La lecture à portée de main
Description
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Publié par | bibebook |
Nombre de lectures | 27 |
EAN13 | 9782824712451 |
Licence : | Libre de droits |
Langue | Français |
Extrait
CHARLES BA U DELAI RE
LA F AN F ARLO
BI BEBO O KCHARLES BA U DELAI RE
LA F AN F ARLO
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1245-1
BI BEBO OK
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V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok. C, signa autr efois du nom de Manuela de
Monte v erde quelques folies r omantiques, – dans le b on temps du Ro-S mantisme , – est le pr o duit contradictoir e d’un blême Allemand
et d’une br une Chilienne . Ajoutez à cee double origine une é ducation
française et une civilisation liérair e , v ous ser ez moins sur pris, – sinon
satisfait et é difié , – des complications bizar r es de ce caractèr e . Samuel a
le fr ont pur et noble , les y eux brillants comme des g oues de café , le nez
taquin et railleur , les lè v r es impudentes et sensuelles, le menton car ré et
desp ote , la che v elur e prétentieusement raphaélesque . – C’ est à la fois un
grand fainé ant, un ambitieux triste , et un illustr e malheur eux ; car il n’a
guèr e eu dans sa vie que des moitiés d’idé es. Le soleil de la p ar esse qui r
esplendit sans cesse au-de dans de lui, lui vap orise et lui mang e cee moitié
de g énie dont le ciel l’a doué . Par mi tous ces demi-grands hommes que j’ai
connus dans cee ter rible vie p arisienne , Samuel fut, plus que tout autr e ,
l’homme des b elles œuv r es raté es ; – cré atur e maladiv e et fantastique ,
dont la p o ésie brille bien plus dans sa p er sonne que dans ses œuv r es, et
qui, v er s une heur e du matin, entr e l’éblouissement d’un feu de charb on
de ter r e et le tic tac d’une horlog e , m’ est toujour s app ar u comme le Dieu
de l’impuissance , – dieu mo der ne et her maphr o dite , – impuissance si
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lossale et si énor me qu’ elle en est épique !
Comment v ous mer e au fait, et v ous fair e v oir bien clair dans cee
natur e ténébr euse , bariolé e de vifs é clair s, – p ar esseuse et entr epr enante à
la fois, – fé conde en desseins difficiles et en risibles av ortements ; – esprit
chez qui le p arado x e pr enait souv ent les pr op ortions de la naïv eté , et dont
l’imagination était aussi vaste que la solitude et la p ar esse absolues ? –
Un des trav er s les plus natur els de Samuel était de se considér er comme
l’ég al de ceux qu’il avait su admir er ; après une le ctur e p assionné e d’un
b e au liv r e , sa conclusion inv olontair e était : v oilà qui est assez b e au p our
êtr e de moi ! – et de là à p enser : c’ est donc de moi, – il n’y a que l’ esp ace
d’un tir et.
D ans le monde actuel, ce g enr e de caractèr e est plus fré quent qu’ on
ne le p ense ; les r ues, les pr omenades publiques, les estaminets, et tous
les asiles de la flânerie four millent d’êtr es de cee espè ce . Ils
s’identifient si bien av e c le nouv e au mo dèle , qu’ils ne sont p as éloignés de cr oir e
qu’ils l’ ont inv enté . – Les v oilà aujourd’hui dé chiffrant p éniblement l es
p ag es my stiques de P lotin ou de Por phy r e ; demain ils admir er ont comme
Crébillon le fils a bien e xprimé le côté v olag e et français de leur
caractèr e . Hier ils s’ entr etenaient familièr ement av e c Jérôme Cardan ; les v oici
maintenant jouant av e c Ster ne , ou se vautrant av e c Rab elais dans toutes
les g oinfr eries de l’hy p erb ole . Ils sont d’ailleur s si heur eux dans chacune
de leur s métamor phoses, qu’ils n’ en v eulent p as le moins du monde à
tous ces b e aux g énies de les av oir de vancés dans l’ estime de la p ostérité .
– Naïv e et r esp e ctable impudence ! T el était le p auv r e Samuel.
Fort honnête homme de naissance et quelque p eu gr e din p ar p
assetemps, – comé dien p ar temp érament, – il jouait p our lui-même et à huis
clos d’incomp arables trag é dies, ou, p our mieux dir e , tragi-comé dies. Se
sentait-il effleuré et chatouillé p ar la g aieté , il fallait se le bien constater ,
et notr e homme s’ e x er çait à rir e aux é clats. Une lar me lui g er mait-elle
dans le coin de l’ œil à quelque souv enir , il allait à sa glace se r eg arder
pleur er . Si quelque fille , dans un accès de jalousie br utale et puérile , lui
faisait une égratignur e av e c une aiguille ou un canif, Samuel se glorifiait
en lui-même d’un coup de coute au, et quand il de vait quelques misérables
vingt mille francs, il s’é criait jo y eusement :
— el triste et lamentable sort que celui d’un g énie har celé p ar un
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million de dees !
D’ailleur s, g ardez-v ous de cr oir e qu’il fût incap able de connaîtr e les
sentiments v rais, et que la p assion ne fît qu’ effleur er son épider me . Il eût
v endu ses chemises p our un homme qu’il connaissait à p eine , et qu’à
l’insp e ction du fr ont et de la main il avait institué hier son ami intime .
Il app ortait dans les choses de l’ esprit et de l’âme la contemplation oisiv e
des natur es g er maniques, – dans les choses de la p assion l’ardeur rapide
et v olag e de sa mèr e , – et dans la pratique de la vie tous les trav er s de
la vanité française . Il se fût bau en duel p our un auteur ou un artiste
mort depuis deux siè cles. Comme il avait été dé v ot av e c fur eur , il était
athé e av e c p assion. Il était à la fois tous les artistes qu’il avait étudiés
et tous les liv r es qu’il avait lus, et cep endant, en dépit de cee faculté
comé dienne , il r estait pr ofondément original. Il était toujour s le doux, le
fantasque , le p ar esseux, le ter rible , le savant, l’ignorant, le débraillé , le
coquet Samuel Cramer , la r omantique Manuela de Monte v erde . Il raffolait
d’un ami comme d’une femme , aimait une femme comme un camarade . Il
p ossé dait la logique de tous les b ons sentiments et la science de toutes les
r oueries, et né anmoins il n’a jamais réussi à rien, p ar ce qu’il cr o yait tr op à
l’imp ossible . – oi d’étonnant ? il était toujour s en train de le conce v oir .
Samuel, un soir , eut l’idé e de sortir ; le temps était b e au et p arfumé .