LA QUESTION SOCIALE EN RD CONGO EST-ELLE UNE QUADRATURE DU CERCLE?
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Donatien MALALA LA QUESTION SOCIALE EN RD CONGO EST-ELLE UNE QUADRATURE DU CERCLE ? PREAMBULE èmeDu 30 octobre au 02 novembre 2012 s’est tenue à Kigali au Rwanda la 7 conférence économique organisée par la Banque africaine de développement (Bad), le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) et la Commission économique pour l’Afrique (CEA) sur le thème : « Développement inclusif et durable pour tous à l’ère des incertitudes économiques ». L’acuité du thème sur l’inclusivité de la croissance économique m’a poussé à relire cette réflexion que j’ai faite sur mon pays, la RD Congo, lors des élections présidentielles de Novembre 2011. La question sociale soulevée n’est pas spécifique qu’à la RD Congo. Les pays d’Europe et de la zone Euro sont confrontés aujourd’hui à une crise sociale des plus aigues. La question de la quadrature du cercle social s’y pose également, même si ce n’est pas dans les mêmes termes. Le capitalisme èmefinancier du 21 siècle serait-il indissociable avec la crise sociale ? LA QUESTION SOCIALE EN RD CONGO EST-ELLE UNE QUADRATURE DU CERCLE ? Cette interrogation vaut son pesant d’or quand on constate la permanence de la crise sociale depuis l’indépendance, voire depuis l’Etat Indépendant du Congo en 1885, date de naissance de la nation congolaise actuelle.

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Publié le 06 décembre 2012
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Langue Français

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Donatien MALALA
LA QUESTION SOCIALE EN
RD CONGO EST-ELLE UNE
QUADRATURE DU
CERCLE ?
PREAMBULE
Du 30 octobre au 02 novembre 2012 s’est tenue à Kigali au Rwanda la 7
ème
conférence
économique organisée par la Banque africaine de développement (Bad), le Programme des
Nations unies pour le développement (Pnud) et la Commission économique pour l’Afrique (CEA) sur
le thème :
« Développement inclusif et durable pour tous à l’ère des incertitudes économiques ».
L’acuité du thème sur l’inclusivité de la croissance économique m’a poussé à relire cette réflexion
que j’ai faite sur mon pays, la RD Congo, lors des élections présidentielles de Novembre 2011. La
question sociale soulevée n’est pas spécifique qu’à la RD Congo. Les pays d’Europe et de la zone
Euro sont confrontés aujourd’hui à une crise sociale des plus aigues. La question de la quadrature
du cercle social s’y pose également, même si ce n’est pas dans les mêmes termes. Le capitalisme
financier du 21
ème
siècle serait-il indissociable avec la crise sociale ?
LA QUESTION SOCIALE EN RD CONGO EST-ELLE
UNE QUADRATURE DU CERCLE ?
Cette interrogation vaut son pesant d’or quand on constate la permanence de la crise sociale
depuis l’indépendance, voire depuis l’Etat Indépendant du Congo en 1885, date de naissance de la
nation congolaise actuelle. La question sociale apparaît comme ce problème de la quadrature du
cercle qui hante les mathématiciens de l’antiquité à ce jour, à savoir : un problème insoluble.
CAMPAGNE ELECTORALE 2011 VICIEE
Invitée surprise, la question sociale avait surgi dans la campagne présidentielle congolaise 2011
pour s’imposer avec violence comme thème principal des débats. La majorité présidentielle mettait
en exergue le bilan économique positif du Président Joseph Kabila, avec des taux de croissance
positifs allant de 3,5 % en 2002 à 7,2% en 2010, avec la chute de l’inflation à 9,8 % après une
décennie 1990 d’hyperinflation (884 % en moyenne annuelle), avec 15,9 millions d’emplois créés
en cumul entre 2002 et 2010, avec les réalisations des 5 chantiers de la République (construction
des infrastructures routières, des écoles, des hôpitaux), avec même des excédents budgétaires en
2010 de 341 milliards CDF (près de 360 millions US$).
Mr Etienne Tshisekedi, lui, le principal opposant politique et candidat à l’élection présidentielle,
leader charismatique de l’UDPS, lançait le slogan : « le peuple d’abord » pour signifier que le bilan
économique du camp présidentiel n’avait eu aucune incidence sur la vie sociale du peuple. La
population ne se nourrit pas bien, ne fait pas étudier convenablement les enfants ou ne bénéficie
pas des soins médicaux appropriés. L’habitat est médiocre et insalubre.
COMMENT DEPARTAGER LES POINTS DE VUE ?
Lorsqu’on examine les arguments des deux camps, on peut conclure que chaque camp a raison.
Chaque camp met l’accent sur une partie de la solution du problème, car la question sociale exige
une solution à double aspect : la croissance et le développement. Les deux notions ne sont pas
synonymes. Elles ne sont pas antonymes. Elles sont complémentaires. La croissance économique
n’est pas le développement. Le développement suppose une croissance économique préalable.
On commençait un peu à oublier la distinction entre les deux notions depuis que, sur le plan de la
pensée dominante, les théories du développement ne sont plus à la mode alors qu’elles dominaient
les débats et la littérature économique de l’après-guerre (1950-1970). Les questions de
développement semblent avoir été abandonnées à l’apanage des organismes des Nations Unies.
Aujourd’hui, le champ de la recherche scientifique en matière d’économie est dominé par la
croissance économique : la recherche a mis entre parenthèses la critique ou l’amélioration de la
validité du modèle de l’équilibre général walrassien pour se tourner vers l’explication des facteurs
qui fondent la croissance économique. La crise financière mondiale de 2007 – 2008, qui a abouti à
la crise de la dette souveraine et à la crise sociale en Europe, va-t-elle freiner cette tendance pour
ramener le programme de recherche vers les problèmes de la régulation économique ou de la
coordination des marchés réels et imparfaits? Il est trop tôt pour l’affirmer.
En tous les cas, il n’est pas superflu de rappeler en termes basiques la distinction entre croissance
économique et développement. La croissance économique est l’augmentation de la quantité des
richesses produites d’une année à l’autre. Le développement est l’amélioration de la qualité de vie
des populations découlant non seulement de leur enrichissement matériel (induit par la croissance
économique) mais aussi d’un certain progrès social et humain : meilleures possibilités d’accéder à
des soins de santé de qualité, à une éducation de qualité pour les enfants, à de meilleures
connaissances, à un logement décent, à un milieu d’habitat assaini, à l’eau potable, à du courant
électrique sans délestages perpétuels, à la facilité de mobilité spatiale des personnes et des biens,
à des loisirs sains, à la disponibilité des institutions de sécurité sociale lorsque surviennent divers
événements de la vie sociale (vieillesse, maladie, deuil, naissance, mariage, …). La qualité de vie
non seulement implique la disponibilité des infrastructures sociales dans lesquelles s’organise la vie
moderne mais également l’accès à ces infrastructures par la population grâce aux revenus qu’elle
gagne d’un travail rémunéré. Le travail sous toutes ses formes doit rester la source privilégiée des
revenus dans la mesure où le travail permet d’accomplir la dignité humaine. Le travail est ainsi
devenu le centre d’intérêt de la question sociale.
Voici la jonction (qui nous fait défaut aujourd’hui !) entre croissance et développement : la
croissance économique permet d’augmenter l’activité économique et les emplois offerts à la
population. Les emplois génèrent des salaires qui permettront aux gens d’accéder aux
infrastructures sociales. Plus la croissance sera pérenne et durera dans le temps, plus il ya des
chances pour que le chômage diminue et que les revenus distribués atteignent presque toute la
population. C’est là le fondement de la stratégie dite de « la croissance pro-pauvres ».
A ce niveau, il convient de saluer les efforts du camp présidentiel. Dans sa diplomatie de petits pas,
le Président Joseph Kabila a réussi à démarrer un cycle long de croissance économique continue
sur 10 ans consécutifs (2002-2011) ; même si l’opposition affirme que le résultat aurait pu être
meilleur. Prions pour qu’il n’y ait plus de guerre ni de troubles sociaux qui pourraient arrêter cette
avancée et nous faire reculer de nouveau. La rébellion du mouvement M23 à l’est de la RD Congo
est, à cet égard, un facteur déstabilisant. Dans l’histoire du Congo après l’indépendance, il faut
remonter à la période de 1967 (avec la réforme monétaire réussie) à 1974, soit 8 ans, pour trouver
une croissance positive continue sur plusieurs années de suite. Ce fut au début du long règne du
Président Mobutu. Malheureusement lui-même va annihiler les effets de cette croissance en
prenant des décisions erronées de zaïrianisation et radicalisation en 1973 et 1974. En dehors de
ces deux périodes, l’histoire économique du Congo-Zaïre est faite de soubresauts : croissance –
décroissance, guerre – paix, création d’emplois – assainissements ou pillages faisant disparaître
des emplois, avec une constante : l’accroissement du sous-développement, du chômage et de la
pauvreté.
COMMENT EXPLIQUER LA COEXISTENCE ENTRE CROISSANCE ET PAUVRETE?
La croissance ancienne se diffusait progressivement avec une transformation significative des
structures sociales et du paysage dans les milieux géographiques d’habitat des populations. Elle
était fondée au niveau du management des entreprises sur « le fordisme » : une organisation basée
sur une division du travail taylorienne combinée à des salaires élevés payés aux travailleurs pour
stimuler leur productivité et leur consommation. La hausse de la production des véhicules Ford était
justifiée par la productivité horaire élevée de l’ouvrier Ford. Les véhicules produits étaient assurés
d’être aussitôt achetés par les mêmes ouvriers qui recevaient des salaires pouvant leur permettre
de se payer des voitures neuves. La demande globale était soutenue et offrait des débouchés
certains aux entreprises. La croissance s’accompagnait du développement.
Dans les années 1970, ce modèle s’essouffle. La productivité du travail américain baisse ; les
salaires sont jugés excessifs et rigides à la baisse à cause du gigantisme et de la puissance des
syndicats. La politique keynésienne de relance par la demande globale devient inefficace. L’école
néoclassique rebondit et lance une vaste campagne de recherche qui remettra à la mode les idées
du « laissez-faire les marchés ». Le mode de pensée a basculé depuis lors à ce jour et se
concentre sur ce qu’il considère comme l’essentiel : le culte du profit.
La croissance moderne est fondée sur la maximisation (à tout prix) du profit et du dividende à
distribuer aux actionnaires propriétaires des entreprises. Ce qui implique la compression
permanente des charges, dont les salaires payés aux travailleurs. Le marché du travail a été ainsi
soumis à des pressions continues pour le rendre flexible : réduction des contrats de travail à durée
indéterminée, généralisation des contrats de travail à durée déterminée et de stage, suppression
des conventions collectives, mise en concurrence internationale de la force de travail, allègement
des lois du travail… Le secteur de la spéculation financière va être le premier à offrir les conditions
d’une maximisation du profit à très court terme : les capitaux se détourneront
en masse des
secteurs productifs (et de l’aide au développement attendue par l’Afrique) pour s’orienter vers la
finance boursière, suscitant la volatilité des marchés des capitaux au jour le jour. Ensuite la
révolution informatique avec
les développements de l’internet permet aux entreprises qui sont
restées dans l’économie réelle d’optimiser les chaînes de production en réduisant la main-d’œuvre
ou en délocalisant la production vers des contrées lointaines rapprochées grâce aux nouvelles
technologies de l’information et de la communication. Conséquence de tous ces phénomènes
modernes : la production peut augmenter alors que l’emploi stagne ou baisse. Bref, la croissance
moderne n’est plus directement corrélée à l’emploi et au développement. Au contraire, elle
engendre et augmente les inégalités dans la répartition des revenus. Elle pose toute la question de
l’éthique de la croissance économique.
Dans notre pays, la RD Congo, la croissance économique est calculée sur l’économie officielle
commercialisée et n’intègre pas les petites productions de l’économie informelle. Or les différentes
enquêtes socio-économiques récentes indiquent que l’emploi informel occupe 90 % de la
population congolaise active, tandis que l’emploi officiel n’occupe que 10 % de cette population.
Voilà pourquoi la majorité de la population, qui opère dans l’informel, ne peut pas ressentir les
effets d’une croissance calculée sur une économie à laquelle elle ne contribue pas, dans laquelle
elle n’est pas partie prenante. Puisque la répartition des fruits de la croissance économique
s’effectue, dans le modèle libéral, à travers les sal ires payés aux travailleurs qui contribuent à cette
production.
Enfin – ô combien Malthus a eu raison – l’accroissement de la pauvreté est accentué par une
croissance de la population plus rapide que la croissance des subsistances. La population
congolaise a doublé tous les 23 ans (l’âge de croissance pour qu’un enfant grandisse et entre dans
la vie active des adultes) depuis 1960. Progression géométrique de la population avec une raison
multiplicative de 2 tous les 23 ans, d’un côté. De l’autre, la production, qui doit nourrir et faire vivre
cette population, elle, n’a pas augmenté du tout, au contraire elle a régressé depuis 1960.
Progression arithmétique négative de la production avec une raison soustractive variable d’une
année à l’autre.
Comment trouver l’équilibre ? Peut-être faisons moins d’enfants (clin d’œil au
FNUAP, le Fonds des Nations Unies pour les Activités en matière de Population !). Mais nous avons
besoin des jeunes et de leur dynamisme, de leur prise de risque pour innover et entrer dans la
modernité ! Mieux vaut un « baby boom » plutôt qu’un « papy boom », nous aurait conseillé le
démographe français Alfred Sauvy. Faisons alors attention lorsque nous peuplons le monde.
QUE FAIRE ALORS ?
La question sociale n’est pas un problème insoluble dans le cas de la RD Congo, un pays qui se
trouve dans un état de sous-emploi de toutes ses ressources, et dont les marges et les opportunités
de croissance restent encore importantes. Le gouvernement devrait gérer l’économie congolaise
dans toute sa réalité plurielle pour obtenir une croissance plus inclusive. Le problème central est
celui de résoudre la dualité de l’économie, qui trace une démarcation trop visible entre l’économie
officielle et sa périphérie. La population qui vit et opère dans l’informel devrait pouvoir accéder à des
sources de financement appropriées, grâce à la micro finance, afin de développer des activités
génératrices des revenus. Avec les revenus nouveaux à injecter dans l’économie informelle, le
pouvoir d’achat de la population augmente ; la consommation des ménages augmente et accroît la
demande globale effective sur le marché, ce qui augmente les débouchés des entreprises du
secteur formel et génère une croissance économique plus forte encore.
Le processus d’une croissance auto-entretenue, de plus grande amplitude et durable ne peut être
enclenché qu’à ce coût-là. L’Etat pourrait, dès lors, adopter des politiques incitant à la création des
institutions de micro finance orientées vers les pauvres sous la garantie solidaire de la dynamique
communautaire. Il faut reconnaître que l’approche du Gouvernement Matata Ponyo va dans ce
sens : des réflexions y ont cours pour résoudre le problème de financement de l’économie
informelle. D’ores et déjà, un Fonds National de la Microfinance a été créé pour soutenir les petits
entrepreneurs.
Donatien
MALALA Bankaka
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