À la duchesse Mazarin, sur la caducité
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Description

Charles de Saint-Évremond
Œuvres mêlées
À la duchesse Mazarin, sur la caducité
À LA DUCHESSE MAZARIN, SUR LA CADUCITÉ.
(1692.)
Flatté d’une douce espérance,
Que me donnoit la belle Hortense,
Je lui cachois mes cheveux gris,
De peur d’attirer ...

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Langue Français

Extrait

Charles de Saint-Évremond Œuvres mêlées À la duchesse Mazarin, sur la caducité
À LA DUCHESSE MAZARIN, SUR LA CADUCITÉ. (1692.)
Flatté d’une douce espérance, Que me donnoit la belle Hortense, Je lui cachois mes cheveux gris, De peur d’attirer ses mépris. Mais détrompé de sa parole, Qui n’a plus rien qui nie console, Je lui montre des cheveux blancs, Triste ouvrage de mes vieux ans ; Je lui montre tout l’équipage De la caducité de l’âge : Lunettes, calotte, en effet, Qui pourroit servir de bonnet ; Tous les secours que la nature Cherche, dans mon infirmité, Pour éloigner la sépulture, Sont montrés devant sa beauté ; Et j’ose nommer défaillance Funeste, mortelle langueur, Ce qu’autrefois en sa présence Je nommois simplement vapeur. Ô belle, ô charmante duchesse ! Je vous remets votre promesse ; 1 Puisqu’il plaît au grandPescator, Ce maître de la destinée, Tuer tous les vieillards à la fin de l’année, Je vais céder mes droits sur votre cher trésor ; Ne me demandez point à qui je les résigne : C’est celui que vos yeux en doivent juger digne, Celui que vous voyez si soumis à vos lois… Je hais le faux honneur des amours éternelles ; Peut-on aimer longtemps, sans être dégoûté Du mérite ennuyeux de la fidélité ? On voit comme une fleur, sur les amours nouvelles, Semblable à la fraîcheur de ces fruits délicats, Qu’on aime à regarder et qu’on ne touche pas. Mais, après les douceurs qu’on goûte à leur naissance, Quand les yeux ont usé leurs innocents plaisirs, Que le cœur a senti la tendre violence De l’amoureux tourment que donnent les désirs : Enfin, la volupté, la pleine jouissance… Un autre pourra l’exprimer, Je ne mérite pas même de la nommer. Faveur, qu’on m’a fait trop attendre, Vous viendriez hors de saison : Adieu, je cesse de prétendre Un si rare et glorieux don. Mais, pour ne fermer pas tout accès à la joie, Souffrez, Hortense, au moins, souffrez que je vous voie ; Et quand la foiblesse des yeux Me rendra difficile un bien si précieux, Quand les divins appas dont vous êtes pourvue Échapperont, hélas ! à ma débile vue, Ne vous offensez pas qu’afin de les mieux voir, J’appelle à mon secours lunettes et miroir. Je n’en demande point pour lire : Entretenir les morts est un triste entretien ;
J’en veux aussi peu pour écrire : L’écriture m’a fait plus de mal que de bien. Je n’en veux faire aucun usage, Que pour voir le plus beau visage, Pour admirer les plus beaux traits Que nature forma jamais.
NOTES DE L’ÉDITEUR
1. Auteur de l’Almanach de Milan.
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