Les « étirements » de la légitime défense - article ; n°1 ; vol.48, pg 49-80
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Description

Annuaire français de droit international - Année 2002 - Volume 48 - Numéro 1 - Pages 49-80
32 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2002
Nombre de lectures 121
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

M. le Professeur Joe Verhoeven
Les « étirements » de la légitime défense
In: Annuaire français de droit international, volume 48, 2002. pp. 49-80.
Citer ce document / Cite this document :
Verhoeven Joe. Les « étirements » de la légitime défense. In: Annuaire français de droit international, volume 48, 2002. pp. 49-
80.
doi : 10.3406/afdi.2002.3692
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/afdi_0066-3085_2002_num_48_1_3692ANNUAIRE FRANÇAIS DE DROIT INTERNATIONAL
XLVIII - 2002 - CNRS Éditions, Paris
LES « ETIREMENTS » DE LA LEGITIME DEFENSE
Joe VERHOEVEN
Le terrorisme n'est pas né le 11 septembre 2001. Il connaît d'anciens - et
d'« illustres » - précédents. Les attentats de New-York et de Washington n'en ont
pas moins révélé ce jour là à des opinions incrédules l'étendue des méfaits
auxquels il exposait désormais des sociétés dites civiles qui, miracles technologi
ques aidant, se croyaient ingénument à l'abri de violences aveugles. Ils ont sonné
comme un coup de tonnerre. Ce n'est pas seulement que les victimes se compt
aient par milliers ; c'est aussi — et peut être surtout que certains des édifices les
plus symboliques de la puissance américaine, débarrassée de tout rival crédible
depuis la fin de la guerre froide, ont été directement atteints, sinon purement et
simplement détruits.
Qu'on le veuille ou non, il est devenu clair que la violence à laquelle doit faire
face la « communauté internationale » n'est plus seulement celle, traditionnelle,
à laquelle des États ont recours, même illégalement, pour satisfaire leurs ambit
ions multiples ou régler les différends qui les opposent l'un à l'autre. Elle est
aussi celle dont des « particuliers », auxquels il est difficile de prêter une qualité
internationale particulière, font usage à des fins qui ne sont pas directement
patronnées par des États, même s'il reste exceptionnel qu'elles soient parfait
ement étrangères aux objectifs que poursuivent certains d'entre eux. On
comprend dès lors que le droit de cette communauté éprouve quelques difficultés
à prendre la pleine mesure des problèmes que suscite et des solutions qu'appelle
une violence internationale « privée ». Il se contente classiquement de faire obli
gation aux États de la réprimer pénalement - c'est-à-dire d'incriminer des
conduites criminelles et d'en poursuivre les auteurs - non sans les inviter à,
voire leur enjoindre de, coopérer à cette fin dans toute la mesure indispensable à
une répression effective. Les décisions prises au lendemain du 11 septembre, et
notamment la résolution 1373 adoptée le 28 septembre par le Conseil de sécur
ité, manifestent la continuité de cette politique. Elles n'en témoignent pas
moins au premier chef d'un souci beaucoup plus immédiat de sécurité (collective)
que la répression pénale n'est pas, ou guère, en mesure de satisfaire pleinement.
Il importe certes toujours de punir les auteurs d'attentats, pour les inciter à ne
pas reprendre leurs activités criminelles ou pour en dissuader d'autres de les
imiter. Il n'en est pas moins clair aussi que des mesures d'un autre ordre sont
requises pour lutter contre le terrorisme lorsque son ampleur est telle que l'orga
nisation, fût-elle lâche, qu'implique l'idée même d'une « communauté » en paraît
menacée.
Il est remarquable que, toutes autres dispositions « pacifiques » réservées,
c'est d'un recours international à la force qu'il a principalement été question au
lendemain du 11 septembre. La logique eût été d'adopter à cette fin des mesures
collectives dans le cadre du chapitre VII de la Charte des Nations Unies, quitte à
(*) Joe VERHOEVEN, Professeur à l'Université Panthéon-Assas (Paris II). LES « ÉTIREMENTS » DE LA LÉGITIME DÉFENSE 50
donner à certaines de ses dispositions une interprétation relativement large dont
la pratique postérieure à la guerre froide fournit diverses illustrations. Il n'en a
rien été. C'est sur la légitime défense que les Nations Unies se sont exclusiv
ement appuyées pour faire de la force armée l'usage que paraissait commander la
lutte contre les terroristes regroupés sous la bannière d'Al-Qaida, que dirige Ben
Laden. Ce n'est pas que la légitime défense n'ait jamais été invoquée auparavant
pour justifier les mesures armées prises contre des terroristes ; il en est divers
précédents, plus ou moins bien connus 1. Il n'empêche que c'est la première fois
sans doute qu'elle a été présentée comme l'arme principale dans la lutte contre le
terrorisme, sans s'être heurtée dans l'ensemble à de vives critiques de principe ou
à une désapprobation généralisée.
D'aucuns jugeront peut-être que l'expérience du recours à la force fut en
l'espèce peu concluante. Les Taliban ont certes été chassés du pouvoir à Kaboul.
La concorde est loin toutefois d'être rétablie en Afghanistan. Et la nébuleuse Al-
Qaida semble toujours à l'œuvre... mais il est trop tôt sans doute pour en tirer des
conclusions. Quoi qu'il en soit, l'important est juridiquement de s'interroger sur
les inflexions qu'aurait prises la légitime défense à l'occasion de son emploi dans
cette lutte contre le terrorisme. Ce n'est pas que ses règles soient à tous égards
incontestées ; elles n'en sont pas moins substantiellement très largement
admises. L'intérêt est alors de vérifier si elles ont ou non été respectées et plus
encore si, ne l'ayant pas été pleinement, elles annoncent ou non des changements
dans le droit applicable qui puissent perdurer au-delà de la crise qui les a
suscités 2.
1. Voy. gén. W. O'BRIEN, « Reprisals, Deterrence and Self-Defense in Counterterror Operations »,
Virg. JIL, 1990, pp. 420 et s. ; R. WEDGWOOD, « Responding to Terrorism : The Strikes Against Bin
Laden », Yale JIL, 1999, pp. 559 et s. ; L. CAMPBELL, « Defending Against Terrorism : A Legal Analysis of
the Decision to Strike Sudan and Afghanistan », Tul.LR, 2000, pp. 1067 et s.
2. Parmi les nombreux commentaires qui ont été consacrés aux attentats du 11 septembre et à leurs
suites, ne sont mentionnés ci-dessous que les articles auxquels il est fait plus d'une fois référence dans la
suite de la présente étude : J. ALCAIDE FERNANDEZ, « La "guerra contra el terrorismo": una "opa hostil" al
derecho de la comunidad international », REDI, 202, pp. 206 et s. ; G. ALDRICH, « The Taliban, Al Qaeda,
and the Determination of Illegal Combatants », AJIL, 2002, pp. 891 et s. ; Th. BRUHA, Gewaltverbot und
humanitares Volkerrecht nach dem 11. September 2001 », AV, 2002, pp. 383 et s. ; M. BYERS, « Terrorism,
the Use of Force and International Law after 11 September », ICLQ, 2002, pp. 401 et s. ; N. CASSESE,
« Terrorism Is Also Disrupting Some Crucial Legal Categories of International Law », EJIL, 2001, pp. 993
et s. ; J. CHARNEY, « The Use of Force Against Terrorism and Law », AJIL, 2001, pp. 835 et
s. ; R. Charvin, « L'affrontement États-Unis - Afghanistan et le déclin du droit international », Act. Dr.
int., novembre 2001, [www.ridi.org/adi] ; L. CONDORELLI, « Les attentats du 11 septembre et leurs suites :
où va le droit international », RGDIP, 2001, pp. 829 et s. ; O. CORTEN et F. DuBUISSON, « Opération
"Liberté immuable": une extension abusive du concept de légitime défense » RGDIP, 2002, pp. 51 et s. ;
J. DELBRÙCK, « Fight Against Global Terrorism : Self-Defense or Collective Security as International
Police Action ? Some Comments on the International Legal Implications of the "War Against Terrorism"»,
GYIL, 2001, pp. 9 et s. ; P. -M. DUPUY, « The Law after The Destruction of the Towers », [http://
www.ejil.org/forum_WTC/ny-dupuy.html] ; M. ElSEMANN, « Attaques du 11 septembre et exercice d'un
droit naturel de légitime défense », in K. BANNELIER et al., Le droit international face au terrorisme. Après
le 11 septembre 2001, CEDIN-Paris I, 2002, pp. 239 et s. ; Th. FRANCK, « Terrorism and the Right of Self-
Defense », AJIL, pp. 839 et s. ; id., Recourse to Force. State Action Against Threats and Armed
Attacks, Cambr

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