Les bestiaires dans la poésie amoureuse de l âge baroque - article ; n°1 ; vol.31, pg 17-34
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Description

Cahiers de l'Association internationale des études francaises - Année 1979 - Volume 31 - Numéro 1 - Pages 17-34
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1979
Nombre de lectures 35
Langue Français

Extrait

Gisèle Mathieu-Castellani
Les bestiaires dans la poésie amoureuse de l'âge baroque
In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 1979, N°31. pp. 17-34.
Citer ce document / Cite this document :
Mathieu-Castellani Gisèle. Les bestiaires dans la poésie amoureuse de l'âge baroque. In: Cahiers de l'Association internationale
des études francaises, 1979, N°31. pp. 17-34.
doi : 10.3406/caief.1979.1181
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/caief_0571-5865_1979_num_31_1_1181LES BESTIAIRES
DAIMS LA POÉSIE AMOUREUSE
DE L'AGE BAROQUE
Communication de Mme Gisèle MATHIEU-CASTELLANI
{Valenciennes)
au XXXe Congrès de V Association, le 24 juillet 1978.
On voudrait ici esquisser une typologie des bestiaires, en
examinant le statut des animaux dans les recueils néo-pétrar-
quistes et baroques (1570-1630) : on prendra en considération
la nature de la représentation mentale qui correspond au signi
fié habituel du mot désignant l'animal.
Quelques remarques préliminaires me permettront de pré
ciser mon propos.
1. La distinction entre animaux « réels » (ayant un réfèrent
dans le monde connu) et fabuleux (êtres imaginaires
composant un bestiaire fantastique) n'est pas plus pertinente
ici qu'elle ne l'est pour les bestiaires médiévaux, la poésie lyr
ique de l'âge baroque n'étant pas davantage référentielle ni
représentative : les deux catégories y assument indifféremment
les mêmes fonctions et y produisent les mêmes effets. Le Phén
ix, par exemple, joue le même rôle que le Vautour ou l'Aigle.
Il serait plus efficace de distinguer les animaux symboliques des
animaux non-symboliques.
2. La typologie zoologique dépend de la typologie textuelle.
De façon générale, chaque « genre » dispose d'un répertoire
spécifique : la fable et la satire, par exemple, qui sont des gen
res didactiques, recourent à un bestiaire « moralisé » dans l
equel chaque animal est pourvu de traits spécifiques, relative-
2 18 GISÈLE MATHIEU-CASTELLANI
ment constants : le loup et l'agneau y sont définis a priori par
des traits qui les caractérisent sommairement, et font référence
à une tradition.
Plus précisément encore, un même animal est pourvu de
traits différents — il change de « nature », ou plutôt appartient
à tel ou tel bestiaire — selon le type de texte. Le chien, par
exemple, est souvent dans la poésie du XVIe s. un animal
symbolique qui représente la nature à l'état sauvage, mais il
peut perdre ce caractère symbolique, lorsqu'il devient, dans
la veine folâtre du lyrisme amoureux, l'objet du désir de méta
morphose. L'ambivalence, voire la polyvalence, caractérisent
bon nombre d'animaux, dont le symbolisme varie en fonction
de la nature du texte.
On essaiera de montrer qu'à un type d'organisation textuelle
correspond un type de bestiaire, c'est-à-dire un ensemble orga
nisé d'animaux qui remplissent le même rôle et assurent les
mêmes effets.
Dans les textes lyriques qui relèvent de la veine folâtre et
mignarde, on trouve, par exemple, l'abeille, la puce, le papil
lon, le taureau, la mouche, le petit chien, etc., qui constituent
un ensemble paradigmatique d'objets interchangeables. D'un
autre côté, dans les textes produits à partir des modèles mythi
ques, l'oiseau-Phénix, le Vautour ou l'Aigle, le cerf ou la meute
de chiens composent un autre ensemble, dont les caractères
sont différents, et la fonction tout autre.
3. C'est que la nature de la représentation mentale est variable,
d'un type de texte, d'un genre, à un autre. Elle dépend des
codes de référence qui sont autant de grilles permettant de dé
chiffrer le statut et la signification de l'animal. Quels sont donc
ces codes de référence ? On peut, il me semble, en distinguer
quatre :
— la désignation de l'animal renvoie le plus souvent à un
système global d'interprétation, à la symbolique en tant que
code (la symbolique, comme disait J. Frappier, est en effet à la
fois « méthode, science et code organisé »), qui fournit la « clé »
en précisant quelles sortes de représentations il suscite : l'un LES BESTIAIRES DE LA POÉSIE BAROQUE 19
des bestiaires est en effet un bestiaire symbolique, dont l'inte
rprétation est d'avance fixée ;
— mais le code de référence peut aussi bien être un code figu
ratif précis, qui attribue aux animaux une valeur emblémati
que (c'est le cas, notamment, des animaux qui peuplent cer
tains romans médiévaux, cerf, épervier, biche, etc.). La poésie
baroque porte des traces de ce bestiaire emblématique, qui ne se
confond pas tout à fait avec le symbolique, comme on
le verra ;
— le code peut aussi être spécifiquement littéraire ; il renvoie
alors, explicitement ou implicitement, à une tradition litt
éraire déterminée, à un registre d'expressions, à un genre ou
sous-genre précis, par exemple à la veine folâtre et mignarde
issue du lyrisme ronsardien. On a choisi d'appeler fantastic
un tel bestiaire, qui relève en effet d'une « fantaisie », du jeu
d'un imaginaire collectif.
En ce cas, le modèle est strictement textuel, et le système de
références permettant le déchiffrage est déterminé par un en
semble de textes appartenant au même genre poétique, et pra
tiquant la même écriture ;
— enfin, il arrive que le système d'interprétation soit garanti
par un mythe précis (mythe d'Actéon ou de Prométhee, ou du
Phénix) qui fournit une topique et une rhétorique déterminées.
Le bestiaire en ce cas est mythique, chaque animal se trouvant
défini par la place et le rôle qu'il a dans le mythe de référence.
Ces « différences » n'interdisent évidemment pas des rela
tions et des rapports d'un bestiaire à un autre : tel animal
mythique, le Vautour attaché au mythe de Prométhee, par exemp
le, peut aussi bien être un animal symbolique. Mais, intégré
dans un contexte mythique, son symbolisme initial s'estompe,
se dégrade ou subit une mutation, tandis que l'animal devient
métaphorique. De même, tel animal « fantastic » comme le
papillon, peut aussi appartenir à la catégorie de l'emblème.
C'est que deux ou plusieurs codes sont susceptibles de régler
concurremment la production du texte. Il nous faudra d'abord
tenter de définir, pour chaque classe, le code dominant, avant
de nous interroger sur les relations qui régissent les divers codes, 20 GISÈLE MATHIEU-CASTELLANI
codes « scientifiques » (symbolique ou emblématique), et codes
« littéraires » (tradition, mythe), et sur leur hiérarchie à l'épo
que considérée.
I. LE BESTIAIRE SYMBOLIQUE.
Il faut évidemment distinguer le symbolisme, en tant qu'acte
individuel, de la symbolique, qui est un système généralisé de
correspondances entre le monde matériel et le monde spiri
tuel (1). Au Moyen Age, on le sait, « une chose ... est symbole
et signe d'une réalité plus profonde, ... elle annonce et ... s
ignifie autre chose » (Gilson). La symbolique animale est une
pièce d'un système plus vaste qui comprend les symboliques
des sons, des couleurs, des odeurs, des objets, etc., et elle entre
en relation avec les symboliques végétale et minérale pour
composer une méthode d'interprétation des signes « naturels »
(animaux, végétaux, minéraux sont autant de miroirs de la
nature).
Tout en s 'inscrivant dans cette tradition, le bestiaire de
l'âge baroque se distingue des bestiaires médiévaux par un
certain nombre de traits spécifiques, la sélection et l'appau
vrissement du répertoire animal, l'atténuation du dualisme (le
Bien vs le Mal, Bestiaire de Dieu vs Bestiaire de Satan), bien
que l'on note la persistance d'un bestiaire moralisé, et l'aban
don de l'interprétation théologique au profit d'une lecture pro
fane.
Si la poésie néo-pétrarquiste et baroque est une poésie sans
objets, abstraite, dans laquelle l'image est toujours, sinon « in
tellectuelle », du moins en voie de conceptualisation, il n'est
guère étonnant que l'un

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