Les Romains et la Chine, réalités et mythes - article ; n°1 ; vol.91, pg 431-479
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Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité - Année 1979 - Volume 91 - Numéro 1 - Pages 431-479
Jean-Michel Poinsotte, ~~Les Romains et la Chine : réalités et mythes~~, p. 431-479. Si bon nombre de travaux ont été consacrés aux « routes de la soie » et, à un moindre degré, à la présence des ~~serica~~ dans le monde romain, il fallait tenter de présenter synthétiquement l'ensemble des rapports, réels et mythiques, qui se sont établis entre l'Occident et la Chine. L'engouement de plus en plus vif des Romains pour la soie, son usage de plus en plus répandu en Occident expliquent l'acharnement avec lequel on a su triompher des difficultés d'un trafic aléatoire et onéreux qui, d'abord continental, est devenu essentiellement maritime à partir du IIe siècle; la mode des ~~serica ~~explique pourquoi la soie est devenue très vite un des symboles privilégiés du «luxe oriental», les « Sères » et la « Sérique » les objets privilégiés d'une idéalisation traditionnellement pratiquée sur les peuples de l'Orient.
49 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1979
Nombre de lectures 25
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Jean-Michel Poinsotte
Les Romains et la Chine, réalités et mythes
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité T. 91, N°1. 1979. pp. 431-479.
Résumé
Jean-Michel Poinsotte, Les Romains et la Chine : réalités et mythes, p. 431-479.
Si bon nombre de travaux ont été consacrés aux « routes de la soie » et, à un moindre degré, à la présence des serica dans le
monde romain, il fallait tenter de présenter synthétiquement l'ensemble des rapports, réels et mythiques, qui se sont établis entre
l'Occident et la Chine. L'engouement de plus en plus vif des Romains pour la soie, son usage de plus en plus répandu en
Occident expliquent l'acharnement avec lequel on a su triompher des difficultés d'un trafic aléatoire et onéreux qui, d'abord
continental, est devenu essentiellement maritime à partir du IIe siècle; la mode des serica explique pourquoi la soie est devenue
très vite un des symboles privilégiés du «luxe oriental», les « Sères » et la « Sérique » les objets privilégiés d'une idéalisation
traditionnellement pratiquée sur les peuples de l'Orient.
Citer ce document / Cite this document :
Poinsotte Jean-Michel. Les Romains et la Chine, réalités et mythes. In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité T. 91,
N°1. 1979. pp. 431-479.
doi : 10.3406/mefr.1979.1195
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-5102_1979_num_91_1_11951
JEAN-MICHEL POINSOTTE
LES ROMAINS ET LA CHINE
RÉALITÉS ET MYTHES
Posons les limites et définissons les perspectives de cette étude1. Depuis
les travaux du sinologue français J. de Guignes (1721-1800), un certain nom
bre de communications, d'articles, de chapitres d'ouvrages, de monographies
ont été consacrés à la description des diverses « routes de la soie », ainsi qu'à
l'histoire des relations commerciales qui ont joint l'Extrême-Orient à l'Occi
dent romain2. C'est un «fil d'Ariane en soie de 5000 milles» qui court de la
Chine à Antioche : la jolie formule par laquelle C. G. Seligman3 désigne la
principale de ces routes est doublement pertinente. D'une part, ces relations
furent toujours précaires, et de nouvelles voies durent au cours des siècles
être frayées à travers le labyrinthe asiatique. D'autre part, le mystère
demeure sur bien des points essentiels : chronologie, tracé de certains par
cours, localisation de certaines étapes, voire du pays d'où proviennent les
soies «sériques», nature et quantité des produits transportés. Tenter de
répondre à toutes les questions qui restent en suspens excéderait les limites
d'un article. Nous nous contenterons donc, pour évoquer l'histoire des rap-
Puissent les sinologues pardonner à un latiniste les erreurs et les oublis que
comporte ce modeste essai pluridisciplinaire!
2 J. de Guignes, Réflexions générales sur les liaisons et le commerce des Romains
avec les Tartares et les Chinois, dans les Mém. de l'Acad. roy. des Inscr., XXXII, 1768,
p. 355-370. L'auteur de référence sur la question est A. Herrmann, à qui l'on doit deux
ouvrages et deux articles classiques : Die alten Seidenstrassen zwischen China und
Syrien, Berlin, 1911, puis Das Land der Seide und Tibet im Lichte der Antike, Leipzig,
1938 (réimpr. phot. Amsterdam, 1968); dans PW, art. Seres, t. 2.A.2, 1923, e. 1678, 54 -
1683, 22 et serica, t. 2.A.2, 1923, e. 1724, 24 sq., avec orientations bibliographiques. Bon
conspectus critique des questions relatives aux Sères dans J. O. Thomson, History of
ancient geography, New York, 1965 (lère éd. 1948), p. 306-319 et passim. Sur l'impor
tance de la soie dans la vie romaine, outre l'article serica de A. Herrmann, on peut tirer
encore profit de J. Marquardt, Manuel des Antiquités romaines, t. 15, La vie privée des
Romains, t. 2, Paris, 1893, p. 124-133.
3 C. G. Seligman, The Roman Orient and the Far East, dans Antiquity, 11, 1937, p. 8. JEAN-MICHEL POINSOTTE 432
ports commerciaux de Rome avec la Chine, de suivre la via media des cert
itudes et des hypothèses probables communément partagées, sans omettre
de signaler, ici ou là, les divergences qui subsistent, dans l'attente de nouvell
es découvertes archéologiques.
Ce parti-pris nous permettra de faire leur place à deux autres aspects de
la question, qui sont généralement traités séparément. D'une part, quel rôle a
tenu, dans les divers domaines de la vie romaine, économique, moral et phi
losophique, ce qui était le signe* tangible de l'existence des Sères, la soie?
D'autre part, on sait que les Romains ont volontiers idéalisé les peuples loin
tains, se donnant d'eux une image où transparaissaient leurs fantasmes, leurs
frustrations, leur mauvaise conscience. La Chine offre à cet égard un terrain
de choix, car elle présente des caractères propres à exciter particulièrement
l'imagination des Romains de l'Empire. De tous les pays exotiques, c'est le
plus lointain et l'un des plus mystérieux; mais il y a aussi, grâce à la soie qui
est expédiée en Occident et qui devient peu à peu, sans rien perdre de son
prestige, une denrée de consommation presque courante, une présence sen
sible de la Chine à Rome. Les deux bonnes centaines de références aux serica
et aux Seres que comporte dans tous les genres la littérature latine, d'une
épode d'Horace aux Originimi libri d'Isidore de Seville, montrent que les Chi
nois, à la fois inconnus et familiers, font partie de l'univers culturel des
Romains. Il y a là une matière suffisante pour que l'on tente de dégager, au-
delà de la frivolité apparente de beaucoup d'entre elles, les diverses signif
ications profondes de ces références, et de montrer que, dès l'époque
romaine, à travers la Chine telle que l'Occident la voit, c'est l'Occident qui se
contemple lui-même.
I - Les contacts : éléments défavorables,
FACTEUR ET CIRCONSTANCES FAVORABLES
Le 28 mai 53 av. J.-C, dans la fournaise de la plaine de Carrhes, l'armée
de Crassus voit scintiller les fanions de soie des officiers parthes4. Si ce n'est
pas à cette occasion que des Romains rencontrèrent pour la première fois
les étoffes «sériques» dont le renom allait bientôt s'étendre en Occident,
nous savons que c'est vers le milieu du Ier siècle av. J.-C.5 que Rome apprit
4 Flor., 1, 46, 8.
5 La plus ancienne mention des Sères dans un texte latin passe pour être due à
Virgile : c'est en Georg., 2, 121 que se trouve affirmée la croyance en une origine végét
ale de la soie chinoise : Velleraque ut foliis depectant tenuta Seres, « Et comment avec
leurs peignes les Sères détachent des feuilles les fines toisons». Ce vers, prototype :
LES ROMAINS ET LA CHINE RÉALITÉS ET MYTHES 433
l'existence des Sères6 et noua, par l'entremise des peuples de l'Orient médi
terranéen et de l'Asie centrale, des relations commerciales avec le «peuple
d'une abondante tradition poétique, a été écrit entre 37 et 29 av. J.-C. Si l'on admet
pour l'épode 8 la datation haute généralement reconnue - autour de 40 -, c'est à
Horace qu'il reviendrait d'avoir signalé le premier la présence des Sères, par l'intermé
diaire de coussins de soie, sericos . . . puluillos, dans la vie quotidienne des Romains.
La soie de Chine était donc à Rome autour des années 40 av. J.-C. Aucune confirmation
n'est à attendre de Dion Cassius, dont on cite parfois le témoignage (43, 24, 2). Selon
lui, César aurait fait tendre un théâtre de voiles de soie, παραπετάσματα . . . σηρικά,
afin de protéger les spectateurs du soleil. Il n'y aura jamais assez de soie à Rome,
même mêlée à d'autres étoffes, pour fabriquer de tels uela. A plus forte raison il est
inconcevable qu'au tout début des importations il y en ait eu suffisamment pour cet
usage. Le témoignage de Lucain, en revanche, n'est pas à dédaigner, lorsqu'il évoque le
voile, fait d'un tissu « pressé par le peigne des Sères », qu'aurait porté la reine Cléopâ-
tre (10, 141-142).
6 Les « Sères » sont-ils les ancêtres des Chinois ? Le doute semble permis, au vu de
certaines localisations et de certaines descriptions que nous proposent les Anciens. Ils
sont souvent mentionnés au voisinage des Scythes de la Caspienne, et un texte comme
c

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