Et de voyager !
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Œuvres de Chapelle et de BachaumontVoyage en Provence et en LanguedocVOYAGE DE CHAPELLE ET DE BACHAUMONTC’EST en vers que je vous écris,Messieurs les deux frères1, nourrisAussi bien que gens de la ville ;Aussi voit-on plus de perdrixEn dix jours chez vous qu’en dix milleChez les plus friands de Paris.Vous vous attendez à l’histoireDe ce qui nous est arrivéDepuis que, par le long pavéQui conduit aux rives de Loire,Nous partîmes pour aller boireLes eaux, dont je me suis trouvéAssez mal, pour vous faire croireQue les destins ont réservéMa guérison et cette gloireAu remède tant éprouvéEt par qui, de fraîche mémoire,Un de nos amis s’est sauvéDu bâton à pomme d’ivoire.Vous ne serez pas frustrés de votre attente, et vous aurez, je vous assure, uneassez bonne relation de nos aventures : car monsieur de Bachaumont, qui m’asurpris comme j’en commençois une mauvaise, a voulu que nous la fissionsensemble ; et j’espère qu’avec l’aide d’un si bon second, elle sera digne de vousêtre envoyée.Chapelle.> Contre le serment solennel que nous avions fait, monsieur Chapelle et moi, d’êtresi fort unis dans le voyage, que toutes choses seroient en commun, il n’a pas laissé,par une distinction philosophique, de prétendre en pouvoir séparer ses pensées ;et, croyant y gagner, il s’étoit caché de moi pour vous écrire. Je l’ai surpris sur lefait, et je n’ai pu souffrir qu’il eût seul cet avantage. Ses vers m’ont paru d’unemanière si aisée, que, m’étant imaginé qu’il étoit bien facile d’en faire de même,Quoique malade et paresseux,Je n’ai pu m’empêcher de mettreQuelques uns des miens avec eux.Ainsi le reste de la lettreSera l’ouvrage de tous deux.Bien que nous ne soyons pas tout à fait assurés de quelle façon vous aurez traiténotre absence, et si vous méritez le soin que nous prenons de vous écrire et devous rendre ainsi compte de nos actions, nous ne laissons pas néanmoins de vousenvoyer le récit de tout ce qui s’est passé dans notre voyage, si particulier que vousen serez assurément satisfaits. Nous ne vous ferons point souvenir de notre sortiede Paris, car vous en fûtes témoins, et peut-être même que vous trouvâtes étrangede ne voir sur nos visages que des marques d’un médiocre chagrin. II est vrai quenous reçûmes vos embrassements avec assez de fermeté, et nous vous parûmessans doute bien philosophesDans les assauts et les alarmesQue donnent les derniers adieux ;
Mais il fallut rendre les armesEn quittant tout de bon ces lieuxQui pour nous avoient tant de charmes ;Et ce fut lors que de nos yeuxVous eussiez vu couler des larmes.Deux petits cerveaux desséchés n’en peuvent pas fournir une grande abondance,aussi furent-elles en peu de temps essuyées, et nous vîmes le Bourg-la-Reine d’unœil sec. Ce fut en ce lieu que nos pleurs cessèrent et que notre appétit commença.Mais l’air de la campagne l’avoit rendu si grand dès sa naissance, qu’il devint tout àfait pressant vers Antoni et presque insupportable à Long-Jumeau. Il nous futimpossible de passer outre sans l’apaiser auprès d’une fontaine, dont l’eauparoissoit la plus claire et la plus vive du monde.Là deux perdrix furent tiréesD’entre les deux croûtes doréesD’un bon pain rôti, dont le creuxLes avoit jusque là serrées,Et d’un appétit vigoureuxToutes deux furent dévoréesEt nous firent mal à tous deux.Vous ne croirez pas aisément que des estomacs aussi bons que les nôtres aienteu de la peine à digérer deux perdrix froides ; voilà pourtant, en vérité, la chosecomme elle est. Nous en fûmes toujours incommodés jusqu’à Saint-Euverte, oùnous couchâmes, deux jours après notre départ, sans qu’il arrivât rien qui mérite devous être mandé. Vous savez le long séjour que nous y fîmes, et vous savez encoreque M. Boyer, dont tous les jours nous espérions l’arrivée, en fut la cause. Des gensqu’on oblige d’attendre et qu’on tient si long-temps en incertitude ont apparemmentde méchantes heures ; mais nous trouvâmes moyen d’en avoir de bonnes dans laconversation de M. l’évêque d’Orléans2, que nous avions l’honneur de voir assezsouvent, et dont l’entretien est tout à fait agréable. Ceux qui le connoissent vousauront pu dire que c’est un des plus honnêtes hommes de France, et vous en serezentièrement persuadés quand nous vous apprendrons qu’il aL’esprit et l’âme d’un Delbéne,C’est-à-dire, avec la bonté,La douceur et l’honnêteté,Cette vertu mâle et romaineQu’on respecte en l’antiquité.Nos soirées se passoient le plus souvent sur les bords de la Loire, et quelquefoisnos après-dinées, quand la chaleur étoit plus grande, dans les routes de la forêt quis’étend du côté de Paris. Un jour, pendant la canicule, à l’heure que le chaud est leplus insupportable, nous fûmes bien surpris d’y voir arriver une manière de courrierassez extraordinaire,Qui, sur une mazette outréeBronchant à tout moment, trottait.D’ours sa casaque étoit fourrée,Comme le bonnet qu’il portait ;Et le cavalier rare étoitTout couvert de toile cirée,Qui, par le soleil retiréeEt fondant, partout dégouttoit.Ainsi l’on peint dans des tableauxUn Icare tombant des nues,Où l’on voit dans l’air répanduesSes ailes de cire en lambeaux,Par l’ardeur du soleil fondues,Choir autour de lui dans les eaux.La comparaison d’un homme qui tombe des nues avec un qui court la poste vousparoîtra peut-être bien hardie ; mais si vous aviez vu le tableau d’un Icare, que noustrouvâmes quelques jours après dans une hôtellerie, cette vision vous seroit venuecomme à nous, ou tout au moins vous sembleroit excusable. Enfin, de quelquefaçon que vous la receviez, elle ne sauroit paroître plus bizarre que le fut à nos yeux
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