Entre Europe et Orient Ceuta et Melilla - article ; n°1 ; vol.59, pg 164-180
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Revue du monde musulman et de la Méditerranée - Année 1991 - Volume 59 - Numéro 1 - Pages 164-180
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 50
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Bernabe Lopez Garcia
Entre Europe et Orient Ceuta et Melilla
In: Revue du monde musulman et de la Méditerranée, N°59-60, 1991. pp. 164-180.
Citer ce document / Cite this document :
Lopez Garcia Bernabe. Entre Europe et Orient Ceuta et Melilla. In: Revue du monde musulman et de la Méditerranée, N°59-60,
1991. pp. 164-180.
doi : 10.3406/remmm.1991.2679
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remmm_0997-1327_1991_num_59_1_2679au xv-' sitxie Ccuta
Ceuta durant le siège de Muley Ismael Bernabé LOPEZ GARCIA
ENTRE EUROPE ET ORIENT
CEUTA ET MELILLA*
Communes d'Europe, comme l'indiquent les panneaux à côté des postes frontiè
res, territoires occupés ou spoliés selon les termes de la presse et des partis politi
ques marocains, Ceuta et Melilla sont deux villes méditerranéennes et « espagnol
es» en plein Maghreb. Elles sont aujourd'hui l'objet d'une polémique passionnée
entre nationalismes, polémique qui ne cesse de rebondir depuis, au moins, l'ind
épendance du Maroc.
Or le statut particulier de ces deux villes ne date pas de l'expansion coloniale :
il lui est largement antérieur, ce qui explique bien des caractères spécifiques.
Histoires de conquête
II faut en effet remonter à 1415, au beau milieu de la guerre civile marocaine
qui marqua le début de la décadence des Mérinides, pour voir tomber Ceuta aux
mains des Portugais. Ville commerçante, elle hébergeait déjà un funduq de mar
chands génois dans son quartier Est, situé sur la colline de l'Almina. Un petit
isthme la séparait du faubourg fortifié d'Alyazira. La conquête de Jean Ier fut la
première d'une série qui, un siècle plus tard, devait aboutir au contrôle des ports
les plus importants de la côte atlantique marocaine par le Portugal.
En 1578, la bataille de l'Oued al-Makhzen, au cours de laquelle périt le roi don
Sebastian alors qu'il essayait d'aider al-Mutawakkil à récupérer son trône, eût pour
conséquence l'incorporation du Portugal et de ses possessions à la couronne d'Espa
gne. Ceuta passa ainsi dans les domaines de Philippe II qui englobaient déjà, sur
RE.M.M.M. 59-60, 1991/1-2 166 / B. Lôpez-Garcia
la côte méditerranéenne d'Afrique, les places de Melilla et Oran. Plus tard encore,
à l'occasion du soulèvement du Portugal en 1640, Ceuta resta fidèle au roi d'Espagne
Philippe IV, ce qui explique en partie qu'au moment de l'indépendance du Por
tugal, en 1668, la ville africaine soit liée à la couronne d'Espagne.
Pour sa part, la conquête de Melilla, ville côtière à mi-chemin entre les confins
des royaumes «wattasi» du Maroc et «abdelwadi» de Tlemcen, fut projetée dès
1494, à l'époque des Rois catholiques, deux ans après la conquête de Grenade,
avec pour objectif l'établissement d'un point d'appui fortifié sur l'autre rive de
la Méditerranée. En septembre 1497, Pedro de Estopinan, Grand argentier de la
maison du Duc de Medinasidonia, débarqua avec 5 000 fantassins et des forces
de cavalerie qui procédèrent à une rapide fortification de l'endroit. Il s'agissait
au départ d'une entreprise privée du Duc. En avril de l'année suivante, un accord
fut passé avec les souverains pour l'approvisionnement à partir de Malaga (et l'entre
tien à charge du Trésor royal) d'une garnison de sept cents soldats : 50 cavaliers,
150 fantassins, 300 arbalétriers, 100 fusiliers, 20 artilleurs, 35 officiers, 40 marins,
auxquels s'ajoutaient 2 prêtres, un médecin, un chirurgien et un apothicaire1.
Presque cinq siècles plus tard, la fonction militaire est toujours essentielle.
Cette conquête, à laquelle il faudrait ajouter l'occupation du Rocher de Vêlez
de la Gomera en* 508 et celle d'Alhucemas en 1673, a fondé, chez les habitants,
de profondes réactions défensives qui subsistent encore de nos jours. La perte tem
poraire (1522-1564) du Rocher de Vêlez, les attaques de Melilla en 1564, 1687,
1696, 1774, ou celles de Ceuta en 1674, 1680, 1694 (début d'un long siège qui
dura en fait jusqu'en 1727), 1782 et 1790, les renforcèrent. On peut en trouver
la trace — côté musulman — dans la littérature consacrée à cette Djihad par des
auteurs comme Abd al-Rahman al-Majdub (mort en 1569), Muhammad Ibn Yaj-
jabsh (mort en 1611) ou Abd al-Hadi Ibn-Tahir al-Hassaini (mort en 1646) qui
se lamentent de ce que « les envahisseurs convoitent votre pays, occupant un vil
lage après l'autre»2. Mais on s'y plaint aussi des dissensions internes qui facilitè
rent la conquête, comme dans ce poème du Mejdub sur Ceuta :
«Sebta, ô pauvre petite et misérable
Toi que voilà campée dans les combinaisons tortueuses!
Nul secours, ni d'ici, ni de là-bas
Sauf du Seigneur Dieu le Très-haut!»3
Le 28 mai 1767, le monarque espagnol Charles III et le marocain Sidi Muham
mad Ben Abdallah signèrent pourtant un traité de paix et de commerce qui mett
ait temporairement fin à ce climat de croisade. Le traité obéissait probablement
à une stratégie espagnole d'alliances en prévision d'un affrontement futur avec
l'Angleterre4. Il définissait la fonction des Présides et leur statut particulier.
L'article 19 stipulait notamment que «les expansions demandées par S. M. Catho
lique dans les quatre présides sont entièrement interdites par la loi». Dès qu'ils
furent pris, leurs Majestés Impériales fixèrent leurs limites, sous la dictée de leurs
talebs et de leurs sages, et jurèrent de ne pas les modifier. D'autre part, les prési
des de Ceuta, Melilla, du Rocher et d'Alhucemas ne devaient pas servir de refuge
pour les Marocains, selon 'l'article 10, ni le Maroc pour les Espagnols déserteurs
des places en question. Les hostilités reprirent néanmoins en 1774, et ne cessè
rent pas jusqu'au nouveau traité de paix, commerce et navigation de 17995, signé
par Charles IV et Muley Sliman. Ce dernier, qui constatait dans l'article 15 la «meil- i
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Entre Europe et Orient : Ceuta et Melilla / 167
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Développement de Ceuta '
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168 / B. Lôpez-Garcia
MER MÉDITERRANÉE
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Les limites de Melilla
d'après A. Bernard (1910)
S.di-CTyrlach Mirsboul Je* / } ftrlsan-Francii
X NN N Terrjioj're Terrjiojre Espag Espagnol
~PUn de Melilla et environs publié par l'Echo ô Oran le 3 3"- Entre Europe et Orient : Ceuta et Melilla / 169
leure harmonie possible entre Ceuta et les Maures frontaliers », rappelait les troubles
continuels qu'avait connu Melilla, « contrairement aux intentions bonnes et ami
cales des deux Hautes Parties contractantes». Aussi le souverain marocain offrait-
il d'«user de tous les moyens que lui dicteraient sa prudence et son autorité pour
obliger ces frontaliers à entretenir les meilleurs rapports », allant jusqu'à autoriser
les autorités espagnoles à utiliser « le canon et le mortier dans les cas où elles seraient
attaquées».
De l'utilité des places, projets d'échanges
Depuis l'époque de Charles III6, on pensa périodiquement à abandonner ces
places fortes, mais ce fut pendant la guerre hispano-française dite d' Independencia
que l'on en vint à l'envisager le plus clairement. Le projet de céder les Présides
mineurs (Alhucemas et Vêlez) au sultan du Maroc fit l'objet d'une étude du Cons
eil de la Guerre et de la Marine, sur proposition de la Junte Centrale, qui est
imait qu'une telle cession pourrait servir à obtenir les céréales et les ressources néces
saires au pays. On envisagea même la possibilité de les vendre au dey d'Alger,
auquel on avait déjà cédé en 1791 les places d'Oran et de Mazalquivir. De son
côté, Joseph Bonaparte pensa aussi à leur cession, en échange de sa reconnaissance
comme Roi d'Espagne par le Sultan.
La question des rochers fut discutée entre février et mars 1811 aux Cortès réu
nies à Cadix. Sur proposition de la Régence, on parla du bien-fondé de leur ali
énation, deux positions s'affrontant : celle des opposants à toute atteinte à l'inté
grité du territoire de la Monarchie, et celle de ceux qui étaient convaincus «de
la nécessité pressante dans laquelle nous nous tr

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