Chungking Express de Kar-Wai Wong
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Fiche produite par le Centre de Documentation du Cinéma[s] Le France.
Site : abc-lefrance.com

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Nombre de lectures 90
Langue Français

Extrait

Chungking express
Chongqing senlinF de Wong Kar-wai
FICHE FILM
Fiche technique
Hong-Kong - 1994 - 1h37
Réalisateur :
Wong Kar-wai
Scénario :
Wong Kar-wai
Musique :
Frankie Chan
Roel A. Garcia
Interprètes :
Brigitte Lin Chin-hsia Résumé Critique
(La femme sans nom)
Le récit raconte deux histoires successives Bien entendu, les parois entre les deux fic-
Takeshi Kaneshiro
et chacune d’elles tresse deux trajectoires : tions sont poreuses. Une multiplicité d’élé-
(Matricule 223/Ho Chi-wu) d’abord celle d’un jeune policier (le matri- ments trouvent leur correspondance d’une
cule 223) et d’une criminelle qui, à l’issue partie à l’autre. Des objets circulent, lesTony Leung Chiu-wai
d’une nuit particulièrement agitée, parta- destins de chaque personnage présentent(Matricule 663)
gent quelques heures de solitude dans une de frappantes similitudes, des plus ano-
Valérie Chow chambre d’hôtel ; puis, celle d’un autre dines (le goût des chief salads) aux plus
(L'hôtesse de l'air) policier (matricule 663) et d’une jeune ser- intimes (le même rapport au sentiment
veuse qui s’immisce dans son appartement amoureux et la confrontation à ses
à son insu afin de le réorganiser à sa guise. impasses).(…)
(…) Tour à tour, chaque personnage prend
en charge le récit et l’accompagne de sa
voix-off : Heureusement, ce mode de narra-
tion ne s'apparente jamais à une technique
savante, mais plutôt à un look in progress,
prenant le risque de sa propre dissolution à
force d’être fragmenté et polyphonique.
L E F R A N C E
1D O C U M E N T S
Wong Kar-wai parvient ainsi à préserver (…) L’enchevêtrement des points de vue Entretien avec Wong Kar-wai
un sentiment d’aléatoire et de précarité, (les deux filles et les deux garçons
comme si le récit s’improvisait sous nos s’expriment tour à tour en voix off, le
Chungking express a une structure
yeux et avançait de façon réellement chassé-croisé des destins autour du
binaire très intéressante : il y a deux flics
hasardeuse. Midnight Express (un snack de
plaqués, deux filles qui s’appellent May,
Bien entendu, la mise en scène est pour Chungking House, haut lieu touristique
deux scènes où un homme masse les pieds
beaucoup dans cette impression de de Hong Kong) ainsi que la continuité
d’une femme, deux filles en perruque blon-
vitesse et de contingence. Tout se passe visuelle entre les deux parties renfor-
de, deux hôtesses de l’air...
comme si les personnages étaient suivis cent encore les nombreux effets d'écho
Ce fut totalement inconscient. Parce
dans tous leurs déplacements par une et de symétrie. La valse des objets, qui
qu’au début, je voulais raconter trois
équipe de MTV particulièrement allu- accompagne ce diptyque polyphonique,
histoires. Puis je me suis rendu compte
mée. La caméra redouble, amplifie ou donne limpression d'une seule et même
que la première histoire faisait à elle
retravaille systématiquement tous les histoire d’amour déçu où les gestes des
seule la moitié du film, donc je me suis
mouvements des acteurs. (…) uns trouveraient leur prolongement dans
limité à deux. D’autre part, j'écrivais le
les réactions des autres. L’esthétique du
scénario au fur et à mesure du tournage.
(…) L'espace est morcelé et déréalisé clip n’est pas loin, mais l’authenticité et
On tournait une scène, et j’écrivais la
par une avalanche de raccords irration- la justesse de ces jeunes en proie aux
suivante le lendemain. Ce n’est qu’au
nels. En multipliant les angles de prise affres de la passion ajoutent un supplé-
moment du montage que j’ai réalisé la
de vue, les décadrages fébriles, les ment d’âme à la fascination exercée par
présence de cette structure double.
variations sur la vitesse de défilement les images d’une incontestable beauté
(accélérés, ralentis), Wong Kar-wai met plastique.(…)
ll y a des moments très forts et originaux
au point une syntaxe cinématographique Comme dans Days of being wild, son
dans Chungking express. Par exemple
impure, empruntant de façon évidente à deuxième long métrage, Wong Kar-wai
l’homme (Takeshi Kaneshiro) qui achète
la pub, au clip et au reportage télévisé, brosse le portrait déchirant d'une jeu-
des monceaux de boîtes de conserves
privélégiant le mouvement, I’élan ryth- nesse en quête d’identité (voir la multi-
d‘ananas, ou la fille (Faye Wang) qui réor-
mique sur le figuré (certains plans sont à plication des miroirs qui renvoient les
ganise, détail après détail I’appartement
peine lisibles). Ce filmage en ébullition personnages à leurs interrogations tout
du second flic (Tony Leung).
n’en demeure pas moins profondément en démultipliant leurs reflets) sans se
L’idée des boîtes de conserves vient d’une
cohérent et finalement beaucoup moins soucier des sempiternelles conventions
considération pratique. On voulait tourner
formaliste qu’on serait d’abord tenté de psychologiques. Son approche behavio-
le film le plus vite possible avec le moins
le penser. Il y a même une correspon- riste est cependant radicalement oppo-
d’éclairage possible. La plupart des scènes
dance très forte entre une forme tra- sée à la démarche des jeunes réalisa-
avaient lieu la nuit, donc l’endroit le plus
vaillant sur le brouillage, la saturation, teurs français qui abordent les mêmes
commode pour tourner était les "conve-
I’exaspération et un regard d’une grande thèmes. A l'espèce de vide existentiel
nience stores" (petites épiceries qui restent
pertinence sur l’individu moderne, lar- qui détache leurs fictions de toute réali-
ouvertes toute la nuit). Et dans ces conve-
gué dans un espace urbain laby- té sociale, il préfère l'expression d’un
nience stores qu’est-ce qu'on peut ache-
rinthique, à la fois chatoyan, sensuel romantisme désenchanté qui poétise le
ter ? Plein de boîtes de conserves. C’est
mais profondément désincarné. quotidien pour mieux s’accrocher au
de là qu’est venue l’idée. Par ailleurs, ce
En découpant et recomposant par le mirage de l’amour. Sur le fond, il s'agit
que je trouvais ironique, c’est que ces
montage chaque déplacement des toujours du même constat désespéré sur
boîtes destinées à préserver la fraîcheur
comédiens, la mise en scène invente la difficulté de communiquer, mais la
d’un aliment aient une date-limite. Même
une sorte de ballet mécanique des mou- mise en scène bouillonnante et pleine
la fraîcheur peut être périmée. En ce qui
vements humains, une chorégraphie où de vie du réalisateur chinois donne un
concerne la seconde partie, la fille dans
chaque geste devient abstrait, perd sa tour fatalement plus séduisant à l’âpreté
l’appartement, c’est parce que la plupart
fonctionnalité au profit d’une valeur de son discours.
des gens nourrissent une curiosité secrète
purement musicale. Philippe Rouyer
en ce qui concerne l'intimité des autres,
Jean-Marc Lalanne Positif (Avril 1995)
rêvent de pénétrer chez eux sans être vus,
Cahiers du Cinéma n°410
pour découvrir qui ils sont, ce qu’ils font...
Avril1995
Il y a des moments où vous ralentissez
l’image, où l’on a l’impression que ce
temps lui-même devient visqueux, moite
L E F R A N C E
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Fax : 77.25.11.83D O C U M E N T S
cmnme l’atmosphère de ces nuits d’été Filmographie
et que cela communique la lourdeur des
corps qui essaient, mais sans succès de
As tears go by 1989
communiquer.
Il y a un truc que j’ai lu : "pour montrer
Days of being wild 1991
le changement, il faut utiliser des
choses immortelles". Le temps passe,
Dong xie xi du 1994
les gens changent, mais il y a beaucoup
Ashes of times
de choses qui ne changent pas. Peut-
être la raison pour laquelle je m’intéres-
Chongquing senlin 1994
se tant au temps c’est que j’ai toujours,
Chungking express
en tant que cinéaste, des délais à res-
pecter. Mais en dépit de tout cela, il y a
bien une chose qui ne change pas, c’est
le désir qu’ont les gens de communiquer
avec les autres.
Propos recueillis par Bérénice Reynaud
Cahiers du Cinéma n°490
Avril 1995
Le

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