Arbres et herbe. Croyances et usages rattachés aux origines de Rome - article ; n°1 ; vol.104, pg 339-371
34 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Arbres et herbe. Croyances et usages rattachés aux origines de Rome - article ; n°1 ; vol.104, pg 339-371

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
34 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité - Année 1992 - Volume 104 - Numéro 1 - Pages 339-371
Germaine Guillaume-Coirier, Arbres et herbe. Croyances et usages rattachés aux origines de Rome, p. 339-371.
De nombreux végétaux sont rattachés aux «origines» de Rome. Chêne donnant naissance aux humains, bois antiques par l'intermédiaire desquels se révèlent les dieux, arbres divers liés à des épisodes de la vie de Romulus dont la longue vitalité est mise en accord avec celle de la Ville. Les deux premiers rois légendaires usent respectivement d'espèces relatives soit à la victoire (laurier, myrte), soit au culte (olivier, érable, hêtre). Néanmoins le laurier, qui dans la vie religieuse l'emporte par l'importance et le nombre de ses emplois, pourrait anciennement avoir été la marque d'un roi-guerrier-prêtre. Quant à la uerbena des fétiaux, herbe provenant de l'auguraculum de l'arx, très tôt employée lors d'un traité et pour la première phase d'une déclaration de guerre, elle est à comprendre comme un signe de paix; elle pourrait avoir été cueillie par les augures lors d'une prise d'auspices, devenant ainsi d'heureux présage.
33 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1992
Nombre de lectures 33
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Germaine Guillaume-Coirier
Arbres et herbe. Croyances et usages rattachés aux origines de
Rome
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité T. 104, N°1. 1992. pp. 339-371.
Résumé
Germaine Guillaume-Coirier, Arbres et herbe. Croyances et usages rattachés aux origines de Rome, p. 339-371.
De nombreux végétaux sont rattachés aux «origines» de Rome. Chêne donnant naissance aux humains, bois antiques par
l'intermédiaire desquels se révèlent les dieux, arbres divers liés à des épisodes de la vie de Romulus dont la longue vitalité est
mise en accord avec celle de la Ville. Les deux premiers rois légendaires usent respectivement d'espèces relatives soit à la
victoire (laurier, myrte), soit au culte (olivier, érable, hêtre). Néanmoins le laurier, qui dans la vie religieuse l'emporte par
l'importance et le nombre de ses emplois, pourrait anciennement avoir été la marque d'un roi-guerrier-prêtre. Quant à la uerbena
des fétiaux, herbe provenant de l'auguraculum de l'arx, très tôt employée lors d'un traité et pour la première phase d'une
déclaration de guerre, elle est à comprendre comme un signe de paix; elle pourrait avoir été cueillie par les augures lors d'une
prise d'auspices, devenant ainsi d'heureux présage.
Citer ce document / Cite this document :
Guillaume-Coirier Germaine. Arbres et herbe. Croyances et usages rattachés aux origines de Rome. In: Mélanges de l'Ecole
française de Rome. Antiquité T. 104, N°1. 1992. pp. 339-371.
doi : 10.3406/mefr.1992.1760
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-5102_1992_num_104_1_1760GERMAINE GUILLAUME-COIRIER
ARBRES ET HERBE
CROYANCES ET USAGES RATTACHÉS AUX ORIGINES DE ROME
Lorsqu'ils remontent au plus loin de leur histoire, les auteurs latins
se plaisent à évoquer l'emplacement de la future Ville : des marais et des
prés inondables, des pâturages boisés et des broussailles, des forêts plus
ou moins clairsemées. Ce cadre se peuple. Les premiers hommes y appar
aissent. Puis un roi légendaire s'installe. Quelques générations, et des
souverains s'y succèdent aux tempéraments et aux intérêts antithétiques.
Dans ces diverses phases qui marquent les débuts de Rome, la tradition
accorde une remarquable importance à maints végétaux qui n'ont rien de
commun avec ceux dont use comme nourriture une humanité démunie
ou qui servent au bétail1. Les anecdotes foisonnent sur quelques arbres et
arbustes en pied groupés ou isolés, sur la qualité de leur bois, leurs
rameaux coupés présentés au naturel ou transformés en couronnes, sur
certaines fruges, sur l'herbe - une herbe particulière. Description pittores
que d'un passé qui serait pourvu d'existence par le truchement d'une
végétation variée? Selon les sources écrites qui vont du Ier siècle av. J.-C.
au IVe siècle de notre ère, ces plantes d'un temps lointain comptent autre
ment que par elles-mêmes; elles ont un sens inséparable du développede YUrbs, elles ne se comprennent que par référence, valeur annonc
iatrice.
1 Le discours sur ceux qui sont consommables, très réduit, est un aspect du
lieu commun du dénuement des premiers âges où genus humanum solis errabat in
agris (. . .); silua domus fuerat, cibus herba, cubilia frondes (Ον., A.A., II, 473-475).
Les hommes ne mangent alors que glands, herbe, arbouses et mûres (Lucr., V, 933-
944; Ον., Am., Ill, 10, 9-10; F., II, 293; IV, 369-370; 395-400). La zone où s'élèvera
Rome ne se distingue en rien de tous les autres nemora atque cauos montis siluas-
que des origines (Lucr., V, 955); endroits inchangés depuis toujours - uastae turn in
locis solitudines erant -, les alentours consistent en saltus, situas paludesque, en col
les campique (T.-L., I, IV, 6-8; V, LUI, 9; LIV, 3).
MEFRA - 104 - 1992 - 1, p. 339371. 340 GERMAINE GUILLAUME-COIRIER
Aussi nous faudra-t-il travailler à partir d'une image totalement arti
ficielle, repensée, recréée, des végétaux des «origines», en excluant ceux
qui sont destinés à une quelconque alimentation. Des discours aux tonali
tés diverses seront à déchiffrer : l'évocation facile et répétée d'un autre
fois illusoire, la curiosité envers une histoire recomposée selon une logi
que propre, l'interrogation sur un très vieux fonds romain réel mais insai
sissable et, unissant le tout, le rapport constamment établi avec des usa
ges tantôt assez proches et tantôt contemporains des textes qui en font
état.
L'arbre senti comme force
Si Tite-Live dans sa préface rejette les poeticae fabulae qui en mêlant
le merveilleux aux actions humaines tendent à embellir les primordia
urbium, ce qui discrédite une histoire éloignée déjà incertaine (praef. 6-7),
l'épopée s'en nourrit2. Dans des temps très reculés, explique Evandre à
Énée tandis qu'ils remontent du Tibre à la citadelle de Pallantée, les
emplacements voisins - omnia circum, haec nemora - étaient habités par
des Faunes et des Nymphes indigènes que côtoyait une race de mortels
truncis et duro robore nata (Verg., Α., VIII 310-315), race «née des troncs
et en particulier du chêne dur», ou mieux par hendiadyn «née des
du chêne dur». Selon Servius, ces malheureux s'extirpaient des arbres
dont ils avaient fait leur demeure comme d'un autre corps auquel dans
leur grossièreté ils ressemblaient, et ils nourrissaient leurs enfants de
glands3. D'après cette interprétation, l'Arcadien ne tiendrait que le di
scours habituel sur les premiers âges rudes que les siècles d'or de Saturne
vont bouleverser de façon spectaculaire. Pourtant, l'idée d'une relation
organique entre le végétal et l'humain est à retenir si nata se comprend
dans le sens le plus simple. Dès l'origine, sur l'emplacement prédestiné
existent des hommes particuliers puisque, contrairement aux autres géné
ralement montrés comme sortis de la terre, de l'eau, des pierres - dernier
cas que retient Virgile dans les Géorgiques -, eux sont issus du chêne rou-
2 Aucun établissement préhistorique, aucune légende des origines n'intéresse
Tite-Live qui reprend le thème de la situation privilégiée de la future Ville : R. M.
Ogilvie, A Commentary on Livy, BooL· 1-5, Oxford, 1965, p. 26-27; 747-749.
3 TRUNCIS ET DURO ROBORE NATI hoc figmentum ortum est ex antiqua
hominum habitatione, qui ante factas domos aut in cavis arboribus aut in speluncis
manebant. qui cum exinde egrederentur aut suam educerent subolem, dicti sunt inde
procreari (Serv., Ad Aen., VIII, 315). ET USAGES RATTACHÉS AUX ORIGINES DE ROME 341 CROYANCES
vre4. Or cette variété est connue pour son exceptionnelle densité, sa résis
tance, la duritia de son cœur une fois dépouillé de l'aubier (Pl., N.H.,
XVI, 204; 207), si bien qu'au figuré robur signifie «force», «vigueur».
De Lucrèce, pour qui la tellus (. . .) dura engendre un genus huma-
num (. . .) durius à l'organisme solide et aux mœurs rudes (V, 925 sq.),
l'auteur de l'Enéide retient un comportement primitif et sans règles -
neque mos neque cultus (A-, VIII, 316 sq.). Mais il se souvient nécessaire
ment d'un précédent grec où les hommes ont des arbres pour géniteurs :
selon Hésiode en effet, la génération de ceux qui utilisent le bronze est
«née des frênes» (O., 145); ce bois léger et souple servant à fabriquer les
lances meurtrières, une telle filiation explique leur caractère redoutable,
leur attirance pour la guerre et la démesure 5. Les premiers humains « nés
des troncs du chêne dur» à l'emplacement de ce qui sera Rome sont ainsi
dotés dans l'épopée virgilienne d'une vertu prometteuse même si leurs
descendants sont destinés à rester quelque temps grossiers, combattifs,
mal organisés. L'idée sous-jacente est que, des générations plus tard, les
Romains des temps historiques - et plus encore les contemporains du
poète - leur doivent résistance et force morale.
Pour la période vague qui dure d'Énée à Romulus et dans des textes
de genres divers, une autre forme de relation entre l'arbre et l'homme est
suggérée à propos du cognomen de Siluius. Porté selon les uns par un fils
posthume d'Énée, pour d'autres par son petit-fils,

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents