Les études de langue et littérature latines en France dans les vingt dernières années - article ; n°1 ; vol.51, pg 5-20
17 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Les études de langue et littérature latines en France dans les vingt dernières années - article ; n°1 ; vol.51, pg 5-20

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
17 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Mélanges d'archéologie et d'histoire - Année 1934 - Volume 51 - Numéro 1 - Pages 5-20
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1934
Nombre de lectures 36
Langue Français

Extrait

L.-A. Constans
Les études de langue et littérature latines en France dans les
vingt dernières années
In: Mélanges d'archéologie et d'histoire T. 51, 1934. pp. 5-20.
Citer ce document / Cite this document :
Constans L.-A. Les études de langue et littérature latines en France dans les vingt dernières années. In: Mélanges
d'archéologie et d'histoire T. 51, 1934. pp. 5-20.
doi : 10.3406/mefr.1934.7242
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-4874_1934_num_51_1_7242ÉTUDES DE LANGUE LES
ET LITTÉRATURE LATINES EN FRANCE
DANS LES VINGT DERNIÈRES ANNÉES1
L'étude de la langue latine et des œuvres qui l'ont illustrée a tou
jours été en honneur en France. Tout le monde sait quelle activité
lut déployée dans nos monastères, depuis le ixe siècle, pour copier
les manuscrits anciens, ce que fut la participation de nos érudits du
xvie siècle au grand mouvement de la Renaissance, quelle influence
la culture latine, vulgarisée par les collèges de Jésuites, a exercée sur
notre littérature classique. Aujourd'hui, où en sommes-nous? Dans
le mouvement universel qui se produit, depuis une quinzaine d'an
nées, en faveur de l'humanisme, quelle est la contribution de la
France?
Au cours de la révision générale des valeurs à laquelle on a pro
cédé au lendemain de la grande guerre, le patrimoine d'idées que les
Latins nous ont légué est apparu à une foule de bons esprits, dans
tous les pays du monde, comme le pôle autour duquel devait s'orien
ter la pensée des générations nouvelles, sous peine d'être la proie de
la confusion et du désordre, prélude de barbarie. Un tel sentiment
était de nature à recommander l'étude de la langue latine et le culte
des grands écrivains latins. On s'est tourné vers eux, non sans
quelque anxiété, non sans quelque fièvre, comme vers des maîtres
1 Celte conférence a été faite à Rome, en italien, le 24 mars 1934,
dans la salle de l'Istituto di Studi Romani, par M. L.-A. Constane. Nous
en donnons, ici, le texte français. LES ÉTUDES DE LANGUE ET LITTÉRATURE LATINES EX FRANCE 6
qui n'avaient pas cessé de détenir le secret de la vie ordonnée et
libre. De là un renouveau certain de l'humanisme : je ne serais pas
étonné si quelque jour un historien futur reconnaissait dans les trois
lustres qui viennent de s'écouler les signes d'une seconde Renais
sance. A quelles destinées est-elle appelée? Bien hardi qui oserait se
prononcer là-dessus. Essayons du moins de voir quelle a été la part
de la France dans ce mouvement, dans cette nouvelle floraison du
grand arbre de science, d'art et de sagesse que les Grecs ont planté
et dont les Romains ont su, grâce à une greffe heureuse, cultiver et
cueillir les meilleurs fruits.
Les études dont la langue latine a été l'objet en France se ra
ttachent toutes à l'école de linguistique générale fondée et illustrée
par un savant dont le nom est bien connu hors de nos frontières : je
veux parler de M. Antoine Meillet. M. Meiliet a consacré lui-même
au latin, en 1928, un livre intitulé : Esquisse d'une histoire de la
langue latine. Appliquant au latin la méthode historique et les vues
philosophiques qui lui ont permis d'éclairer d'une lumière nouvelle
le champ immense de la linguistique, M. Meillet a écrit un livre
d'une grande portée. Il a montré d'une façon définitive tout ce que
la langue latine doit à la réussite politique des hommes qui l'ont par
lée. Cette langue que nous appelons latine, il serait peut-être plus
juste de l'appeler romaine : car, sans Rome, elle n'existerait pas;
elle ne serait qu'un dialecte du Latium, situé sur le même plan que
le prénestin, le falisque ou le parler de ïibur, et que les savants e
ssayeraient de déchiffrer d'après quelques inscriptions rustiques. Pen
dant les longs siècles où Rome, lentement, péniblement, a préparé
l'unité italienne, que de langues ne parle-t-on pas en Italie! Le grec
dans le sud, l'étrusque entre le Pô et le Tibre, le vénète, le messapien
sur le versant adriatique, le gaulois au pied des Alpes. Si le latin a
fini par être parlé d'un bout à l'autre de la péninsule, c'est parce que
Rome y avait fait régner son autorité. On a parlé du miracle grec,
du miracle juif : de la même manière, on pourrait aussi parler d'un DANS LES VINGT DERNTERES ANNEES /
miracle romain, ou plutôt de deux. Qu'un petit peuple de paysans,
ayant fondé un Etat au passage du Tibre, dans le site privilégié des
sept collines, ait eu, presque dès sa naissance, une personnalité as
sez forte pour résister à l'influence de ses puissants voisins les
Etrusques, et, n'acceptant d'eux que ce qui lui était assimilable,
faire de cette influence une des conditions de son progrès; qu'il ait
su poursuivre, sans plan concerté, mais sous l'inspiration du plus pur
patriotisme, l'organisation de la cité et l'extension de sa puissance au
dehors; qu'il soit parvenu enfin, après tant de dures guerres, à réa
liser sous son commandement l'unité italienne : voilà ce que j'ap
pelle le premier miracle romain. Le second, c'est la réalisation de
l'idée impériale, c'est l'unification politique de l'Europe occidentale,
de l'Afrique du Nord et de l'Asie antérieure, c'est la propagation
d'une seule et même culture depuis la mer du Nord jusqu'au désert
de Syrie.
A cette merveilleuse histoire de Rome répond, comme un reflet
fidèle, l'histoire de la langue latine. Peuple issu d'une aristocratie
conquérante, comme tous les peuples indo-européens, le peuple r
omain garde dans sa langue un grand nombre de mots de la politique
et du droit qui expriment des concepts propres à cette aristocratie :
rex, dominus, lex, ins. Peuple rural, dont le noyau primitif est
formé par les paysans du Latium, il garde dans sa langue la trace de
cette origine paysanne : par exemple, on dit miser, l'oie, et non han-
ser, olus, le légume, et non holus, parce que ce sont là des mots ve
nus de la campagne, et que la suppression de l'aspiration initiale est
un phénomène du parler rural. Le latin ne pouvait manquer de faire
des emprunts à d'autres langues, à la langue étrusque, à la langue
grecque : mais il a remarquablement maintenu son caractère propre,
ses traits originaux. Pourquoi cette fidélité à soi-même? Sans doute
à cause d'une vitalité singulière, d'une sorte de vertu native; mais
aussi pour deux raisons historiques qu'on aperçoit assez aisément. La
première c'est que le latin s'est fixé de bonne heure, grâce aux ora- 8 LES ÉTUDES DE LANGUE ET LITTÉRATURE LATINES EN FRANCE
teurs et aux rédacteurs de textes de loi : ils ont joué dans la forma
tion du latin le rôle qui est dévolu, pour d'autres langues, aux écr
ivains et aux gens du monde. C'est au Sénat, c'est au forum que la
langue latine a mûri. La seconde raison delà résistance du latin aux
influences étrangères, c'est la volonté de la classe dirigeante de main
tenir à la langue, comme aux mœurs, son caractère national.
« L'aristocratie romaine, écrit M. Meillet, a compris la nécessité de
se cultiver, et elle ne pouvait le faire qu'en acceptant la civilisation
intellectuelle de l'hellénisme; mais sa dignité lui interdisait de s'hel
léniser extérieurement; elle se nourrissait de plus en plus de philo
sophie grecque, de rhétorique grecque, d'art grec, mais elle gardait
la pureté de sa langue : la tenue des discussions du Sénat ne comport
ait pas un mélange de mots grecs. »
Langage de paysans progressivement adapté aux besoins d'un
peuple devenu la plus grande puissance politique du monde ancien,
il restait encore au latin un grand progrès à accomplir pour être le
moyen d'expression d'une civilisation universelle. Ce fut Cicéron qui
lui fit faire ce pas décisif : il fut, selon l'expression de M. Meillet, le
véritable créateur du « vocabulaire de la pensée européenne ». « C
icéron n'a pas été, dit M. Meillet, un simple adaptateur. Il s'était pé
nétré de l'hellénisme, et il avait pour le latin un respect scrupuleux

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents