Le message symbolique des rinceaux de l Ara Pacis Augustae - article ; n°1 ; vol.126, pg 81-101
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Description

Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 1982 - Volume 126 - Numéro 1 - Pages 81-101
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1982
Nombre de lectures 82
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Monsieur Gilles Sauron
Le message symbolique des rinceaux de l'Ara Pacis Augustae
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 126e année, N. 1, 1982. pp. 81-
101.
Citer ce document / Cite this document :
Sauron Gilles. Le message symbolique des rinceaux de l'Ara Pacis Augustae. In: Comptes-rendus des séances de l'Académie
des Inscriptions et Belles-Lettres, 126e année, N. 1, 1982. pp. 81-101.
doi : 10.3406/crai.1982.13914
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1982_num_126_1_13914SYMBOLISME DES RINCEAUX DE L'ARA PAGIS 81
COMMUNICATION
LE MESSAGE SYMBOLIQUE
DES RINCEAUX DE L'ARA PACIS AUGUSTAE,
PAR M. GILLES SAURON
II peut sembler paradoxal de prétendre apporter un éclairage nou
veau à l'un des monuments les plus commentés de la Rome ancienne.
Depuis l'identification de ses vestiges par von Duhn en 18791, l'Ara
Pacis Augustae occupe, en effet, une place centrale dans les recherches
concernant le principat d'Auguste, plus spécialement sans doute du
point de vue de l'histoire de l'art, mais aussi sur le plan de l'histoire
politique et idéologique. Un commentateur récent du monument,
M. Borbein, a même pu écrire que l'évaluation historique de l'Ara
Pacis était désormais achevée, et qu'il ne convenait plus de se poser
à son sujet que des questions limitées mettant en rapport les reliefs
avec notre connaissance de l'idéologie du principat2. Or notre
recherche prétend découvrir une clé essentielle de la signification
de l'autel dans la partie en apparence la plus insignifiante de son
décor, les vastes compositions florales qui occupent le champ infé
rieur de la face externe de l'enceinte.
J'avais suggéré, dans une précédente étude, que l'ouvrage de
M. Theodor Kraus, intitulé précisément Die Ranken der Ara Pacis,
s'il renouvelait par sa magistrale synthèse notre connaissance de
l'art décoratif hellénistique, n'éclairait guère par contre l'objet appa
rent de sa recherche, à savoir les rinceaux de l'Ara Pacis eux-mêmes3.
J'avais ainsi pu démontrer que la composition de ces motifs ne
devait rien à l'art pergaménien de l'époque royale, mais s'inspirait
en revanche de modèles empruntés au décor de monuments funé
raires de l'Athènes classique. Mais un tel débat est très loin d'épuiser
la signification de la décoration florale de l'autel. Je voudrais essayer
* Cette communication reprend, en apportant certains compléments, une
partie de mon mémoire de l'École française de Rome, intitulé Aureus ramus :
essai sur les rinceaux de l'Ara Pacis Augustae et la formation d'une esthétique apolli-
nienne à l'époque d'Auguste. Cf. le compte rendu de M. Jacques Heurgon, dans
CRAI 1980, p. 627-628.
1. Dans Miscellanea Capitolina, 1879, p. 11 sq.
2. A. H. Borbein, Die Ara Pacis Augustae. Geschichtliche Wirklichkeit und
Programm, dans Jdl, 90, 1975, p. 244.
3. Theodor Kraus, Die Ranken der Ara Pacis. Ein Beitrag zur Entwicklungs-
geschichte der augusteischen Ornamentik, Berlin, 1953. Cf. G. Sauron, Les modèles
funéraires classiques de l'art décoratif néo-attique au Ier siècle avant J.-C, dans
MEFRA, 91, 1979-1, p. 202-209. 82 COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS
Fig. 2. — Le lierre, l'acanthe et le laurier.
de marquer ici les étapes d'une investigation qui m'a amené à mettre
en évidence l'existence signification symbolique de ces motifs,
puis à proposer quelques hypothèses sur le contenu de ce symbolisme.
I. L'existence du symbolisme :
Je suis parvenu à la quasi certitude que ces décors étaient por
teurs d'une signification, par une suite d'observations liées, d'une
part, à une simple examen du monument lui-même, et, d'autre part,
à des confrontations multiples avec ce que nous savons de l'histoire
de ce motif dans l'art décoratif grec.
La première constatation porte sur la très grande différence qui
existe entre le décor inférieur des petits côtés de l'enceinte de l'autel
et celui des longs côtés. La différence de dimensions n'explique pas
tout, car, nous le verrons, certaines variations sont inexplicables du
strict point de vue décoratif.
La seconde observation tient à l'assemblage végétal qui ne se laisse
observer que sur les longs côtés de l'enceinte. Le trait le plus frappant
est la présence d'un simple rameau de laurier, perdu au milieu d'une
prolifération d'acanthe, sur chaque moitié du décor (fig. 2). La
modestie extrême de la place réservée au laurier est d'autant plus
étonnante que l'on connaît bien par ailleurs l'importance de ce SYMBOLISME DES RINCEAUX DE L'ARA PACIS 83
végétal emblématique dans l'arsenal des symboles privilégiés par
Auguste4. L'étonnement grandit, lorsqu'on observe que cet unique
rameau de laurier est issu d'une volute d'où jaillit une touffe de
lierre. D'une part, en effet, le lierre est presque toujours absent des
rinceaux d'acanthe de la tradition hellénistique5. D'autre part, la
juxtaposition de ces deux plantes fait irrésistiblement penser au
couple antagoniste des dieux qu'elles symbolisent, et qui sont à cette
époque d'une singulière actualité : Apollon et Dionysos.
De telles constatations m'avaient amené à suivre Hans-Peter
L'Orange dans son hypothèse d'une figuration de l'âge d'or, inspirée
de la IVe Églogue de Virgile6. Dans le célèbre texte virgilien, en
effet, on assiste bien au spectacle d'une nature proliférante, où, en
particulier, le lierre se mêle à l'acanthe7 :
errantes hederas passim cum baccare tellus
mixtaque ridenti colocasia fundet acantho.
Mais il saute aux yeux que le rapprochement s'arrête avec la pré
sence simultanée du lierre et de l'acanthe, et que, sur l'Ara Pacis,
les deux végétaux, loin d'être mêlés, sont nettement distingués
(fig. 2) : le lierre est même, au sens propre du terme, circonscrit par
l'acanthe. Or, m'a-t-il semblé, les Bucoliques de Virgile fournissent,
en effet, la clé d'une telle composition, mais non la IVe, ainsi que le
pensait L'Orange, mais la VIIe. Au cours d'une compétition poé
tique entre deux bergers, l'un d'eux, Corydon, met en scène des végé
taux explicitement emblématiques, et imagine entre eux une lutte,
d'où sortira finalement victorieuse la plante préférée de sa bien-
aimée, Phyllis8 :
Populus Alcidae gratissima, uitis Iaccho,
formosae myrtus Veneri, sua laurea Phoebo,
Phyllis amat corylos ; illas, dum Phyllis amabit,
nec myrtus uincet corylos, nec laurea Phoebi.
De telles compétitions entre végétaux sont bien connues dans la
littérature hellénistique, ainsi le Débat du laurier et de Volivier de
4. Cf. Andréas Alfôldi, Die zwei Lorbeerbâume des Augustus, Bonn, 1973.
5. Sur la nette distinction entre ces deux motifs dans la tradition décorative
grecque, cf. mes analyses dans F. Coarelli-G. Sauron, La tête Pentini. Contribution
à l'approche méthodologique du néo-atticisme, dans MEFRA, 90, 1978-2, p. 712-
715.
6. Hans-Peter L'Orange, Ara Pacis Augustae. La zona floreale, dans Acta ad
archaeologiam et artium historiam pertinentia, 1, 1962, p. 7 sq.
7. Virgile, Bucoliques, IV, 19-20.
8. Ib., VII, 61-64. COMPTES RENDUS DE L* ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS 84
Callimaque9. Mais Virgile enrichit le thème en attribuant un végétal
à une mortelle, et en orchestrant une compétition générale des végé
taux emblématiques. Si l'on considère le décor de l'Ara Pacis, on
peut supposer que le lierre s'y trouve en position de végétal « vaincu »
selon l'expression virgilienne, tandis que l'acanthe et le laurier, qui
semblent se prêter un renfort mutuel, y feraient figure de végétaux
« vainqueurs ».
Telles sont les observations qui ont servi de point de départ à cette
étude. Mais il fallait considérer la totalité du décor de l'enceinte, en
particulier s'interroger sur le curieux parallélisme entre la frise
figurée et la frise végétale. Une petite mais pénétrante étude de
M. Hermann Bùsing nous fournissait un nouveau cadre pour des
observations ultérieures10.
M. Bùsi

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