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Page 1 sur 11 16.07.2012 - No Volverán Considérez que cette note a traversé l'Atlantique. Elle est donc décalée de toutes les façons possibles dans cette sorte d'exercice. Je vis à un rythme magiquement ralenti par rapport à tout ce que j'ai vécu ces derniers mois. Pour autant je ne peux pas dire que je suis tout à fait sorti du champ de bataille. Ici, au Venezuela, je participe un peu à la campagne électorale qui a commencé en vue des élections présidentielles d'octobre prochain. Je raconte quelque chose d'une de ces journées extraordinaires dans lesquelles j'ai reconnu tant de traits communs avec les nôtres. Je dis un mot à propos de la place de l'affaire PSA qui va être la signature du moment politique qui commence en France. Mais je parle aussi de la lutte victorieuse des femmes de Sodimedical. Je donne une place spéciale au dépôt de mes comptes de campagne. Il me permet de souligner l'injustice totale du calcul de l'attribution du financement public qui ne tient aucun compte du résultat de l'élection présidentielle ! Pourquoi ? Je jette un ?il aussi sur le coup d'Etat au Paraguay. Je suis le désespoir de ceux qui n'aiment pas qu'on regarde ailleurs qu'au bout du nez des « vrais problèmes » de leur clocher. J'ai fait le voyage vers Barquisimeto en avion. C'est là qu'était convoqué le « rassemblement Bolivarien » du jour. La ville se trouve dans l'état de Lara. J'avais l'honneur d'être assis sur le siège en face de celui au nom de Chavez.

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Publié le 18 juillet 2012
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Langue Français

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Page 1 sur 11
16.07.2012 - No Volverán
Considérez que cette note a traversé l'Atlantique. Elle est donc décalée de toutes
les façons possibles dans cette sorte d'exercice. Je vis à un rythme magiquement
ralenti par rapport à tout ce que j'ai vécu ces derniers mois. Pour autant je ne peux
pas dire que je suis tout à fait sorti du champ de bataille. Ici, au Venezuela, je
participe un peu à la campagne électorale qui a commencé en vue des élections
présidentielles d'octobre prochain. Je raconte quelque chose d'une de ces journées
extraordinaires dans lesquelles j'ai reconnu tant de traits communs avec les nôtres.
Je dis un mot à propos de la place de l'affaire PSA qui va être la signature du
moment politique qui commence en France. Mais je parle aussi de la lutte
victorieuse des femmes de Sodimedical. Je donne une place spéciale au dépôt de
mes comptes de campagne. Il me permet de souligner l'injustice totale du calcul de
l'attribution du financement public qui ne tient aucun compte du résultat de l'élection
présidentielle ! Pourquoi ? Je jette un ?il aussi sur le coup d'Etat au Paraguay. Je
suis le désespoir de ceux qui n'aiment pas qu'on regarde ailleurs qu'au bout du nez
des « vrais problèmes » de leur clocher.
J'ai fait le voyage vers Barquisimeto en avion. C'est là qu'était convoqué le
« rassemblement Bolivarien » du jour. La ville se trouve dans l'état de Lara. J'avais
l'honneur d'être assis sur le siège en face de celui au nom de Chavez. Mais il resta
vide car « le commandant », comme il disent, travaillait ses fiches dans son carré
privé. J'ai trop pratiqué l'exercice pour ne pas en comprendre l'importance. Ce
temps où l'on entre dans ce que l'on va dire et où il faut en quelque sorte
commencer à l'incarner doit être fait avec sérieux et méthode. Car les émotions qui
vont suivre submergent tout, ensuite. Elles risquent alors d'effacer la fragile trame
que l'on a posée sur la surface de l'esprit. Le mouvement des mots qui vont devoir
venir quand ce sera leur tour en dépend pourtant. Il faut donc bien gérer cela.
Impossible de passer à côté de l'émotion que dégage un rassemblement. D'ailleurs,
il ne faut pas y résister si l'on veut s'imprégner de l'ambiance et du message qu'il
porte. Pour ma part j'ai été saisi d'émotions et emporté par elles chaque fois qu'il
fallait traverser un bout de la salle de nos meetings. On cessa de le faire quand il
devint évident que ce déplacement mettait en danger les gens qui participaient à
l'accueil si chaleureux qu'ils me faisaient ! Mais j?en fus très frustré. Ce que j'ai vécu
sur place, à Barquisimeto, m'a confirmé cette intuition de la dialectique du rationnel
et du sensible dans la production du message politique. Ce qui nous attendait à
l'arrivée, la télé le nommait « l'ouragan Bolivarien ! » pour intituler les images qu'elle
donnait à voir.
Un ouragan en effet ! Sur les trois kilomètres du trajet une foule compacte hurla
sans discontinuer à mesure que les camions sur lesquels nous étions installés
avançaient. Le rassemblement commença aux portes mêmes de l'aéroport, ce qui
n'était pas prévu. Les véhicules du cortège ont donc fendu la foule au pas, entourés
d'un impressionnant double cordon de militants qui protégeait autant le passage que
les gens qui se précipitaient sur les voitures. Suffoqués par l'effort, ruisselants sous
le soleil des Caraïbes, ils tinrent bon leur part de tâche ! Je voyais sur leurs jeunes
visages la lumière que j'ai vue sur celui de mes camarades, filles et garçons qui ont
fait cet exercice à Strasbourg, à Paris, et à combien d'autres endroits encore ! Puis
on descendit des voitures et on monta sur le toit des bus qui avaient été postés face
à un podium d'accueil, à cet instant totalement submergé. Commença alors le
parcours. Ce fut comme un ailleurs de tout ce que j'ai connu. Jamais je n'ai vu telle
ferveur politique se concentrer de telle façon dans les corps et les visages. A
mi-chemin je m'aperçus que j'avais le visage en larmes. A côté de moi, Max
Arvelaiz et Ignacio Ramonet montraient un visage inconnu. Le saisissement, l'effroi
sacré qui nous habitait est un moment qui n'a pas ses mots pour le décrire
raisonnablement. La force de la passion politique qui s'exprimait à cet instant
sculptait et remodelait tout ce qui passait entre ses mailles fines. Je comprends à
présent que notre position était singulière : perchés sur ce camion nous avons été
touchés en continu par quelque chose qui n'a duré que quelques minutes pour
chacun de ceux qui s'y sont impliqués, à terre, autour de nos camions et à mesure
qu'ils passaient. Ce qui était un paroxysme momentané pour eux fut un jet continu
pour nous. Et il dura presque une heure me semble-t-il. Et voici ce qu'il faut retenir :
c'était les nôtres, sans aucun doute possible.
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Les nôtres ! Vous vous souvenez peut-être quand j'interpellais notre rassemblement
à la Bastille. Je disais : «
Où était-on passés ? On s'était perdus ! On se manquait,
on s'est retrouvés !
» Vous saviez tous de qui et de quoi je parlais, sans qu'il y ait
besoin d'en dire davantage. Ici c'est de cela encore dont je parle. Vous savez
instantanément de qui il s'agit : les nôtres. Cela se voyait. D'abord par la couleur de
peau : partout dominait en profondeur ce superbe marron que montrent les plus
beaux êtres humains. Ici la couleur de peau est un signal social. Ceci était une
marée de pauvres venus des quartiers populaires. Je ne dis pas qu'il n'y avait pas
de mélange de toutes sortes ! Rien n'est plus bigarré qu'une foule des Caraïbes :
mille nuances de couleurs et d'habits saturent tout, tout le temps. Pas de haillons ici.
Mais les pauvres et les humbles comme on dit pour désigner les invisibles aux yeux
des importants. Les humbles et les pauvres en habits de classe, en visages de
classe, leurs slogans politiques, les pauvres, les humbles faisaient le gros du fleuve
humain qui s'était formé là. Voilà ce qui me saisit au plus profond de moi et me
mettait ces larmes aux yeux. Les damnés de la terre en mouvement. Le sourire aux
lèvres. Comme chez nous quand on s'est retrouvés. Les gens souriaient. Ces mille
sourires n'en faisaient plus qu'un dans le creuset du cri sans fin qui entourait ce
camion ! Je pensais à ces images filmées en noir et blanc à l'entrée de Pancho Villa
et Emiliano Zapata vainqueurs à Mexico. Une marée de tenues de paysans pauvres
et de haillons entourait leurs chevaux. Le film est muet bien sûr. Et il n'y a pas de
pancartes ni de banderoles. Mais je demandais quel pouvait bien être le bruit de
cette foule déjà, le jour où j'ai vu ces images, l'an passé, dans l'exposition des
photos de la révolution mexicaine à Arles. Cela n'a rien à voir avec ce que l'on peut
observer au retour d'une équipe de foot victorieuse ou autour d'une pop star. C'est
un son humain particulier. Je dis « le son », comme je le dirais pour désigner le ton
qu'avait la voix de notre mère quand elle nous berçait, le ronronnement de notre
chat, le grondement de la bête qui a faim, la gorge qui bée à la vue d'une merveille.
Ou n'importe lequel de ces messages essentiels qui court-circuitent les mots. C'est
le bruit particulier d'un événement humain singulier. Vous savez ! L'un de ces bruits
qu'on connaît sans qu'il ait de nom : le craquement de la neige sous le pas, la pluie
qui plouic plouic sur le bord de la fenêtre et celle qui frrttrr frrtrr sur le carreau quand
l'averse tombe en biais. Ici, c'est le son que fait la révolution. Un rugissement a dit
Chavez, une clameur selon mon esthétique.
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Mais si violente que fut la ferveur autour du passage de Chavez, jamais le sens
politique de ce qui se passait ne s'effaça. Pancartes, bannières, slogans, cris et
salutations, poings fermés levés en cadence, saluts militaires, drapeaux rouges,
tout le temps, tout le long, du c?ur de la masse agglutinée contre le camion, sur les
branches des arbres, comme du bord opposé de l'avenue, rien n'effaça un instant la
marque de l'engagement politique ! Incroyable discipline que celle de ces gens
occupés des heures à attendre, puis après le passage des camions à attendre le
discours, puis à l'écouter en scandant slogans et consignes qui en accompagnaient
le sens et les incluaient dans son déroulement. Et parmi ceux-ci ce cri guttural et
jaillissant comme un éclat de rire : «
no volverán !
». Ils ne reviendront pas !
Comme c'était le quatorze juillet, et peut-être parce que je le lui ai mentionné, Hugo
Chavez a rendu hommage à la Révolution française. Il a expliqué la contribution
décisive de cet événement au mouvement pour l'indépendance du Venezuela, à
travers le personnage du maréchal Francisco de Miranda, militaire vénézuélien qui
combattit avec nous à Valmy et commanda victorieusement les armées françaises
en Belgique contre l'agression de l'union de l'Europe féodale et des émigrés. Ces
mots de Chavez, l'évocation de ma belle patrie républicaine, le « viva » qui conclut
ce passage de son discours, aussi bien à l'académie militaire le matin que le soir à
Barquisimeto, nous touchèrent beaucoup, on le devine, à la tribune où nous étions.
Dans ma forme de patriotisme, l'évocation de la France révolutionnaire est centrale.
S'y trouve résumé le contenu de l'identité française. Chavez en a bien compris toute
la profondeur : il a expliqué comment la Révolution française est la révolution du
monde entier dans la mesure où elle agissait au nom des droits universels de la
personne humaine et non d'une nationalité en particulier ! Cela me rend ce moment
plus mémorable et plus intéressant pour mon pays que la rencontre du nouveau
président français avec les journalistes désemparés qui voulurent l'intéresser à leur
conversation. Mais le nouveau président français a aussi connu une mobilisation
populaire si j'en crois « Ouest France ». La Pravda la plus sectaire de France, qui
s'honore de ne jamais me donner la parole, mentionne : «
À Brest, le chef de l'Etat a
fait un véritable tabac, dans une sorte d'hystérie collective.
» Comme
« Ouest-France » est bien à droite, j'en déduis qu'à leurs manières les gens qui se
trouvaient à Brest autour de Hollande étaient de gauche, puisqu'ils sont décrits
comme « hystériques ». Mais peut-être à Brest a-t-on entre-aperçu une petite braise
du grand feu que j'ai vu incendier Barquisimeto ? Hollande ferait bien de se méfier
de tous ces gens capables de s'enthousiasmer. Car ils finiront par demander des
raisons de le faire.
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De ce que j'ai vu des nouvelles d'Europe j'ai compris que nous sommes entrés dans
une nouvelle phase de l'histoire sur le vieux continent. Le niveau de confrontation
sociale grimpe d'un cran décisif. Les actualités d'Espagne ont été beaucoup
commentées ici, au Venezuela, parmi nos amis. Le défilé des mineurs, la répression
qui a suivi, ont marqué les esprits. Je crois que c'est ce qui leur donne le plus
matière à penser du fait de la communauté de langue qui leur permet de vivre de
plus près ce qui se passe. Car d'une façon générale j'observe que peu de gens sont
informés du degré de verrouillage « austéritaire » en Europe. Je pense qu'il en est
ainsi parce qu'ils croient que les horreurs qui leur sont arrivées dans la phase
précédentes de leur histoire, celle où le FMI et la Banque mondiale leur serraient la
gorge, sont connues en Europe. Ici ils pensent que tout le monde a tiré la leçon de
cette politique. Il leur est difficile d'admettre que ce n'est pas le cas. Quand
j'explique que la Banque centrale européenne ne prête pas directement aux Etats
tout le monde est stupéfait, se fait répéter l'information pour être certain d'avoir bien
compris. Et ainsi de suite. Pour moi aussi, en dépit de tout ce que je sais, je suis
estomaqué comme tout un chacun à l'heure où nos prévisions deviennent des
réalités matérielles et humaines. Le nouveau plan d'austérité en Espagne est une
façon de mettre le doigt dans l'engrenage qui a déjà détruit la Grèce. Comment se
fait-il que les décideurs ne le sachent pas ? Comment peuvent-ils agir de cette
façon en sachant que cela ne mène nulle part ? Les coups assénés au monde du
travail sont d'une incroyable violence. Le surgissement des gueules noires dans les
rues de Madrid donne à la situation une tonalité qui va maintenant donner un autre
visage aux luttes en Espagne. Au temps des « indignés » succède celui des
révoltés. Je crois que c'est la tonalité de toute la période qui arrive pour nous aussi
en France. Cette phase est celle qui a précédé en Amérique du sud le collapsus
final, celui où surgissent des masses immenses de population qui crient «
qu'ils s'en
aillent tous !
».
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c'est évidemment en tenant compte de la répétition des expériences réelles.
Chacune a confirmé que la ligne politique austéritaire n'ouvre aucune issue
aux peuples qui acceptent de s'y soumettre. Récession et misère sans issue
sont la constante, jusqu'à l'explosion. Mais ce qui hier ne s'était vérifié, pays
par pays, qu'en Amérique du sud est dorénavant bien installé sur notre
continent. Le naufrage de la Grèce en a témoigné. L'Espagne entre à son tour
dans la spirale mortelle. Elle ne s'en sortira pas davantage. La logique
voudrait que commence bientôt les
grandes man?uvres politiques en vue d'une
grande coalition pour sauver le plan d'austérité. Ces gens-là sont comme ça. Quand
Hollande a été à la télévision grecque pour appeler à voter à droite plutôt que pour
l'autre gauche, il a en quelque sorte signifié cette implacable alliance des eurocrates
pour maintenir leurs plans envers et contre tout. Dignité incluse !
Une telle série d'événements soulève bien la question que je viens de poser.
Pourquoi les gens qui dirigent prennent-ils des décisions si évidemment
contre-productives ? Pourquoi le dirigeant espagnol Mariano Rajoy met-il en place
un plan qui conduit tout droit à la récession alors que la récession va augmenter les
difficultés budgétaires qu'il prétend régler ? Du fait même du caractère si hautement
prévisible des conséquences de telles décisions, on devine que la situation peut se
lire de façon bien différente. Laissons de côté pour l'instant l'idée que ces dirigeants
soient idéologiquement ou personnellement corrompus. Essayons d'imaginer qu'ils
croient à leur propre propagande. On peut imaginer alors qu'ils pensent
sérieusement être mis en demeure de réparer les « erreurs de gestion » de leurs
prédécesseurs. Que «
de toute façon il faut payer ses dettes
» et ainsi de suite.
C'est la musique dominante. On entend dire en Espagne comme en Grèce et
comme en France que «
le pays a vécu au-dessus de ses moyens
». La dette ce
serait de la dépense irresponsable. Le piège qu'est ce discours fonctionne bien. On
peut y croire sans difficulté parce que son énoncé paraît évident. Mais ce n'est
qu'un discours. Il ne résiste pas à un examen attentif des faits.
Pourquoi était ce vivre au-dessus de ses moyens que de vivre comme nous
vivions ? L'histoire fiscale et économique permet vite de situer le début de
l'explosion, d'ailleurs relative, de la dette publique. Je ne vais pas seulement
évoquer le moment où il est devenu impossible à l'Etat de se financer auprès
de la Banque centrale et où il a dû se tourner, par obligation institutionnelle,
vers le marché des banques privées. Je veux revenir sur le moment où la
droite et les sociaux-libéraux ont commencé à baisser le niveau des impôts
sur les bénéfices des sociétés et sur les particuliers. Si nous avons vécu
au-dessus de nos moyens c'est parce que nous avons réduit nos moyens. Là
encore mettons de côté la collusion de classe comme facteur d'explication.
Acceptons de croire que cela a été fait, comme cela a été annoncé, «
pour
relancer l'économie, améliorer la compétitivité des entreprises
» et les autres bla bla
bla. Pourtant le résultat est sous nos yeux : rien ne s'est passé comme prévu. Ce
démenti des faits est le plus cruel démenti opposable à cette politique ! Elle ne
marche pas ! Dès lors la cohérence du système se lit d'une autre manière. Il s'agit
d'une organisation en vue de rendre possible et de protéger la perception d'un
immense impôt privé, celui que le système financier prélève sur la société. La rente
financière et sa protection est la seule logique du système et non l'apparente
volonté de faire ceci ou cela, habituellement énoncée par ceux qui prennent les
décisions visibles. En ce sens ce qui est usuellement nommé et présenté comme
une « crise », un dérèglement provisoire dû à une mauvaise gestion passée où
actuelle n'en est pas une. C'est un système permanent. Ce que l'on nomme la
« crise » est la norme de fonctionnement désirable et profitable du système.
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que cet état implique pour fonctionner, le système peut se lire comme une
méthode de confrontation de ceux qui profitent contre ceux qui sont
ponctionnés. Au-delà de tout ce qu'il peut dire sur le sujet et même peut-être
de ce qu'il croit lui-même, Mariano Rajoy réorganise l'Espagne pour que
puisse continuer la prédation du système financier sur l'Espagne aux
conditions que ce dernier a
déterminé. Il n'y a pas de « crise » en ce sens que
« la crise » est seulement le nom d'une méthode de confrontation sociale. Elle
part de la sphère financière et elle s'exprime dans tous les compartiments qui
s'y rattachent ou qui lui sont liés. A chaque étape de la confrontation, les
agents du système, qu'ils en soient dupes où qu'ils croient réellement à sa
nécessité, présentent la soumission comme une règle de bon sens ! Mieux,
c'est une nécessité de la modernité, un choix pour le futur. Tout ce qui n'en
convient pas est de « l'idéologie ». Vous connaissez cette musique, n'est-ce
pas, mes amis. Au début le grand nombre y croit. Il se soumet en majorité,
même en râlant. La propagande fonctionne alors à plein régime. Elle ne
s'arrête jamais d'ailleurs. Puis vient le moment où les pires dupes, c'est à dire
les catégories sociales moyennes qui ont cru y trouver leur compte, sont
tellement piétinées qu'elles se réveillent. «
Nous avons des familles
» crient les
manifestants madrilènes. Comme si c'était une façon d'appeler les gouvernants au
retour au réel qu'eux viennent de faire. La corde se tend. Tant qu'elle tient, la
logique du système augmentera la tension ! Elle se tend au sommet de la hiérarchie
sociale des salariés. Jusqu'à la dernière minute la propagande tourne à plein
régime.
pour comprendre à quel point ce système peut durcir
ses méthodes
d'intoxication mentale. Deux grammes de protestation avant trois couplets d'appel à
la soumission aux normes dominantes et de dénonciation de l'idéologie
anti-mondialisation. Le médiacrate social libéral enragé voit dans l'affaire PSA, «
le
cimetière des illusions idéologiques françaises
»!
Intellectuellement c'est révulsif.
Surtout venant de gens qui se disent de gauche. Mais, politiquement, nous n'avons
pas meilleur allié. Ces gens maintiennent tout le monde dans un état de stupeur qui
ne se résout pour finir que par des explosions du type de celles qui ont eu lieu en
Amérique latine. Car à la fin des fins, les lecteurs du « Nouvel Observateur » aussi,
même intoxiqués à mort par ce qu'ils lisent, eux aussi savent qu'ils « ont des
familles » ! Et ce n'est pas l'opium de Joffrin qui leur permettra de les nourrir ou de
leur assurer un vécu décent ! Le mur de béton que construisent de tels médias
hallucinogènes explique pourquoi tant de gens des classes moyennes et moyennes
supérieures se tournent vers nous comme vers une alternative intellectuelle.
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que constitue la « crise » prend aujourd'hui le chemin des usines. PSA
aujourd'hui. Ce n'est pas le pire cas pour nous. En effet, il s'agit d'un milieu
ouvrier fortement structuré par le syndicalisme. La bataille va donc prendre
une forme contrôlée et dirigée qui affaiblit la portée des
man?uvres et coups
tordus gouvernementaux ou patronaux. Ce matin jeudi, à Caracas, j'y ai tout de
suite pensé quand je me suis levé avec l'annonce des plans de licenciements
massifs chez PSA. Les camarades m'alertaient depuis le site d'Aulnay et la ville où
milite une section du Parti de Gauche. Mais aussi depuis notre équipe nationale où
cette affaire déclenche une grosse émotion militante. Moi aussi je bouillais. Je suis
si loin ! Mais sur place évidemment tout notre dispositif est en place. Les copains se
disposent donc pour aller à la rescousse si on les y invite à le faire. Comme
d'habitude, nous sommes à la disposition des syndicats des travailleurs. Nous
appliquerons les consignes qui seront données par ceux qui luttent. C'est notre
doctrine. Pour autant nous ne sommes pas inertes politiquement. Le Parti de
Gauche vient de rappeler sa prise de position pour une loi en faveur de l'interdiction
des licenciements boursiers et pour un moratoire sur les licenciements de cet été.
Je voudrais rappeler que la loi contre les licenciements boursiers a été présentée au
Sénat l'an passé par Dominique Watrin, sénateur du Front de Gauche, et qu'elle a
été votée alors par les socialistes. Ils pourraient donc la mettre en débat à
l'Assemblée et elle pourrait être effective avant la fin de la session parlementaire. Le
cycle qui commence est un temps de confrontations sociales ouvertes. Je pense
que le nouveau gouvernement ne l'analyse pas de cette façon. Il ne sera pas le
seul. Comme par le passé, beaucoup vont examiner le problème comme un « vrai
problème économique », lié à la « compétitivité des entreprises ». Et ainsi de suite.
Vous connaissez tous la chanson. Mais combien vont souligner que PSA fait tout de
même plus de cinq cent millions d'euros de bénéfices ? Et combien vont rappeler
cette évidence : le marché n'est malade que de son ouverture incontrôlée.
Exemple : trois Renault sur cinq qui se vendent en France viennent d'usines
délocalisées. C'est là le modèle économique que veut appliquer dorénavant à son
tour PSA. Il ne le fait qu'en raison de l'impunité dont ont bénéficié les autres
constructeurs en agissant de cette façon. C'est parce qu'on a laissé faire que tout
empire ! De même la question de la nécessaire transition écologique de l'industrie
automobile qui doit venir à l'ordre du jour. Là encore le problème ne peut plus être
traité en fonction de nos propres desiderata. En effet toute la recherche et
développement de cette grande entreprise a été déjà délocalisée à l'occasion du
précédent plan l'an passé ! De nouveau, on a laissé faire et tout empire. On notera
aussi la discrétion des « analystes » sur le bilan de la politique de « réduction des
coûts salariaux », menée pourtant sans désemparer par le précédent
gouvernement. Je pense en particulier à la suppression de la taxe professionnelle !
Un somptueux cadeau de douze milliards d'euros aux « entreprises », offert sans
aucune contrepartie ! C'est cependant dans cette voie de la réduction des coûts
salariaux que veut persister le nouveau gouvernement. Donc il n'y a pas de
solutions au problème posé sans prendre à bras le corps la question de
l'organisation du modèle économique national et européen. Cela dépasse donc ce
que peuvent faire seuls les travailleurs localement. Leur lutte doit rencontrer une
volonté d'appui déterminée, gouvernementale et législative. C'est ce que ferait une
majorité parlementaire dirigée par le Front de Gauche. Nous allons voir à présent
les bavards du « vote utile » au pied du mur des réalités de la lutte sociale. Hélas.
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Mais mercredi, ma journée en décalage horaire de six heures et demie avec vous
en France avait très bien commencé. C'était un message de Laurence Sauvage.
Laurence j'en ai déjà parlé ici. C'est la secrétaire nationale du Parti de Gauche en
charge des luttes sociales. Elle a succédé en catastrophe à un camarade qui était
fort habile à faire des textes et des recommandations pontifiantes mais absolument
inapte à quelque activité concrète que ce soit. Beaucoup ne donnaient pas cher de
cette jeune femme sans passé politique catapultée à la place d'un cacique aigri
dans un univers dominé par les hommes. Le bilan fut tout simplement à couper le
souffle. La recette ? Militer ! Agir ! Laurence n'arrête pas. Elle est présente. Non pas
derrière un bureau ou à travers un pouvoir de nuisance fielleusement entretenu. Elle
se rend sur place, elle téléphone, elle soutient, elle va, elle revient, elle m'oblige
aussi, autant que possible, à aller et venir en courant derrière elle. Ma première
visite d'après campagne présidentielle, sur l'insistance de Laurence, fut pour ces
femmes au combat ! C'est Laurence qui a centralisé au Parti de Gauche la lutte des
femmes de Sodimedical en entretenant la flamme de l'intérêt pour elles. C'est à elle
que je dois d'avoir cité si souvent ce combat dans mes discours et interventions tout
simplement parce que j'étais continuellement informé par elle de ce qui se passait.
Ce matin son sms et son mail d'appui m'a mis les larmes aux yeux. Après tant de
mois d'angoisse, sans salaires, de décisions de justice non respectées, de renvoi en
report de jugement, ces femmes ont gagné ! J'imagine la joie sur place. J'en ai les
larmes aux yeux. Je vois le visage tranquillement déterminé d'Angélique, la
première de cordée de cette lutte ! Voici le message de Laurence : «
Bonjour à tous,
s'il fallait qu'aujourd'hui le soleil brille de tous ses rayons, il fallait que cela soit dans
l'Aube. Et bien bingo ! Les salariés de Sodimedical ont gagné contre le groupe
Lhomann & Rauscher. Le groupe est condamné à payer les salaires avec astreinte
de 1000EUR par jour de retard. Mieux : le jugement fait obligation de reprendre
l'activité à Plancy. Quand nous avons parfois le doute que tout est perdu, même en
allant régulièrement les soutenir et en leur apportant une aide morale par téléphone,
cette victoire nous prouve que rien n'est jamais perdu ! Bravo à elles et à leurs
avocats. Je fais un communiqué de presse ce soir mais je t'avoue que c'est en
tremblant car l'un des premiers appels d'Angélique Debruyne, leur "leader", était
pour le PG afin de savourer leur victoire en direct. Bises. Laurence
»
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A présent mon compte de campagne présidentielle vient d'être déposé en bonne et
due forme. Un travail de titan pour les deux camarades chargés de cet exercice,
Marie-Pierre Oprandi, ma mandataire financière et Jean-Pierre Masson son
co-équipier dévoué. Juste pour mémoire, il faut savoir qu'au cas particulier cette
présidentielle ce fut 15 000 documents scannés, 4 800 lignes d'écritures
comptables, 2 400 chèques pour la seule Association de Financement du Compte
de Campagne « JLM 2012 », 2 000 heures de travail assumées par le tandem que
je viens de citer. Et bien sûr, j'en oublie forcément... A présent commence une
période de concertation avec la Commission chargée de vérifier la régularité de tout
cela. Je me sens obligé de vous rappeler que je suis tenu pour personnellement
responsable sur le plan juridique de cet exercice. C'est moi qui paye si le compte de
campagne est rejeté. C'est moi qui serais puni si quelqu'un a triché dans mon dos
ici où là avec les règles vétilleuses de cette comptabilité. On voit quel rôle est aussi
celui du candidat. Et les risques. Car bien sûr il y a toujours des irresponsables
dans le circuit. Aux élections européennes, un responsable départemental partit en
vacances sans rendre ses documents. Il fallut, en plein mois de juillet, tout
reconstituer, aller de villages en villes pour récupérer les bons documents
comptables. Ici ce fut autre chose : 2 000 pièces comptables soudainement arrivées
quatorze jours avant la clôture du compte à saisir, analyser, et intégrer pour un
montant de plus d'un million d'euro ! La désinvolture confine parfois de si près avec
le sabotage que j'en ai des sueurs froides rétrospectives.
Mais si de tels risques sont mis sur le dos du candidat, comment ne pas pointer du
doigt une énorme injustice du système de financement public. Comme vous le
savez les subventions publiques aux partis politiques sont attribuées sous certaines
conditions. Il faut avoir fait un minimum de voix dans un minimum de département
pour accéder à ce financement. L'injustice ? La voici. L'élection présidentielle ne
compte tout simplement pas dans ce calcul. Ne sont pris en compte que les voix
acquises aux élections législatives ! On comprend le coup tordu destiné à favoriser
les partis qui dominent cette sorte d'élection à deux tours ! Ainsi nous sommes
responsables de tout, en tant que candidat, mais bénéficiaires de rien. La prise en
compte du résultat à l'élection présidentielle me semble être une mesure de simple
justice dans le cadre d'un système que je continue à qualifier d'intrinsèquement
injuste.
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Je veux aussi pointer, par humour cette fois-ci, une autre extravagance. Des
candidats qui recueillent des millions de voix à l'élection présidentielle où vote tout
le pays, sont ensuite astreints à aller en circonscription, au suffrage à deux tours, ce
piège à loup, pour recevoir l'onction nécessaire pour représenter le peuple français
à l'Assemblée nationale ! Sachant qu'un député est élu en moyenne avec trente
mille voix, faites la division des quatre millions de voix qui se sont portées sur mon
nom et vous constaterez que ma représentativité est équivalente à l'addition d'une
très grosse quantité de ceux qui siègent à présent. Je m'amuse aussi en pensant à
une autre singularité. Un ancien Président de la République est censé acquérir la
science infuse du droit constitutionnel à la fin de son mandat, ce qui le rend
automatiquement membre du Conseil qui surveille la constitutionnalité des lois.
Mais un candidat à la représentation du pays n'est pas censé l'avoir acquise après
avoir recueilli des millions de voix dans une élection un mois avant.
Pourtant il est
tenu pour responsable sur ses deniers et droits civiques de toutes les factures de sa
campagne. Pas belle la cinquième République ?
J'ai évoqué dans ma précédente note le coup d'Etat au Paraguay. Je me fais un
devoir de poursuivre l'information de mes lecteurs sur le sujet. Je le fais bien sûr
pour que vous sachiez. Savoir c'est aussi se préparer. Il est important de savoir de
quoi sont capables nos adversaires et quelle est la pratique ordinaire des Etats-Unis
avec leurs voisins rebelles. Cela permet de faire la part des choses quand déferle la
propagande médiatique contre les gouvernements « dictatoriaux » de nos amis en
Amérique du sud et dans les Caraïbes. Je le fais aussi comme un défi. De ce dont
je vous parle il n'est question nulle part ! Imaginez que cela se déroule à Cuba ou à
Caracas ! La presse sous influence regorgerait d'articles et de « reportages » de
« correspondant locaux » comme nous en sommes régalés à l'ordinaire dès qu'il
s'agit d'un gouvernement de gauche à mettre en cause ! Il est important pour moi de
guérir mes lecteurs de toutes les façons possibles contre la tendance à oublier que
sont en réalité les « médias de référence » quand ils parlent de questions
internationales. Donc, le président « déchu », Fernando Lugo, s'est adressé à
l'opinion publique nationale et internationale. Cherchez-en la trace dans vos
journaux ! Il raconte comment vit dorénavant son pays, depuis le putsch. Son texte
s'intitule : «
Non à la violence du régime illégitime et putschiste !
». On y apprend
comment se met en place une répression politique de grande envergure. Ainsi les
sénateurs Carlos Filizzola et Sixto Pereira qui ont refusé de voter la déchéance de
Fernando Lugo sont dorénavant menacés par leurs collègues putschistes ni plus ni
moins que d'expulsion du pays ! Mais il y a plus glauque. Le nouveau prétendu
président est à la tête d'une grande entreprise de vente de pesticides. Il s'est donc
immédiatement attaqué au CENAVE, l'organisme de contrôle des semences. Plus
de cent employés ont été licenciés sous l'accusation d'être des « luguista »,
c'est-à-dire des partisans du président Lugo. Ici la lutte contre les putschistes
devient aussi une lutte écologiste. Le licenciement politique ferait le régal des
outragés stipendiés s'il s'agissait de Cuba ou du Venezuela. Ici, quoi ? Pourtant ça
tape dur. L'appel international de Fernando Lugo signale un exemple frappant à
Itaipu Binacional, la plus grande centrale hydroélectrique du monde ! L'actuel
directeur général paraguayen, membre dirigeant du parti du président pesticide,
annonce le licenciement de 300 employés ! Motif officiel : ils sont « gauchers ».
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Le silence des médiacrâtes s'étend même à des domaines où ils ont pourtant
d'habitude les nerfs à fleurs de peau. Je veux parler de la sacro-sainte défense des
collègues opprimés parce qu'ils « font seulement leur métier » et de « la liberté
d'informer », et des bla bla habituels de la caste ! Car au Paraguay, le nouveau
régime vient d'essayer d'assaillir la TV publique ! Les occupants des lieux ont
opposé une défense héroïque. Dorénavant il y est procédé à des menaces de
licenciements massifs pour faire cesser la résistance. Quel silence entoure tout
cela ! Dorénavant vous savez donc ce que valent les sanglots mouillés des
médiacrâtes à propos de la liberté de la presse et tous leurs bla bla ordinaires sur le
sujet ! Leurs indignations signalent la présence de la laisse, leurs silences indiquent
sa longueur maximale ! Touchant de naïveté, Lugo s'adresse pourtant à cette
engeance : «
Ce sont quelques-uns des faits qui invitent l'opinion publique
internationale et nationale, tous et toutes les démocrates de la région et du pays, les
institutions internationales et régionales à ne pas faiblir dans leur accusation afin
d'empêcher que le viol de la Démocratie et de la Constitution paraguayenne reste
impuni.
» Aphatie, Duhamel, Ménard, Barthès, Elkabbach, au secours ! Trop drôle !
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