La Justice à l épreuve
167 pages
Français

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Description

Montée du pouvoir des juges, vieillissement des procédures, surcharge : la justice française est en crise. Mais n’est-ce pas plutôt la France qui découvre les servitudes et les vertus du droit ? Notre justice est-elle prête pour les nouvelles missions que la société lui assigne ? Les juges sont-ils bien choisis et formés pour assumer leur tâche ? Les cours et tribunaux sont-ils adaptés ? Quels sont les autres moyens de résoudre les conflits ? Le système de répression pénale est-il satisfaisant ? L’avènement d’un ordre juridique européen et, au-delà, d’une justice internationale ne constitue-t-il pas une chance pour notre propre appareil judiciaire ? Pour la première fois, un juge et un avocat confrontent sans concession leurs points de vue. Apparemment, tout les oppose : l’exercice de leur métier, la fonction qu’ils remplissent, leur conception du droit. Pourtant, par-delà les différences et les divergences, s’ébauche le portrait de ce que devrait être notre justice. Jean-Marie Coulon, magistrat, est premier président de la Cour d’appel de Paris. Daniel Soulez Larivière est avocat au barreau de Paris.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2002
Nombre de lectures 3
EAN13 9782738170675
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0900€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , SEPTEMBRE  2002 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-7067-5
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
S OMMAIRE
Couverture
Titre
Copyright
Introduction
I - De la crise de la justice, de la loi, du droit, de l’État et de quelques malentendus
Crise ou renouveau ?
Justice et démocratie d’opinion
Droit-valeur, droit-marché
La procédure
Intérêt général et intérêts particuliers…
II - Le couple État-justice dans les labyrinthes du changement
Affaiblissement de l’État, montée du droit…
… et fermentation de la justice
La justice étend sa sphère d’intervention
Nouvelles missions
La justice internationale
Légitimité du juge international
Davantage de démocratie ?
Les limites d’un système
Nécessité de réformes profondes
III - Des juges et des avocats
Les juges
La justice, fondement du lien social
Des juges qui se retiennent…
La légitimité du juge
La solution procédurale
Les avocats
Faillite de la représentation chez les avocats
La formation
La grande division : le juridique et le judiciaire
Une communauté juridique ?
Une formation commune ?
Créer un espace commun
Un inquiétant défaut de culture
IV - Un juge pour quoi faire ?
Des missions élargies
Une demande judiciaire inflationniste
Des méthodes inadaptées à la demande
Juges et avocats : des missions voisines ?
V - Avec qui juge-t-on ?
Un héritage historique difficile
L’École de la magistrature, un modèle discuté
En finir avec les deux cultures
Esprit de corps ou esprit de caste ?
La formation des juges à l’étranger
Les prud’hommes
VI - Qui juge-t-on ?
L’éducation juridique de tous
Le coût du droit
Le rôle nouveau du système judiciaire
Transaction, conciliation, médiation
Le revers de la médaille
Une menace pour le droit ?
La prison
Un peu d’histoire pénitentiaire
La prison : symbole ou châtiment physique ?
Application des peines
À quoi sert la prison ?
VII - Comment juge-t-on ?
Naissance d’une justice internationale
Vers le respect de la défense
Lenteur des évolutions
Le civil et le pénal
Le contrat
VIII - Que faire ?
Justice et gouvernance
Les difficultés du politique
Faut-il un changement brutal ?
Vers l’Europe
IX - L’avenir de la justice
La dernière institution à bouger
Le juge, « grammairien des rapports sociaux »
Procédure et démocratie
La loi et les mœurs
Une justice supranationale
Transformation du métier d’avocat
Un nouveau pouvoir des juges
Conclusion
Introduction

JEAN-MARIE COULON   — Pourquoi ce livre ? Pourquoi ces entretiens sur la justice entre un magistrat et un avocat ?
Les réflexions qu’appelle la modernisation de la justice ne se comptent plus depuis une dizaine d’années. De toute part, on insiste sur la crise profonde qui caractériserait l’institution judiciaire. La justice est objet de débats parmi les acteurs de la vie politique et judiciaire, comme au sein de la société civile. Et certains sont même invités par des ministres de la Justice à formuler leurs observations personnelles ou collectives.
Nous nous sommes, l’un et l’autre, souvent exprimés, chacun à sa manière, sur les enjeux et les mécanismes de la justice. Voilà plusieurs années aussi que nous échangeons nos points de vue, qui sont parfois divergents mais complémentaires. Il nous a donc semblé intéressant de poursuivre cet échange sous la forme d’un livre à deux voix. Bien sûr, cette entreprise procédera d’une démarche d’explication de la « vraie justice » peut-être ambitieuse sur le fond, mais modeste dans l’approche, nuancée, en tout cas sans excès ni caricature, et surtout dénuée d’esprit partisan.
 
DANIEL SOULEZ LARIVIÈRE   — Je ne sais pas si mon approche sera nuancée, modeste, sans excès ni caricature et dénuée d’esprit partisan, comme vous le souhaitez. Je ne prétends pas atteindre un tel niveau de prudence, de perfection et même de sainteté. Car, pour être entendu aujourd’hui, il faut parler fort. Du reste, cela ne vous fait pas peur puisque vous avez accepté que nous écrivions ce livre ensemble. Sans doute parce que vous estimez nécessaire, comme moi, de discuter des causes et des conséquences de la révolution en cours dans la justice.
 
J.-M. C.  — La justice, comme le progrès, a changé de sens à la fin du XX e siècle. Il n’est pas exagéré de dire qu’aujourd’hui elle fait peur. Et pourtant, considérée comme une vertu, c’est une source d’équilibre et de joie. Face à cet absolu, l’institution se doit, malgré ses contradictions, de ne pas perdre de vue l’idéal démocratique.
Tous les observateurs qui s’expriment avec un peu de recul et de distance conviennent que la justice est confrontée de nos jours à quatre grands problèmes, qui influencent son destin de façon contradictoire et suscitent des interrogations profondes : le déclin de l’État jacobin, celui de la norme traditionnelle, la montée en puissance du juge et la naissance d’une entité judiciaire européenne.
L’État jacobin, produit d’une lente construction depuis le XVII e siècle et organisé sur le mode hiérarchique autoritaire napoléonien, a élaboré un droit fondé sur la souveraineté nationale et la primauté de la puissance publique. Ce schéma n’est plus valide. La centralisation a cédé le pas à la décentralisation. La régulation administrative imposée d’en haut décline au profit de la réglementation juridique contractualisée. Dès lors, le droit s’impose comme un élément moteur de la vie publique, ce qui se traduit par un rééquilibrage des pouvoirs. Dans ce contexte, le juge, jusqu’alors acteur périphérique, est appelé à jouer un rôle central pour beaucoup d’enjeux de société. Les sources de légitimité démocratique ont ainsi éclaté. Les conséquences sur l’institution judiciaire, sur son organisation et son fonctionnement sont importantes. Sans doute sont-elles encore imprévisibles, mais du moins peut-on tenter de les considérer à leur juste valeur.
Beaucoup voient à tort le déclin de la norme traditionnelle comme une faiblesse, comme un signe de dépossession démocratique. L’ordre juridique imposé, c’est-à-dire la loi votée par le Parlement, comprend aujourd’hui le droit communautaire, le droit européen, les principes généraux du droit, notamment constitutionnel. Il instaure une hiérarchie des normes. Le meilleur exemple en est la supériorité, selon la Constitution, des traités, donc de la Convention européenne des droits de l’homme sur la loi nationale et, par là même, son application directe par le juge. L’ordre public imposé d’en haut coexiste avec un ordre public négocié ; souvent d’ailleurs, il s’efface devant ce dernier. Cette tendance trouve son origine dans le libéralisme économique et dans la mondialisation des échanges. Elle s’exprime en particulier dans le contrat, moteur de la régulation économique et facteur d’une régulation juridique instable. Cela pose la question de savoir si l’excellence de la justice est compatible avec cette forme de démocratie extrême, peut-être extrémiste, qu’est la mondialisation, cette liberté sans contrainte qui rejette une partie de la population et protège les libertés individuelles d’une minorité.
Dans ce contexte, la montée en puissance du juge est inéluctable. Désormais, on attend de lui qu’il soit non seulement le protecteur des libertés individuelles, mais aussi le régulateur des conflits privés et publics comme des grands problèmes de société. Sa légitimité fonctionnelle, fondée sur sa compétence et son impartialité, l’emporte sur sa légitimité institutionnelle, laquelle ne fait plus l’objet de contestations aussi virulentes qu’il y a quelques années.
Que signifie donc cette nouvelle légitimité fonctionnelle à l’égard de la société ? Quel est le rôle du juge, et celui de l’avocat ? Comment éviter de glisser vers une justice à deux vitesses ? Est-il nécessaire de redéfinir des structures judiciaires qui, face à ces bouleversements, n’ont que peu évolué ? Quelle place, enfin, la société française réservera-t-elle demain à sa justice et quels moyens lui donnera-t-elle ?
La dernière idée directrice est sans doute celle qui a le plus progressé depuis les années 1980-1990 : il s’agit de l’ambition judiciaire européenne. Le stade de l’harmonisation a minima des normes nationales, notamment procédurales, est dépassé. Le déclin de l’État jacobin va de pair avec celui de l’État-nation procédural puisqu’une entité européenne judiciaire est en train de naître. Elle implique des règles précises de loyauté du procès, de comportements professionnels et elle dessine, avec le crayon du procès équitable, les contours d’un modèle européen. Parallèlement, le Conseil consultatif des juges européens est chargé d’élaborer un projet d’avis sur les normes concernant l’indépendance de la justice et l’inamovibilité des juges. Cette justice européenne inclut nécessairement toutes les avancées récentes sur l’approche du titre exécutoire européen, le projet de statut de société européenne et la naissance d’organismes d’harmonisation comme Eurojust. Il est peu de dire que ce cheminement est en train de bousculer les règles de la vie judiciaire et le statut de ceux qui la composent.
L’objectif peut paraître ambitieux. Le dialogue permet de comprendre, de convaincre parfois, de condamner, jamais.
 
D. S. L.  — Je suis d’accord

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