Recherches sur les origines des cultivateurs noirs du Sahara - article ; n°1 ; vol.7, pg 35-45
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Description

Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée - Année 1970 - Volume 7 - Numéro 1 - Pages 35-45
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 27
Langue Français

Extrait

Gabriel Camps
Recherches sur les origines des cultivateurs noirs du Sahara
In: Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée, N°7, 1970. pp. 35-45.
Citer ce document / Cite this document :
Camps Gabriel. Recherches sur les origines des cultivateurs noirs du Sahara. In: Revue de l'Occident musulman et de la
Méditerranée, N°7, 1970. pp. 35-45.
doi : 10.3406/remmm.1970.1056
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remmm_0035-1474_1970_num_7_1_1056RECHERCHES SUR LES ORIGINES
DES CULTIVATEURS NOIRS DU SAHARA
L'origine des populations raélanodermes du Sahara a toujours fait l'ob
jet d'hypothèses qui, sous des formes variées, reparaissent périodiquement
sous la plume des spécialistes. On pourrait, en simplifiant à l'extrême,
classer les différentes opinions en deux séries : pour les uns, les Haratin ,
actuels cultivateurs des oasis, seraient surtout les descendants d'esclaves
soudanais amenés du Sud par les marchands arabes et c'est l'opinion la plus
répandue ; pour les autres, le Sahara fut primitivement peuplé de Noirs ,
occupant la totalité du désert et qui furent progressivement réduits à une
sorte de servage par les conquérants blancs, nomades cavaliers puis cha
meliers.
Ces deux thèses, qui ne furent jamais aussi rigoureusement exprimées ,
résument effectivement les opinions exposées depuis plus d'un siècle. Sans
vouloir faire oeuvre originale, j'ai cru bon de rechercher les témoignages
les plus probants et de tous ordres qui permettraient d'opter. Nous passe
rons successivement en revue les éléments, citations ou documents archéo
logiques d'origine historique, protohistorique et préhistorique.
Pour l'époque historique et antérieurement aux géographes arabes qui
ont connu un Sahara semblable à celui que nous connaissons, nous possé
dons des témoignages nombreux d'écrivains grecs et latins. Comme je l'ai
déjà écrit1 il importe toutefois de se méfier des clichés littéraires qui abon
dent dans les récits antiques et risquent de dénaturer l'information. Presque
tous les auteurs anciens qui parlent des régions situées au Sud de l'Atlas ,
pays qu'ils appellent la Libye intérieure ou supérieure, citent des popula
tions mélanodermes qu'ils nomment Ethiopiens et parfois Ethiopiens occiden
taux pour les distinguer de ceux qui habitaient au Sud de l'Egypte. Certes
les précisions ne manquent pas qui nous révèlent que dans les régions où se
trouve employé aujourd'hui le mot Haratin, les Anciens plaçaient les Ethio
piens mais peut-on déduire de cette observation que les Haratin actuels des
cendent des Ethiopiens anciens ?
1. C. Camps, Maasinissa ou les débuts de l'Histoire. Ltbyca Archéolotie, Spiiraphle ,
t. Vin, 1960. G. CAMPS 36
Différents textes, particulièrement des passages de Strabon, Pline et
même d'Ammien Marcellin, historien du IVème siècle de notre ère, prou
vent que ces Ethiopiens étaient voisins de la Numidie et des Maurétanies2 .
On les situe volontiers immédiatement au Sud de ces provinces ; dans l'actuel
Maroc, les Ethiopiens occupent les rives du Draa (Ethiopiens Daratites) ; en
Algérie ils sont voisins du fleuve Nigris que la plupart des historien? assi
milent à l'oued Djedi3. L'auteur de V Expositlo totius mundi et ientium*
affirme qu'au Sud de l'Africa (province romaine d'Afrique) on trouve un dé
sert habité par des Mazices et des Aethtopes. Cette assertion est d'autant
plus intéressante que sous le terme Mazices fréquemment employé par les
historiens et géographes antiques5 se cache le nom par lequel certains Ber
bères se désignent eux-mêmes : Imazighen (singulier Amazegh) et Imouchar
ou Imoûhar (singulier Amâhar). Ainsi l'auteur de V Expositlo nous donne une
image des populations sahariennes étonnamment semblable à celle d'aujourd'
hui : au Sud du Maghreb, le Sahara est peuplé par des Berbères (et des Ber
bères arabisés) et des gens à peau noire qu'on appelle souvent Haratin. Sté
phane Gsell a recensé les nombreux textes ou citations qui, du Vème siècle av.
J.C. jusqu'à la période byzantine, soit pendant plus d'un millénaire, mention
nent ainsi des Ethiopiens dans le Nord du Sahara, et a fortiori plus au Sud .
Nous ne reviendrons pas sur cette étude mais n'est-ce pas les mêmes cons
tatations que le voyageur le moins averti peut faire dès qu'il franchit le Haut
Atlas, l'Atlas saharien ou l'Aurès ?
Qu'étaient ces Ethiopiens ? Le mot est d'origine grecque et signifie
simplement : "les visages brûlés". Si dans certains cas il s'applique indi
scutablement à de vrais Nègres, tels que les esclaves éthiopiens assez nom
breux dans les grandes villes de l'Empire romain : Rome, Alexandrie, Lepcis ,
Carthage, dans d'autres cas, des descriptions que nous serions tentés de
qualifier d'ethnographiques nous montrent que ces peaux-noires n'étaient pas
des Nègres. Voici un texte fort ancien, du IVème siècle av. J.C. attribué
au navigateur Scylax qui décrit ainsi les Ethiopiens occidentaux voisins de
l'île de Cerné sur la côte méridionale du Maroc : "II y a là des Ethiopiens
avec qui les Phéniciens font des échanges. . . (Ils) se parent le corps de pein
ture, boivent dans des coupes d'ivoire. Leurs femmes se font des parures
en ivoire et même leurs cheveux ont des ornements de la même matière .
Ces Ethiopiens sont les hommes les plus grands que nous connaissions, leur
taille dépasse quatre coudées, quelques uns atteignent même cinq coudées.
2. Strabon, H, 5, 53 ; XVII, 3, 3 et 7. Pline l'Ancien V, 43. Ammien Marcellin XXIX,
5, 37.
3. Cette assimilation est rejetée par Berthelot, G. Ch. Picard et H. Lhote qui veulent
y voir le fleuve Niger.
4. Riese, Geographlcl lattnl minores, p. 123.
5. Sur l'extension du terme Mazice dans l'Afrique ancienne cf. G. Camps, Masslntssa
I960, pp. 26-28.
6. St Gsell, Histoire ancienne de l'Afrique du Nord, I, pp. 295-300. ORIGINES DES CULTIVATEURS NOIRS DU SAHARA 37
Ils portent leur barbe et les cheveux longs. Ce sont les plus beaux de tous
les hommes. . . Ces Ethiopiens mangent de la viande et boivent du lait ; ils
font beaucoup de vin de leurs vignes, les Phéniciens en exportent"7.
Les Ethiopiens de la région de Cerné ne sont certainement pas des
Nègres , les peintures corporelles (sans doute des barbouillages d'ocre rouge
comme chez les Maxyes du Sahel tunisien dont parle Hérodote), la longueur
de la barbe et des cheveux, leur beauté sensible à un Grec, tout révèle que
ces Ethiopiens sont en fait des Méditerranéens du type robuste. Leur pays
qui produit de la vigne ne saurait d'ailleurs se situer dans des régions trop
méridionales.
Cet exemple, parmi d'autres (comme ces Leuco- Ethiopiens dont parle
Pline8, véritables Nègres-blancs), montre combien nous devons être prudents
dans l'interprétation des textes ou citations plus ou moins tronquées des au
teurs anciens. D'ailleurs, dans les mêmes régions traditionnellement attr
ibuées aux Ethiopiens, les mêmes auteurs citent des nomades blancs, les
Gétules, et un groupe plus méridional assez solidement organisé, les Gara-
mantes.
Nous pouvons donc retenir que durant l'Antiquité le Sahara septentrional
était déjà un désert parcouru à l'ouest par des Gétules, à l'Est par des
Libyens nomades (Mazices) qui furent parfois également appelés Gétules
(au moins dans le Sud tunisien) et au Sud-Est, dans l'actuel Fezzan et ses
abords, par les Garamantes. Ces peuples contrôlaient les oasis, déjà décri
tes au Vème siècle avant notre ère par Hérodote, où des populations méla-
nodermes, les Ethiopiens, cultivaient les palmiers et le blé tendre.
Appelons les Ethiopiens : Haratin, les Gétules : Regueibat ou Chaamba,
les Garamantes : Touaregs et nous aurons, très sommairement, l'image d'un
Sahara infiniment proche de celui de notre époque.
En remontant plus haut dans les temps obscurs de la Protohistoire
africaine nous trouverons, paradoxalement, des documents plus précis. Il
s'agit des restes humains, trop rares malheureusement, recueillis dans les
sépultures sahariennes largement antérieures à l'Islam. Nous ne saurions,
cette fois encore, passer en revue la totalité des documents. J'emprunterai
à Mme Chamla les conclusions de l'une des deux parties d'un livre qu'elle
a

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