Les lumières de Lampedusa
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Les lumières de Lampedusa , livre ebook

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Description

Les lumières de Lampedusa renferme le rêve de milliers de jeunes. Premier îlot en terre européenne où viennent s'échouer les canots de fortune. Premier passage vers la terre promise. Mais quelles promesses seront tenues ? Faut il croupir dans la misère sans autre espoir que de mourir dans cette même misère ? Faut-il partir au risque de sa vie ? Pour certains l'aventure se terminera bien, pour d'autres c'est la succession des galères comme si celles subies pour arriver jusque là ne suffisaient pas. Bamane fait une analyse sans concession de la situation dans la quelle s'étiole la jeunesse africaine ballottée entre corruption et égoïsme international. Un roman fort, son héros n'a rien d'exceptionnel mais en lui se reconnaîtront des milliers de jeunes.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2022
Nombre de lectures 77
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

La pauvreté, les privations et la misère sont l’unique Enfer pour les misérables de ce bas monde.
Mokhtar Reguieg

Illustration de couverture : Aïssatou Kadé BALDÉ

© Éditions Ganndal
ISBN : 978-2-35045-117-6
B.P : 542, Conakry-Guinée
Tél. : (224) 622 39 65 88
Courriel : ganndal.editions@gmail.com
http : //editionsganndal.blogspot.com
Tous droits réservés.

Dépôt légal, Mai 2021

Je dédie ce livre à mes défunts parents: à mon père Julien et à ma mère Hadja Foulematou qui m’ont donné le jour. À la Guinée, la petite terre qui m’a tout légué.

Préface
Depuis leur indépendance voici plus d’un demi-siècle, les pays africains souffrent d’hémorragies : ils perdent leur sang, leur jeunesse, leur énergie alors qu’ils devraient les retenir. Leurs dirigeants ont vendu les richesses du sous-sol à des compagnies étrangères qui en sont les sangsues avides. Et pendant que les chefs politiques recueillent les millions de dollars de l’exploitation minière, les forces juvéniles de l’Afrique s’épuisent.
Au lieu de regarder avec commisération les cerveaux africains en jachère et d’employer chez elle les jeunes africains comme balayeurs ou agents de sécurité de grandes surfaces, l’Europe assaillie et l’Afrique exsangue devraient ouvrir de grands chantiers. Financer des écoles valables pour ceux qui ont la chance d’aller à l’école, des routes praticables pour stimuler les échanges commerciaux, amener l’eau et l’électricité, au lieu de corrompre les élites.
Au lieu de mettre dans les banques européennes les fortunes de ses chefs pour les mettre à l’abri dans des paradis fiscaux, l’Afrique devrait les investir dans le développement, l’administration et le système éducatif. Et appliquer la maxime Aide-toi, le c iel t’aidera .
Au lieu d’attirer les paysans dans les mines en Afrique, l’Europe devrait aider à développer une agriculture florissante sur des terres tellement fertiles qu’elles attirent la convoitise des Chinois plus avides et mieux organisés qu’elle. Ainsi les Africains ne seraient pas obligés d’importer les produits alimentaires de base.
Au lieu de refouler des jeunes désireux de s’enrichir pour aider leurs parents dont ils sont l’assurance-vieillesse, l’Europe devrait comprendre que leur fuite est due à la précarité, à l’absence de perspectives et aux effets de la corruption qu’elle entretient sur le continent.
Au lieu de financer la Libye pour faire barrage aux migrants et cautionner ainsi leur mise en esclavage, l’Union européenne et l’Union africaine refusent de voir que les migrants sont devenus un business international tout comme la drogue et la prostitution.
Enfin, l’Europe devrait se souvenir des leçons de droits de l’homme qu’elle dispense à la planète entière.
Mais je rêve sans doute, je rêve… alors que, dans ce livre comme dans la réalité, des jeunes continuent à mourir.
Nadine Bari
Auteure franco-guinéenne
Chapitre 1
Monnèta, la ville fantôme
On était au mois d’août, l’hivernage battait son plein, le tonnerre grondait, les éclairs déchiraient le ciel dans un vacarme effroyable et il pleuvait des cordes sur Monnèta. Mais ce jour-là, les pluies diluviennes que la ville avait enregistrées ces dernières semaines s’étaient subitement arrêtées.
Les pauvres habitants avaient vécu en reclus ces derniers temps contraints de rester cloîtrés chez eux. Les rares personnes que l’on voyait au dehors étaient occupées à évacuer les eaux de leurs maisons inondées.
Cette ville n’avait rien d’une cité moderne. Elle n’était en réalité qu’un gros village sans plan d’aménagement avec ses innombrables ruelles sinueuses. Elle était vétuste et très sale. Ses habitations d’un autre âge continuaient à servir encore de refuge à une population misérable.
Les routes étaient boueuses et jonchées de nids de poules d’où se dégageait une odeur nauséabonde, insupportable. Les maisons étaient très proches et implantées de manière désordonnée. On pouvait pénétrer dans une concession et en sortir par une autre. Aucun plan d’urbanisation n’existait. À l’exception des quelques rares bâtiments appartenant à l’administration et aux pontes du régime, toute la ville dégageait l’odeur de la ruine. Le long des routes, on voyait des tas d’ordures ménagères à même le sol. On apercevait souvent des enfants qui fouinaient dans ces tas d’immondices à mains nues. Ils recherchaient désespérément des objets à recycler : boites de conserve, sachets de plastique, câbles électriques, chaussures usées, bref tout ce qui pouvait avoir une valeur marchande auprès des recycleurs.
La plupart de ces enfants ne portaient pas de chaussures. Ils avaient de petites figures noircies par les ordures. Leur situation ne préoccupait plus personne, leur image faisait partie du décor. Personne n’en était plus ému. Ceci faisait désormais partie du quotidien de la population. Les autorités du pays n’en avaient cure. Enfoncées dans de grosses cylindrées, climatisées, aux vitres fumées et à l’intérieur bien parfumé, elles échappaient ainsi à la puanteur ambiante.
Dans certains endroits de la ville, on trouvait des portions de route en bon état et des caniveaux pour drainer les eaux de ruissellement. Mais, faute de décharges publiques, les citoyens les remplissaient d’ordures avant la saison des pluies. Ce qui avait pour effet d’obstruer le chemin des eaux de ruissellement. Les torrents d’eaux qui ne trouvaient pas de passage se fâchaient et débordaient, occasionnant des inondations terribles. Ils emportaient tout sur leur passage y compris des âmes innocentes.
La plupart des concessions de la ville n’avaient pas de latrines. Les populations se soulageaient le long des berges de la mer. Jeunes et vieux s’y relayaient à longueur de journée, sans gêne, pour satisfaire leurs besoins naturels. Certains en profitaient pour prendre tranquillement une douche dans la mer. Tahoui était un des usagers les plus assidus des lieux. Il s’y rendait tôt le matin et tard le soir pour échapper aux regards indiscrets.
Samantha, comme bien des personnes de son âge, évitait de s’y aventurer. Elle utilisait un pot de chambre qu’elle vidait très tôt le matin dans les caniveaux. Sa maison n’avait pas de latrines et ne pouvait d’ailleurs même pas en avoir faute d’espace. Et il se trouve que celles des voisins étaient pleines. On ne pouvait plus les fréquenter sans ramener à la maison des excréments collés aux sandales.
La nuit, Samantha avait le sommeil difficile. Elle passait plusieurs heures à méditer. Les nuits étaient longues pour elle, surtout les jours où il pleuvait. Le toit de sa maison était rouillé et transformé en véritable passoire. Elle était obligée de placer, partout dans sa chambre, des ustensiles pour recueillir l’eau qui gouttait à travers les vieilles tôles de sa vieille baraque, au risque de se retrouver complètement trempée .
La misère était la chose la mieux partagée dans cette ville ! Les gens avaient du mal à joindre les deux bouts. Tout espoir était perdu dans cette capitale de malheur où l’on avait arrêté de rêver. Le sommeil emportait souvent la pauvre dame alors qu’elle était plongée dans ses pensées.
Avant l’appel du muezzin invitant les musulmans à la prière de l’aube, Samantha était déjà debout.
En bonne croyante, elle ne manquait jamais, comme la plupart de ses coreligionnaires du même âge, la prière du matin. Couvrant sa tête d’un châle noir, elle se rendait à la mosquée où elle se rangeait dans le coin réservé aux femmes pour adresser sa prière à Dieu.
Dieu exauçait-il ses prières ?… Elle avait du mal à le croire. Depuis toutes ses années qu’elle priait, rien n’avait changé dans son quotidien. Pourtant, la prière arrivait toujours à lui redonner un peu de foi en l’avenir. Elle pensait que jamais le Miséricordieux ne la laisserait finir sa vie dans ce dénuement absolu.
Tahoui, comme les autres jeunes de son âge, allait rarement à la prière de l’aube. Il ne croyait plus en rien. Il se disait que Dieu avait définitivement fait dos à cette ville, à cette génération. Il n’attendait plus rien de Lui.
À l’Est, lentement, le soleil dardait ses premiers rayons qui éclairaient la ville fantôme. Tahoui était encore dans sa chambre sur un vieux lit en bois sur lequel était posé un matelas fait de paille et de vieux sacs de riz. Ce matelas déchiré à certains endroits était un véritable nid de punaises et de puces. Des cafards couraient sur les murs et des souris grignotaient sans peur des grains de riz tombés du repas de la veille.
Ce matin, Samantha ne voyant pas son fils dehors, était allée d’un pas pressé vers la chambre de celui-ci :
– Tahoui ! Tahoui ! dit-elle doucement. Lève-toi, il fait jour, lève-toi !
Tahoui s’étira paresseusement et replongea dans son sommeil aussitôt.
– Lève-toi dis-je ! insista la vieille.
Tahoui rouvrit les yeux. Il regarda longuement sa mère comme pour l’implorer de le laisser continuer à dormir avant de descendre du lit.
La vieille montre mécanique qu’il avait toujours à son chevet indiquait huit heures. Tahoui prit la bouilloire sans couvercle posée devant sa case et se dirigea sous le manguier dans l’arrière-cour de la concession pour faire sa toilette. Sa mère avait fini de réchauffer son petit déjeuner. Il revint quelques instants plus tard et le mangea. Il était composé des restes du repas de la veille.
Depuis peu il sortait tôt le matin pour rejoindre son lieu de travail. Tahoui, grâce à son ami Sôryba, avait réussi à se faire embaucher dans un chantier après plusieurs allers et retours au centre . C’était un chantier chinois. Les Chinois étaient partout devenus les partenaires privilégiés du nouveau pouvoir, ils gagnaient tous les marchés publics. Mais, la population les détestait. Ils étaient réputés être de mauvais employeurs.
Pantalon sauté, chemise froissée, avec sa casquette de cow-boy, Tahoui

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