Dire le monde
192 pages
Français

Dire le monde , livre ebook

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192 pages
Français

Description

Contre le préjugé qui oppose le langage à l'expérience comme la forme au contenu ou le vêtement à la pensée, l'examen montre que le langage est une des formes fondamentales de notre appréhension du monde. C'est la forme d'expérience dans laquelle ce que nous disons le situe dans le champ d'une expérience envisageable. La langue est une cartographie virtuelle de l'expérience.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2010
Nombre de lectures 175
EAN13 9782296241183
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

INTRODUCTION

Les nécessités de l’édition ont imposé de répartir une
exploration coordonnée en quatre volumes. Si chaque volume est
axé sur un thème propre et consistant, sa compréhension n’est pas
possible indépendamment de la lecture attentive des autres, en
particulier du premier.Comme cette investigation s’écarte
massivement de la tradition, tant dans sa manière de procéder que
dans ses résultats, il n’est pas possible de résumer l’acquis des
volumes précédents. Toutefois, la préface dupremiervolume
dessine la perspective d’ensemble ; il peut êtreutile de s’yreporter.

Dans ce secondvolume, il s’agit d’aborder les manières de
saisir le monde autres que la perception mais tout aussi communes
etuniverselles, à savoir le langage et la pensée ordinaire.
D’emblée, ceci s’oppose à la tradition pour laquelle seule notre
perception pourrait être appelée expérience. Ici, il s’agit de justifier
cette extension mais surtout de montrer en quoi ces formes, tout
aussi authentiques et importantes, se distinguent entre elles en
s’articulant, ajoutant à la diversité des modalités d’expériences
décelées dans le premiervolume.
Ainsi commence à prendre corpsune figure plus réaliste et
moins idéologique de l’expérience, figure marquée par la diversité
des modalités. Dans ces deuxpremiersvolumes sont explorées les
modalités spontanées communes à tous les hommes, terrains sur
lequel se constituent non seulement les connaissances, légitimes ou
prétendues, mais lesvisions dumonde commandant nos actions et
réactions. Lorsqu’il s’agit de comprendre comment se constituent
nos connaissances, c’estune erreur grave de s’en tenir à la
perception, qui plus est àune figure largement inventée.
Dans lesvolumes suivant, nous tâcherons d’élucider les formes
d’expérience caractérisées par l’effort maximal d’en contrôler et
conduire l’effectuation. Ainsi, s’amplifie la diversité des formes
d’expérience en étant amenés à distinguer rigoureusement la
connaissance de la nature et celle de ce qu’ilya de proprement

INTRODUCTION

humain dans l’homme, à distinguer par conséquent les sciences de
la nature et les disciplines spécifiquement humaines.
L’investigation ne s’arrête pas à caractériser les diverses
modalités de notre manière de saisir le monde mais cherche en
même temps àvoir comment ces modalités peuvent s’articuler.
Cette dernièrevisée constitueune mode de connaissance propre
qu’il me semble caractéristique de la philosophie. Il sera esquissé à
la fin duderniervolume

CHAPITRE I

IMAGES, SYMBOLES, SIGNES, …

Si, comme j’ai tâché de le montrer dans le premier chapitre du
volume précédent, est expérience tout sorte de rapport entre
homme et monde dans la mesure oùce rapport comporteune part
consciente, il est clair que le langage dit naturel estune forme
d’expérience dumonde, etune formeuniverselle autant que la
perception. Ce n’est que dansune perspective de dualité plaçant
l’entité consciente en face dumonde qu’on s’imagine pouvoir
placer le langage dans cette seule entité, séparément dumonde
1
qu’il exprime . Cette séparation entraîneune deuxième erreur en
attribuant pour seule fonction aulangage de désigner. La
conjonction, en quelque sorte anecdotique mais prégnante, entre
cette fonction, les développements de l’informatique et ceuxde la
biologie cérébrale, entraîne en outre à ignorer la spécificité du
langage dit naturel, tant dans sa structure que dans ses fonctions,
en l’assimilant à tout système de signes ousignaux. De ce que cette
2
réduction peut être trèsutile en certainsusages spécialisés , il ne
s’en suit pas que cela justifie de croire qu’on a ainsi atteint sa
nature.
Nous avons donc à situer le langage parmi les activités
humaines ayant pour fonction de signifier ausens le plus commun
et général, de tenter de déceler les principes d’une classification
des systèmes pouvant signifier, d’établir à partir de là comment se
situe le langage dit naturel et de cerner ce qu’il peut avoir de
spécifique.
On ne peut par davantage postuler, même implicitement, que
cette forme d’expérience serait seconde et subordonnée à d’autres
formes : l’examen de sa nature comporte de chercher à clarifier son
rapport auxautres formes. Notons pour commencer que tout ce
qui se fait dans l’examen de la perception s’est formé dans
l’expression. Certes la perception jouit d’une antériorité

1
Nous aurons àvoir ce que peutvouloir dire exprimer.
2
Mais cela ne peut se faire que par des transformations imposées au
langage et non en le prenant tel qu’il est.

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IMAGES, SYMBOLES, SIGNES

chronologique, tant dans l’histoire humaine que dans l’évolution
de l’enfant ; en outre, elle nous donneune référence constante dans
l’examen de l’expression linguistique, mais cela ne lui donne
aucune priorité de principe.
Si la littérature en ce domaine est abondante et de grande
valeur, elle ne répond que très partiellement à l’optique qui
conduit notre investigation pour plusieurs raisons. En premier
lieu, les théories logiques dulangage l’abordent selonunevisée et
des normes qui nevalent aumieuxque pourunusageunique,
l’usage scientifique, et non pour le langage tel qu’il fonctionne
effectivement. Ceci entraîne plusieurs défau: a) ilts rédhibitoires
n’est pas sûr que le langage ainsi construit soit purementune
dimension dulangage ordinaire, qu’il rende compte
exhaustivement d’un desusages du: lalangage ordinaire
désignation ;b) il n’est pas sûr que cetusage soit séparable des
autresusages et que la désignation soit assurée indépendamment ;
c) cette démarche exclutun des traits les plus cruciauxdulangage
ordinaire : ladiversité des langues. Les théories logiques parle du
3
langage alorsque nous avons des langues dont l’unité n’est pas
encore entièrement décryptée. Pour l’instant l’unité dulangage
resteun sentiment, fondé sur la possibilité de traduction, mais la
fonction linguistique, et encore plus langagière, reste encore trop
partiellement explorée.
4
En second lieu, l’approche linguistique, si légitime soit-elle , ne
retient dulangage que la structure de la formation des signes en
excluant les conditions de fonctionnement, donc de production et
de réception des signes effectifs: phrases et séquence de phrases
(discours). Non content de n’exposer qu’une dimension de la
forme d’expérience qu’est l’expression langagière, il est probable
5
que l’incapacité à dépasser le niveaude la formation des mots
vient, aumoins en partie, de la restriction de l’entreprise à la seule
dimension linguistique.

3
Ce qui est d’ailleurs assezillusoire car onvoit bien que tout est construit
auplus près de la langue anglaise.
4
Légitime pour fonder la discipline, elle ne l’est plus s’il s’agit devisée
ontologique.
5
Malgré les tentatives de Chomskyet alii, la syntaxe resteun bricolage
empirique. La sémantique linguistique souffre de sa subordination à la
logique formelle et de sa projection dans les dictionnaires.

IMAGES, SYMBOLES, SIGNES

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En l’état actuel, nous trouvons deuxapproches également
déficientes dupoint devue de ce que nous cherchons, d’une part
des théories linguistiques concentrées sur le fonctionnement
observable des signes constituants les langues mais laissant de côté
la fonction même d’expression (ce qui est légitime dupoint devue
méthodologique), de l’autre des “philosophies“ dulangage qui,
bien que se développant dansun horizon érigeant l’expérience en
fondement premier, ignorent massivement le phénomène même
des langues, c’est à dire dulangage tel que nous pouvons
l’appréhender, parlant d’une figure inventée dulangage pourune
utilisation particulière.
6
Notre propos est d’élucider l’excommepression langagière
mode fondamental d’expérience, ce qui exige d’envisager toutes
les dimensions de ce qui se pr

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