Toutes les nuits de Green Eugene
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Fiche produite par le Centre de Documentation du Cinéma[s] Le France.
Site : abc-lefrance.com

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Langue Français

Extrait

FICHE FILM
Toutes les nuits
www.abc-lefrance.com
D O C U M E N T
dÕinventer des personnages. et de tiss les fils de leurs histoires, puis de nou enrouler sur la pelote de leurs destin croisÈs, il sait faire passer le sentimen tÈnu du passage du temps. Tout cel accompagnÈ par un talent de filmag Ètonnant, dont les maÓtres mots seraien rigueur, dÈpouillement, simplicitÈ nÈcessitÈ. Serge Kaganski Les Inrockuptibles- 28 mars 200
Toutes les nuitsest le beau film dÕu chemin ‡ prendre, dÕun mystËre ‡ pe cer, dÕune obscuritÈ ‡ lever. MystËr sexuel du corps dÕune femme (la premi re femme du film, vue nue dans un source, sÕappelle la Sauvage), mystËr plus profondÈment charnel de lÕincarn tion. La prostituÈe, qui est le seul corp de femme que connaÓtra Jules, cite l nom de Claudel, celui-l‡ qui rÈpÈta qu la possession physique est le premie acte de la dÈpossession, le premie geste pour se dÈlivrer du poids et mon ter vers l'esprit. Jules fait le chemin d se dÈlivrer du corps, c'est pourquoi il n vieillit pas au fil des ans, quand Henri qui se frotte au rÈel, acquiert maturitÈ e moustache. Les deux ne sont d'ailleur pas filmÈs de la mÍme faÁon par Green Jules, marcheur aux cheveux longs, es volontiers angÈlisÈ, posÈ comme un visi teur solitaire et dÈsoccupÈ au milieu de plans, quand Henri est bien plus souven filmÈ dans le feu de l'action et du grou pe. Les autres personnages aussi, on le rencontre par les pieds. Notammen Emilie (Christelle Prot) qui quitte so mari pour Henri, quitte Henri, Ècrit Jules, lui demande : avons-nous u corps ?, s'isole dans une ferme, crois un autre Jules qui a les stigmates d Christ, couche avec lui. Ne rÈsout jam
cette question : qu'est-ce que je fai avec mon enveloppe de chair ? Les pied ont aussi ce sens-l‡ : ils dÈsignent l monde de l'ici-bas, Èvoquent la statio debout, la tension vers le haut, le dÈsi d'ÈlÈvation. A l'opposÈ, il y a le visages. Il est remarquable de voir com bien Green se concentre sur ces deu extrÈmitÈs, polarisant le film sur son ax vertical, rÈsumant ainsi la contradictio qui assaille chacun des personnages : l terre ou le ciel ? A un seul moment, l corps entier acquiert une importance mais c'est une heure nÈgative : dans u appartement de New York, Henri e Emilie assistent au dÈlitement de leu amour (prÈvisible puisque Henri arriv dans le Nouveau Monde avec le mÍmes chaussures que le mari). Henri joue avec le chat, Emilie s'enthousiasm pour les ÈvÈnements de Mai 68 et s plante devant la tÈlÈ. Ils sont devenu des assis. Il y a l‡ un Ètat des corps plu proche d'Eustache que de Bresson, un apathie propre ‡ qui s'embourbe. L sÈquence est trËs belle, d'autant qu New York n'est prÈsent que par les son d'ambiance. EugËne Green, qui vient d thÈ‚tre, a un sens de l'Èconomie extrÍ mement efficace qui lui fait figurer Mai avec seulement trois manifestants e deux CRS. Au vrai, une telle reprÈsenta tiona minimade l'Histoire n'est pas for cÈment liÈe au thÈ‚tre (cf les films d Planchon ou de ChÈreau). Elle singulari se bien plus ce qu'on pourrait appeler u rÈcit catholique du passÈ (penser Lancelotde Bresson,Non ou la vain gloire de commanderd'Oliveira L'Annonce faite ‡ Mariede Cuny). L foi dans la prÈsence et dans le signe es si forte (ÒSouviens-toi, souviens-toi d signe !Ó, Claudel) qu'il n'y a pas besoi d'en rajouter : un CRS vaut pour tous le autres. De signes,Toutes les nuitsen regorge comme de fenÍtres dans la nuit. La pre miËre est celle o˘ Henri etJules cher chent ‡ voir la Sauvage mais un chat animal du Malin, leur bondit dessus. Il
SALLE D'ART ET D'ESSAI C L A S S … ER E C H E R C H E 8 ,R U ED EL AV A L S E 42100 SAINTETIENNE 04.77.32.76.96 R…PONDEUR : 04.77.32.71.71 Fax : 04.77.32.07.09
bougie, un vitrail, et enfin la fenÍtre ÈclairÈe de la fille d'Emilie et Henri qui est aussi bien un ange. Symboliquement, les fenÍtres n'ouvrent jamais sur un autre espace. On ne voit pas l'autre cÙtÈ, elles sont les limites entre le connaissable et l'autre monde, mystÈ-rieux, spirituel. Mais comment accÈder l‡-bas ? Par la parole peut-Ítre, dont le statut est essentiel. Non seulement, les personnages s'Ècrivent beaucoup ; mais les dialogues sont littÈraires et la dic-tion suprÍmement travaillÈe, n'Èvitant aucune liaison, et tant pis pour l'eupho-nie. Car compte avant tout le souci de la continuitÈ : il faut que la parole fasse corps avec l'existence continue du monde, qu'il n'y ait pas de rupture. De ce point de vue, le montage de Green est extrÍmement fidËle ‡ son projet d'ensemble. Les plans commencent sou-vent avant (finissent souvent aprËs) le moment de l'acte, parce que le monde excËde les personnages. (Et montrer un personnage d'abord par les pieds, c'est aussi montrer comment quelque chose excËde son Ítre, lui Èchappe.) Mais le montage sait aussi Ítre trËscut, coller ‡ la parole, filmer celui qui parle et non celui qui Ècoute, changer de visage aussi vite que les gens se rÈpondent. Car c'est la parole qui est le mystËre, c'est le verbe qui, ‡ lÕorigine, s'est fait chair. Toutes les nuits, de ce fait, interroge beaucoup la poÈsie. Le film accorde une place importante ‡ la constellation Baudelaire (qu'Henri cite avant de cou-cher avec Emilie), Rimbaud (sur qui Jules Ècrit une piËce), Verlaine (que Jules, dans l'universitÈ post 68, perÁoit ‡ contre-courant comme un poËte de la foi), Claudel enfin. Mais pourquoi cette poÈsie-l‡ ? Sans doute, parce qu'elle trace un chemin qui mËne la parole du quotidien (projet baudelairien de se tourner vers le bas) jusqu'au ÒTransport de cette mesure sacrÈeÓ (Claudel). Dans cette optique se comprend l'ironie mor-dante (et hilarante) dont fait preuve '
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et fÈministes. La femme, qui dit un romane plutÙt qu'un roman, crÈe un salonne de thÈ, et soutient qu'u homme ne peut occuper le Je de Louis LabÈ, est une ennemie parce qu'elle n fait pas confiance au plein de la Parole qu'elle remet en cause le langage qui offre l'accËs au monde. De la mÍm faÁon, Henri pointe la vanitÈ des dis cours gauchistes des Ètudiants en droit parce que ces jeunes gens sont soute nus financiËrement par qui, sinon l bourgeoisie qu'ils dÈnoncent. Cette foi absolue (et un brin naÔve) en la parol (c'est ‡-dire, au fond, en la transparenc du monde) est peut-Ítre ‡ l'origine d seuI dÈfaut du film : une tendance sur l fin ‡ virer au sulpicianisme, ‡ la moral de la bonne vierge (les plans sur Emili la font un peu trop lourdement innocen te) et du gentil ange. Mais ces rÈserve ultimes g‚chent bien peu d'une si Ètran ge et belle traversÈe de la nuit obscure. StÈphane Bouque Cahiers du cinÈma n∞556 -avril 200
Belle surprise, vraiment, que ce premie long mÈtrage dont l'auteur est totale-ment inconnu au bataillon du cinÈma. NÈ aux Etats-Unis, installÈ en Franc depuis 1969, EugËne Green s'est consa crÈ jusqu'ici au thÈ‚tre. Avec un culot Ètonnant et une passion mÈticuleuse d la littÈrature et de la langue franÁaises comme seuls les Ètrangers en tÈmoi gnent parfois, voil‡ ce qu'il propose : la transposition d'un texte de Flauber dans les annÈes 1967-1979, en tournan le dos ‡ toutes les conventions domi-nantes du cinÈma d'aujourd'hui. Le roman, c'estLa PremiËre Èducatio sentimentale, une Ïuvre de jeunesse qui n'a ÈtÈ publiÈe qu'en 1912, et qui n'a aucun rapport direct avecL'Educatio qu'on dÈcortique au IycÈe. Le film, trËs librement inspirÈ de ce roman, met en scËne deux amis d'enfance, issus d'un village du Midi, et arrivÈs ‡ l'‚ge des possibles, du bac et des premiËre amantes. Henri est plutÙt fonceur ; Jules, contem
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contrechamps stricts et dÈpouillÈs comme on n'en voit plus guËre ou ‡ par-tir de fragments de corps expressifs (les pieds surtout) saisis en gros plan. Quant ‡ la maniËre de figurer tel lieu ou tel ÈvÈnement historique, elle est pour le moins euphÈmique : une sirËne de poli-ce au loin pour New York, un Ïuf sur le casque d'un CRS pour Mai 68, etc. Ces choix auraient pu n'aboutir qu'‡ un exercice de style dandy et vaniteux. Toutes les nuitsest le contraire de cela, et la preuve que l'hyperstylisation peut parfois conduire droit ‡ la vÈritÈ des sentiments. Sans doute parce que, sous une forme savante, EugËne Green carbure au pur romanesque. Les trajec-toires parallËles de Jules et d'Henri et leurs Èchanges de lettres renvoient ‡ un beau thËme littÈraire : I'opposition entre la vie rÍvÈe et la vie vÈcue, entre les dÈceptions de celui qui va de l'avant et les regrets de celui qui reste en arriË-re(É) Louis Guichard ∞ -
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Rencontre avec le rÈalisateur
J'ai mis deux ans ‡ Ècrire le scÈnario, librement inspirÈ deLa PremiËre Èdu-cation sentimentalede Flaubert, que j'ai terminÈ en 1996, sans savoir trop quoi en faire. On m'a dit de le dÈposer au CNC. Le vice-prÈsident du premier collËge Ètait Jacques Rozier qui l'a beaucoup aimÈ. Le scÈnario a Ègalement plu ‡ Philippe Martin, un producteur qui aurait voulu le produire, mais il avait un embouteillage de projets. Puis j'ai commencÈ ‡ faire le tour des producteurs indÈpendants. Au bout de six mois, je n'en trouvais toujours pas, le CNC m'a dit que la meilleure configuration pour moi serait de trouver une boÓte n'ayant fait que des courts-mÈtrages et qui voulait passer au long, pour laquelle le projet serait donc aussi important que pour moi. On m'a prÈsentÈ un jeune producteur, Alain Bellon, qui correspondait ‡ cette situation, qui a lu le scÈnario et a acceptÈ. MalgrÈ un bud-get trËs faible (3 millions de francs), on a dÈcidÈ de faire le film. Tout le monde Ètait en participation. La situation Ètait tellement critique que j'ai refusÈ ma rÈmunÈration pour un vague contrat de participation. Mais, avec une sortie dans une seule salle, j'ai peu d'espoir de gagner de l'argent avec le film.
Bresson m'a marquÈ lorsqu'‡ 19 ans j'ai vuLe Journal d'un curÈ de campagne au cinÈma de la rue Bleeker ‡ la Nouvelle-York (sic). «a m'a bouleversÈ. Si j'avais rÈussi ‡ tourner des films dans les annÈes 70 ou 80, j'aurais sans doute fait une sorte de sous-bressonisme. Maintenant je pense que c'est intÈgrÈ, que Áa fait partie d'une culture avec beaucoup d'autres choses. Il y a des cinÈastes actuels avec qui je me sens des affinitÈs trËs fortes, mais peu sont franÁais. Ce sont surtout avec des cinÈastes asiatiques, portugais. Je rejet-te violemment tout le cinÈma camÈra ‡ l'Èpaule, de mÍme que la vidÈo, avec laquelle, pour moi, il est impossible
faire du cinÈma. «a peut donner de temps en temps un objet qui a une valeur artistique commeViesd'Alain Cavalier, qui est presque le seul ‡ faire quelque chose d'intÈressant avec la vidÈo. C'est une Ïuvre qui n'aurait sans doute pas pu Ítre tournÈe autrement, mais, en mÍme temps, cela reste en marge du cinÈma de fiction, Áa ne peut pas remplacer le cinÈ-ma. Je me sens comme un Martien par rapport aux tentatives de faire du vrai cinÈma en vidÈo. En mÍme temps, je ne pense pas m'Ítre arrÍtÈ dans le temps. C'est vrai que j'ai beaucoup de rÈfÈ-rences cinÈmatographiques de la grande Èpoque du cinÈma, entre 1950 et 1980. J'ai aussi des affinitÈs avec des cinÈastes chinois ou japonais d'aujour-d'hui, comme Hou Hsiao-hsien.
Le travail sur la diction est le contraire de ce que je fais avec le thÈ‚tre baroque. Je voulais quÕil y ait cette diction spÈcial car je voulais Èviter tout ce qui relËve du tÈ‚tre psychologique que je dÈteste. CÕÈtait une faÁon dÕimposer aux acte une sorte de masque pour quÕil nÕy aucune tentative dÕavoir des intonation dites rÈalistes, qui de toute faÁon ne le sont pas. JÕai fait du thÈ‚tre baroque o˘ la dÈcl mation est trËs musicale. CÕest presqu du chant. Ce sont les mÍmes intonations que dans mon film mais poussÈes jusquÕaux limites de leurs possibilitÈ Pour le film, je leur demandais le contrai-re : de retenir pour que Áa devienne intÈ-rieur, comme si, en parlant ‡ lÕautre pe sonnage, ils parlaient ‡ eux-mÍmes. Jean-SÈbastien Chauvin Cahiers du cinÈma n∞556 - avril 2001
Le rÈalisateur
NÈ en AmÈrique du Nord, EugËne Green sÕest installÈ en France en 1969. AprË des Ètudes en lettres et histoire de lÕa ‡ Paris, il a crÈÈ en 1977 le ThÈ‚tre de
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laquelle il poursuit une recherche sur le langage thÈ‚tral baroque, quÕil cherche ‡ faire revivre pour le public moderne, ainsi que sur des alternatives pour le thÈ‚tre contemporain. Parmi les spectacles baroques quÕil met en scËne avec le ThÈ‚tre de la Sapience, se distinguent trois piËces de Corneille,La suivante(Avignon, Paris, 1999),Le Cid(Avignon, Paris, 1995) etLa place royale(Avignon, Paris, 1999). En 1999, il met en scËne, pour le ThÈ‚tre National de Prague,Castor et Polluxde Rameau, au ThÈ‚tre des Etats. Il est directeur artistique des Èditions 1995 et 1996 dÕun festival ‡ Paris, le ÒMai baroqueÓ, comportant des spec-tacles, des concerts, des lectures et des confÈrences. On le voit souvent comme interprËte dans des spectacles de poÈsie ou de textes littÈraires, seul, ou avec des musiciens. Sa discographie comporte une oraison funËbre Ècrite pour Charles III de Lorrain (avec leRequiemde Charles dÕHelfer par A sei voci, AsirÈe Auvidis), des fables de La Fontaine (Sonpact) et des poËmes de ThÈophile de Viau (avec piËces de thÈor-be de Robert de VisÈe par Vincent Dumestre, Alpha). Ecrivain, il est lÕauteur de cinq piËces de thÈ‚tre en vers et de recueils de poËmes. Il rÈdige actuellement, pour les Èditions DesclÈe de Brouwer, un livre, La parole baroque. En 1999 il rÈalise, avec le concours du Centre National de la CinÈmatographie, son premier film,Toutes les nuits, dont il a Ègalement Ècrit le scÈnario.
Filmographie
Documents disponibles au France
Cahiers du cinÈma n∞556 - avril 2001 Positif n∞483 - mai 2001
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