Note de synthèse - article ; n°1 ; vol.96, pg 87-112

Jean-Pierre Pourtois, Huguette Desmet

Description

Revue française de pédagogie - Année 1991 - Volume 96 - Numéro 1 - Pages 87-112
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: REVUE_FRANCAISE_DE_PEDAGOGIE
• Publié le: 01 janvier 1991
• Nombre de lectures: 23
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 2 Mo

Extrait

M. Jean-Pierre Pourtois
Huguette Desmet
Note de synthèse
In: Revue française de pédagogie. Volume 96, 1991. pp. 87-112.
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Pourtois Jean-Pierre, Desmet Huguette. Note de synthèse. In: Revue française de pédagogie. Volume 96, 1991. pp. 87-112.
doi : 10.3406/rfp.1991.1351
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfp_0556-7807_1991_num_96_1_1351NOTE DE SYNTHESE
L'éducation parentale
Jean-Pierre Pourtois
Huguette Desmet
INTRODUCTION
Les agents sociaux qui travaillent avec des populations en difficulté font
régulièrement part de leur désenchantement : ils constatent que les pro
blèmes des familles dont ils ont la charge se perpétuent d'une génération à
l'autre. « Les enfants perturbés semblent provenir de familles en difficulté et
devenir des adultes qui élèveront des enfants perturbés » (Me Cord,
1988).
Rompre ce cercle vicieux n'est pas chose aisée. Depuis plusieurs décenn
ies des tentatives sont menées visant à atteindre ce but. Mais une telle
entreprise est-elle pertinente ? Peut-elle s'avérer efficace ? A quelle critique
doit-elle faire face ? Sur quelle conception de l'homme s'appuie-t-elle ? Comm
ent, concrètement, la mener à bien ? Comment ne pas nuire aux personnes
auxquelles on propose des services ? Telles sont autant de questions aux
quelles tout concepteur de programmes est confronté et auxquelles nous
allons tenter de répondre ci-après. La réflexion à propos de ces diverses
interrogations et la connaissance des bilans des interventions déjà menées
s'avèrent indispensables à tous ceux — praticiens et chercheurs — qui
s'engagent dans la voie, certes difficile, mais combien prometteuse, de
l'intervention en milieu familial.
1. DÉVELOPPEMENT DES PROJETS D'INTERVENTION
Le développement de la formation des parents à l'éducation de leur(s)
enfant(s) est associé à l'apparition, aux Etats-Unis, dans les années 60, du
vaste courant des pédagogies de compensation. Celui-ci avait pour but de
faciliter les apprentissages, le développement et l'intégration sociale des
enfants issus de milieux défavorisés dans un souci égalitaire certes mais
aussi dans une optique visant un investissement productif. Un des grands
projets qui vit le jour à cette époque fut le programme Head Start. Ce dernier
présentait plusieurs modes d'intervention : association des parents à des
Revue Française de Pédagogie, n° 96, juillet-août-septembre 1991, 87-112 87 activités proposées à l'enfant hors du foyer ou proposition d'activités à
domicile avec une aide aux parents. Depuis lors, de très nombreux pr
ogrammes d'intervention au foyer se sont développés. La plupart s'adresse à
des parents issus de milieux sociaux défavorisés. Mais une vaste gamme de
programmes existe : ceux-ci sont créés pour prévenir l'abus et la négligence,
pour soutenir les parents adolescents ou les parents d'adolescents ou encore
les familles monoparentales, pour diminuer la mortalité infantile ou l'échec
scolaire ou les retards développementaux... Par ailleurs, les modes d'interven
tion sont très variés (Bouchard et Coll., 1981, p. 6) : présence d'un « home
visitor» (Gordon, 1980 ; Weikart, 1980 ; etc.), emploi du téléphone ou de la
télévision (Telepac de Hofmeister, 1975), recours à un service tel que le
«Technical Assistance Development System» de R. Epting et Coll. (1974),
Groupes de rencontres parentales (Projet Mandala de Robinson, 1977 ; Pour-
tois et Coll., 1984), etc.
D'autres pistes d'intervention que celle destinée aux parents peuvent
aussi être envisagées : la formation des adolescents en tant que parents
potentiels (Pourtois et Coll., 1984), la formation des enseignants à la collabo
ration école-famille (Hager et De Lellis, 1977 ; Bataille, 1984 ; Monnier et
Pourtois, 1987 ; Macbeth, 1989) et la sensibilisation des grands-parents à leur
rôle éducatif (Pourtois et Fajfer, 1987).
Bien que ces divers programmes émanent de secteurs différents (sani
taires, sociaux, éducationnels) et sont orientés vers des populations spécifi
ques, ils développent des buts, objectifs et services similaires comme par
exemple le renforcement des habiletés parentales, la diminution de l'isolement
social, une interaction parent-enfant plus riche et plus appropriée au dévelop
pement de l'enfant. De plus, ces programmes se révèlent utiliser des métho
dologies proches. Dès lors, pour H.B. Weiss et F. H. Jacobs (1988), il apparaît
judicieux d'encourager une démarche d'évaluation qui serait commune à ces
divers programmes. Notons, cependant, qu'il convient de faire la distinction
entre les programmes « orientés vers la famille » et ceux « centrés sur la
famille» (Kahn et Kamerman, 1982). Un programme est «orienté vers la
famille » lorsque l'équipe travaille avec les parents (le plus souvent avec la
mère) et les enfants ensemble et qu'elle fournit un soutien aux adultes dans
leur rôle de parent et de membre de la famille. Peu de programmes sont
« centrés sur la famille », c'est-à-dire qu'ils s'adressent à tous les membres
de la famille et évaluent l'impact sur la famille en tant que système.
Ainsi, bien que des similarités existent entre les divers programmes, les
différences ne doivent pas être minimisées. L'implantation géographique, les
caractéristiques de la population, les théories sous-jacentes au programme,
son contenu, sa durée, son intensité, sa conception philosophique de
l'homme et du rôle du parent, etc. sont autant d'éléments qui les distinguent.
Il est clair que, tout comme il n'y a pas un type de famille idéal, il ne peut y
avoir un type de programme de soutien et de formation des parents univer
sellement efficace (Weiss et Jacobs, 1988).
Notons aussi que certains programmes font référence à la formation de
formateurs en éducation familiale en vue de disséminer les innovations auprès
des institutions. Ces projets impliquent d'aborder le difficile problème du
changement, tant au niveau des pratiques de l'acteur que des dispositions
légales qui régissent le fonctionnement des organisations et des institutions
(Desmet, 1983). Jusqu'ici, très peu d'attention a été portée aux questions de
généralisation des programmes à d'autres lieux et vers d'autres populations.
88 Revue Française de Pédagogie, n° 96, juillet-août-septembre 1991 Remarquons que les programmes d'interventions au foyer se sont surtout
développés dans les pays anglo-saxons (Etats-Unis, Grande-Bretagne). L'Eu
rope francophone est plus réticente à pénétrer dans les familles en vue de
soutenir les parents dans leur fonction d'éducateur. De nos jours encore, peu
de recherches et d'actions relatives à l'éducation des parents y sont menées.
Par rapport aux études anglo-saxonnes, il y a là une carence importante.
2. AGENTS DE L'ACTION
Des éducateurs, des enseignants, des travailleurs sociaux, des infirmières,
des orthophonistes, des psychologues, des médecins, des bénévoles, ... peuvent
être les animateurs de l'intervention visant à favoriser le développement et les
acquisitions scolaires des enfants issus des milieux défavorisés. Certains
programmes de compensation ont tenté d'apporter hors du foyer la stimulation
nécessaire pour développer au mieux les capacités de l'enfant. Mais les
nombreuses expériences menées ont montré que les professionnels risquent fort
de voir leur action entravée s'ils n'intègrent pas les parents dans les programmes
d'intervention. Par ailleurs, à maintes reprises, l'expérience a prouvé que les
parents, par une formation adéquate, étaient susceptibles d'acquérir les compét
ences nécessaires pour mener à bien un programme. En d'autres termes,
l'implication et la participation des parents au projet visant à développer de façon
optimale les potentialités des enfants s'avèrent non seulement une pratique
possible mais encore une condition sine qua non de la réussite de ce projet.
2.1. Relations parents-professionnels
De nombreux chercheurs se penchent aujourd'hui sur les rapports qui
s'installent entre les professionnels et les parents. Depuis plusieurs années,
on insiste de plus