pas bo t’en prie. Mon bras se bloque. Je sais pourtant qu’il s’agit d ’une ruse, un mensonge destiné à me tromper. Malgré tout, mon instinct me pousse à croire le contraire. Maudit instinct, je te hais de me rendre si faible. Si jam ais je plonge dans la merde à cause de toi, je te fais ta fête. Prouve-moi que tu es vraiment Juliette ! Les flammes continuent de dévorer ses habits, provo quant une souffrance visible inscrite sur le visage de Merlin... de Juliette... argh, je ne sais plus. Malgré la douleur, elle reprend : i dit ceci : j’ai toujours rêvé Lorsque je t’ai donné ma vie, au cimetière, je t’a d’être une déesse. Avec toi, je le serai un peu. OK, c’est Juliette. D’un bond, je me précipite et m e couche sur les flammes. Mon tigre, sous mes ordres, me rejoint et écrase de sa masse les dernières parcelles du corps martyrisé encore visible. Bientôt, les flamme s ne sont plus, mais la douleur reste vive. J’aide Juliette à s’asseoir, cette désa gréable sensation de m’occuper de Merlin encore à l’esprit. Que s’est-il passé ? Merlin a changé de corps, il m’a volé le mien. Ce disant, elle se recroqueville, tel un oisillon t raversé d’un coup de froid. Elle poursuit, l’expression figée. e moi en me jetant dans unEnsuite, lui et Morgane ont voulu se débarrasser d brasier. Les maudits. Voilà qu’elle pleure, larmes qui, sur la figure bur inée de ce géant, me procurent une étrange sensation. J’ai mal, Néa. C’est normal, ma grande. Vraiment très grande, baraquée, et poilue en plus. J’ai du mal à imaginer une gamine enfermée dans cette armoire à glace. Si seul ement j’avais la clef pour l’ouvrir, mais ce pouvoir n’appartient qu’à Merlin. J’occulte l’image renvoyée par le corps de
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