Compte rendu Journée d’étude du 3 mai 2006 à Vesoul
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Compte rendu Journée d’étude « Humaniser l’annonce d’un handicap »Mme LAURCompte renduCompte rendu de lade la journée d’ étudejournée d’étude du 3 mai2006 du 3 mai 2006EAdapei de Haute-Saône – Mai 2006/71 Compte rendu Journée d’étude « Humaniser l’annonce d’un handicap »ESOMMAIRE PagesIntroduction 03Mme WOESSNER – Présidente de l’Adapei 70Ouverture de la journée 03erJean-Claude AYALA, 1 adjoint au Maire – représentant de M. JOYANDET, Député-maire de VesoulYves KRATTINGER – Sénateur, Président du Conseil Général de Haute-Saône 04« Le médecin, le handicap et l’annonce » 06Claude HAMONET – Professeur, Service de médecine physique et de réadaptation, CHU H. Mondor Créteil« Les fr ères e t sœurs et la non annonce de handicap » 11Régine SCELLES – Professeur de psychopathologie, Université de RouenDébat 16Animé par Dominique ARNOULD – Médecin coordinateur PMI – Haute-Saône« Di fficultés d e l’annonce d u h andicap, e xpérience d’u n service d e r éanimation n éonatale. » 16Christine GUILLERMET – Praticien hospitalier, Service de réanimation infantile – CHU de Besançon« L’articulation d u r éseau a utour de l’enfant v ulnérable » 27Jacques SCHIRRER, Néonatologue, Président du Comité de coordination du Réseau ...

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Extrait

   d’étude « Journée rendu Compte  Humaniser l’annonce d’un handicap  »
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Compte rendu de la journée d’étude du 3 mai 2006
Adapei de Haute-Saône – Mai 2006 /71
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   d’étude « Compte Journée rendu   handicapHumaniser l’annonce d’  »  un
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 Maône 061/i 20
« L’annonce vécue par le couple » Laurence et Laurent BEAUDOIN - Parents
« Découverte périnatale – Point de vue d’une sage-femme » Marie-Noëlle WEINACHTER – Sage-femme, CHI de Vesoul
« L’annonce vécue par la sœur » Nadine BATHELOT Soeur -
« Expérience d’un groupe de parole frères et sœurs » Sylviane BARBEY, Psychologue et Virginie GAMBACHE , Educatrice spécialisée – SESSAD de Vaivre - AHSSEA
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« La part de l’école dans l’annonce d’un handicap » Chantal STERCKEMAN, Psychologue scolaire - Doubs
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Ouverture de la journée Jean-Claude AYALA, 1eradjoint au Maire – représentant de M. JOYANDET, Député-maire de Vesoul Yves KRATTINGER – Sénateur, Président du Conseil Général de Haute-Saône
Introduction Mme WOESSNER – Présidente de l’Adapei 70  
« Les frères et sœurs et la non annonce de handicap » Régine SCELLES – Professeur de psychopathologie, Université de Rouen
Le médecin, le handicap et l’annonce » « Claude HAMONET – Professeur, Service de médecine physique et de réadaptation, CHU H. Mondor Créteil
« Difficultés de l’annonce du handicap, expérience d’un service de réanimation néonatale. » Christine GUILLERMET – Praticien hospitalier, Service de réanimation infantile – CHU de Besançon
Débat Animé par Dominique ARNOULD – Médecin coordinateur PMI – Haute-Saône
Débat Animé par Dominique ARNOULD – Médecin coordinateur PMI – Haute-Saône
« L’articulation du réseau autour de l’enfant vulnérable » Jacques SCHIRRER, Néonatologue, Président du Comité de coordination du Réseau périnatalité de Franche-Comté
« Présentation du Site Internet : Humaniser l’annonce d’un handicap »  Cathy LAMBOEUF – Secrétaire Adapei 70
Clôture de la journée Marie-Dominique WOESSNER – Présidente de l’Adapei de Haute-Saône Francis LAMY – Préfet de la Haute-Saône
Annexes Charte « Humaniser l’annonce d’un handicap »
Nos partenaires
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   rendu Compte d’étude « Journée  Humaniser l’annonce d’un handicap  »
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« L’annonce vécue par la mère » Christine THOLY, Parent « L’annonce vécue par le père » Dominique DERID, Parent
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« Présentation du réseau : Humaniser l’annonce d’un handicap » Claire GRANDJEAN – Directrice des SESSAD – AHSSEA, Présidente de l’association ACCES
Débat Animé par Michel ENGELBERT – Directeur Général Adapei de Haute-Saône
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Ade ônMa 20i 2/06iepa ed tuaHaS-e
   rendu Compte Journée d’étude «  Humaniser l’annonce d’un handicap  » Compte rendu Journée d’étude du 3 mai 2006 à Vesoul Sur le thème « Humaniser l’annonce d’un handicap » 
Introduction par Mme Marie-Dominique WOESSNER, Présidente de l’Adapei de Haute-Saône et  p orteuse du projet de laction «  Humaniser l’annonce d’un handicap  »
Au nom de l’ensemble des membres du groupe de travail, des partenaires et de l’Adapei de Haute-Saône, je vous souhaite la bienvenue à cette journée que nous espérons riche en échanges et en informations. Je laisse la parole à M. AYALA, 1eradjoint au maire, qui représente M. Alain JOYANDET, Député –Maire de Vesoul, absent pour engagements parlementaires. J’en profite pour le remercier ainsi que la Ville de Vesoul pour leur soutien et pour la mise à notre disposition de cette Salle du Théâtre ainsi que la Salle Parisot.
 O uverture de la journée par M. AYALA, 1 e r  ,YAJOETNDAl. n aiprés, rent Mentani tdaojiaeruaM Député-maire de Vesoul et M. Yves KRATTINGER, Sénateur – Président du Conseil Général de Haute-Saône
 M. AYALA : « Remerciements. Bienvenue à Vesoul. Je suis très heureux de vous accueillir et surtout très heureux d’ouvrir cette journée qui va être très forte puisqu‘elle rassemble beaucoup de personnes de la Franche-Comté.
Je voudrais excuser M. Alain JOYANDET, notre député-maire qui a été retenu au dernier moment à Paris et qui m’a chargé de le représenter.
Je voulais féliciter la présidente et les membres du groupe de travail pour le thème qui a été retenu « Humaniser l’annonce d un handicap » ; Je crois que cette journée va permettre une grande réflexion. En même temps, je voudrais remercier l’ensemble des partenaires qui ont répondu présents et les intervenants qui vont être nombreux et de grande qualité.
« Humaniser », c’est un bien grand mot mais je crois que c’est un profond respect qu’il faut avoir à travers ce mot. En effet, vous savez, je suis élu « politique » d’une part et élu « associatif » d’autre part, car je suis élu dans le mouvement sportif et je peux vous dire qu’au niveau du Comité Olympique, nous cherchons beaucoup à humaniser et à intégrer le monde du handicap. D’ailleurs, l’Adapei a signé la Charte sur le handicap et c’est avec une grande joie que nous l‘ avons accueillie. Il ne faut pas oublier qu’au niveau de l’Adapei, les jeunes découvrent par le sport, s’intègrent dans de plus en plus de disciplines. Je crois qu’aujourd’hui on doit être à une trentaine de disciplines qui les acceptent, qui les intègrent : c’est l’aviron, c’est le judo, le basket, et bien d’autre disciplines encore… Et tout cela pour leur profond respect.
Le handicap ne frappe pas que les autres, il faut toujours regarder à sa porte. Quelle est la famille qui n’est pas touchée ? Handicap de naissance, handicap suite à un accident et handicap parfois à vie après cet accident. Et ce n’est pas toujours facile de redonner le moral à ces familles. Je crois que la meilleure façon de leur donner le moral, c’est de les accepter, de les écouter, de participer en les intégrant comme la plupart le font. Voilà les quelques mots que je voulais vous dire, je vais m’arrêter là car il reste encore pas mal d’intervenants à écouter. Je vous souhaite à tous une très bonne journée. La Ville de Vesoul est très heureuse de mettre à votre disposition le Théâtre et la Salle Parisot. Bons travaux. »
Adapei de Haute-Saône – Mai 2006 3/71
   Compte rendu Journée d’étude «  uH nuh  edacpnaidser maninonclan  »
 M. Yves KRATTINGER: « J’ai été sollicité pour introduire cette journée de travail autour de l’annonce d’un handicap et je reconnais volontiers que ce n’est pas un exercice très facile. Pas très facile pour nous élus, car si l’on essaie d’imaginer ce qui peut arriver, ce qui peut nous arriver ; Si nous ne l’avons pas vécu directement ou dans notre proximité, nous sommes quelque part, très « mal placés » pour en parler. En même temps, il ne faut pas se défiler et j’ai souhaité répondre oui à votre sollicitation, parce que je pense, qu‘en tant que représentant du Conseil Général et dans le contexte des missions nouvelles qui nous sont confiées, qui se sont élargies et bien ce sont des questions que nous devons embrasser complètement. Cette journée, c’est d’abord l’aboutissement d’un travail qui a été démarré il y a déjà 5 – 6 ans à l’initiative de l’Adapei sur la problématique de l’annonce d’un handicap. Le Conseil Général a été d’emblée associé à cette réflexion avec la présence du Dr ARNOULD, Responsable du Service PMI et la présence d’une puéricultrice du secteur. Toutes les deux ont participé au Comité de pilotage. Le Conseil Général a aussi été associé au financement de la recherche-action, co-financée avec la Fondation de France, la DRASS, l’URCAM, la CRAM et bien sûr l’URAPEI donc tous ceux qui se trouvent aujourd’hui, de prêt ou de loin, dans la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH). C’est vrai qu’à l’époque, on n’en parlait pas encore mais aujourd’hui c’est quelque chose qui prend un sens très important, c est déjà une réalité. Cette recherche-action a été réalisée auprès de 15 familles de Haute-Saône qui avaient vécu pour des enfants de moins de 6 ans une situation d’annonce d’un handicap. Les résultats de cette étude seront présentés au cours de vos travaux tout à l’heure. Je sais que ce sont des témoignages très importants qui peuvent baliser, un petit peu, la route de tous ceux qui sont en situation de devoir annoncer dans un scénario qui est forcément un scénario compliqué. A partir de cette réflexion, une charte a été rédigée visant à améliorer les conditions de l’annonce d’un handicap. C’est un travail difficile car une fois la charte réalisée, il faut la mettre en œuvre et évidemment chaque mot, chaque observation doit être pesé et on ne peut pas faire les choses comme çà sans les préparer. Cette charte a pour but d’aider les professionnels confrontés à des situations d’annonce d’un handicap à trouver les éléments nécessaires à leur réflexion. Il a été également créé un réseau pour que les familles et les professionnels trouvent les relais et les appuis nécessaires. Ce réseau a été récemment matérialisé par un site Internet où apparaissent évidemment le Conseil Général, la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) et le Service de Protection Maternelle et Infantile (PMI) qui est en fait très impliqué. Enfin, nous avons l’organisation de cette journée qui a pour but d’associer parents et professionnels et je vois qu’il y a beaucoup de professionnels, et je sais que vous êtes tous préoccupés par cette question. Il y a un peu moins de parents mais çà ne veut pas dire qu’il n’y en a pas qui arriveront un peu plus tard, et sachant qu’ils ont besoin les uns, les autres, de préparer quelque chose qui est très difficile : l’annonce d’un handicap. Ce problème sera abordé tout au long de cette journée sous différents angles et il le mérite. Du côté professionnel, par tout ce qui concerne la sociologie, par la médecine physique et de réadaptation, par la néonatologie et par la psychologie. Et du côté des parents, par de multiples dimensions qui doivent toutes être prises en compte : les familles, l’école et la socialisation.
Je pense que c’est un moment particulier que je dois re-situer dans le cadre de la Maison Départementale des Personnes Handicapées. Je me suis déjà exprimé sur ce thème mais puisqu’il y a beaucoup de travailleurs sociaux ici, de familles, de responsables d’établissement, je veux le faire devant vous. J’ai toujours dis : je considère que la loi qui a été votée est un progrès et qu‘elle ouvre un champs de progrès pour la société dans la relation avec et pour l’intégration des personnes handicapées. La MDPH instaurée en décembre sera opérationnelle dans quelques mois, le temps de passer d’un système à un autre. Elle remplira les missions qui lui ont été confiées par la loi. Voici celles qui me paraissent les plus fondamentales :
Adapei de Haute-Saône – Mai 2006 4/71
   rendu Journée Compte d’étude «  Humaniser l’annonce d’un handicap  » D’abord, offrir un accès unique donc une simplification. C’est vrai que pour les familles et les personnes handicapées, la multiplicité des guichets est une complication, on finit par ne plus savoir à qui s’adresser, comment cela doit être fait et dans quel ordre. C’est donc très important qu’il y ait un accès unique : accès unique aux droits et aux prestations en faveur des personnes handicapées ; accès unique à toutes les possibilités d’appui dans la formation et l’accès à l’emploi ; accès unique à l’orientation vers les établissements et les services.
Ensuite la MDPH se doit de faciliter les démarches des personnes handicapées et de leur famille : aller vers plus de simplicité, d’efficacité, de réactivité. Ses missions définies par les textes sont l accueil, l’information, l’accompagnement, le conseil aux personnes handicapées et à leur famille. Mais aussi la sensibilisation des citoyens à la question du handicap. Nous sommes sortis des ghettos qui existaient autrefois, nous sommes dans une société qui marche vers l’intégration. Nous devons faire en sorte que cette intégration ne soit pas seulement le fait des institutions mais qu’elle soit le fait de toute la société c’est à dire que chacun, sur son lieu de travail, dans les associations, dans le sport, partout, se sentent concernés. Mon père, par les accidents de la vie, de la guerre, était handicapé et il ressentait fortement ces choses là quand les gens ne facilitaient pas la vie des personnes handicapées. Nous devons faire en sorte que tous les citoyens prennent en compte et soient sensibilisés à l’accueil des personnes handicapées, assurer à celles-ci et à leur famille, l’aide nécessaire à l’élaboration du projet de vie puisque chaque personne handicapée aura droit à son projet de vie, nécessaire à la mise en œuvre des décisions prises par la Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH). Cette commission est en cours de création et va, petit à petit, élaborer sa propre doctrine, mettre en œuvre les textes et décrets et répondre aux sollicitations des familles et des personnes handicapées. Donc, la MDPH doit créer les conditions d’un fonctionnement efficace de la commission des droits et de l’autonomie puis assurer à la personne handicapée et à sa famille, l’accompagnement et les médiations que cette mise en œuvre peut requérir. Enfin la MDPH doit mettre en œuvre l’accompagnement nécessaire aux personnes et à leur famille après l’annonce et lors des évolutions du handicap puisque le handicap n’est pas forcément quelque chose de figé et déterminé pour une vie entière, il peut aussi être évolutif. Il s’agit donc d’un vaste chantier devant nous sur lequel nous demandons le droit de parfois ne pas être parfait dès le 1erjour. Je le dis à vous tous, ce n’est pas simple. C’est un chantier nouveau que nous devons aborder avec humilité mais en même temps avec une ambition, celle du progrès qui va jalonner les prochaines années. C’est une construction positive. Je souhaite que cette journée s’inscrive globalement dans cette étape de l’évolution de la société française qu’est la création de cette MDPH et que, à travers vos échanges et témoignages, à travers les apports scientifiques des professionnels qui vont intervenir, nous soyons tous demain, mieux armés pour remplir les missions que la loi nous a confiées. Je vous remercie. »
Présentation de la démarche par Serge EBERSOLD  :  
Cette intervention n’a pu être réalisée, en raison de l’absence de M. EBERSOLD pour raisons professionnelles.
 P arole à Mme ARNOULD, médecin coordinateur PMI  Haute-Saône, animatrice de la matinée  :
« On ne le dira jamais assez mais quelque soit la façon dont est annoncé le handicap, la déficience, la malformation d’un enfant à ses parents, cela reste pour eux, un choc violent. Les réactions face à l’annonce varient d’un individu à l’autre mais s’expriment généralement sous la forme de violence, colère, peur, révolte, souffrance, culpabilité mais aussi silence et isolement. Les parents se trouvent face à une situation qu ils n’avaient pas prévue et devant laquelle, ils se sentent totalement anéantis et démunis et avec laquelle ils devront avec leur enfant avancer malgré tout. La difficile tâche d’annoncer revient généralement aux professionnels et bien qu’il n’y ait pas de bonne annonce, chacun sait que de la manière dont sont formulés
Adapei de Haute-Saône – Mai 2006 5/71
   Journée rendu d’étude « Compte  Humaniser l’annonce d’un handicap  » les premiers mots est lourde de conséquence pour l’enfant et sa famille. La mise en forme autant que le contenu des informations délivrées vont en effet orienter les premières réactions mais aussi et surtout par la suite la mise en place de l’investissement parental. » (Préambule de la Charte « Humaniser l’annonce d’un handicap »)
C’est dans cette optique et à l’initiative d’un groupe de parents confrontés au handicap que l’Adapei de Haute-Saône a décidé de mener dans le cadre du Programme Régional de Santé (PRS) une recherche action intitulée « Humanisons l’annonce d’un handicap ». Cette recherche a été co-financée par la Fondation de France, le Département de la Haute-Saône, l’URCAM, la CRAM, l’URAPEI de Franche-Comté et a été confiée à M. Serge EBERSOLD. Celui-ci n’étant pas arrivé, nous allons intervertir ce programme. Il devait nous présenter cette recherche-action, les conclusions et les pistes dégagées par cette étude.
Je laisse donc la parole à M. Claude HAMONET, Professeur de médecine physique et de réadaptation au CHU H. Mondor et Docteur en anthropologie sociale. Son intervention intitulée « Le médecin, le handicap et l’annonce » va permettre de voir l’annonce sous 2 regards, celui du médecin et celui de l’anthropologue.
 « Le médecin, le handicap et lannonce  » par Claude HAMONET, Professeur, Service de médecine physique et de réadaptation, CHU Mondor Créteil.
Professeur Claude Hamonet, Médecin rééducateur, Docteur en Anthropologie sociale, Membre du Conseil scientifique de l'UNAPEI, ex expert handicap à l'Organisation mondiale de la santé, Chef de service de Médecine Physique et de réadaptation au CHU Henri Mondor, 94010 Créteil. Louise Gagnon, Professeur à l'Université de Montréal, Québec, Canada ; Marie de Jouvencel, Psychologue, Centre de Réadaptation fonctionnelle du Château de Richebourg, 78550 Houdan; Petra Menzel, Psychanalyste. Introduction : l'importance de la subjectivité
Salutations à tous, je remercie beaucoup les organisateurs pour la qualité d’organisation de ce colloque qui me paraît indispensable, nécessaire aujourd’hui car on parle beaucoup de fractures sociales, c’est à la mode, et il y en a une ici entre le corps médical et les usagers de la société et notamment ceux qui sont les plus démunis face aux apports de santé c’est à dire les personnes en situation de handicap.
L’Unapei, dont j’appartiens à son comité scientifique, avait organisé il y a un an 1/2 environ un colloque sur ce thème et c’est à cette occasion que nous nous sommes rencontrés, ce qui explique ma présence aujourd’hui.
Selon une enquête de Handicap International, l'APAJH et Leroy-Merlin (2004), 65% les familles de personnes en situation de handicap considèrent que l’annonce a été mal faite ou très mal faite (43%). Comment expliquer le fait qu'il y ait une telle incompréhension entre les explications du médecin et l'attente des intéressés (personnes en situation de handicap et/ou leurs familles) ? Notre équipe internationale de recherche regroupée au sein du Groupe International de Recherche Interdisciplinaire sur le Handicap (GIRIH) a pris en compte cet aspect dans une approche qu'elle qualifie de quadridimensionnelle. A côté des dimensions corporelles, fonctionnelles et situationnelles qui caractérisent le fait, pour une personne, d'être en situation de handicap, une large part est faite à la subjectivité de la personne concernée et de sa famille. Il s'agit du vécu et du ressenti par cette personne de son état de personne handicapée ce qui inclut les circonstances d'apparition (sentiment de culpabilité, d'être une victime) et la façon de l'apprendre à travers l'annonce. Le fait que, depuis plusieurs années, nous nous sommes très impliqués dans la réadaptation d'une affection d'origine génétique, rare, orpheline, très handicapante et surtout très méconnue ou mal connue des médecins : le syndrome d'Ehlers-Danlos nous a incité à demander l'aide de la Fondation de France pour
Adapei de Haute-Saône – Mai 2006 6/71
   Compte Journée rendu d’étude «   pacidnah inesuHamdunnce annor l  » mieux explorer l'annonce dans ce cas particulier. L'étude a commencé. Sa méthodologie mérite d'être connue pour reproduire ce type d'investigations. Annoncer quoi ? Pour une autre vision du handicap. On ne peut aborder correctement l'annonce du handicap si l'on ne définit pas ce dont il s'agit précisément et sans en mesurer la sévérité actuelle ou potentielle. C'est pourquoi nous proposons la définition suivante qui se réfère au "modèle social" décrit dans l'introduction de la Classification internationale des fonctionnements, des handicaps et de la santé de l'OMS (2001) dans lequel : "le handicap n'est pas un attribut de la personne, mais plutôt un ensemble complexe de situations, dont bon nombre sont créées par l'environnement social " (introduction à la CIF). « CONSTITUE UNE SITUATION DE HANDICAP LE FAIT, POUR UNE PERSONNE, DE SE TROUVER, DE FAÇON DURABLE OU TEMPORAIRE, LIMITÉE DANS SES ACTIVITÉS PERSONNELLES OU RESTREINTE DANS SA PARTICIPATION À LA VIE SOCIALE DU FAIT DE LA CONFRONTATION INTERACTIVE ENTRE SES FONCTIONS PHYSIQUES, SENSORIELLES, MENTALES ET PSYCHIQUES LORSQU’UNE OU PLUSIEURS SONT ALTÉRÉES ET, D’AUTRE PART, LES CONTRAINTES DE SON CADRE DE VIE » Ce concept global de la notion de handicap permet d'aborder avec plus de facilité le processus de l'annonce en dissociant nettement les différentes composantes qui le constituent.
 Modifications du corps
 Limitations fonctionnelles  de la personne
 Obstacles dans les situations  de la vie
Subjectivité
 
L’annonce du handicap est un passage qui obéit à un rituel Entrer dans l'état de handicap est, pour l'intéressé comme pour sa famille et ses proches, un "passage" d'un monde dans un autre : de celui des "valides" à celui des personnes handicapées. C'est être une personne en situation de handicap dans un monde organisé par des personnes prétendument valides et d'avoir à affronter, au quotidien, un grand nombre d'obstacles constitués de barrières architecturales et de rejets aux multiples facettes de la part des "autres". Ce passage, pour être réussi appelle un rituel qui doit aider au mieux cette transition d'un état vers un autre. Ce rite est ici ce qu'il est convenu d'appeler "l'annonce". Nos habitudes sociales ont évacué la pratique de bien des rites sans savoir que cela altérait ou détruisait le lien social. Ici le développement d'une pratique médicale essentiellement basée sur les techniques du corps dominées par l'imagerie et la biologie, expression "d'un grand savoir sur le corps mais d'un piètre savoir sur
Adapei de Haute-Saône – Mai 2006 7/71
   Compte d’étude « rendu Journée  Humaniser l’annonce d’un handicap  » la souffrance" (David LEBRETON) ont imprimé aux échanges avec le médecin un aspect trop souvent réduit aux seuls aspects "techniques".
Les rites et leur importance dans le lien humain et social. Quelques notions fondamentales d'anthropologie. « Une société ne peut pas vivre sans rites », (L.V. THOMAS). “ Le rite apparaît comme une assurance qu’on s'invente pour maîtriser l’épisodique et l’aléatoire. Il permet de dépasser l’angoisse". Il fixe les repères de l’organisation de notre vie personnelle et sociale. Certains demeurent des “ habitudes de vie “, d’autres ponctuent les faits marquants de la vie sociale. Ces derniers ont été dénommés "rites de passage" par l'ethnologue Arnold VAN GENNEP. Ils ponctuent les étapes importantes de la vie d'un être humain de sa naissance à sa mort. « L‘Anthropologie voit dans le rite une forme privilégiée d’affirmation d’un ordre commun. En consacrant l’intégration de l’individu à la société globale par l’intermédiaire de groupes d’appartenance, et par l’assimilation de normes, le rite devient un facteur essentiel de cohésion sociale  » (Dictionnaire critique d’action sociale). Parler du rite est d’actualité dans notre société qui se caractérise par l’appauvrissement des liens sociaux et le développement de rites violents inversés. Ceci est particulièrement vrai en handicapologie où l'on peut opposer les "rites d'inclusion" aux "rites d'exclusion" ou de rejet.
Le médecin, sa formation et l'annonce
L'attitude du médecin face à un "malade-patient-usager-client-bénéficiaire" est marquée par sa formation à la maladie c'est-à-dire à tout ce qui est négatif pour l'Homme. La difficulté à désigner la personne qui est l'objet de ses préoccupations est en soi significative du malaise qui est présent dans la communication entre la personne malade ou handicapée (ce n'est pas la même chose). Georges CANGUILHEM a parfaitement analysé cette question dans "Normal et pathologique" en montrant que le médecin a une approche "objective" (jusqu'à la déshumanisation parfois) et que le patient a un point de vue éminemment subjectif. On conçoit que les échanges entre les deux approches puissent ne jamais se rencontrer et que bien souvent elles s'opposent dans le conflit, la frustration et la souffrance.
Médecine de la déficience ou médecine de l’inclusion ?
"Il n'y a pas de meilleur livre que le malade" disait déjà BAGLIVI, un pionnier de la médecine clinique, au 18ème siècle.
La nouvelle réforme des études médicales qui vient de se mettre en place a introduit un module obligatoire sur le handicap qui est malencontreusement dénommé "déficiences, handicap et dépendance" ("handicap autonomie et réadaptation" aurait été préférable car moins stigmatisant et davantage porteur de solutions positives). On favorise avec cet intitulé, le développement d'une médecine de la déficience et de l'exclusion au détriment d'une médecine de la réadaptation et de l'inclusion avec participation sociale. Son enseignement est inhomogène dans les Facultés de médecine françaises et n'est pas toujours confié à des médecins spécialisés ou connaisseurs dans le domaine du handicap. C'est ainsi que nous avons assisté, dans une Faculté de médecine parisienne, à un excellent cours fait par un spécialiste ORL sur le tympan, les otites, les tumeurs de l'oreille interne avec des images très explicites mais rien sur la langue des signes, l'appareillage et l'état d'isolement des sourds et leur insertion scolaire et professionnelle. Il y aura donc beaucoup à faire encore pour infléchir les préjugés et le comportement du corps de santé face au handicap et à la façon de l'annoncer. L'évolution de l'état d'esprit du corps de santé sera parallèle à celle de toute la population : l'image du handicap chez les "blouses blanches" n'est, en fait, que la projection de l'image qu'en a la société et du milieu social auxquels ils appartiennent.
Adapei de Haute-Saône – Mai 2006 8/71
   Compte rendu Journée d’étude «  once duer lannpa  nahdncimuHsina  » Ce nouveau module de l'enseignement des médecins a aussi pour objectif de combler leur manque de connaissances sur les possibilités de la rééducation et sur la méthodologie de la réadaptation. Ceci impliquerait aussi une formation pratique, le plus souvent défaillante, par manque de services hospitaliers compétents. Le médecin et le handicap d'origine mentale. Le Collège National des Professeurs de Médecine Physique et de Réadaptation a édité (éditions Masson) un ouvrage national, collectif qui comporte un chapitre "handicap mental" qui a été, dans sa première édition, soumis au conseil scientifique de l'UNAPEI pour avis et approbation. Malgré les réserves que nous avons faites, l'inscription officielle du handicap dans les études médicales constitue un progrès notoire et doit être exploitée et améliorée. Le droit de savoir et l'annonce du handicap. Les mots pour le dire. Le devoir d'information, renforcé par la loi du 4 mars 2002 sur le droit des patients, a induit dans le corps de santé un comportement d'explications et d'information dont l'abondance et le "réalisme", quand ce n'est pas la froideur ou même la brutalité, ne sont pas appropriées face à la fragilité des personnes qui reçoivent le message. L'accent est mis sur les manques, le plus souvent sans proposition de solutions et de conduite à tenir ou de façon vague. On sait aussi que l'accès à l'information dans ce domaine éclaté et disparate est très difficile. On sait aussi qu'il y a un manque d'offre scandaleux très bien dénoncé dans la lettre à Jacques Chirac de Julia KRISTEVA qui évoque le tribunal d'honneur présidé par le Docteur SALBREUX, réuni le 15 mai 2002 qui a reconnu coupables, à l'unanimité, tous les premiers ministres et tous les ministres de la santé depuis 1996. Elle fait aussi le constat de la faillite et de la caducité de la loi de 1975 qui ne vaut pas la peine d'une réforme mais doit être remplacée par des dispositions juridiques audacieuses répondant à la modernité. Nous estimons, personnellement, qu'aujourd'hui nous n'en avons pas pris le chemin. Bien au contraire nous reculons! Dans un tel contexte, l'annonce est douloureuse.
Que doit faire le médecin ? Tout d'abord il se doit de rester un être humain et de ne pas abandonner la personne handicapée, ni la considérer comme "incurable ou "chronique". " Il ne doit pas mentir ou fuir les questions. C'est ce que reprochent aux médecins certaines personnes handicapées que nous avons suivies, notamment un médecin traumatisé cérébral : "aucun médecin ne m'a dit que je resterai handicapé !". Il en est de même de cet anthropologue américain, Robert MURPHY, devenu paralysé par maladie, qui indique que les médecins très compétents et attentifs à son état sphinctérien urinaire, à l'adaptation de son fauteuil roulant ne lui ont jamais posé la question qu'il attendait : "Qu'est-ce que cela vous fait d'être tétraplégique ?"
 L annonce «  négative  »
"Etre handicapé" sonne dans l'esprit de ceux qui l'attendent comme un lourd verdict social, surtout si les fonctions qui caractérisent le plus l'Homo sapiens sapiens que nous sommes sont compromises : marcher, parler, penser, prendre.  L annonce «  positive  »
Adapei de Haute-Saône – Mai 2006 9/71
   d’étude « rendu Journée Compte  Humaniser l’annonce d’un handicap  » Un tel constat ne peut se faire sans mettre en parallèle les possibilités de la rééducation et de l'adaptation-réadaptation. C'est pourquoi la présence d'un médecin spécialiste de Médecine Physique et de Réadaptation auprès du spécialiste qui a fait le diagnostic est, selon nous, nécessaire.
Un diagnostic qui doit être fonctionnel Le diagnostic n'est pas seulement "lésionnel", il est aussi "fonctionnel" et doit être centré sur les fonctions qui sont respectées et/ ou qui peuvent être transformées plutôt que sur les lésions objectivées par l'imagerie qui ne sont pas nécessairement des indicateurs de gravité. Bref, on ne peut annoncer des lésions sans proposer des solutions porteuses d'un espoir lucide.
Prendre le temps, écouter Il est important de prendre le temps, d'écouter et de tenir compte de cette dimension essentielle de la personne que sont la subjectivité et l'affectivité dans lesquelles, les préjugés culturels, les peurs, les tabous la culpabilité et la honte, jouent un si grand rôle. L'annonce concerne l'enfant ou l'adulte en situation de handicap et ses proches, ce qui inclut aussi la fratrie qui partagera les situations de handicap du frère ou de la sœur concerné. La notion de "deuil", par analogie avec le vocabulaire psychanalytique, est souvent évoquée. Nous ne l'aimons pas car elle introduit un aspect négatif et de frustration. A moins d'introduire le deuil, comme le fait Edgar MORIN, que nous avons légèrement modifié. « Le deuil exprime socialement l’inadaptation individuelle à une perte mais en même temps il est ce processus social d’adaptation qui tend à refermer la blessure des proches ».
Conclusion : De l'hominisation à l’humanisation, Il n'est pas certain que l'Homme soit en cours d'humanisation (Edgar MORIN). Ceci commence avec le bureau du médecin dont on ne doit jamais sortir plus mal qu'en y entrant. Pour cela, une nouveau dialogue doit être noué avec le corps médical et, plus généralement, le corps de santé. Le médecin doit apporter écoute, respect et espoir et essayer d'être "un enchanteur dans un monde désenchanté" (Christian HERVE).
Intervention de Dominique ARNOULD, médecin coordinateur PMI – Haute-Saône  : « Merci M. HAMONET pour votre intervention directe et percutante. On a beaucoup apprécié vos critiques, y compris celles du corps médical. Vous avez raison de le dire, il y a encore beaucoup de progrès à faire, l’annonce n’est toujours pas faite de manière très positive. Il y a un effort à faire pour informer et former les médecins. Vous associez cette annonce du handicap à un rituel, cette transition d’un état à un autre, qui est inventée pour maîtriser l’aléatoire et l’épisodique et qui permet de dépasser l’angoisse en fixant des repères dans notre vie.
Je vais désormais laisser la parole à Mme SCELLES, Professeur de psychopathologie à l’Université de Rouen et qui a intitulée sa présentation « Les frères et sœurs et la non annonce du handicap ». Chaque membre de la famille vit l’annonce du handicap de façon spécifique puisque cette annonce intervient dans son histoire individuelle et dans la vie de la famille et c’est très intéressant que l’on puisse en parler. »
Adapei de Haute-Saône – Mai 2006 10/71
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