La lecture à portée de main
Description
Informations
Publié par | bibebook |
Nombre de lectures | 35 |
EAN13 | 9782824710518 |
Langue | Français |
Extrait
HONORÉ DE BALZA C
P H YSIOLO GI E DU
MARIA GE
BI BEBO O KHONORÉ DE BALZA C
P H YSIOLO GI E DU
MARIA GE
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1051-8
BI BEBO OK
w w w .bib eb o ok.comLicence
Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
Except where otherwise noted, this work is licensed under
h tt p : / / c r e a ti v e c o m m on s . or g / l i c e n s e s / b y - s a / 3 . 0 /
Lir e la licence
Cee œuv r e est publié e sous la licence CC-BY -SA, ce qui
signifie que v ous p ouv ez lég alement la copier , la r e
distribuer , l’ env o y er à v os amis. V ous êtes d’ailleur s
encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.P H YSIOLO GI E DU
MARIA GE
1DÉDICA CE
Faites aention à ces mots : « L’homme sup érieur à qui ce
liv r e est dé dié » n’est-ce pas vous dire : ― « C’est à vous ? »
L’ A U T EU R.
, sur le titr e de ce liv r e , serait tenté e de l’ ouv rir , p eut
s’ en disp enser , elle l’a déjà lu sans le sav oir . Un homme , quelqueL malicieux qu’il puisse êtr e , ne dira jamais des femmes autant de
bien ni autant de mal qu’ elles en p ensent elles-mêmes. Si, malgré cet avis,
une femme p er sistait à lir e l’ ouv rag e , la délicatesse de vra lui imp oser la loi
de ne p as mé dir e de l’auteur , du moment où, se privant des appr obations
qui flaent le plus les artistes, il a en quelque sorte gravé sur le fr
ontispice de son liv r e la pr udente inscription mise sur la p orte de quelques
établissements : Les dames n’entrent pas ici .
n
2I N T RODUCT ION
« Le mariag e ne dériv e p oint de la natur e . — La famille orientale dièr e
entièr ement de la famille o ccidentale . — L’homme est le ministr e de la
natur e , et la so ciété vient s’ enter sur elle . — Les lois sont faites p our les
mœur s, et les mœur s varient. »
Le mariag e p eut donc subir le p erfe ctionnement graduel auquel toutes
les choses humaines p araissent soumises.
Ces p ar oles, pr ononcé es de vant le Conseil-d’État p ar Nap olé on lor s
de la discussion du Co de civil, frappèr ent viv ement l’auteur de ce liv r e ;
et, p eut-êtr e , à son insu, mir ent-elles en lui le g er me de l’ ouv rag e qu’il
offr e aujourd’hui au public. En effet, à l’ép o que où, b e aucoup plus jeune ,
il étudia le Dr oit français, le mot ADU LT ÈRE lui causa de singulièr es
impr essions. Immense dans le co de , jamais ce mot n’app araissait à son
imagination sans traîner à sa suite un lugubr e cortég e . Les Lar mes, la Honte ,
la Haine , la T er r eur , des Crimes se cr ets, de sanglantes Guer r es, des
Familles sans chef, le Malheur se p er sonnifiaient de vant lui et se dr essaient
soudain quand il lisait le mot sacramentel : ADU LT ÈRE ! P lus tard, en
ab ordant les plag es les mieux cultivé es de la so ciété , l’auteur s’ap er çut
que la sé vérité des lois conjug ales y était assez g énéralement temp éré e
p ar l’ A dultèr e . Il tr ouva la somme des mauvais ménag es sup érieur e de
3P hy siologie du mariag e Chapitr e
b e aucoup à celle des mariag es heur eux. Enfin il cr ut r emar quer , le pr
emier , que , de toutes les connaissances humaines, celle du Mariag e était la
moins avancé e . Mais ce fut une obser vation de jeune homme ; et, chez lui
comme chez tant d’autr es, semblable à une pier r e jeté e au sein d’un lac,
elle se p erdit dans le g ouffr e de ses p ensé es tumultueuses. Cep endant
l’auteur obser va malgré lui ; puis il se for ma lentement dans son imagination,
comme un essaim d’idé es plus ou moins justes sur la natur e des choses
conjug ales. Les ouv rag es se for ment p eut-êtr e dans les âmes aussi my
stérieusement que p oussent les tr uffes au milieu des plaines p arfumé es du
Périg ord. D e la primitiv e et sainte fray eur que lui causa l’ A dultèr e et de
l’ obser vation qu’il avait étourdiment faite , naquit un matin une minime
p ensé e où ses idé es se for mulèr ent. C’était une raillerie sur le mariag e :
deux ép oux s’aimaient p our la pr emièr e fois après vingt-sept ans de
ménag e .
Il s’amusa de ce p etit p amphlet conjug al et p assa délicieusement une
semaine entièr e à gr oup er autour de cee inno cente épigramme la
multitude d’idé es qu’il avait acquises à son insu et qu’il s’étonna de tr
ouv er en lui. Ce badinag e tomba de vant une obser vation magistrale . D
ocile aux avis, l’auteur se r ejeta dans l’insouciance de ses habitudes p
ar esseuses. Né anmoins ce lég er princip e de science et de plaisanterie se
p erfe ctionna tout seul dans les champs de la p ensé e : chaque phrase de
l’ œuv r e condamné e y prit racine , et s’y fortifia, r estant comme une p etite
branche d’arbr e qui, abandonné e sur le sable p ar une soiré e d’hiv er , se
tr ouv e couv erte le lendemain de ces blanches et bizar r es cristallisations
que dessinent les g elé es capricieuses de la nuit. Ainsi l’ébauche vé cut et
de vint le p oint de dép art d’une multitude de ramifications morales. Ce
fut comme un p oly p e qui s’ eng endra de lui-même . Les sensations de sa
jeunesse , les obser vations qu’une puissance imp ortune lui faisait fair e ,
tr ouvèr ent des p oints d’appui dans les moindr es é vénements. Bien plus,
cee masse d’idé es s’har monia, s’anima, se p er sonnifia pr esque et
marcha dans les p ay s fantastiques où l’âme aime à laisser vag ab onder ses
folles pr og énitur es. A trav er s les pré o ccup ations du monde et de la vie ,
il y avait toujour s en l’auteur une v oix qui lui faisait les ré vélations les
plus mo queuses au moment même où il e x aminait av e c le plus de plaisir
une femme dansant, souriant ou causant. D e même que Méphistophélès
4P hy siologie du mariag e Chapitr e
montr e du doigt à Faust dans l’ép ouvantable assemblé e du Br ok en de
sinistr es figur es, de même l’auteur sentait un démon qui, au sein d’un bal,
v enait lui frapp er familièr ement sur l’ép aule et lui dir e : ― V ois-tu, ce
sourir e enchanteur ? c’ est un sourir e de haine . T antôt le démon se p
avanait comme un capitan des anciennes comé dies de Hardy . Il se couait la
p our pr e d’un mante au br o dé et s’ effor çait de r emer e à neuf les vieux
clinquants et les orip e aux de la gloir e . T antôt il p oussait, à la manièr e
de Rab elais, un rir e lar g e et franc, et traçait sur la muraille d’une r ue un
mot qui p ouvait ser vir de p endant à celui de : ― T rinque ! seul oracle
obtenu de la div e b outeille . Souv ent ce T rilb y liérair e se laissait v oir assis
sur des monce aux de liv r es ; et, de ses doigts cr o chus, il indiquait
malicieusement deux v olumes jaunes, dont le titr e flamb o yait aux r eg ards.
Puis, quand il v o yait l’auteur aentif, il ép elait d’une v oix aussi ag açante
que les sons d’un har monica : ― P H YSIOLO GI E DU MARIA GE ! Mais
pr esque toujour s, il app araissait, le soir , au moment des song es. Car
essant comme une fé e , il essayait d’appriv oiser p ar de douces p ar oles l’âme
qu’il s’était soumise . A ussi railleur que sé duisant, aussi souple qu’une
femme , aussi cr uel qu’un tigr e , son amitié était plus r e doutable que sa
haine ; car il ne savait p as fair e une car esse sans égratigner . Une nuit
entr e autr es, il essaya la puissance de tous ses sortilég es et les cour onna
p ar un der nier effort. Il vint, il s’assit sur le b ord du lit, comme une jeune
fille pleine d’amour , qui d’ab ord se tait, mais dont les y eux brillent, et
à laquelle son se cr et finit p ar é chapp er . ― Ce ci, dit-il, est le pr osp e ctus
d’un scaphandr e au mo y en duquel on p our ra se pr omener sur la Seine
à pie d se c. Cet autr e v olume est le rapp ort de l’Institut sur un vêtement
pr opr e à nous fair e trav er ser les flammes sans nous brûler . Ne pr op
oserastu donc rien qui puisse préser v er le mariag e des malheur s du fr oid et du
chaud ? Mais, é coute ? V oici L’ ART DE CONSERV ER LES SU BST ANCES
ALIMEN T AI RES, L’ ART D’EMP ÉCH ER LES CH EMI N ÉES DE F UMER,
L’ ART DE F AI RE DE BONS MORT I ERS, L’ ART DE MET T RE SA CRA -
V A T E, L’ ART DE DÉCOU P ER LES V IAN DES.
Il nomma en une minute un nombr e si pr o digieux de liv r es, que
l’auteur en eut comme un éblouissement.
― Ces my riades de liv r es ont été dé v orés, disait-il, et cep endant tout
le monde ne bâtit p as et ne mang e p as, tout le monde n’a p as de cravate
5P hy siologie du mariag e Chapitr e
et ne se chauffe p as, tandis que tout