Les migrations intra-caribéennes - article ; n°2 ; vol.2, pg 9-24

Hervé Domenach

Description

Revue européenne de migrations internationales - Année 1986 - Volume 2 - Numéro 2 - Pages 9-24
Les migrations intra-caribéennes.
Hervé DOMENACH
L'économie de plantation puis l'économie de dépendance sont à l'origine de mouvements de population quasi-permanents qui ont largement induit l'histoire des sociétés caribéennes depuis leur constitution. Les migrations intra-caribéennes résultèrent d'abord des grands déplacements de main-d'œuvre provoqués par la croissance économique coloniale, puis relevèrent pour partie d'une dynamique propre. Ces flux se sont considérablement diversifiés au cours des trois dernières décennies, affectant sous des formes diverses la quasi-totalité des pays du Bassin caraïbe. Certains ont une assise historique, relativement indépendante des variations conjoncturelles, tandis que d'autres proviennent de situations de rupture politiques ou économiques, dont on ne saurait prédire l'évolution. La description de ces divers flux et leur quantification approchée constituent une synthèse porteuse d'interrogations sur la mobilité future à l'intérieur du Bassin caraïbe.
Las migraciones inter-caribienas.
Hervé DOMENACH
La economia de plantación y la economia de dependencia son al origen de los movimientos de la población que han inducido expansivamente la historia de la sociedad caribiana desde su constitución.
Las migraciones inter-caribienas resultarán primero de los grandes deplazamientos de la mano de obre provocados por el crecimiento económico colonial, luego realzarán una dinámica propia. Estos flujos se han diversificados considerablamente al curso de los tres ultimos decenios, afectando sobre diversas formas la casi-totalidad de los paises de la Cuenca Caribe. Algunos tienen un asiento historico relativamente independiente de variaciones conjonturales, mientras que los otros provienen de situaciones de ruptura politicas ó económicas. La descriptión de esos diversos flujos y sus aproximaciones cuantitativas, constituyen una sintesis portadora de interrogación sobre el movimiento futuro en el interior de la Cuenca Caribe.
Intra-Caribbean migrations.
Hervé DOMENACH
Plantation and dependency economies originated quasi permanent population movements, which, from the beginning, partly shaped the history of Caribbean societies. Intra-Caribbean migrations were first produced by the massive displacements of the labour force subsequent to the growth of colonial economy. Then they acquired their own dynamism. During the last three decades, the flows became more diversified, and concerned practically all the countries of the Caribbean basin. Some had historical roots and were relatively independent from short-term variations, while others were caused by economic or political breaks which could not be predicted. The description of these flows, and their quantification, even if only roughly assessed, is a useful synthesis, which might raise interesting questions as far as future regional population movements are concerned.
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: REVUE_EUROPEENNE_DE_MIGRATIONS_INTERNATIONALES
• Publié le: 01 janvier 1986
• Nombre de lectures: 18
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Hervé Domenach
Les migrations intra-caribéennes
In: Revue européenne de migrations internationales. Vol. 2 N°2. Novembre. Amériques. pp. 9-24.
Citer ce document / Cite this document :
Domenach Hervé. Les migrations intra-caribéennes. In: Revue européenne de migrations internationales. Vol. 2 N°2.
Novembre. Amériques. pp. 9-24.
doi : 10.3406/remi.1986.1096
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remi_0765-0752_1986_num_2_2_1096Résumé
Les migrations intra-caribéennes.
Hervé DOMENACH
L'économie de plantation puis l'économie de dépendance sont à l'origine de mouvements de population
quasi-permanents qui ont largement induit l'histoire des sociétés caribéennes depuis leur constitution.
Les migrations intra-caribéennes résultèrent d'abord des grands déplacements de main-d'œuvre
provoqués par la croissance économique coloniale, puis relevèrent pour partie d'une dynamique propre.
Ces flux se sont considérablement diversifiés au cours des trois dernières décennies, affectant sous
des formes diverses la quasi-totalité des pays du Bassin caraïbe. Certains ont une assise historique,
relativement indépendante des variations conjoncturelles, tandis que d'autres proviennent de situations
de rupture politiques ou économiques, dont on ne saurait prédire l'évolution. La description de ces
divers flux et leur quantification approchée constituent une synthèse porteuse d'interrogations sur la
mobilité future à l'intérieur du Bassin caraïbe.
Resumen
Las migraciones inter-caribienas.
Hervé DOMENACH
La economia de plantación y la economia de dependencia son al origen de los movimientos de la
población que han inducido expansivamente la historia de la sociedad caribiana desde su constitución.
Las migraciones inter-caribienas resultarán primero de los grandes deplazamientos de la mano de obre
provocados por el crecimiento económico colonial, luego realzarán una dinámica propia. Estos flujos se
han diversificados considerablamente al curso de los tres ultimos decenios, afectando sobre diversas
formas la casi-totalidad de los paises de la Cuenca Caribe. Algunos tienen un asiento historico
relativamente independiente de variaciones conjonturales, mientras que los otros provienen de
situaciones de ruptura politicas ó económicas. La descriptión de esos diversos flujos y sus
aproximaciones cuantitativas, constituyen una sintesis portadora de interrogación sobre el movimiento
futuro en el interior de la Cuenca Caribe.
Abstract
Intra-Caribbean migrations.
Hervé DOMENACH
Plantation and dependency economies originated quasi permanent population movements, which, from
the beginning, partly shaped the history of Caribbean societies. Intra-Caribbean migrations were first
produced by the massive displacements of the labour force subsequent to the growth of colonial
economy. Then they acquired their own dynamism. During the last three decades, the flows became
more diversified, and concerned practically all the countries of the Caribbean basin. Some had historical
roots and were relatively independent from short-term variations, while others were caused by economic
or political breaks which could not be predicted. The description of these flows, and their quantification,
even if only roughly assessed, is a useful synthesis, which might raise interesting questions as far as
future regional population movements are concerned.Revue Européenne
des Migrations Internationales
Volume 2 - V' 2
Novembre 19X6
Les migrations intra-caribéennes
Hervé DOMENACH
Depuis la Seconde Guerre mondiale, le bassin Caraïbe a été
fréquemment analysé comme un réservoir inépuisable de surplus de main-d'œuvre,
que les anciennes métropoles coloniales européennes et l'Amérique du Nord
auraient utilisé à volonté et selon leur conjoncture économique. De fait, les trois
dernières décennies ont connu une conjonction de facteurs peu favorables à la
stabilisation des populations caribéennes : l'explosion démographique avec des
taux considérables de croissance naturelle (souvent supérieurs à 3 r7 par an), la
décolonisation de nombreux pays, la crise profonde de l'économie de plantation,
les besoins en main-d'œuvre des pays industrialisés... Il en est résulté des flux
d'émigration massive vers les métropoles et les pays industrialisés, qui apparurent
dès les années 50 et se prolongent encore actuellement, même s'ils ont varié de
forme et d'importance. Ces flux sont considérables, puisqu'on estime généralement
que plus de quatre millions de Caribéens ont émigré au cours de la période 1950-
1 980, pour une population totale qui est passée de 1 7 à 30 millions d'individus dans
le même temps (Segal, 1985). Par ailleurs, ces différents mouvements de population
ont engendré de multiples flux secondaires à l'intérieur même du Bassin caraïbe,
qui s'inscrivent dans un « espace de référence » commun (Domenach et Guengant,
1984) et relèvent le plus souvent de processus similaires.
Par Bassin caraïbe, on entendra ici la Caraïbe insulaire et différents pays
borduriers de l'Amérique continentale :
le Belize et la Guyana, intégrés au « Carrihean Commonwealth » qui
regroupe toutes les îles de colonisation et de langue anglaise, dont la quasi-totalité
est aujourd'hui indépendante,
- le Surinam, associé aux îles de colonisation hollandaise,
la Guyane Française, liée aux îles de colonisation française,
-- le Venezuela, dont les relations avec la Caraïbe insulaire sont croissantes, et
qui constitue de plus en plus un pôle réceptif d'importance pour les migrants
caribéens.
la Floride, élément intégré de la Mer des Antilles qu'elle ferme au nord. Elle
constitue un cas tout à fait particulier qu'on ne saurait ignorer dans l'étude des Hervé Domenach
mouvements migratoires internes à la région. Même si elle peut difficilement être
dissociée sur le plan statistique de l'émigration extra-caribéenne vers l'Amérique du
Nord, la région de Miami est fortement hispanisée et constitue un carrefour impor
tant de la migration caribéenne, clandestine pour une bonne part, dont la nature et
les caractéristiques restent largement spécifiques par rapport au reste des Etats-
Unis.
Ce sont donc ces flux à caractère intra-caribéen que nous étudirons, au regard
des diverses contraintes économiques tant historiques que contemporaines, dont
résulte la dynamique migratoire de ces sociétés insulaires.
L'ECONOMIE DE PLANTATION ET LES DEPLACEMENTS DE
MAIN-D'ŒUVRE
Plus qu'ailleurs il faut, concernant le Bassin caraïbe, garder à l'esprit les faits
de population essentiels, dont les conséquences restent aujourd'hui encore particu
lièrement vivaces. Ils constituent les fondements d'une pratique migratoire bien
ancrée, et que l'on peut analyser succintement en trois phases historiques, jusqu'au
début de notre siècle.
LES DEBUTS DE LA COLONISATION
Cette première période, qui débute avec le XVIe siècle et la découverte des
différentes îles, est espagnole et durera un peu plus d'un siècle. C'est autour de l'île
d'Hispaniola (Saint-Domingue et Haïti) que s'organise d'abord la colonisation qui
consiste alors essentiellement à découvrir et conquérir l'espace, pour faire main
basse chaque fois que possible sur les minerais précieux. Les Espagnols introduisi
rent les premiers esclaves noirs, qui dès 1525 furent plus nombreux que les Indiens
à Hispaniola et Porto Rico. La seconde moitié du siècle vit l'apparition de planta
tions de canne à sucre et de petites productions de coton et d'épices, mais les
« conquérants » avaient continué leur chemin et colonisaient le Mexique et le
Pérou, tandis que la piraterie se développait bon train, aux fins de pillage et de
contrebande. Le siècle s'acheva sur un échec de la colonisation économique et une
dépopulation importante des Grandes Antilles, tandis que se développaient les flux
d'immigration esclavagiste, source de rémunération particulièrement intéressante
pour les transbordeurs. Les mouvements entre les îles n'existaient guère à cette
époque.
LE COMMERCE TRIANGULAIRE JUSQU'AU XIXe SIECLE
Dans les premières décennies du XVIIe siècle, les Hollandais qui possédaient
alors la plus forte puissance navale et comm