La bête humaine
344 pages
Français

La bête humaine

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
344 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

La Bête humaine est le dix-septième volume de la série Les Rougon-Macquart. L'histoire évoque le monde du chemin de fer et se déroule tout au long de la ligne Paris-Le Havre. On a coutume de dire qu'elle comporte deux héros : d'une part le mécanicien Jacques Lantier et de l'autre sa locomotive, la Lison, que Lantier aime plus qu'une femme. Outre son aspect documentaire, La Bête humaine est un roman noir, sorte de thriller du xixe siècle

Informations

Publié par
Nombre de lectures 214
EAN13 9782824702384
Langue Français

Extrait

ÉMI LE ZOLA
LA BÊT E H UMAI N E
BI BEBO O KÉMI LE ZOLA
LA BÊT E H UMAI N E
1893
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-0238-4
BI BEBO OK
w w w .bib eb o ok.comLicence
Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
Except where otherwise noted, this work is licensed under
h tt p : / / c r e a ti v e c o m m on s . or g / l i c e n s e s / b y - s a / 3 . 0 /
Lir e la licence
Cee œuv r e est publié e sous la licence CC-BY -SA, ce qui
signifie que v ous p ouv ez lég alement la copier , la r e
distribuer , l’ env o y er à v os amis. V ous êtes d’ailleur s
encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.CHAP I T RE I
   la chambr e , Roubaud p osa sur la table le p ain
d’une liv r e , le pâté et la b outeille de vin blanc. Mais, le matin,E avant de descendr e à son p oste , la mèr e Victoir e avait dû couv rir
le feu de son p oêle , d’un tel p oussier , que la chaleur était suffo cante . Et le
sous-chef de g ar e , ayant ouv ert une fenêtr e , s’y accouda.
C’était imp asse d’ Amsterdam, dans la der nièr e maison de dr oite , une
haute maison où la Comp agnie de l’Ouest log e ait certains de ses
emplo yés. La fenêtr e , au cinquième , à l’angle du toit mansardé qui faisait
r etour , donnait sur la g ar e , cee tranché e lar g e tr ouant le quartier de
l’Eur op e , tout un dér oulement br usque de l’horizon, que semblait
agrandir encor e , cet après-midi-là , un ciel gris du milieu de fé v rier , d’un gris
humide et tiède , trav er sé de soleil.
En face , sous ce p oudr oiement de ray ons, les maisons de la r ue de
Rome se br ouillaient, s’ effaçaient, légèr es. A g auche , les mar quises des
halles couv ertes ouv raient leur s p or ches g é ants, aux vitrag es enfumés,
1La bête humaine Chapitr e I
celle des grandes lignes, immense , où l’ œil plong e ait, et que les bâtiments
de la p oste et de la b ouilloerie sép araient des autr es, plus p etites, celles
d’ Ar g enteuil, de V er sailles et de la Ceintur e  ; tandis que le p ont de
l’Eur op e , à dr oite , coup ait de son étoile de fer la tranché e , que l’ on v o yait
r ep araîtr e et filer au-delà , jusqu’au tunnel des Batignolles. Et, en bas de
la fenêtr e même , o ccup ant tout le vaste champ , les tr ois doubles v oies
qui sortaient du p ont, se ramifiaient, s’é cartaient en un é v entail dont les
branches de métal, multiplié es, innombrables, allaient se p erdr e sous les
mar quises. Les tr ois p ostes d’aiguilleur , en avant des ar ches, montraient
leur s p etits jardins nus. D ans l’ effacement confus des wag ons et des
machines encombrant les rails, un grand signal r oug e tachait le jour pâle .
Pendant un instant, Roubaud s’intér essa, comp arant, song e ant à sa
g ar e du Hav r e . Chaque fois qu’il v enait de la sorte p asser un jour à Paris, et
qu’il descendait chez la mèr e Victoir e , le métier le r epr enait. Sous la
marquise des grandes lignes, l’ar rivé e d’un train de Mantes avait animé les
quais  ; et il suivit des y eux la machine de manœuv r e , une p etite
machinetender , aux tr ois r oues basses et couplé es, qui commençait le
débranchement du train, alerte b esogneuse , emmenant, r efoulant les wag ons sur les
v oies de r emisag e . Une autr e machine , puissante celle-là , une machine
d’ e xpr ess, aux deux grandes r oues dé v orantes, stationnait seule , lâchait
p ar sa cheminé e une gr osse fumé e noir e , montant dr oit, très lente dans
l’air calme . Mais toute son aention fut prise p ar le train de tr ois heur es
vingt-cinq, à destination de Caen, empli déjà de ses v o yag eur s, et qui
attendait sa machine . Il n’ap er ce vait p as celle-ci, ar rêté e au delà du p ont
de l’Eur op e  ; il l’ entendait seulement demander la v oie , à lég er s coups de
sifflet pr essés, en p er sonne que l’imp atience g agne . Un ordr e fut crié , elle
rép ondit p ar un coup br ef qu’ elle avait compris. Puis, avant la mise en
mar che , il y eut un silence , les pur g eur s fur ent ouv erts, la vap eur siffla au
ras du sol, en un jet assourdissant. Et il vit alor s déb order du p ont cee
blancheur qui foisonnait, tourbillonnante comme un duv et de neig e ,
env olé e à trav er s les char p entes de fer . T out un coin de l’ esp ace en était
blanchi, tandis que les fumé es accr ues de l’autr e machine élar gissaient
leur v oile noir . D er rièr e , s’étouffaient des sons pr olong és de tr omp e , des
cris de commandement, des se cousses de plaques tour nantes. Une dé
chir ur e se pr o duisit, il distingua, au fond, un train de V er sailles et un train
2La bête humaine Chapitr e I
d’ A uteuil, l’un montant, l’autr e descendant, qui se cr oisaient.
Comme Roubaud allait quier la fenêtr e , une v oix qui pr ononçait
son nom, le fit se p encher . Et il r e connut, au-dessous, sur la ter rasse du
quatrième , un jeune homme d’une tr entaine d’anné es, Henri D auv er gne ,
conducteur-chef, qui habitait là en comp agnie de son pèr e , chef adjoint
des grandes lignes, et de ses sœur s, Clair e et Sophie , deux blondes de
dixhuit et vingt ans, adorables, menant le ménag e av e c les six mille francs
des deux hommes, au milieu d’un continuel é clat de g aieté . On
entendait l’aîné e rir e , p endant que la cadee chantait, et qu’une cag e , pleine
d’ oise aux des îles, rivalisait de r oulades.
―  Tiens  ! monsieur Roubaud, v ous êtes donc à Paris  ? . . . Ah  ! oui,
p our v otr e affair e av e c le sous-préfet  !
D e nouv e au accoudé , le sous-chef de g ar e e xpliqua qu’il avait dû
quitter Le Hav r e , le matin même , p ar l’ e xpr ess de six heur es quarante . Un
ordr e du chef de l’ e xploitation l’app elait à Paris, on v enait de le ser
monner d’imp ortance . Heur eux encor e de n’y av oir p as laissé sa place .
― Et madame  ? demanda Henri.
Madame avait v oulu v enir , elle aussi, p our des emplees. Son mari
l’aendait là , dans cee chambr e dont la mèr e Victoir e leur r emeait la
clef, à chacun de leur s v o yag es, et où ils aimaient déjeuner , tranquilles et
seuls, p endant que la brav e femme était r etenue en bas, à son p oste de la
salubrité . Ce jour-là , ils avaient mang é un p etit p ain à Mantes, v oulant se
débar rasser de leur s cour ses d’ab ord. Mais tr ois heur es étaient sonné es,
il mourait de faim.
Henri, p our êtr e aimable , p osa encor e une question  :
― Et v ous couchez à Paris  ?
Non, non  ! ils r etour naient tous deux au Hav r e le soir , p ar l’ e xpr ess
de six heur es tr ente . Ah bien  ! oui, des vacances  ! On ne v ous dérang e ait
que p our v ous flanquer v otr e p aquet, et tout de suite à la niche  !
Un moment, les deux emplo yés se r eg ardèr ent, en ho chant la tête .
Mais ils ne s’ entendaient plus, un piano endiablé v enait d’é clater en notes
sonor es. Les deux sœur s de vaient tap er dessus ensemble , riant plus haut,
e x citant les oise aux des îles. Alor s, le jeune homme , qui s’ég ayait à son
tour , salua, r entra dans l’app artement  ; et le sous-chef, seul, demeura un
instant les y eux sur la ter rasse , d’ où montait toute cee g aieté de
jeu3La bête humaine Chapitr e I
nesse . Puis, les r eg ards le vés, il ap er çut la machine qui avait fer mé ses
pur g eur s, et que l’aiguilleur env o yait sur le train de Caen. Les der nier s
flo connements de vap eur blanche se p erdaient, p ar mi les gr os tourbillons
de fumé e noir e , salissant le ciel. Et il r entra, lui aussi, dans la chambr e .
D e vant le coucou qui mar quait tr ois heur es vingt, Roubaud eut un
g este désesp éré . A quoi diable Sé v erine p ouvait-elle s’aarder ainsi  ? Elle
n’ en sortait plus, lor squ’ elle était dans un mag asin. Pour tr omp er la faim
qui lui lab ourait l’ estomac, il eut l’idé e de mer e la table

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents