Les verbes à argument incorporé en français - article ; n°89 ; vol.23, pg 7-26
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Description

Langages - Année 1988 - Volume 23 - Numéro 89 - Pages 7-26
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1988
Nombre de lectures 34
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Christophe Bogacki
Les verbes à argument incorporé en français
In: Langages, 23e année, n°89, 1988. pp. 7-26.
Citer ce document / Cite this document :
Bogacki Christophe. Les verbes à argument incorporé en français. In: Langages, 23e année, n°89, 1988. pp. 7-26.
doi : 10.3406/lgge.1988.1978
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_1988_num_23_89_1978Christophe BOGACKI
Université de Varsovie
LES VERBES À ARGUMENT INCORPORÉ EN FRANÇAIS*
II existe dans le lexique de nombreuses langues des verbes dont la forme présente
des ressemblances avec une autre unité lexicale : substantif, adverbe, adjectif, etc. On
parle dans ce cas de verbes dérivés de substantif, d'adverbe, d'adjectif, etc. Le plus
souvent, cette similitude formelle va de pair avec une parenté sémantique et le lien
entre substantif (adverbe, adjectif, etc.) et le verbe est bien senti de nos jours. Les
définitions données par les dictionnaires courants le reflètent assez bien : asphalter
(une route) est paraphrasé par 'couvrir une route d'asphalte', tutoyer (une personne)
c'est 's'adresser à elle en employant la forme tu\ blanchir veut dire 'rendre blanc', tar
der à faire quelque chose c'est 'mettre un temps considéré comme long à faire quelque
chose' {tard est expliqué ailleurs comme 'après un temps considéré comme long'), etc.
Dans les cas comme ceux que nous venons de voir, on retrouve dans la définition
l'élément formel présent dans le verbe même. Celle-ci éclaire également sur le rôle
sémantique que l'unité ainsi incorporée joue dans la structure sémantique du mot
dérivé. Ce rôle peut être différent d'un verbe à l'autre. Ainsi arbitrer 'être arbitre de'
ou singer 'faire des grimaces comme un singe' renferment un élément dont la fonction
est différente de celle que l'on retrouve dans baver 'produire de la bave', scier 'se ser
vir d'une scie', baigner 'être plongé dans un liquide (dans un bain)' ou enfin enterrer
'mettre sous terre', etc.
L'analyse que nous présentons ci-après sera menée pour répondre à la question
principale : peut-on prévoir le rôle sémantique de la forme incorporée dans le verbe à
partir de son sens considéré en dehors de la nouvelle entité qu'est le verbe ? Nous
tâcherons de voir aussi s'il existe des contraintes observables dans ce domaine et
jusqu'à quel point la prévision est possible. La réponse à ces questions implique qu'on
établisse au préalable les principaux types de structures sémantiques représentées par
les verbes à argument incorporé. Avant d'y arriver cependant, nous allons voir rapide
ment comment le problème des verbes de notre classe est présenté dans quelques-unes
des études linguistiques.
Le phénomène de l'incorporation ne compte pas parmi ceux qui, comme par exemp
le celui des systèmes casuels, des aspects, des temps et de beaucoup d'autres, connais
sent une longue tradition. Les premières études consacrées à ce sujet sont relativement
récentes : elles ne remontent, à vrai dire, qu'au début de notre siècle et ne sont pas
très nombreuses. Parmi les plus anciennes, notons celle de A. Thorn (1907) pour le
français et celle de Sapir (1911) pour les langues amérindiennes.
Assez curieusement, c'est à l'incorporation dans les langues d'Amérique et dans les
parlers asiatiques que l'on a consacré le plus d'attention. On pourrait citer dans ce
* Cet article reprend, avec quelques modifications, les thèses exposées dans Bogacki (sous
presse) chapitres III et IV. domaine КгоеЬег (1909), Haas (1941), Mardirussian (1975), Merlan (1976), Miner
(1982), Miner (1983a, b), Miner (1984), Sadock (1980), Steever (1979), Sugita (1973),
Wolfart (1971), Woodbury (1975a, b).
Les préoccupations de ces auteurs sont extrêmement divergentes. Ainsi A. Thorn
(1907) s'attache à découvrir les facteurs qui, dans le processus de la dérivation, déte
rminent le choix entre les deux suffixes i-er et -ir) et propose un classement, essentiell
ement syntaxique, des verbes étudiés.
Une des dernières études en date, celle de Mithun (1984), tend à démontrer que
« speakers always incorporate for a purpose » et que « NI (= noun incorporation)
is used for four different but related functions. Furthermore, these four types of
N1 fall into an implicational hierarchy, which in turn suggests a path along which
N1 develops historically. Differences among languages in the productivity of the
types indicate that the development may be arrested at any point along the path »
(Mithun,1984 : 848).
L'article est remarquablement documenté et contient une bibliographie détaillée ra
ssemblant les travaux parfois difficiles d'accès.
L'article de Mardirussian (1975) prend en considération une large gamme de lan
gues. Sont étudiés différents aspects de l'incorporation tels que : les marques casuel-
les, la pluralisation. les constructions avec adjectif déterminatif, etc. En ce qui con
cerne les caractéristiques des substantifs qui se prêtent à ce procédé, il est possible de
« talk about the Njnc in terme of a hierarchy of accessibility such that if a language
incorporates non-agental subjects and direct objects, and if a language incorporat
es non-agental subjects then it also incorporates direct objects » (Mardirussian,
1975 : 387).
Parmi les propriétés sémantiques est notée la non-référentialité du substantif incor
poré, ce qui est correlé avec plusieurs traits purement syntaxiques et
« can also explain why the derived predicates (after incorporation) have the ten
dency to become idiomatic (lexicalized). This is the meaning of the whole is not
constrained to be a function of reference of parts » (Mardirussian, 1975 : 387).
La non-référencialité de l'argument incorporé est confirmée pour le tamil par Steever
(1979) ce qui
« strongly suggests that INs (= incorporated nouns) are not directly associated
with arguments in logical structure, but are parts of complex predicates » (Steever,
1979 : 285).
Dans le domaine slave, mentionnons Dulewiczowa (1981) pour le polonais et le
russe, remarquable surtout grâce à une bibliographie récente accessible dans les lan
gues slaves, Grzegorczykowa (1969) pour le polonais seul, Herej-Szymanska Ц978) et
Szymaňski (1977) pour le bulgare, Bojar (1975) et Karolak (1972) pour le polonais. Le
point de vue qui domine ici est celui de l'étude du mécanisme dérivationnel : c'est lui
qui constitue le point de ralliement des préoccupations parfois très divergentes.
En ce qui concerne le français, deux études récentes méritent une attention parti
culière : il s'agit de celle de D. Willems (1979) et de celle de M.-N. Gary-Prieur
(1979).
L'article de D. Willems (1979) concerne la classe de verbes dérivés d'adjectifs et de
substantifs et porte sur les relations entre les deux types de constructions : morphémi-
ques (les verbes dérivés) et syntaxiques (constituées par la paraphrase correspondant
au verbe simple). La recherche est menée dans l'espoir de découvrir « les types de contenus pouvant donner lieu à une lexicalisation en décrivant les caractéristiques
syntaxiques des constructions à verbe dérivé » (Willems, 1975 : 5). En dépit de cette
déclaration, Fauteur vise davantage les objectifs qui se situent en dehors du domaine
de la sémantique. Elle note, par exemple, une dépendance inversement proportionn
elle entre la longueur d'un verbe et celle de la construction syntaxique dans laquelle
il entre : « presque tous les verbes dérivés se classent à l'intérieur des constructions
très courtes » (p. 4). Tout se passe donc comme si « la syntaxe in tra- proposition était
remplacée par une syntaxe intra-mot (ou morphosyntaxe) » (p. 4). Relevant une co
rrespondance entre les constituants d'une phrase et les différentes parties d'un mot
dérivé, elle rapproche le préfixe et/ ou le suffixe d'un verbe dérivé avec le verbe non- le radical de ce dernier étant à son tour mis en parallèle avec l'adjectif-
constituant ayant la fonction de l'attribut du complément d'objet dans le schéma
syntaxique construit autour du verbe non-dérivé :
SNi + Vnon.dérivé(rendre, + SN2 + Adjx - SNj + Vdérivé(Adjx)
(cf. appauvrir, ennoblir, amé

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