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VALÉRIE SARRE. (1) Femmes Mixité Sports (www.femixsports.fr). (2) Le Monde du 25 août 2008: «Sport français: où sont les femmes?», par Gilles Van Kote.

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Langue Français

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La femme est-elle encore l’avenir du sport ? À l’aube de l’an 2000, après une longue domination masculine, le sport se déclinait de plus en plus au féminin, avec la parité en ligne de mire. Las, l’élan insufflé par Marie-George Buffet semble être retombé. Jusqu’à se demander : la femme est-elle encore l’avenir du sport ? Février 2009en jeuune autre idée du sportn°42311
HAUT NIVEAU,ASSOCIATIONS,DIRIGEANTS De lafragilité féminine dans un monde d’hommes
La contre-performance de nos sportives à Pékin a révélé les faiblesses récurrentes du sport au féminin, en dépit des efforts de certaines fédérations et des progrès de la représentativité des femmes dans les instances dirigeantes.
’était en Une duMonde, il y a presque dix ans déjà. Le 21 décembre 1999, le journal de référence titrait :« La PMiaetrrheCaltiaticueiumefadCeoubertin«sUenpehorlaysmepimaisde femelle femme est l’avenir du sport ». Dans son article, la journaliste Bénédicte ogyne de serait impratique, inintéressante, inesthétique et incorrecte»pour montrer le chemin parcouru depuis.«Un siècle après cette mâle affirmation, les JO de l’an 2000 seront féminins»affirmait-elle en insistant sur la présence croissante des femmes aux JO (4000 à Sydney en 2000 contre 12 à Paris en 1900) et en notant«un nouvel engouement général pour le sport féminin», tant du côté du public que des médias, des sponsors et des fédé-rations. À la surprise générale, les handballeuses françaises venaient de s’inviter en finale du cham-pionnat du monde – le match avait été retrans-mis in extremis à la télé, double prolongation à la clé! – et un souffle nouveau semblait porter
les femmes sportives vers des lendemains radieux. La parité était à portée de main, la ministre des Sports en faisait son affaire, et les tristes réticences du vieux Baron seraient bien-tôt définitivement ringardisées… D’ailleurs, au plan mondial les deux dernières olympiades ont bien confirmé cette présence accrue des femmes – de l’ordre de 40% – tandis que, quel symbole, 16 des 33 médailles tricolores décrochées à Athènes en 2004 étaient féminines! On commençait à croire que la journaliste duMondeavait vu juste…
RETOUR À LA RÉALITÉ
Quatre ans plus tard, le voyage à Pékin a balayé cette belle assurance. Avec seulement 7 médailles sur un total de 40 pour la délégation française, les filles ont cruellement déçu, et les interro-gations sur le sport féminin brutalement resurgi…« Ces sept médailles de Pékin sont une force pour nous !,estime cependant Béatrice Palierne, cadre national à la Fédération française
de tennis de table et responsable de l’associa-tion Femix, qui défend la cause des femmes dans le sport (1).En effet, ce médiocre résultat a le mérite d’interpeller les dirigeants du monde sportif, qu’il s’agisse des fédérations, du CNOSF ou du ministère. Tous se sont pris de plein fouet la réalité du terrain ! »Une analyse partagée par Dominique Petit, directrice de la vie asso-ciative au Comité national olympique et spor-tif français :« Nous avons toujours considéré les excellents résultats d’Athènes comme l’arbre qui cachait la forêt. »Une façon d’expliquer que la question du haut niveau chez les femmes n’a jamais été réglée. D’ailleurs, seul un entraîneur national sur dix est une femme. «Bien des entraîneurs ont beaucoup de mal à comprendre certains aspects de la psychologie féminine,constate Meriem Salmi, psychologue à l’Insep, qui accompagnait la délégation française à Pékin.Il y a encore beaucoup à faire en la matière. »Restée longtemps taboue, la question
UN PÔLE RESSOURCES AU SERVICE DES FEMMES Le Pôle ressources national « Sport, famille et pratiques fémi- nisation devrait ainsi être publié ces jours-ci (le consulter sur nines » installé au sein du Creps d’Aix-en-Provence (Bouches- www.sfpf.fr). « Nous avons également mis en place depuis 2007 du-Rhône) a vu le jour en 2006. Cette structure animée par quatre des groupes ressources réunissant des universitaires, des experts personnes et dirigée par Youri Filloz se veut un « outil de mutua- et des acteurs de terrain sur les thèmes : “filles et cités”, “sport lisation, de conseil et d’expertise ». Le pôle organise désormais et maternité”, “adapter les équipements sportifs” et “histoire le concours annuel Femmes et Sport, anime un réseau de réfé- de l’évolution du sport féminine”, explique Youri Filloz. En rents, mène des actions de formation et produit des analyses attendant le fruit de leurs travaux, le Pôle a déjà constitué un statistiques. Un rapport quadriennal (2004-2008) sur la fémi- centre documentaire riche de 1 200 références.V.S.
12Février 2009en jeuune autre idée du sportn°423
La femme est-elle encore l’avenir du sport ?
Norvège-France, décembre 1999 : la marche en avant du sport féminin semblait alors impossible à freiner.
commence cependant à pointer son nez:«Les féminines ont-elles besoin d’une stratégie diffé-renciée dans l’approche du haut niveau?»inter-rogeait l’un des ateliers du rassemblement du haut niveau, à Talence, en octobre dernier. Au lendemain de ces Jeux en demi-teinte, Roselyne Bachelot s’est elle-même inquiétée du«déséqui-libre flagrant»entre les équipes masculines et féminines:«C’est vraiment un caillou dans ma chaussure de sport»a-t-elle confié (2), en sou-haitant que cette«déception majeure»soit«abso-lument rectifiée»en vue de Londres 2012. D’où la commande d’un rapport circonstancié à la Préparation olympique et paralympique(lire p 14).
ET DANS LES CLUBS ?
À travers la contre-performance de Pékin, et au-delà de la vitrine du haut niveau, c’est aussi la place des femmes dans la pratique sportive en général qui interroge. Comme l’écrit Stéphanie Mahuet dans un document récemment publié par le pôle ressources national «Sport famille et pra-tiques féminines », s’il demeure d’actualité le débat sur les médailles n’est que«la partie visible de la question de la présence des femmes dans le sport, à tous les niveaux.»D’ailleurs, en dépit de la spécificité de la problématique du haut niveau, on retrouve la même proportion de femmes – stable autour de 35 % depuis quelques années – sur la liste du haut niveau et parmi les licen-ciés sportifs en France, toutes fédérations confon-dues… Et ce malgré les efforts déployés par certaines fédérations pour encourager la pra-
tique féminine au sein de leurs clubs. C’est le cas du tennis de table, qui a réussi en deux ans à séduire 700 nouvelles adeptes – portant ainsi leur nombre à 14000 (12%) sur un total de 120 000 licenciés (hors licences promotionnelles), ce qui relativise un peu la performance – en pro-posant en plus du ping-pong des modules de gymnastique et d’assouplissements, dans des cré-neaux horaires mieux adaptés aux attentes des femmes. Des fédérations très masculines ont elles aussi choisi de faire un effort. Le rugby a vu par exemple sa proportion de femmes pro-gresser de 2,8 à 3,8 % de 2004 à 2007 : elles sont désormais 10 000. Dans le même temps, la part des footballeuses dans les effectifs de la FFF passait de 2,1% à 3%, soit près de 70000 femmes sur 2,3 millions de licenciés. Cette évolution est encouragée par le minis-tère des Sports. Dans le cadre du dispositif «Soyez sport », en 2007, 14 fédérations (3) se sont vu attribuer des postes dans le cadre de conven-tions d’objectifs visant à développer la pratique féminine.à une jeune fille ainsi recru-« Grâce tée parmi nos athlètes de haut niveau, nous avons pu mener une enquête approfondie auprès d’une trentaine de nos clubs les plus ”féminins” afin de comprendre pourquoi cela marche chez eux. Ceci afin de proposer un modèle d’accueil des femmes utilisable par toutes nos associa-tions », explique Béatrice Palierne à la FFTT. Les fédérations de boxe, de rugby et de cyclisme se sont également engagées dans cette voie. À l’ar-rivée, le constat est le même: aucune solution
miracle mais du cas par cas et, surtout, une approche différente à intégrer tant en terme d’ac-cueil (vestiaire, ambiance), d’activité proposée (plutôt loisir que compétition), d’encadrement et d’horaires. Si on veut faire venir les femmes dans les clubs, il faut peut-être aussi qu’elles puissent s’y retrouver entre elles, comme le montre le suc-cès des courses urbaines ou des salles de sport qui leurs sont exclusivement réservées. Ou proposer tout au moins un environnement où la mixité n’est pas numériquement trop déséquilibrée…
FRÉMISSEMENT DANS L’ENCADREMENT
Autre problème récurrent, le déficit de repré-sentation féminine dans l’encadrement sportif et les instances dirigeantes. Un déficit qui a conduit au décret de 2005 imposant la propor-tionnalité au sein des fédérations entre la part de licenciées et la part des femmes dans les conseils d’administration et comités directeurs. Et, de fait, ça bouge en haut de la pyramide.«On sent un certain frémissement,note Dominique Petit, même si on ne pourra dresser un vrai bilan qu’après toutes les élections post-olympiques », précise-t-elle. En athlétisme par exemple, pour la toute première fois une femme – Chantal Langlacé, ex-marathonienne de haut niveau – a osé se porter candidate à la présidence. Sans être élue, mais c’est un début… «Grâce à ce décret, souligne Danielle Salva, du CNOSF,les fédérations sont obligées de se poser la question, voire de solliciter certaines candidates, ce qui entraîne un changement d’état d’esprit. »Plus
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fort encore, Pierre You, président de la Fédération française de la montagne et de l’es-calade, a choisi d’imposer la parité au sein du comité directeur pour les prochaines élections, alors que sa fédération ne compte que 38,7 % de femmes. Autres signes de ce frémissement, au sein de la fédération de volley-ball une vice-présidente est désormais en charge du développement du
sport féminin et du haut niveau, tandis que la fédération de cyclisme compte désormais une DTN adjointe!«La présence et la visibilité des femmes à des postes de responsabilité aura un effet boule de neige», prédit Danielle Salva. Mais de là à parier sur l’arrivée prochaine d’une femme à la tête d’une fédération olympique… Quant au CNOSF, qui ne compte encore que 6 femmes sur 45 élus au conseil d’administration, et aucune
« Pékin n’est pas un simple accident de parcours »
parmi les 7 membres du bureau, il a encore quelques mois pour montrer l’exemple.VALÉRIESARRE
(1) Femmes Mixité Sports (www.femixsports.fr) (2)Le Mondedu 25 août 2008 : « Sport français : où sont les femmes ? », par Gilles Van Kote. (3) Basket-ball, handball, rugby, aviron, baseball, boxe, course d’orientation, cyclisme, Foot US, gym, surf, tennis de table, roller, Centre nautique des Glénans.
L’analyse de Fabien Canu, directeur de la Préparation olympique et paralympique (Pop).
abien Canu, vous aviez annoncé 40 F médailles françaises à Pékin: le contrat est rempli, mais vous attendiez-vous à seulement 7 podiums féminins ? Nous estimions difficile de reproduire le score d’Athènes – 16 médailles – et avions évalué le potentiel des filles entre 10 et 12 podiums. On est loin du compte. Si la France se maintient dans e les dix premiers pays, nous ne sommes qu’en 22 position chez les filles, alors que tous les autres pays du Top ten s’appuient sur 40 à 50 % de médailles féminines. Cependant, je tiens à sou-ligner que la moitié de nos représentantes ont réussi à être finalistes, c’est-à-dire dans les huit premières de leur discipline, une performance équivalente à celle des garçons. En revanche, beaucoup sont restées au pied du podium, phé-nomène que nous avons du mal à expliquer. Il est vrai que le sport féminin a progressé de façon significative dans le monde. Est-ce nous qui n’arrivons pas à suivre le rythme ? Quoiqu’il en soit, on ne peut considérer ces résultats comme un simple accident de parcours.
Quelle réponse apporter ? Depuis septembre, nous rencontrons les fédé-rations pour analyser le manque de médailles d’or (la France a régressé dans ce classement, avec seulement 7 titres olympiques contre 12 espérés) et le manque de réussite chez les filles. Bien sûr, il existe encore des fédérations où la pratique féminine n’est pas bien considérée, mais c’est loin d’être la majorité. De nombreuses fédérations ont mis en place des politiques volontaristes à l’égard des femmes, comme l’avi-ron par exemple. Mais, malgré cela, les résul-tats ne sont pas toujours au rendez-vous… Nous essayons de comprendre pourquoi afin
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L’élimination du relais 4 x 100 m en séries a symbolisé la contre-performance des filles à Pékin.
de formuler des propositions aux fédérations et au mouvement olympique.
Mais quelles explications envisagez-vous ? Nous constatons un problème d’investissement dans le haut niveau pour les filles vers l’âge de 15-16 ans. Souvent, la pression des parents est plus forte en matière de réussite scolaire que pour les garçons. D’où le choix de beaucoup d’entre elles de mettre le sport entre parenthèses pour mieux se consacrer à leurs études et s’as-surer un avenir professionnel. Il est vrai que les débouchés pour les filles dans le sport sont moins nombreux que pour les garçons. Il existe aussi un problème d’encadrement. Les filles réagissent davantage que les gar-çons à certaines qualités humaines et cer-tains entraîneurs ne sont pas prêts à répondre à cette demande. Nous devons uti-liser le savoir-faire de certains, comme Olivier Krumbholz(entraîneur de l’équipe
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de France de handball, NDLR)pour« coa-cher »d’autres entraîneurs. Je ne suis pas convaincu qu’il faille à tout prix féminiser l’encadrement, mais plutôt apprendre aux entraîneurs, hommes et femmes confondus, à gérer des équipes de filles. On devrait aussi s’inspirer du tennis, qui a choisi de suivre et d’encadrer de près les joueuses dès l’âge de 12 ans, afin d’anticiper sur la période délicate de l’adolescence.
L’aspect financier n’est pas négligeable non plus… C’est vrai, certains clubs préfèrent encore inves-tir sur les garçons. Le haut niveau coûte très cher en stages, en déplacements, en entraî-neurs, et dans certains sports il demeure une discrimination à l’égard des filles. La plupart des clubs de football n’ont par exemple pas de vraie équipe féminine, comme en Allemagne.RECUEILLI PARV.S.
Féminité
La femme est-elle encore l’avenir du sport ?
sportive
dans
les
cités
À Marseille, l’Ufolep invite les filles à s’approprier les terrains de foot.
oncernant le rapport entre les catégories socioprofessionnelles et la pratique spor-imCplacables: si 77% des femmes qui travaillent tive des femmes, les statistiques sont ont une activité sportive, seulement 45 % des autres enfilent régulièrement un short, un maillot, un justaucorps ou un jogging… Dans les milieux défavorisés surtout, le sport n’est pas une priorité pour les filles. Et les collecti-vités locales ne cherchent pas forcément à aller contre le cours des choses.« Dans les quartiers sensibles,confirme Marie Launo, déléguée Ufolep des Bouches-du-Rhône et membre du groupe national Femmes et sport, les clubs spor-tifs s’intéressent très peu aux filles. Quant aux poli-tiques de la ville, elles préfèrent miser sur les garçons pour acheter une certaine forme de paix sociale.» Afin de tenter de palier ce déficit, l’Ufolep a lancé il y a deux ans à Marseille un programme baptisé « Sport pour elles ». L’objectif : propo-ser dans les quartiers, avec l’aide des structures sociales en place, un programme d’activités sportives à destination des filles.« Sur trois sites différents, nous proposons des cycles de
sports collectifs et de danse Dans les cités à raison d’une à deux fois par de Marseille, semaine, l’accès étant gra-les filles se prêtent tuit »explique Amina Madi, au jeu. en charge du projet. Grâce à cette initiative, une cin-quantaine de filles de 7 à 17 ans ont découvert le foot, le hand, le basket, le hip-hop ou le roller.«Ces filles ne fai-saient aucun sport, mais elles y ont vite pris goût. Elles apprécient de pouvoir choisir leur activité et de se sentir responsabilisées, en arbi-trant par exemple. L’essentiel est d’assurer un bon contact via l’animateur, qui doit miser sur l’aspect ludique de la pratique. »Plusieurs rencontres sont prévues en mai prochain, de manière à associer aussi les parents à cette démarche.« Même si ce programme s’adresse aux filles, cela nous arrive parfois d’accueillir quelques garçons », explique également Amina Madi. L’idée, à terme, est d’ailleurs de
UNE MÉDIATISATION TRÈS SUBJECTIVE Elles sont devenues des stars people, ou presque: Laure Manaudou, Laura Flessel, Muriel Hurtis… Autant de championnes dont la visi-bilité médiatique est presque équivalente à celle de leurs homo-logues masculins. Et pourtant… À y regarder de plus près, l’hyper médiatisation de quelques vedettes cache le déficit médiatique du sport féminin.«On ne voit toujours pas de match de rugby ou de foot féminin à la télé,souligne la sociologue Catherine Louveau. Quant au mondial de hand féminin qui s’est tenu en France fin 2007, qui était au courant?»Lors des Jeux de Pékin, la couverture médiatique des épreuves féminines a cependant été plus large que précédem-ment et, selon France Télévision, 3,9 millions de téléspectateurs ont suivi la finale du 400 m nage libre dames, avec… Laure Manaudou et Coralie Balmy. Soit la meilleure audience des Jeux! On notera d’ailleurs que la contre-performance de Manaudou a complètement éclipsé la quatrième place de Coralie Balmy, qui n’a pourtant échoué qu’à huit centièmes de la médaille de bronze! En réalité, comme on le souligne au pôle ressources national,«la valeur en image des
créer des équipes mixtes. Une gageure pour le foot marseillais !V.S.
L’Agence pour l’éducation par le sportorganisait le 14 jan-vier à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) une journée-débat sur le thème « sports au féminin dans les banlieues » en pré-sences d’élus politiques, d’éducateurs, de responsables associatifs et de plusieurs championnes (www.apels.org).
championnes n’attend pas le nombre des médailles». Une Christine Arron ou une Laura Flessel sont toujours pri-sées, même si leurs résultats s’avèrent décevants.«En revanche, qui connaît Marie Delattre ou Anne-Laure Viard, kayakistes en bronze à Pékin, et aussi championnes du monde en 2005 et 2007?», interroge Stéphanie Mahuet. La médiatisation du sport féminin continue donc de faire problème. Avec, de surcroît, quelques dérives récurrentes chez certains com-mentateurs prompts à mettre en avant des considérations plastiques ou «esthétiques», ou encore cette propension des ligues de basket-ball(photo)et de handball à vendre leurs championnats féminins en jouant sur une imagerie sexy… Signe que sur ce point aussi, l’égalité de traitement entre le sport féminin et masculin est loin d’être gagnée.V.S.
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L’Ufolep
et
le
sport
au
féminin
Le groupe Femmes et sport multiplie les initiatives sur une thématique que notre fédération a fait sienne depuis longtemps.
rès tôt, l’Ufolep s’est intéressée à la pratique féminine, et nos archives témoignent d’un intérêt porté à celle-simeTnt exclusivement au masculin, on pense ci dès 1931. Certes, à une époque où le mot sport se décline encore qua-surtout« mouvements d’ensemble, danse ryth-mique, excursions et promenades ». Mais dès 1939 l’évolution est sensible puisque G.Varlet, délégué de l’Allier écrit :« Développons, au sein de notre Ufolep, les sports féminins d’été ! » Cet intérêt va se concrétiser après-guerre avec l’organisation de « championnats féminins » et de stages de formation également féminins, à Bordeaux puis à Boulouris. Grande première, en 1966 le stage de Reims est mixte et permet aux organisateurs de poser une question cruciale : « Devons-nous faire une différence entre l’en-seignement apporté aux garçons et celui dis-pensé aux filles ? » Mais c’est avec la création, en 1968, de la toute première commission féminine Ufolep, que la question féminine va vraiment émerger dans nos rangs. Une rubrique du mensuelInformations Ufolep-Usep, signée Jerico (1) et intitulée «sport au féminin», est alors réservée à des articles trai-tant du sport et de la femme. L’année suivante voit l’éclosion de nombreuses associations fémi-nines ou mixtes permettant aux femmes de pratiquer et, en 1975, le congrès de Rodez pré-sente des panneaux d’exposition sur « Les femmes et le sport » réalisés par le Groupe d’études et de recherche du sport féminin.
Le pari était-il gagné? C’est au début des En tout cas la commis-années 70 que la question féminine a sion féminine disparait véritablement alors en tant que telle, émergé au sein de pour renaître en 2000 l’Ufolep. sous le nom de groupe de travail Femmes et sport. Une façon de s’inscrire dans les prio-rités de Marie-George Buffet, ministre de la Jeunesse et des Sports, et surtout de contri-buer au développe-ment de la pratique féminine et de l’accès des femmes aux respon-sabilités dirigeantes au sein de notre fédération. Ce groupe a tout d’abord lancé des enquêtes qui ont mis en lumière la place encore insuffisante faite aux femmes dans nos instances, même si, depuis, l’obligation de proportionnalité entre le nombre de licenciés femmes et hommes éligibles a fait évoluer les choses. Le groupe de travail a ensuite supervisé la réalisation d’une vidéo inti-tulée «Sport, les mots qu’elles disent» et nour-rie des témoignages de pratiquantes Ufolep. S’est ajoutée depuis une exposition mettant en parallèle l’émancipation des femmes et leur place dans la société, l’histoire du sport fémi-nin et l’évolution des pratiques en France, et plus spécifiquement la place des femmes à l’Ufolep et à l’Usep. Enfin, le groupe Femmes et sport a organisé des stages thématiques pour
contribuer à faire émerger des dirigeants et rédigé un guide invitant à la pratique. Intitulé « Femmes et sport, un bienfait tout au long de la vie », il propose notamment le regard de médecins, de sociologues et d’universitaires. D’autres projets sont envisagés ou déjà en cours : un nouveau film de témoignages de prati-quantes et de militantes fortement engagées, ou encore une plaquette sur le droit des femmes. Les idées ne manquent pas, et pour les mener à bien le groupe aimerait s’étoffer un peu… Avis aux intéressées !NELLYARADAN,ÉLUE NATIONALE CHARGÉE DU GROUPEFEMMES ET SPORT
(1) Pseudonyme commun formé par les initiales des prénoms des cinq membres de cette commission féminine.
ESQUISSER LE PORTRAIT DE LA SPORTIVE UFOLÉPIENNE Militante ou simple pratiquante, engagée en compétition ou en partage, de la communication et, pourquoi pas, de la transmission loisir, la femme sportive ufolépienne est multiple. Néanmoins, forte de connaissances, après avoir suivi les formations fédérales. Ce de mon expérience personnelle et de nos multiples questionne- plaisir, les femmes le trouvent moins que les hommes dans la ments, l’image que j’en ai est celle d’une jeune fille ou d’une compétition, mais il n’en est pas moins le principal moteur de leur femme recherchant avant tout dans la pratique d’activités physiques pratique. C’est pourquoi je suis persuadée que des pratiques et des le bien-être, la santé, le plaisir, voire la performance comme moyen aménagements adaptés (lieux, horaires, garde d’enfants, etc.) de se tester et de se dépasser, mais sans aller jusqu’à la souffrance pourraient faire progresser le nombre des féminines à l’Ufolep. physique et psychique que peut entraîner la pratique de haut Nous y croyons et ferons tout pour que les femmes prennent toute niveau. Pour moi, dans le sport féminin le plaisir vient aussi du leur place au sein de notre fédération.N.A.
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Et
chez
La femme est-elle encore l’avenir du sport ?
nous,
sont
les
femmes ?
Paradoxe : la proportion de femmes parmi nos licenciés est en recul depuis plusieurs années tandis que nos cadres et nos instances dirigeantes se féminisent.
arouchement attachée aux valeurs de mixité et d’égalité, anFnées sur la dynamique l’Ufolep travaille depuis des hommes/femmes, tant dans le domaine de l’accès aux responsabili-tés que dans celui de la pratique spor-tive. Des avancées ont eu lieu, grâce à l’impulsion donnée par le groupe national Femmes et sport, au travail mené à tous les échelons de notre fédération et à l’évolution de la société, avec des femmes volontaires qui s’engagent et dont le projet de vie croise celui de notre fédération. C’est sûrement dans le domaine de la « représentation politique » que les avancées ont été les plus marquées. Il faut dire que nous partions de très loin avec une vie statutaire très masculinisée, même dans des comités ou des associa-tions où la pratique sportive fémi-nine est très développée, voire majoritaire. Les postes étaient tra-ditionnellement aux mains des hommes, qui trustaient toutes lesAvec le cyclotourisme et l’APE, les activités présidences et n’abandonnaient gymniques, comme ici aux élues femmes que quelques la GRS, concentrent postes de secrétariat départe-encore l’essentiel des licenciées Ufolep. mental. Il y avait 7 présidentes de comités départementaux en 2001, 13 en 2005, 17 en départementales femmes et, depuis trois 2008 : la tendance est donc amorcée et ans, les promotions de nouveaux délégués devrait s’accentuer avec la mise en place de sont quasiment mixtes. Au niveau régio-la proportionnalité dans toutes les ins- nal, les femmes sont même 8 sur 12. Des tances fédérales, comme le stipule la Loi sur efforts restent cependant encore à réaliser le sport et comme va le permettre le renou- au sein de la direction nationale, même si vellement, en cette année 2009, des comi- nous sommes passés de 0 à 2 femmes dans tés directeurs de toutes nos instances. une équipe de 8. Comme quoi c’est en passant par la contrainte UNE PROPORTION EN BAISSE que les progrès sont les plus sensibles… Quant au comité directeur national élu en Concernant la vie sportive et la présence avril 2008, il compte 12 élues sur 30 féminine, un colossal travail statistique a membres, contre seulement 5 en 2001. Enfin, permis de distinguer quelques grandes ten-cette féminisation s’est aussi traduite dans dances, confirmées depuis par l’implacable la composition des commissions nationales logiciel Affiligue... Les sportives licenciées sportives. sont donc aujourd’hui près de 150 000, un Côté salariés, la tendance est tout aussi nombre en baisse depuis 8 ans (-13 %) alors nette. On compte désormais 22 déléguées que celui des hommes est stable, mais équi-
valent aux effectifs d’il y une ving-taine d’années. La proportion hommes/femmes s’établit désormais à 61/39 contre 52/48 en 2001. La présence plus affirmée des femmes dans les instances statutaires n’en est que plus remarquable. On relève aussi que les pratiquantes Ufolep se répartissent très inégale-ment d’une discipline sportive à l’autre, avec notamment plusieurs activités à la fois très investies et stables : gymnastique sportive, acti-vités physiques d’entretien, gym-nastique rythmique et sportive et cyclotourisme. Par ailleurs, on constate une baisse dans d’autres activités individuelles, parallèlement à une certaine féminisation dans certains sports collectifs et les acti-vités motorisées. Les femmes contri-buent également à l’augmentation des effectifs dans la quinzaine d’ac-tivités les plus pratiquées à l’Ufolep, parmi lesquelles la randonnée pédestre et la danse. Enfin, pour ce qui est des classes d’âge, la popula-tion féminine est stable chez les jeunes, principalement grâce à la gym sportive et à la GRS. Dernier point : les femmes sont-elles heureuses à l’Ufolep ? Il le semble, puisque selon la dernière enquête natio-nale réalisée auprès des licenciés Ufolep, ceux-ci estiment que notre fédération cor-respond aux aspirations loisir du public féminin. C’est en tout cas l’image qu’ils en ont. En effet, quand les 300 licenciés inter-rogés estiment que l’Ufolep a comme prio-rité le plaisir par le sport et qu’elle met en place des actions autour du sport en famille et de la santé, ceci croise les aspirations de nombreuses femmes concernant la pratique sportive. Gageons donc qu’en menant un projet fédéral fidèle à nos valeurs et en phase avec nos ambitions et les transfor-mations de la société, nous saurons répondre à ces demandes et séduire de nouvelles licen-ciées.ARNAUDJEAN
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(1) co-auteur deMusculation et renforcement musculaire du sportif, Amphora, 22,50.
(2) Auteur deProgrammes de musculation, Amphora, 18,50.
La
musculation
en
question
Si les sportifs de haut niveau pratiquent la musculation, les amateurs ont-ils intérêt à reprendre cette habitude à leur compte? Pourquoi pas, mais à certaines conditions.
oi, ce quevite et manque de fluidité dans les j’aime dans lagestes techniques. Pour être utile, la «Cette phrase C’est pourquoi un tennisman ne pra-natation, c’estmusculation doit être spécifique à dnéafgieniutrimédaMleedaultboosdvi.Aurpsxuacno-ronaiyloélliulAfenuqipumq la muscu ! »chaque sport et aux muscles sollicités. ve, c’est la marionnett tiquera pas la même musculation Bernard qui la prononce dans les tifs amateurs qui souhaiteraient ajou-Guignols de l’Info ! Bien sûr, on est ter du renforcement musculaire à leurs dans le registre de la satire et de l’exa- entraînements habituels de vélo, de gération. Il n’empêche que, depuis jogging ou de foot : il ne s’agit pas de plusieurs années, les sportifs de faire n’importe quoi ! haut niveau entretiennent une rela- Prenons l’exemple de l’escalade. Dans ce tion très étroite avec la musculation. sport, le muscle a tendance à tétaniser « Avant, on faisait du sport pour seon est souvent obligé de tenir unecar muscler. Maintenant, on se muscleposture, le temps de consolider ses pour faire du sport ! »résume Nicolas appuis et de préparer la prise suivante. « Avant, on faisait du sport pour Dyon, préparateur physique d’équipes On dit que le muscle travaille «en iso-se muscler. Maintenant, on se muscle professionnelles de football (1). métrie» et «en statique»: sa longueur pour faire du sport ! » Cette tendance n’est pas due au hasard ne varie pas pendant l’effort. ou au désir secret des athlètes de res- Conclusion ? Les exercices de muscu-sembler à des bodybuilders. Elle se justifie de manière tout lation doivent le préparer à ce type de travail en privilégiant à fait rationnelle.« Chez le sportif, la musculation estles contractions pendant lesquelles on ne bouge pas : par d’abord orientée vers la prévention des blessures,mur, on se maintient en position assise endos au explique exemple, r le D Stéphane Cascua (2).Cette pratique protège l’appa-respectant un angle de 90°, pendant des temps assez longs reil locomoteur dans son ensemble et tout spécialement les(plus de 30 secondes) et répétés. articulations. Un exemple : avoir des muscles des cuisses ACIDE LACTIQUE puissants permet de pallier les éventuelles défaillances des liga-ments du genou. »La problématique du coureur à pied est très différente. IlEt puis, dans des sports collectifs devenus de plus en plus « virils », posséder une carrure d’armoire à a bien sûr tout intérêt à travailler les muscles de ses membres glace aide sans conteste à mieux encaisser les chocs et les inférieurs afin de repousser l’apparition de crampes et l’ac-contacts. « En foot notamment, une musculature développéelactique. Pour cela, il peut utiliser unecumulation d’acide est indispensable pour garantir l’intégrité physique des: allongé sur la machine,« presse » dans une salle de sport joueurs »complète Nicolas Dyon. les jambes en l’air, il s’agira de repousser un poids vers le Bien sûr, l’amélioration de la performance est l’un des objec- haut en poussant sur les jambes. Il privilégiera les séries tifs visés par les sportifs qui soulèvent de la fonte ou enchaî- longues (de nombreuses répétitions) avec des charges nent les séries d’abdominaux. Le coup droit du tennisman sera légères (inférieures au poids du corps). Mais encore faut-d’autant plus performant que celui-ci aura développé les il que ces muscles des membres inférieurs puissent venir chaînes musculaires du bras et de l’avant-bras, impliquées dans s’appuyer sur un bassin bien fixe. Et pour cela, il faut de ce geste, et la propulsion du basketteur sous le panier d’au- bons abdominaux ! tant plus efficace qu’il pourra compter sur des muscles réac- On le voit, l’affaire est complexe… Il est donc essentiel de tifs des membres inférieurs.niveau des sports de« Le se renseigner auprès d’un spécialiste de la musculation ou compétition a tellement augmenté qu’on ne peut désormaisdu sport avant de se lancer. Un dernier petitd’un médecin se passer de la musculation pour courir plus vite, sauter plusconseil :« Pour être sûr de pratiquer un renforcement mus-haut, frapper plus fort »affirme Nicolas Dyon.culaire adapté à son sport, on peut tout simplement partir de ce sport et se rajouter des contraintes : le cycliste peut privi-À CHAQUE SPORT SA MUSCU légier l’utilisation du grand plateau, le coureur à pied recher-On l’aura compris, pour le sportif la musculation n’est pas decher les côtes et le nageur se mettre des palettes aux mains » r la « gonflette ». Si la prise de volume est parfois recherchée, propose le D Stéphane Cascua. Et les progrès seront au ren-elle n’est pas – et de loin – la priorité. D’ailleurs, un sportif dez-vous !bodybuildé est rarement à son avantage : il a du mal à courirISABELLEGRAVILLON
Février 2009en jeuune autre idée du sportn°423
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